Fin mars et août 1918
La description des derniers assauts allemands de l'offensive allemande en Picardie
Le 27 mars, le flot allemand contenu
sur la droite française déferle vers la gauche dans la plaine où l'absence de
défenses naturelles rend la résistance plus difficile.
Le front est là très mince encore et les Allemands
en profitent ; ils enlèvent le Cessier, puis Tilloloy.
La 22e DI. se replie sur
Bus, puis perd Bus et ses bois.
Pendant deux heures, l'ennemi ne peut déboucher de
ces bois, arrêté presque uniquement par les feux d'un groupe d'artillerie de
campagne en position dans le bois Marotin.
Tout près de là, le 22e
territorial, un escadron divisionnaire et deux compagnies du
génie, jetés dans la lutte, se battent avec acharnement à un
contre dix et ne reculent que pas à pas.
L'ennemi n'avance qu'au prix de lourdes pertes; à
peine a-t-il pénétré dans le bois Marotin qu'une concentration
d'artillerie (225e régiment d’artillerie)
l'y écrase.
Contenu devant le massif de Boulogne-la-Grasse,
il s'engage entre ce massif et Montdidier ; il y a là une brèche entre la
gauche de l'armée Humbert et la droite de l'armée Debeney qui arrive et dont
une partie seulement, la 56e D.I. (Demetz), est à
peine installée. Cette division (49e, 65e, 69e
bataillons de chasseurs à pied, 132e et 106e régiments de ligne),
avec la 5e division de cavalerie de la Tour) et deux bataillons du 97e territorial, doit défendre, de Pierrepont aux abords
de Roye, un front de 20 kilomètres.
Assaillie par 3 divisions allemandes soutenues par
une puissante artillerie, la 56e D.I. résiste vaillamment.
Toute la matinée, le 69e bataillon de chasseurs se bat sur la ligne l'Echelle
Saint-Aurin, Dancourt, Grivillers.
Ce dernier village n'est perdu qu'à 12h45; les
chasseurs près d'être cernés doivent, avec des éléments de cavalerie, se jeter
vers Marquivillers, tandis qu'une compagnie encerclée
continue à se défendre désespérément, plutôt que de se rendre.
Après la prise d'Erches, à 9 h40, et de Saulchoy à 13 heures, le 65e
bataillon de chasseurs arrête quelque temps l'ennemi sur la ligne
Guerbigny, mais, attaqué de flanc par les Allemands qui ont passé l'Avre au
delà de Guerbigny, il doit se replier vers 14 h30, non sans infliger à l'ennemi
de lourdes pertes; le 49e bataillon de chasseurs,
qui est au-dessus de Becquigny, se replie à son tour.
Devant Marquivillers,
deux bataillons du 106e de ligne
tiennent longtemps et ne cèdent que quand ils sont débordés ; ils se replient
en combattant sur la crête au sud de Lignières, puis sur le plateau à l'est d'Etelfay.
Un bataillon du 132e
de ligne, qui n'a pu gagner Fescamps,
se bat avec les territoriaux du 97e
entre Menues et la ferme Forestil.
A 15 heures, un bataillon du 132e, à peine arrivé, est jeté sur Etelfay
due l'ennemi a pris et sa contre-attaque permet aux deux bataillons du 106e et au troisième du 132e
de se regrouper sur le plateau, à l'ouest, où ils obligent l'ennemi à marquer
un nouveau temps d'arrêt jusqu'à 18h30.
Au
sud de Montdidier, un bataillon du 132e
combat toujours, mais le repli de la 22e D.I. à sa droite le découvre, et
l'ennemi court vers Rollot et Rubescourt.
On renonce à défendre Montdidier pour ne pas user,
dans une bataille de rues, les quelques troupes qui s'opposent à la ruée de
l'ennemi.
Celui-ci entre dans la ville à 18h30.
La 56e D.I. et la 5e division de cavalerie se
regroupent à l'ouest de Montdidier et de l'Avre sans avoir perdu un seul canon.
La progression de l'ennemi est enrayée.
Au soir, les Français tiennent la ligne Ayencourt au sud-ouest de Montdidier, Mesnil-Saint-Georges
à l'ouest, Gratibus au nord, Pierrepont au coude de l'Avre, Contoire.
Le général de Mitry, commandant
le 6e corps, donne l'ordre de tenir à tout prix la ligne des hauteurs qui
domine à l'ouest la rivière des trois Doms entre Pierrepont au nord de
Montdidier, et Domfront au sud.
La 56e D. I. est sur la ligne Framicourt,
Domfront.
Le 28 au matin, la 9e
division allemande de Silésie pénètre dans Courtemanche
et Framicourt, dans Fontaine-sous-Montdidier,
bouscule les éléments du génie qui faisaient le coup de feu sur la route de
Mesnil, s'établit dans Mesnil, ainsi que dans Ayencourt
et le Monchel.
Immédiatement, la 56e D.I. contre-attaque.
Pendant qu'un bataillon du 132e reprend Fontaine-sous-Montdidier,
que le 65e bataillon de chasseurs
progresse dans le bois et sur la croupe vers Mesnil, le 3e bataillon du 132e soutenu par un bataillon du 350e fraîchement arrivé, refoule l'ennemi sur
Mesnil et le Monchel, s'empare de ces villages après
un combat de rues à la grenade. A droite, l'armée Humbert a repris Assainvillers.
Le 29 mars, la 56e D. I. reçoit
l'ordre d'avancer jusqu'à la voie ferrée entre Courtemanche
et le Monchel; son attaque se déclenche à 18 heures
au moment même où l'ennemi se jette à l'assaut de son côté.
Le combat est tout de suite terrible ; à gauche,
une compagnie du 69e bataillon de chasseurs
a pu entrer dans Framicourt, mais elle est submergée
et en partie faite prisonnière ; le 49e bataillon de chasseurs, après avoir
poussé jusqu'à la Chapelle Saint-Pierre à l'ouest de Courtemanche,
est débordé et obligé de se replier en avant de Fontaine-sous-Montdidier
; le 65e bataillon de chasseurs et le 3e bataillon du
132e de ligne à l'est de Mesnil progressent sous un violent
barrage d'artillerie et de mitrailleuses jusque sur la Cote 97, mais décimés
doivent se replier.
Le 30 mars ,dès
l'aube, un violent bombardement de mines et d'artillerie précède une nouvelle
attaque allemande.
Au nord, devant Fontaine-sous-Montdidier
et la Cote 104, le 49e bataillon de chasseurs,
soutenu par des éléments du 54e de ligne,
repousse sept assauts, les cadavres allemands couvrent le terrain.
Après que deux escadrilles d'avions ont survolé et
mitraillé les lignes françaises, l'ennemi revient à la charge avec des troupes
fraîches ; repoussé, il lance à nouveau de fortes colonnes vers 15h45 contre
les troupes françaises épuisées, les déborde sur les flancs ; celles-ci ne se
replient sur la crête est de Villers-Tournelle que
pour éviter d'être encerclées et s'accrochent sur de nouvelles positions ; dans
la journée, elles ont lancé plus de 1500 grenades et brûlé plus de 500.000
cartouches.
De Mesnil à Royaucourt,
la bataille est aussi acharnée ; la 9e D I. allemande a l'ordre de pousser
jusqu'à la Cote 136, à 2 kilomètres et demi au sud-ouest de Royaucourt.
Devant
Mesnil, le 106e de ligne brise
quatre attaques du 7e grenadiers allemand dans la matinée, mais dans l'après
midi, vers 17 heures, après que la gauche française a fléchi sous un
bombardement effroyable. Les Allemands abordent le village par le nord.
Les Français le défendent maison par maison et ne l'abandonnent
an feu que vers 18h30 pour s'établir à 200 ou 300 mètres en arrière.
Sur la droite, les 19e et 154e régiments allemands
s'emparent du Monchel et d'Ayencourt
et ne peuvent en déboucher sons les feux du 132e de ligne
qui leur interdit les abords sud-ouest de Mesnil et les approches de Royancourt.
Le soir, à 19 heures,
une contre-attaque menée par des éléments du 153e
de ligne, un bataillon de cavaliers à pied, une section
d'autos canons et un groupe d'artillerie (225e
régiment d’artillerie) surprend
l'ennemi, lui enlève Ayencourt et le Monchel et porte la ligne du Monchel
à la Cote 98.
Epuisé par ses efforts et ses pertes
considérables, l'ennemi, qui n'a réalisé que des gains médiocres, organise ses
positions.
La 56e D.I., qui s'est battue sans interruption
pendant cinq jours, a perdu une bonne partie de son effectif, mais elle a
contenu, puis fixé l'Allemand.
Dans les mois qui suivirent, l'ennemi resta sur
ses positions ; ce secteur ne fut plus agité que par des coups de main
réciproques ou par quelques opérations locales, destinées de part et d'autre à
améliorer les positions. Dans la région de Mesnil-Saint-Georges
tenue notamment par la 60e D.I.,l'extrême droite de l'offensive allemande du 9 juin
vint se briser contre la résistance des troupes françaises ; devant une seule
compagnie du 248e de ligne,
l'ennemi laissa plus de 200 cadavres.
Le 1 août, il fit de nombreuses et
vaines tentatives près de Mesnil ; à partir du 3, les Français progressèrent
lentement à l'est du village, préparant les positions de départ pour
l'offensive de l'armée Debeney du 8 août.
Le 4, les Allemands, sentant
venir l'attaque, abandonnèrent une partie de leurs positions ; les Français
occupèrent Braches, pénétrèrent dans Hargicourt malgré les arrière-gardes ennemies et
atteignirent Courtemanche.
Le
8 août, la 3e D I. (9e corps) passe l'Avre au nord,
enlevant et élargissant la tête de pont de la Neuville-Sire-Bernard
et occupant les lisières ouest du Contoire et de
Hamel.
Le 9e corps est alors remplacé par le 10e dont les
trois divisions sont en ligne : les 152e et 166e, derrière le ruisseau des
Doms, la 60e devant Montdidier.
Le 9 au matin, au lieu
d'essayer de franchir le ruisseau marécageux, la 152e D.I., obliquant sur sa
gauche, le passe à la Neuville-Sire-Bernard et
permet, en progressant, à la 166e d'en
forcer le passage de front à la hauteur de Gratibus.
Pendant que les 126e et 153e D.I. enlevaient Hangest et son plateau, la 152e D.I. poussait son front à Contoire et Pierrepont ; la 166e D.I., qui n'a passé les
Doms qu'après de rudes efforts, n'a pu prendre pied sur le plateau à l'est.
Débordé par le nord, Montdidier va l'être par le
sud. Le général Debeney, transporte rapidement sa masse d'artillerie de sa
gauche à sa droite et déclenche une nouvelle attaque.
La 60e D.I. se porte sur Montdidier, la 169e, de Donfront pousse vers le nord-est en direction de Faverolles
pour couper la route de Montdidier à Roye, la grande voie de retraite de
l'ennemi ; la 133e attaque face à l'est pour masquer le massif de Boulogne-la-Grasse et couvrir le flanc de l'offensive ;
derrière suivent la 46e D.I. et le 2e corps de cavalerie, prêts à exploiter le
succès.
Celui-ci est complet; au soir, de Faverolles à
Piennes, Montdidier est débordé par le sud. Assainvillers,
Piennes et Faverolles ont été repris et l'ennemi se replie par la route de Montdidier-Andechy, qu'il a pu maintenir libre par sa
résistance devant Gratibus.
Dans la nuit, il évacue Montdidier dans le plus grand désordre en
laissant des officiers mitrailleurs chargés de retarder l'avance française.
Pendant que les troupes françaises pénètrent dans la ville, qu'elles tiennent entièrement, à midi, le 10, toute l'armée Debeney pousse vers l'est : les 47e et 56e D.I. s'avancent à l'est de Villers-lès-Roye ; la 166e de Gratibus jusqu'à Lignières, la 60e jusqu'aux abords de Dancourt, la 46e à l'est de Tilloloy, la 133e jusqu'au nord-est de Fescamps, la 169e jusque devant le Cessier.
Sur cette ligne, l'armée Debeney retrouve les vieilles tranchées de la guerre de position. Montdidier est largement dégagé.
« La grande guerre vécue, racontée, illustrée par les Combattants, en 2 tomes Aristide Quillet, 1922 »
Michelin ,
guide des champs de batailles ; batailles de Picardie ,1921
Voir l’offensive allemande en Picardie
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