HISTORIQUE

DU

25 e BATAILLON DE CHASSEURS A PIED

PENDANT LA GRANDE GUERRE

 

 

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SOMMAIRE :

1914-sept. 1915

LA SOMME (sept.-déc.1916)

MOUSSY (janv.-fév.1917)

FRATERNITE D’ARME

AUTOUR DE SOISSONS (mars 1917)

SOUPIR (avril 1917)

LA FERME DE LA ROYERE (mai 1917)

EN SECTEUR DANS LES VOSGES (juin-décembre 1917)

UNE GRANDE PERIODE DE REPOS (janvier-mars 1918)

AU SECOURS DES ANGLAIS (mars 1918)

GRIVESNES (avril 1918)

EN SECTEUR AUX EPARGES

 

 

 

Merci à Jean Paul pour la longue recopie

 

 

LA SOMME (sept.-déc.1916)

 

 

Le bataillon exécute une marche de 18 kilomètres pour aller cantonner à Guignemicourt, sauf la 2e compagnie qui reste à Clairy.

Le 12 septembre, par décision du Général commandant la 6e C.A., le capitaine Dumont, commandant de la 5e compagnie, est nommé capitaine adjudant-major en remplacement du capitaine L’Helgouach. Cette heureuse nomination est accueillie avec beaucoup de joie par tout le bataillon. Le capitaine Dumont était connu pour sa grande bonté et sa paternelle autorité.

 

Jusqu’au 15 septembre, le Bataillon partage son temps entre la manœuvre et le repos.

Le 15 au matin, les unités du 25e sont transportées en camions-auto au sud de Bray-sur-Somme. Nous sommes arrivés dans la zone d’offensive.

Bivouaqués sous la tente, nous entendons de nouveau la voix du canon.

D’autre part, les abords de Bray et le village même sont occupés par des troupes anglaises dont l’offensive se déroule méthodiquement en même temps que la nôtre.

Une activité extraordinaire règne dans ce coin de front. C’est un va-et-vient continuel de convois de ravitaillement de toutes espèces.

Pendant sept jours, nous allons rester sous la tente, inhospitalière à cette époque de l’année, car les nuits sont fraîches, et il pleut continuellement. Bref, nous ne demandons qu’à attaquer le plutôt possible pour quitter ce bivouac.

 

 Le 21 septembre, on parle de reconnaissance du secteur, et les renseignements recueillis sont plutôt favorables.

 

Effectivement le 22 au matin, départ. Nous allons bivouaquer au Moulin de Fargny (N.O de Curlu) où l’on est encore plus mal qu’à Bray. Ici c’est le plein bled. De grosses pièces de marine tirent derrière nous, et chaque départ nous assourdit. Nous ne sommes même plus sous la tente. On dort dans des tranchées larges et peu profondes recouvertes de nos toiles de tente.

Et puis, comme malgré soi, on pense à la journée du 25 septembre ! Qui est en passe de devenir la date anniversaire du Bataillon, si nous attaquons ce jour-là.

 

En effet, le 24 au soir, en route. Le Bataillon doit jouer un rôle important dans une attaque d’ensemble. Nous relevons dans les tranchées le 19e B.C.P. Nous sommes en liaison à droite avec le 106 R.I., à gauche avec le 29e B.C.P.

La relève est plutôt pénible ; le terrain est bouleversé, rendu glissant par plusieurs journée de pluie ; les moindre ravins sont écrasés par de l’artillerie ennemie, et quand le temps sera favorable, les obus à gaz arroseront tout le terrain, en arrière de la ligne de bataille.

Heureusement les commandants d’unités ont reconnu le terrain à parcourir ; grâce aux dispositions prises, les endroits dangereux sont traversés pendant de courtes périodes d’accalmie.

Le bataillon est déployé entre Bouchavesnes et la ferme du Bois l’Abbé.

Les compagnies de réserve sont très près de la première ligne ; le P.C. et le poste de secours avancé dans une petite carrière près de la route Nationale. Il n’y a aucun abri, alors que les tirs sont très violents sur la route et ses abords. Si bien que la carrière offre bientôt un spectacle effrayant.

Un des premiers, le docteur Attané, est grièvement blessé ; il est difficilement transporté à l’arrière, et ne rejoindra le bataillon dont il avait été le Médecin Chef pendant plus d’un an. C’est une grosse perte pour les blessés ; il joignait à son calme toujours souriants une affabilité sans bornes, un dévouement sans égal, et plusieurs fois on le vit en tête d’une équipe de brancardiers, relevant les blessés et les emmenant vers son poste de secours, bridant les plaies, et dirigeant au plus vite les blessés vers l’arrière.

Combien de survivants du 25e lui doivent-ils d’être encore en vie, et lui seront reconnaissants des soins dont ils ont été entourés des leurs blessures.

 

Le 25 septembre est le jour J

12h. 35 est l’heure H.

Bien emmenée, la 1re ligne atteint ses objectifs capturant de nombreux prisonniers ; à droite la 1re compagnie dépasse largement la tranchée qui lui était assignée.

Le sous-lieutenant Lardy, de cette compagnie, est grièvement blessé, et sera fait Chevalier de la Légion d’Honneur sur son lit d’hôpital avant de mourir. Le capitaine Durel, qui commande la 1re, tombe blessé à son tour ; c’est alors que les chasseurs de cette unité, voyant leur capitaine tomber, veulent venger la perte qu’ils viennent de subir, et enlèvent de haute lutte la tranchée ennemie, progressant plus loin encore.

Le chasseur Wirtz s’élance au secours du capitaine Durel, alors que se déclenche le barrage d’artillerie ennemie. Les obus tombent drus autour d’eux. Alors voyant le danger, Wirtz traîne son capitaine dans un trou d’obus, et pour faire un bouclier de son corps, se couche sur lui, et reçoit une pluie d’éclats qui le tue. Il a sauvé la vie de son chef.

Sous les ordres du capitaine Hinterlang, la 5e compagnie progresse, mais elle est décimée par des mitrailleuses de la tranchée Detwa qui n’a pas été détruite par notre artillerie et qui est garnie d’ennemis. Le brave sous-lieutenant Wagner est tué (il était au front depuis le début de la campagne, sans jamais avoir été blessé)

Le caporal Lestage ( 5e compagnie ), s’étant aperçu qu’un de ses fusiliers mitrailleurs venait de tomber, s’empare de son arme et dirige sur une mitrailleuse ennemie un tir bien ajusté, réussissant à la réduire au silence pendant un instant, et permettant à des groupes voisins de progresser. Il est tué quelques instants plus tard, en repartant en avant.

Le chasseur Daligné (5e) se porte seul au devant des mitrailleuses ennemies ; ses camarades le suivent, et réduisent au silence une mitrailleuse allemande.

Le 26 septembre, sous un feu violent d’artillerie, il transporte seul un de ses camarades blessé, qu’il a le bonheur de déposer au poste de secours.

 

Le caporal Hauptmann (5e) est blessé à 50 mètres de la tranchée ennemie. Autour de lui les blessés sont morts.

Le 28 septembre une patrouille française arrive jusqu'à lui. Il l’arrête et donne à l’officier qui la commande des renseignements sur la situation, mais l’ennemi est mis en éveil, on ne peut l’emporter.

Enfin le 30, une nouvelle patrouille arrive près de lui, et le ramène dans nos lignes. Un de ceux qui le portent est tué. La blessure de Hauptmann s’est envenimée, sa cuisse est labourée par un éclat d’obus. Il arrive à l’hôpital de Marcelcave pour y mourir du tétanos.

 

A gauche, la 2e compagnie subit des pertes, mais réussit à enlever une portion de la tranchée Turka. Le caporal Larmet y pénètre en tête et réussit à se débarrasser des allemands dans un vif combat à la grenade.

Le chasseur Marie est blessé au début de l’action, mais tient cependant à accompagner son chef de section. Il arrive dans la tranchée ennemie et est de nouveau blessé ; sur ordre de son chef, il quitte le combat en disant : «  Je suis content maintenant, j’ai fait tout mon, devoir. » Le chasseur  Mahaut est très grièvement blessé, en arrivant dans la tranchée. L’adjudant Moreau, originaire de Dravegny, venait voir sa famille, pendant le séjour du Bataillon dans ce cantonnement. Il est tué à la tête de sa section. Le caporal-fourrier Dasque est tué, le sergent Bouret est tué, le sous-lieutenant Barbier est blessé, et combien d’autres encore.

La 3e compagnie rejoint les premières vagues dans la région de la 1re tranchée allemande ; au cours de la progression, le capitaine Pinart, commandant la compagnie, est blessé ; le chasseur Mas, près de lui, est grièvement blessé et sera amputé d’une jambe.

A droite, le 106 R.I.n’ayant pu déboucher, la 1re compagnie se trouve prise d’enfilade. A 20 heures, sur ordre du Commandant elle se repliera en arrière.

La 5e compagnie repousse une contre-attaque venant du ravin. Sur tout le plateau où s’est effectué la progression, un feu terrible de mitrailleuses fait subir de lourdes pertes et rend les transmissions précaires, les fourriers de la liaison du Commandant font des prodiges de valeur et sont presque tous touchés.

Le fourrier Vezin de la C.M.2 , qui occupait  dans la vie civile un poste important, et qui quoique dégagé de toute obligation militaire, avait tenu à s’engager dans une unité combattante, est tué sous les yeux de son frère, la capitaine Vezin, commandant de la C.M.2. Aux cours de la nuit, la situation du front étant stabilisée, le capitaine Vezin, qui avait été blessé au cours de l’action, descend au poste de secours pour se faire panser.

En sortant du poste un obus éclate, et tue net ce brave Capitaine, si apprécié  par sa bravoure souriante et son commandement paternel.

A 50 ans, il avait demandé à servir dans les chasseurs, et c’est en chasseur ardent, impitoyable pour l’ennemi, qu’il était ravi à l’affection de sa compagnie.

Le Commandant ayant besoin de renseignements sur la 1er ligne, le caporal Pagel, de la S.H.R., s’offre volontairement pour aller les recueillir ; il est grièvement blessé. Le caporal Nef, de la 1re compagnie, s’offre à son tour, pour essayer de renseigner le Commandant ; il est tué. Le chasseur Castet (Auguste), de la C.M.1., part également comme volontaire pour reconnaître les emplacements occupés par les compagnies de 1re ligne. Il met plusieurs heures pour accomplir sa mission et rapporte, heureusement les renseignements demandés.

A 20 heures, une rafale d’obus tombe sur la carrière et blesse le commandant Cabotte, le sous-lieutenant Lorrain et le sous-lieutenant Southgate.

Cette carrière est un véritable enfer, et cependant les blessés y affluent. Les brancardiers paient un lourd tribut ; parmi les tués : Laville, Millot.

Il n’y a plus de pansements, et pas d’eau. Blottis contre le talus, en l’absence de tout abri, les blessés souffrent en silence. De nombreux blessés graves sont restés sur le terrain d’attaque ; impossible de s’approcher d’eux de jour. L’arrière ne peut envoyer des brancardiers en renfort, on en demande partout. Enfin, à la chute du jour, le tir ennemi se ralentir un peu, les évacuations commencent, elles dureront une bonne partie de la nuit, et les blessés se retrouveront presque tous à l’hôpital d’évacuation de Marcelcave.

Comment ne pas admirer la vaillance, la remarquable organisation du médecin aide-major Rousseau, qui, après la blessure du médecin major Attané, assuma le direction du service de santé en cette terrible journée. Les pertes du Bataillon étaient de : 3 officiers tués,8 officiers blessés, 9 sous-officiers tués et 29 blessés, 129 caporaux et chasseurs tués et 285 blessés.

 

Le 25 septembre, à 24 heures, les éléments du Bataillon étaient relevés par un bataillon du 172e R.I. Il se portait en réserve de la brigade au Bois Madame contre la pente E. du Ravin de Bouchavesnes.

Le 27, le Bataillon se reconstitue à la valeur de 3 compagnies et de 1 compagnie de mitrailleuses.

 Ainsi reformé, il reçoit l’ordre d’appuyer le 172e violemment contre-attaqué à la ferme du Bois l’Abbé.

La compagnie du lieutenant Charles est engagée à l’est de la ferme et contribue à maintenir la situation au prix de pertes assez élevées. Enfin, dans la nuit du 27 au 28 septembre, le Bataillon est relevé définitivement et vient bivouaquer près du Moulin de Fargny

Mais la bataille engagée demande chaque jour des troupes fraîches, les bivouacs doivent être laissés libres pour les troupes qui montent en secteur. Aussi chaque jour le 25e est obligé de changer de camp, et les tentes que devaient occuper les chasseurs n’étaient pas libres.

 

Le 4 octobre, le Bataillon embarque en camions-auto et par l’itinéraire Villers-Bretonneux, Amiens, Granvillers et Fouquières les compagnies arrivent à Bouvresse où elles débarquent.

Bouvresse est un des cantonnements du bataillon resté célèbre entre tous.

Les premiers chasseurs de la classe 1917 et avec eux le sous-lieutenant Lhuillier, arrivaient au 25e.

D’autre part, c’est là que notre capitaine adjudant-major Dumont allait quitter le Bataillon pour prendre le commandement du 29 B.C.P.

Nous perdions un chef aimé, dans lequel nous avions une confiance aveugle, mais notre joie restait profonde à la pensée qu’il ne nous quittait que pour guider le Bataillon avec lequel nous combattions côte à côte depuis le début de la campagne. Cette nomination allait resserrer les liens de fraternelle camaraderie qui unissaient les officiers, sous-officiers et chasseurs des 25e et 29e B.C.P.

Des centres d’instruction et du dépôt de Nogent-le-Rotrou, différents renforts étaient venus combler les vides des jours précédents. Les deux semaines passées au repos avaient redonné aux rescapés du 25 septembre une nouvelle vigueur, ils étaient prêts à de nouveaux exploits.

 

Le 19 octobre, le Bataillon recevait l’ordre de monter en réserve de division près du P.C. Madame pour aménager cette partie du secteur, en position de réserve.

 

Puis le 25 octobre, nous relevions le 29 B.C.P.

Relève mémorable. Tous ceux qui ont effectué cette rude montée en lignes n’ont jamais oublié les difficultés et les souffrances physiques de cette nuit d’octobre.

Dans cette région déjà bouleversée par les derniers combats, les pluies ont détrempé le terrain. C’est une mer de boue glissante, gluante, dans laquelle on enfonce à chaque pas ; on se relève pour retomber de nouveau. Les caillebotis disposés çà et là pour aider dans la marche ont disparu sous une épaisse couche de glaise liquide. La montée se fait pas à pas, en arrachant une jambe pour la passer devant l’autre.

La nuit est noire comme de l’encre, et à chaque instant on entend un juron sonore ou une lamentation sans fin, encore un chasseur qui vient de tomber. D’autre part, l’artillerie ennemie marmite les passages praticables, le lieutenant De Ferluc et le lieutenant Grosdenis sont blessés. Enfin, après neuf heures de cette marche exténuante, on arrive sur une position où aucun abri n’existe, dans des tranchées dont le fond est plein d’eau. Le jour, défense absolue de bouger, des avions ennemis survolent constamment le secteur, et pour ne pas trop modifier l’aspect du terrain, on ne fera pas de travaux.

Le ravitaillement se fera de nuit, quand on pourra, et seulement avec ce qui pourra nous parvenir.

La 3e et 4e sections de la 3e compagnie occupent à la lisière E de Bouchavesnes un élément de tranchée, sans autres communications que la liaison à vue à droite et à gauche. Un camarade qui a conservé par écrit ses impressions a bien voulu extraire de ses mémoires le passage suivant :

«  Nous atteignons sans avaros le matin du 7e jour, ce soir c’est la relève. Malgré les « privations endurées, on a le sourire. Vers 15 heures, la pluie commence à tomber ; pluie « tenace, qui ne cessera plus de toute la journée et de la nuit.

« Comme il n’a pas d’issue, notre fossé se remplit petit à petit. On boucle les sacs, et « sans se soucier d’être vus, tout le monde se met debout.

« Mais l’eau monte dans le fossé, on en a jusqu’à la cheville à 6 heures du soir. La nuit « est tombée tout à fait, tout le monde sort du trou, pliant l’échine sous la pluie. Une marmite « tombe de-ci de-là. Personne ne s’en soucie. On attend la relève. Qui prendrait en « consigne…un trou rempli d’eau ?

 

Elle arrive dans la nuit du 31 octobre au 1re novembre.

Le 26 B.C.P. nous remplace. La descente des lignes ressemble à la montée. La pluie qui ne cesse pas, rend le sol plus glissant. Il faut maintenant éviter les trous remplis d’eau.

La marche est tout à fait pénible. Toute la nuit les compagnies se rendent isolement dans des baraquements, en réserve, les hommes ressemblent à des paquets de boue qui déambulent lentement. En descendant des Eparges, ces mêmes paquets de boue avaient la consolation de cantonner dans un village accueillant.

Dans la Somme, hélas ! Ce sera le bivouac sous la tente, où il fait froid. Le sol imprégné d’humidité n’est pas fait pour améliorer notre repos nocturne. Le matin au réveil, les membres raidis par le froid, incapables de tout mouvement, les chasseurs réclament à corps et à cris le jus bien chaud qui leur procurera un petit soulagement.

 

Le 7 novembre, le commandant Cabotte, blessé le 25 septembre, rentre au Bataillon. Pour fêter cet heureux évènement, la fanfare donne concert.

Le 9 novembre, le Bataillon est transporté en camions-auto, à Formerie. Là on allait enfin pouvoir se nettoyer, se reposer tout à son aise. Le Bataillon allait retrouver son entrain, son moral ; l’âme du Bataillon se retrouve  prête à de nouveaux sacrifices.

Le 15 novembre, le Bataillon est réuni dans un terrain à l’ouest de Moliens.

Le Commandant rappelle le souvenir des camarades tombés, remet la Croix de Guerre aux cités, à l’occasion des journées de septembre, et qui sont présents au Bataillon. Et le 18 novembre, le 25e se retrouvait de nouveau au camp19, près de Suzanne, bivouac que nous connaissions bien, et qui allait permettre la reconnaissance du secteur que nous allions occuper.

La relève a lieu dans la nuit du 19 au 20 novembre. Le terrain est toujours aussi impossible, même boue glissante, aussi collante que les jours précédents. De nombreux enlisés ne pourront être retirés qu’au jour.

Nous occupons le secteur de Saint-Pierre-Waast, en liaison à gauche avec le 1er mixte ( 20e CA ), à droite avec la 12e D.I.

Le 21 novembre, l’artillerie ennemie se montre particulièrement nerveuse, les Allemands font une guerre atroce ! Ils emploient, ce jour là, des obus incendiaires. Quelques chasseurs de la 5e compagnie qui se trouvent en première ligne sont atteints de brûlures, le lieutenant Bourchied est grièvement brûlé aux mains.

 

Puis le calme revient, et le 24 novembre, le 29e B.C.P. relevait le 25e dans ce secteur.

Les pertes, pendant cette courte période d’occupation, avaient été relativement sévères, nous perdions 33 tués et 36 blessés. Parmi ceux-ci le chasseur Laffrique, de la C.M.1., et le sergent Deniaux, de la C.M.1. , grièvement blessés tous deux au cours du bombardement du 21 novembre ; le chasseur Blazy, de la 1re compagnie, blessé le 23 novembre, devra être, amputé de la jambe droite et le chasseur Corvisy, de la même compagnie, amputé des deux jambes.

Le 25 novembre, le Bataillon se porte en réserve de brigade dans une ligne de réduits le long de la route de Péronne ; il s’agit d’organiser défensivement ce secteur. De nombreuses corvées de travailleurs vont creuser des tranchées, transporter des matériaux, travaux pénibles, exécutés sous la pluie et dans cette boue gluante qui restera le cauchemar du Bataillon pendant cet hiver 1916-1917.

 

Enfin, le 1er décembre, le Bataillon se portait plus en arrière près de Suzanne ; il allait pouvoir se reposer aux camps 17 et 19 jusqu’au 8 décembre. Le temps est surtout occupé par des travaux de nettoyage et des changements d’effets, car dès que nous avons quitté les tranchées, le chasseur aime surtout à être, sinon coquet, tout au moins propre.

 

Et puis, le 9 décembre la fanfare donne concert devant le Château de Suzanne, et nous apprenons que notre prochain cantonnement de repos est Crépy-en-Valois.

 

En effet, le 10 décembre, le 25e était transporté en autos dans la région de Crépy-Bouillant-Mermant où l’on s’installe en compagnie de la division et de la brigade.

Période de repos, un peu d’instruction dans les compagnies et nous allons quitter définitivement la Somme. Plus tard, dans un nouveau secteur, qui sera un champ de Bataille, le Bataillon va inscrire sur son fanion un brillant fait d’armes.

 

Successivement, nous cantonnons à Marolles-sur-Ourcq (17 décembre), Gandelu ( 18 décembre) , Bricy ( 24 décembre ) et le camp d’Aougny ( 26 décembre )

Le séjour au camp d’Aougny va surtout être pour le Bataillon une période d’instruction intense. Il s’agit d’initier les jeunes recrus aux méthodes d’utilisation des moyens de liaison employés en vue d’une offensive du printemps.

 

Jusqu’au 15 janvier, la division manœuvrera ensemble, puis le 18 janvier le Commandant va reconnaître le secteur de Moussy, assez tranquille dans son ensemble.

 

 

MOUSSY (janv.-fév.1917)

 

Le Bataillon est en liaison à droite, avec le 29e B.C.P., à gauche, avec le 335e R.I. L’ennemi se montrent très vigilant et parfois même agressif.

  Du 19 au 22 janvier, les unités travaillent à améliorer leurs positions. L’artillerie s’est montré jusqu’ici assez clémente, quand le 23, à 5 heures du matin, l’ennemi déclenche un violent bombardement, plus particulièrement intense sur le 355e. Ce bombardement est suivi d’un coup de main des Allemands.

Aucune perte n’est à signaler au Bataillon. Vers 6h. 30, le calme est revenu, et les compagnies en réserve à Moussy qui avaient été alertées reçoivent l’ordre de fin d’alerte.

 

Le 24 janvier dans la nuit, une patrouille ennemie est repoussée par un petit poste de la 3e compagnie, en position au Boqueteau.

 

Les 25 et 26 janvier sont des journées calmes et le 27 janvier les compagnies de 1re ligne s’aperçoivent qu’à la faveur de la nuit les Allemands ont pratiqué une brèche dans notre réseau. Toutes les dispositions sont prises pour ne pas être surpris  par l’ennemi : le soir même, la brèche est rebouchée et les Allemands s’étant aperçus que leur coup était éventé n’insistent pas et à part quelques obus sur nos tranchées le calme revient tout à fait.

 

Le 8 février le 25e B.C.P.était relevé par le 54e R.I. Embarqué en chemin de fer, il débarque à Lizy-sur-Ourcq et va cantonner à Jaignes-Rutel.

 

FRATERNITE D’ARME

 

 

Jusqu’au 8 mars, le Bataillon va se reposer, partageant son temps entre l’instruction, la manœuvre, et le repos. Le 5 mars, le 29e Bataillon, cantonné à Tancrou, donne une grande fête à laquelle sont conviés les chasseurs du 25e B.C.P. Réunion fraternelle au cours de laquelle les amitiés existantes s’avivent et où de nouvelles se créent. Belle manifestation de la camaraderie qui unissait les officiers, sous-officiers et chasseurs des deux bataillons et qui se renouvellera à plusieurs reprises au cours de la campagne.

 

AUTOUR DE SOISSONS (mars 12917

 

 

Le 7 mars, le Bataillon se rend dans la région de Chézy-Dammard-Passy-en-Valois, où il cantonne. Le 8 mars, la neige est tombée une grande partie de la nuit, il fait très froid et les routes sont en parties obstruées. Les compagnies marchent péniblement. Il faut six heures pour parcourir une quinzaine de kilomètres et arriver à Hartennes et Taux d’où les Commandants de compagnie vont reconnaître le secteur de Ciry-Sermoise.

 

Le 10 mars, les compagnies montent en ligne. Jusqu’au 18, c’est le calme complet. Le 18, les Allemands font un recul stratégique. La gauche de la division (172e, 335e R.I), avance  au N.-N.-E  de Soissons, et le soir même nous sommes relevés. Le Bataillon reste en réserve de division jusqu’au 24 mars.

Alerte continuelle. De Vignolles, nous allons à Saint-Médard (Faubourg de Soissons), puis dans Crouy avec trois compagnies. Les 2e et 3e compagnies du 25e sont provisoirement à la disposition du 355e de Missy, que l’ennemi qui a contre-attaqué vient de reprendre, et qu’il faut réoccuper à notre tour. La 3e compagnie perd : 1 sergent, 1 caporal et 12 chasseurs.

 

Le 24 mars la situation est stabilisée, les compagnies détachées rejoignent le Bataillon, qui va relever un Bataillon du 172e devant Crouy où il reste en position jusqu’au 28 mars.

A cette date, le 25e B.C.P. part au repos à Noyant et Aconin. Quelques journées de repos à la fin desquelles une nouvelle stupéfiante frappe le Bataillon : le commandant Cabotte quitte le commandement du Bataillon. Ses adieux touchent profondément les chasseurs :

 

«  A mes loyaux compagnons des luttes passées ; officiers gradés et chasseurs du 25e B.C.P.

« Frappé par une décision aussi brutale qu’imprévue, je me souviens avec tristesse des « vœux que je vous adressais au début des années 1916-1917, et je vous quitte profondément « navré de mes rêves brisés. Pendant vingt-six-mois, je vous ai donné tout mon cœur, toutes « mes pensées, comme j’avais toute votre affection et votre confiance. Les innombrables « souvenirs de nos héroïques combats ne me quitteront jamais et je continuerai de vivre avec « vous, à me réjouir de vos succès futurs. Adieu à tous, camarades glorieux  des Eparges, « Sonvaux, Champagne, Verdun, Somme. Adieu à vous les jeunes, soyez artisans de la « belle victoire, et dans l’ivresse de l’assaut adressez, par la pensée, un souvenir ému à votre « Commandant »

 

 

Le 25e Bataillon de chasseurs à pied sous les ordres du Commandant LAMARCHE

 

A la date du 4 avril, le 25 B.C.P., est commandé par le chef de Bataillon Lamarche et va occuper, à partir du 6 avril, le secteur de Soupir, avant de s’élancer à l’attaque des lignes allemandes.

 

 

SOUPIR (avril 1917)

 

Le secteur est manifestement nerveux. Les coups de mains se succèdent sans interruption. Les deux artilleries, amies et ennemies, font chaque jour des tirs de destruction. Le Bataillon a quelques blessés, parmi lesquels le lieutenant Hainzelain, blessé le 15 avril.

 

Le 16 avril, a lieu la grande offensive, sur laquelle les troupes comptent bouter hors de France, l’envahisseur. Le moral est magnifique, chacun veut absolument en finir et l’on comprendra mal les raisons, qui arrêteront notre bel élan.

L’artillerie bombarde les positions allemandes avec violence. Pour notre part nous n’ignorons pas que notre tache sera rude ; des carrières (creutes) abritent les réserves ennemies que notre artillerie est impuissante à atteindre. Mais notre vaillance, notre endurance, notre désir de vaincre sauront bien venir à bout de la résistance allemande.

L’heure H. est 6 heures du matin. Les 5e, 3e, et 2e compagnies sont en première ligne.

A 6 heures

Le Bataillon se porte d’un seul élan sur son objectif, et atteint la tranchée Werther après avoir franchi la tranchée Tirpitz, sans peine, en y faisant une trentaine de prisonniers. A partir de ce moment, il est accueilli par un feu nourri de grenades, de bombes à ailettes et de rafales de mitrailleuses, ces dernières placées sur le rebord et le sommet du plateau. Malgré ces difficultés, les premières vagues gravissent les pentes abruptes du plateau et s’approchent, des points fortement occupés par les mitrailleurs et grenadiers allemands. Un violent combat s’engage : grenades, obus VB. et fusils mitrailleurs fonctionnent à plein rendement.

Devant les difficultés d’un progression de front, la 2e vague (1re et 4e) manœuvre avec hardiesse afin d’envelopper l’ouvrage fermé qui couronne les carrières. La manœuvre réussit ; les grenadiers sont réduits, les mitrailleuses enlevées dans un violent corps à corps et les artilleurs allemands tués sur leurs minenwerfers.

Pendant cette opération, l’aspirant Dillard, de la 1re compagnie, et le sous-lieutenant Soureillat, de la C.M.1., s’apercevant que le 355e est arrêté dans sa progression, n’hésitent pas à faire face à gauche.

Cette initiative neutralise le tir de l’ennemi et soulage fortement le régiment voisin.

La prise des carrières nous livre 300 prisonniers dont 8 officiers appartenant au 186e R.I. (25e division de Landwehr ) et au 418e R.I.( 183e division d’infanterie )

7 heures

La progression continue sur le plateau même où successivement quelques mitrailleuses nouvelles se dévoilent. L’adjudant chef Liauté sert lui-même une de ses mitrailleuses malgré la proximité de l’ennemi ; sa vigoureuse intervention permet une reprise de la progression un instant arrêtée, puis les chasseurs manœuvrent à leur tour les mitrailleuses allemandes et réussissent à les réduire.

Néanmoins, la progression avait été lente et le barrage, qui devait nous précéder de 80 mètres devant les premières vagues, s’était tellement éloigné que l’ennemi avait pu fortement occuper les deuxième lignes. L’avance continue cependant jusqu’au moment où le nombre des mitrailleuses mises en ligne par l’ennemi est tel, qu’aucune manœuvre n’est plus possible.

12h30

Après une préparation d’artillerie médiocre le Bataillon en liaison  avec les corps voisins essaye mais vainement de progresser vers la lisière du bois. A chaque reprise, il est reçu à coups de mitrailleuses et de grenades. La 5e compagnie renforce à droite la 1re ligne.

17h30

Le Bataillon essaye à nouveau de progresser. A droite, la 4e compagnie gagne avec peine environ 80 mètres ; à gauche, la 2e compagnie pousse un petit poste  vers la zone des abris. Deux compagnies du 29e B.C.P.sont mises à la disposition du Commandant.

Le manque de munitions, grenades, artifices se fait sentir. Malgré les différentes demandes par avion, par coureur, aucune munition n’arrive. Force est alors d’employer les grenades allemandes trouvées dans les carrières et les tranchées abandonnées par l’ennemi.

20 heures

Le Bataillon s’organise pour passer la nuit aux avants postes, tout en conservant le contact avec l’ennemi. Les unités poussent des guetteurs en avant. En fin de journée, une colonne ennemie est signalée venant d’Ostel et se dirigeant vers le sud.

21 heures.- Violente contre-attaque sur le centre ( 3e compagnie). Le sergent Gantzmann voit sa section décimée. Grâce aux grenades ennemies trouvées dans les carrières, grâce aux mitrailleuses, l’attaque allemande est repoussée.

 

Le 17 avril

4h.30

l’ennemi prononce une très forte contre-attaque sur tout le front du Bataillon. Des troupes fraîches y coopèrent, elles appartiennent au 211e régiment de réserve (45e division de réserve)

Nos feux obligent l’assaillant à reculer en laissant des cadavres sur le terrain. La 4e compagnie, malgré de grosses pertes (capitaine Bonnier, blessé, sous-lieutenant Scoliège, tué) résiste énergiquement. Le lieutenant Charles est tué.

11 heures.- Le tir trop court de nos canons oblige toute la droite de la ligne à refluer de quelques pas. Sitôt la crise passée les emplacements sont réoccupés.

Il faudrait, en ces jours d’héroïques combats, citer tous les chasseurs du Bataillon, car tous se sont battus comme des lions, la difficulté de s’emparer de cette position indique suffisamment la bravoure avec laquelle les chasseurs se sont élancés à l’assaut. Néanmoins quelques-uns méritent qu’on cite leurs noms.

Le chasseur Biez, de la C.M.1., voit déboucher une contre-attaque ennemie en arrière de la section ; il s’élance seul sur les assaillants, les attaque à la grenade, en tue 4 et met les autres en fuite.

Le sergent Ethuin, de la 5e compagnie, se précipite sur un groupe de grenadiers ennemis, tue 3 Allemands, dont un officier et fait les autres prisonniers.

Le sergent Delaune, de la 5e compagnie, est blessé ; il prend néanmoins, le commandement d’une section privée de son chef et repousse trois contre-attaques ennemis.

L’adjudant Guillaume, de la 2e compagnie, enlève de haute lutte une mitrailleuse ennemie.

L’adjudant Ricart, de la 3e compagnie, tombe mortellement frappé après avoir été blessé au début de l’action.

Le chasseur Guyon, de la 3e compagnie, est en position prés d’une mitrailleuse ; l’ennemi, au cours d’une contre-attaque, s’avance au devant de la pièce, elle va être prise. Guyon se précipite au devant de l’assaillant, lutte, est blessé, mais la pièce est sauvée.

Le sous-lieutenant Lhuillier a été blessé au début de l’attaque ; le sergent Lang, de la 3e compagnie, a pris le commandement de sa section, il manœuvre adroitement trois îlots de résistance, permettant ainsi à sa compagnie de progresser. Le soir, il repousse une violente contre-attaque ; un de ses chasseurs, Picot (Georges) est grièvement blessé et perd l’œil droit.

Le chasseur Paindevoine, de la 2e compagnie, veut, malgré la violence du feu, transporter un de ses camarades mis hors de combat ; il est à son tour grièvement blessé.

Il faudrait des pages pour citer tous les actes des braves qui se sont distingués, car ils furent nombreux.

17h30

Le Bataillon appuie l’attaque des 27e et 29e Sénégalais sur les carrières de Grinons et l’attaque du 29e B.C.P. sur les carrières souterraines.

Dans une progression à la grenade, le 1re compagnie cherche à déborder par l’est la zone des abris fortement tenue par l’ennemi ; le mouvement  est arrêté par des mitrailleuses et barrages de grenades. Le peloton de 37 appuie par son tir le mouvement des Sénégalais.

A 21 heures

Une contre-attaque allemande est repoussée comme les précédentes.

 

Le 18 avril, vers 3 heures du matin, l’artillerie ennemie montre une activité anormale. Notre artillerie exécute un tir de contre-préparation sur les tranchées ennemies.

La 4e compagnie est maintenant commandée par le sous-lieutenant Clauzolles. Elle repousse une contre-attaque, l’ennemi s’enfuit laissant quelques cadavres en avant de nos lignes. Durant la matinée, le Bataillon multiplie ses reconnaissances et provoque à chaque instant le tir des mitrailleuses ennemies.

A 12 heures

Les dernières patrouilles rendent compte que l’ennemi cherche à se dérober.

A 12 h30

Le 29e B.C.P.qui doit continuer le mouvement en avant, relève nos unités à l’est du boyau Falkenhayn. La marche en avant est immédiatement reprise, ce qui nous procure une vingtaine de prisonniers et deux mitrailleuses.

Des prisonniers allemands nous apprennent qu’ils ont reçu l’ordre de se replier sur la Siegfriedstellung (position Hindenburg du Chemin des Dames)

Les trophées conquis par le Bataillon au cours des journées des 16, 17 et 18 avril consistent environ en : 400 prisonniers dont 10 officiers, 22 mitrailleuses, 12 minenwerfers moyens (deux de ces engins encadrent actuellement le monument aux morts des 25e, 65e et 106e B.C.P. à Menton, garnison actuelle du 25e B.C.P.), 9 minenwerfers lourds et un important butin comprenant armes, équipements, grenades, lance-grenades, etc…

Le Bataillon devient réserve de division et se porte entre les anciennes carrières souterraines et le boyau Falkenhayn où il passe la nuit en position d’attente.

 

Le 19 avril, toute la division ayant avancé sur tout le front, vers 6 heures, le Bataillon se porte en réserve, entre la ferme de Folemprise et le bois de Fosse Marguet ; position d’alerte durant toute la journée.

Le 20 avril, le Bataillon occupe la même position que la veille. Dans l’après-midi, le Commandant du 26 B.C.P. reconnaît les emplacements occupés et prépare la relève qui doit avoir lieu dans la nuit. Le 21 avril, le Bataillon relevé se dirigeait sur Chacrise par Chavonne, Brenelle, Braisne, La Ferme la Siège, Nampteuil et Chacrise où il cantonnait.

Pendant ces dernières journées, le Bataillon avait perdu :

Le 15 avril : Le sous-lieutenant Hainzelain, blessé, 1 chasseur tué, 4 blessés, 7 disparus.

Le 16 avril : Tués : Le sous-lieutenant Scoliège et 26 caporaux et chasseurs ; blessés : le capitaine Bonnier, sous-lieutenant Lhuillier, sous-lieutenant Delcourt et 130 caporaux et chasseurs blessés

Le 17 avril : Tués : Le lieutenant Charles et 12 caporaux et chasseurs ; blessés : 56 caporaux et chasseurs.

Le 18 avril : 8 blessés ; 4 tués.

Le 19 avril : 1 blessé.

Le 20 avril : 1 blessé.

Le 23 avril, le général De Mitry, commandant le 6e C.A., réunissait les officiers à la division et félicitait le Bataillon par sa belle attitude.

Le 24 avril, le général D’Anselme remettait la Croix de la Légion d’Honneur au capitaine Migeot et au sous-lieutenant Clauzolles, et la Médaille Militaire à l’adjudant-chef Liauté et au sergent Gantzmann.

Le capitaine Migeot remplaçait comme capitaine –adjudant major le capitaine Bonnier qui était blessé.

Le 3 mai, le Bataillon se rend à Chassemy pendant quelques jours, où il reste en position d’alerte, réserve de division.

 

 

LA FERME DE LA ROYERE (mai 1917)

 

 

Le 7 mai, par une pluie battante et une obscurité totale qui retarde considérablement la marche du Bataillon, on relève le 171e R.I., à la Ferme de la Royère.

Le secteur est soumis à un fort bombardement, les pertes sont assez sérieuses. Le sous-lieutenant Pontlévy est blessé le 9 mai. Les chasseurs sont continuellement sur le qui-vive, l’ennemi ne veut pas s’avouer vaincu et l’on sent qu’il veut, coûte que coûte, reprendre le terrain qui lui été enlevé le 16 avril. Si son désir de vaincre est immense, notre volonté de résister est encore plus grande que son désir, et le 14 mai, les Allemands vont l’apprendre à leurs dépends.

 

Le 14 mai, à 7 heures du matin, un Allemand du 4e Ersatz fait prisonnier par le 29 B.C.P. à notre gauche, fait savoir qu’une attaque est prévue  pour le soir même, à 19h 15, après un bombardement commençant à 17 heures.

En conséquence, les compagnies de réserve (3e et 4e) tiennent par des sections les tranchées de l’Apana et du Couteau ; les grenadiers d’élite occupent le boyau des Voraces prêts à contre-attaquer. Le tir d’artillerie est intermittent durant la matinée, et l’après-midi est calme.

A 17 h.15

Un bombardement d’artillerie ennemie intense s’étend sur tout le front du Bataillon. Il s’étend également sur sa droite et principalement sur sa gauche. La zone de bombardement s’étend au sud, jusque à la tranchée Barton.

La première ligne reçoit des obus spéciaux ainsi que des minenwerfers légers.

A 18 h.15

Devançant l’heure annoncé par le prisonnier du matin, l’ennemi prononce une première attaque. Le tir de barrage instantanément déclenché ainsi que le tir de nos mitrailleuses obligent les éléments ennemis à se retirer en désordre.

A 18 h. 20

Voyant que son attaque a échoué, l’ennemi recommence une nouvelle préparation très violente sur la tranchée de la Gargousse (5e compagnie)

A 18 h.50

Les Allemands renouvellent leur attaque qui échoue comme la première devant notre barrage d’artillerie et de mousqueterie. Les artilleurs allemands reportent sur  notre première ligne une préparation aussi intense que précédemment. Notre artillerie riposte vivement, de nombreux avions français et allemands survolent nos lignes.

A 19 h 45

Pensant trouver une tranchée démolie et sa garnison anéantie, l’ennemi renouvelle son effort ; les vagues d’assaut sont encore brisées par nos tirs de barrage, nos mitrailleurs et V.B. L’ennemi s’avoue alors vaincu, il ne renouvelle pas son attaque. A peine quelques Allemands essaient-ils encore d’avancer, ils sont tués ou obligés de se terrer dans quelques trous d’obus jusqu’à la nuit à la faveur de laquelle ils s’enfuient. De nombreux cadavres jonchent le terrain.

Des renseignements complémentaires permettent d’établir que l’attaque dirigée sur le front Ferme La Royère-Les Bovettes a été effectué par la valeur d’une décision fraîche ( 206e D.I ). La poussée du Bataillon a été faite par le 4e Ersatz.

 

Du 15 au 20 mai, le secteur est quelque peu agité : bombardements, coups de mains ennemis sur les corps voisins, à l’occasion desquels les Allemands nous gratifient de tirs de barrage  d’artillerie. L’aviation elle-même est très active. Les pertes subies par le Bataillon sont assez sérieuses et se décomposaient comme suit : 1 sous-officier et 42 caporaux et chasseurs tués ; 1 officier, 4 sous-officiers, 62 caporaux et chasseurs blessés.

 

Du 21 mai au 7 juin, le Bataillon définitivement relevé allait cantonner successivement à Noyant, Billy-sur-Ourcq, Montigny-Lencoup pour arriver enfin à Nogent-sur-Seine, où il embarque à destination des Vosges.

 

 

EN SECTEUR DANS LES VOSGES (juin-décembre 1917)

 

 

Le 10 juin, le Bataillon cantonne dans la région de Remiremont. Le C.A. et la D.I. sont à Remiremont où le 29e B.C.P. se repose également.

Sur l’initiative du commandant Dumont, commandant le 29e, les fanfares des 25e et 29e B.C.P. fusionnent, et après un concert donné en présence des généraux Paulinier et d’Anselme, une retraite aux flambeaux endiablée parcourt les rues de Remiremont suivie d’une partie de la population Remiremontaise, et d’un grand nombre de chasseurs du 25e et 29e.

 

Le 13 juin, à Saint-Amé, cantonnement du 25e, le Bataillon recevait les camarades du 29e au cours d’une fête qui ne devait se terminer que tard dans la nuit.

Le général d’Anselme, le général Pernod, le colonel Hakling, le commandant Dumont honoraient le Bataillon de leur présence, et cette belle journée effaçait les mauvais moments passés, exaltant le moral des troupes que certains éléments louches auraient voulu voir diminuer. Et si certaines unités, peu nombreuses, il est vrai, mal conseillées par des gens de l’intérieur, ont eu la faiblesse de prêter l’oreille aux propos de rébellion qu’on leur inspirait, nos chasseurs n’ont pas terni leur gloire, ni entaché leur honneur par un geste indiscipliné.

 

Dès le 17 juin, le Bataillon se rend par étapes dans le secteur du Linge : par Gérardmer, Tholy, Fraize, le col du Luschpach. Il relevait, le 26 juin, un bataillon du 253e R.I au Barrenkopf, Combekopf, Schratzmanelle et Lingekopf.

Noms désormais célèbres, tombeaux de 20.000 chasseurs à pied et alpins, les fils de Sidi-Brahim ont été dignes des pères ! Raconter les épisodes héroïques de la bataille de Linge ne nous appartient pas, ce sera l’œuvre des chasseurs du 106e B.C.P. qui y ont pris une part glorieuse.

 

Pendant 6 mois, le 25e B.C.P. va tenir position sur ces hauts cols des Vosges. Il ne permettra à aucun moment à l’ennemi de s’approcher de ses tranchées, et le terrain dont le commandement lui a confié la garde, il le rendra intact, précieux dépôt qu’il était fier d’avoir entre les mains.

Si en cette année 1917, les combats ont cessé, si de part et d’autre, on s’est considérablement retranché, si des améliorations ont été apportées aux abris qui protègent les troupes en ligne, l’occupation des premières lignes n’est pas à proprement parler un cantonnement de tout repos. Les Allemands y montraient quelque activité, pratiquant des brèches dans leur réseau de fil de fer, ce qui nous obligeait à une surveillance incessante. Nos patrouilles étaient fréquentes et longues, et le sous-lieutenant Lecoeur, avec son groupe de grenadiers, a passé bien des nuits à la belle étoile, essayant de surprendre les patrouilleurs ennemis.

D’autre jour, tel le 24 septembre, les Allemands tendaient une embuscade aux patrouilles de liaison passant devant nos lignes. Une patrouille de liaison du 29 B.C.P. était victime d’un fil de fer tendu en travers du chemin de ronde. Les chasseurs ont buté sur ce fil et sont tombés dans un trou peu profond, mais…dans les bras des Allemands : le caporal et le chasseur qui composaient la patrouille ont pris la direction de Berlin, ainsi qu’un caporal et un chasseur de la 1re compagnie du 25e qui avaient été envoyés au devant de la patrouille du 29e, et qui avaient été victimes de la même chute. A ce moment on entendit quelques cris, mais les patrouilles envoyées à leurs secours n’ont trouvé que différents objets d’équipements.

De notre coté, c’était également le même genre de guets-apens, entrecoupés de violents bombardements, dès qu’une de nos opérations avaient obtenu plein succès.

Pendant toute cette période d’été, la vie est active des deux côtés, les lignes sont d’ailleurs assez éloignées l’une de l’autre. Les incursions en terrain ennemi sont journalières et les nuits de juillet et août sont si courtes que l’obscurité sera employée hâtivement à démolir ce que l’adversaire aura construit la nuit précédente.

 

Les compagnies du Bataillon alternent dans le service de première ligne ; les unités sont en général trois en ligne et deux en secteur ; les C.M. occupent, tour à tour, les positions de mitrailleuses du secteur. Si la vie de la première ligne est active, en position de soutien les journées sont calmes ; on peut aller et venir sous les sapins, car si les pentes du Barren, du Linge et du Schratz sont dénudées, il n’en est pas de même à deux kilomètres en arrière. Quelques arbres de la vallée portent encore des fruits et le seul garde champêtre qui puisse vous empêcher de marauder, c’est l’artilleur ennemi qui vous guette quand on s’est aventuré un peu trop loin. Quelques fusants rappellent à l’ordre les chasseurs audacieux ou trop gourmands.

 

Le secteur est d’autant plus agréable, que l’on tient les tranchées pendant un mois, pour aller au repos à Gérardmer pendant le même laps de temps. Gérardmer c’est un peu la grande ville, c’est le repos complet assez loin des lignes, les chasseurs y sont accueillis avec joie par la population civile. Tous les magasins sont ouverts, c'est-à-dire que le ravitaillement est facile pour les popotes. Certains négociants savent même flatter la coquetterie  de nos chasseurs, et la fantaisie vestimentaire règne pendant ces périodes de détente. Enfin cafés et brasserie sont ouverts sous l’œil de la maréchaussée, et le regard qu’elle y jette est beaucoup plus clément qu’au début de la campagne.

Mais dès la tombée de la nuit tout est clos, plus de lumières, plus personne dehors, les avions ont des yeux qui guettent, et les crottes qu’ils pourraient laisser tomber incitent les chasseurs à être prudents et à respecter les mesures de précaution édictées pour la protection de la population civile. D’ailleurs la police du cantonnement est grandement facilitée du fait que les compagnies sont logées à Gérardmer, dans le quartier Kléber.

Avec le mois d’octobre, notre secteur change d’aspect. Bien que les sapins restent verts, ils vont bientôt se couvrir de neige, et avec eux toute la terre. L’hiver dans les Vosges nous réjouit presque. Certes, il va faire froid, mais les vêtements chaud sauront parer aux rigueurs de la température, le passe-montagne en laine tricoté par les mamans couvrira les oreilles, et les guetteurs découvriront mieux sur l’immense tapis blanc les patrouilleurs ennemis qui déambuleront.

Cette neige qui avait le don de nous enthousiasmer avait bien ses inconvénients, car la route était longue pour relever en première ligne : il fallait deux jours de marche. La première étape était le plus souvent Gérardmer, le camp du Collet.

Au Collet nous rencontrions le T.C et quelques éléments du T.R. C’était alors la franche réception de nos ravitailleurs : un bon quart de jus bien chaud vous ravigotait, bien souvent on cassait une petite croûte, et l’on repartait au camp.

Quand le temps était clair, nous faisions un détour par la Schlucht, et c’était un vrai régal des yeux que de s’attarder sur cette vue magnifique qu’était la vallée de Munster.

 

Le lendemain, c’était la montée en ligne, et par la route serpentant dans la vallée, ou longeant les collines, nous traversions cette belle forêt de sapins qui entoure le lac Blanc et le lac Noir, et comme elle était froide alors, cette neige qui crissait sous vos pieds. Les mulets, conduits par des territoriaux, amenaient jusqu’au P.C. du commandant tout le matériel de tranchée dont pouvaient avoir besoin les unités de première ligne. Les cuisines roulantes arrivaient également à proximité du P.C. et pendant notre séjour d’hiver en secteur, les compagnies eurent au moins un repas chaud chaque jour. L’alcool solidifié servait à chauffer le repas de midi. Et de ce fait l’état sanitaire du Bataillon fut parfait.

 

Le 18 octobre, le Bataillon donna une fête sportive en présence du général De Mitry : football, courses à pied. La fanfare fut naturellement priée d’agrémenter le programme par ses morceaux variés.

 

Le 14 novembre, au casino de Gérardmer, le lieutenant Dillard organisait une soirée récréative, à laquelle étaient conviées les troupes cantonnées à Gérardmer, ainsi que la population civile : inutile de vous dire que cette soirée obtint le plus vif succès.

Le 19 novembre, dans la matinée, le Commandant organise un concours de tir de spécialités (fusil, fusil-mitrailleur, pistolet, grenade). L’après-midi eut lieu un concours de manœuvre à raison d’une demi-section par compagnie. Des prix récompensèrent les lauréats.

C’est par la variété de ces divertissements que le moral du Bataillon était maintenu à un niveau toujours plus élevé. Les chasseurs en revanche mettaient toute leur bonne humeur pour accomplir les divers travaux de l’arrière, dont le commandement demandait l’exécution.

 

Le 23 novembre, le Bataillon effectue sa dernière montée en ligne dans ce secteur des Vosges. La neige ne nous quittera pas jusqu’au 23 décembre, date à laquelle les unités définitivement relevées, vont cantonner à Rochesson, à quelques kilomètres de Gérardmer.

Pendant l’occupation du secteur du Linge, le Bataillon avait perdu : 1 officier  (sous-lieutenant Lecoeur, blessé) : 8 caporaux et chasseurs tués ; 2 sous-officiers, 24 caporaux et chasseurs blessés.

 

 

UNE GRANDE PERIODE DE REPOS (janvier-mars 1918)

 

 

  Du 28 décembre au 19 janvier 1918, le Bataillon va parcourir une partie de la région est de la France. Il fait froid, la neige assez commune dans ce coin, ne nous gênera que pendant deux ou trois étapes. Enfin, particularité de l’est, les cantonnements occupés ne permettront pas au Bataillon de se réunir au complet. Les villages sont petits, mais par contre assez peu éloignés l’un de l’autre.

De Rochesson, le Bataillon va cantonner à la Lanterne-Ecromagny ; c’est là que le 1er janvier 1918 le Commandant nous souhaite victoire sur l’ennemi. Son vœu devait heureusement se réaliser.

Puis nous repartons pour Vy-les-Lures où nous allons passer quelques jours, qui seront occupés surtout par le repos complet.

 

Le 13 janvier, départ pour la région de Villersexel. La 3e compagnie est détachée provisoirement du Bataillon pour aller travailler à un camp d’aviation à Port-sur-Saône. (tir contre avions )

Le Bataillon se rend à Viethorey. Il a neigé  toute la nuit, les routes sont glissantes, les voitures T.C.et T.R. suivent très péniblement, et il faut parcourir seize kilomètres dans dix centimètres de neige. Vers la fin de l’étape, la pluie se met à tomber et les chasseurs  sont trempés de la tête aux pieds. Heureusement la population qui nous reçoit est très accueillante, de grands feux de bois brûlent dans de hautes cheminées. On se sèche, on mange chaud, et la gaieté, en fin de journée, a repris la place qu’elle occupe toujours, la première.

 

Le 19 janvier enfin, le 25e gagne la région de Montbéliard. Le cantonnement restera célèbre au Bataillon pour le bien-être que les chasseurs y ont rencontré, et l’accueil enthousiaste de la population. Beaulieu, Vougeaucourt, Belchamps, c’est toute la population ouvrière des usines Peugeot qui reçoit le Bataillon. Beaulieu en particulier, est le centre des usines. De grands dortoirs ont été installés par la famille Peugeot et ses directeurs. Il est peu de chasseurs qui les utiliseront.

C’est sous un toit familial qu’ils passeront la nuit.

Les fêtes de Beaulieu ont connu le grand succès. Deux mots suffiraient pour résumer la période du 20 janvier au 7 février : Repos, Gaieté.

 

Le 26 janvier, une société sportive de Montbéliard demandait à matcher l’équipe de football du 25e : nos équipiers eurent à cœur de faire triompher leurs couleurs, et leurs efforts furent couronnés de succès.

 

Le 30 janvier, une soirée était organisée avec le concours de la jeunesse de Beaulieu. Les organisateurs eurent bien du souci pour permettre à tous nos invités de trouver une place, et pour éviter des mécontentements, une matinée avait lieu le lendemain à la satisfaction générale.

 

Le 3 février, l’équipe de football offrait à la jeunesse de montbéliard un match revanche. Nos chasseurs montrèrent au cours de cette manifestation sportive une supériorité qui étonna les jeunes gens de la région ; il est vrai que l’élément sportif ne manquait pas au Bataillon. Un concert donné par la fanfare termina cette réunion, qui laissait dans l’esprit de tous un excellent souvenir.

Mais si dans ces endroits enchanteurs, on finissait par oublier la guerre, le 7 février, la division nous donnait l’ordre de nous rendre à Meslières-les-Glay où une position de résistance était à organiser, et les chasseurs du Bataillon vont empoigner pelles et pioches sous la direction du génie.

 

Du 7 au 17 février, les travaux de terrassement vont être toute notre occupation. Puis nous embarquons à destination de Monthureux-sur-Saône, où la 3e compagnie, provisoirement détachée, nous rejoindra.

Nous venons à Monthureux compléter notre instruction. Un nouvel engin d’accompagnement offensif, dont l’infanterie vient d’être doté, nécessite une connaissance un peu spéciale. Tour à tour, 25e et 29e iront à Martigny-les-Bains faire des manœuvres de quatre jours avec accompagnement de chars d’assaut, et, de retour à Monthureux, pendant tout un mois, ce sera qu’application des enseignements reçus. Le Bataillon démontrera devant les états-majors ses qualités manœuvrières qui lui feront décerner les éloges du Général commandant le 6e C.A.

 

Enfin le 27 mars, nos chasseurs bien reposés, bien entraînés, vont s’embarquer à Passavant. Les Allemands jouent en ce moment leurs dernières cartes, ils veulent à tout prix remporter la victoire. Cette victoire nous allons leur arracher. Sans trêve, sans répit, le 25e B.C.P. va marcher au combat, et si nous connaissons quelques jours en secteur calme, dans une région que nous avions connue très agitée, ce sera pour nous recueillir devant nos morts, et enlever de haute lutte les lauriers de la victoire.

 

En effet, le 21 mars à 4 heures du matin, les Allemands ont bombardé avec extrême violence, les lignes anglaises au nord d’Amiens. A la cadence des 65.000 obus à l’heure, la plupart à l’ypérite disent les rapports officiels, l’ennemi prépare son attaque. Celle-ci se déclenche à 9 h. 10. Profitant du brouillard, l’infanterie allemande progresse de 12 kilomètres dans la journée du 21. L’ennemi presse de plus en plus l’armée anglaise qui recule, découvrant la route de Montdidier, et par la suite la route de Paris. Les Allemands ont pris Combres, Péronne, Ham, Nesles et Chauny.

 

Enfin le 26, les Allemands ont pris Roye.

 

Le 27, ils entrent à Montdidier, et prennent Amiens comme objectif principal. Amiens marque la soudure des armées britanniques et françaises et il faut à tout prix éviter cette rupture. La situation est grave. L’ennemi poursuit ses progrès ; le 30 au soir, il prend Moreuil, mais il est à bout de souffle, pendant trois jours il se repose, et quand il reprendra son offensive, partout décimé, haché, il renoncera.

 

 

AU SECOURS DES ANGLAIS (mars 1918)

 

 

C’est à Verberie, dans la journée du 28, que nous apprenons que les Allemands se sont emparés de Montdidier la veille au soir. La situation est assez confuse.

Le Bataillon doit débarquer à Moyenneville (Oise), dont on est sans nouvelles depuis le matin. Le Bataillon y arrive sans encombres à 16 heures.

 

Le 29 au matin, le 25e est embarqué en camions-auto et il doit se rendre à Ailly-sur-Noye, via Breteuil.

Au cours de route nous croisons de nombreux convois d’évacués, et c’est le même spectacle sinistre des premières journées de la guerre. Quelques hardes jetées pêle-mêle sur une voiture, visages tristes, enfants grelottants, sous ce ciel gris qui laisse tomber un brouillard qui vous glace. Une parie de la 5e armée anglaise est mêlée à ces convois, infanterie, cavalerie, artillerie, le tout sans ordre. Ce triste cortège ressemble plutôt à une fuite.

Sans incidents nous débarquons à Rouvrel. A partir de ce moment ordres et contre-ordres vont se succéder. Les troupes anglaises occupent le village de Rouvrel ; ils vont partir nous dit-on. En fin de journée, c’est nous qui partons.

A 17 heures, le Bataillon reçoit l’ordre suivant :

La 127e D.I. doit se regrouper dans la région de Breteuil. Ordre au 25e B.C.P. d’aller cantonner à Louvrechy-Merville. Les 2e et 3e compagnies du 29e qui se sont jointes au 25e, suivent le Bataillon.

A 19 heures, le Bataillon et les deux compagnies du 29e quittent Rouvrel. Au passage de la route Ailly-Moreuil, un Officier d’état-major de l’armée venant de Moreuil fait connaître au Commandant que cette ville est tournée au nord par les Allemands.

La C.M.2. va se mettre en position à cheval sur la route Ailly-Moreuil à hauteur de la ferme Montdée.

A 21 heures, le Bataillon cantonne à Louvrechy, les 2e et 3e compagnies et le 29e à Merville-aux-Bois. Toutes dispositions prises en cas d’attaque ennemie.

 

30 mars.- A 6 heures du matin, le Bataillon est avisé qu’au lieu de se grouper dans la région de Breteuil, la D.I. se regroupe dans la région de Sourdon-Chirmont.

6 h.30 : Le Bataillon se dirige sur Sourdon en réserve.

9 h. 30 : Le Bataillon reçoit l’ordre de s’établir à la lisière est du bois de l’Arrière Cour jusqu’à la route Sourdon-Mailly Raineval, en liaison au sud avec le 29e B.C.P. Les compagnies se rendent sur la position en formation d’approche, la 4e compagnie avant-garde du Bataillon. Il pleut, le matériel de mitrailleuses est porté à dos. Et dans les champs que nous traversons, on ne voit rien, personne à droite, personne à gauche sur la plaine, qui s’étend à perte de vue.

Au passage à Louvrechy, le Commandant est avisé que la région Mailly est fortement tenue par la 166e D.I.

Le Bataillon est replacé en réserve. Il continue sa marche jusqu’à Merville où il s’établit défensivement.

21 heures : Deux compagnies de dragons à pied viennent s’établir à Merville, chargés de la défense du village.

 

31 mars, 1 h. 30 : Afin d’avoir dès la pointe du jour un dispositif de défense du plateau dans le cas de recul de la 166e et 120e D.I., le Bataillon doit laisser une couverture à Merville et aller en réserve à Louvrechy.

3 heures : Départ du Bataillon, et installation à Louvrechy.

10 h. 45 : Ordre de se porter à Chirmont. On mange comme l’on peut dans cet état de perpétuelle alerte. Les agents de liaison ne cessent de parcourir le chemin qui sépare le P.C. du Commandant aux emplacements de leurs compagnies.

Le départ pour Chirmont est très délicat, les drachens allemands sont très vigilants ; par paquets d’une demi-section, et par des itinéraires défilés on arrive à Chirmont à 14 heures. Le cantonnement est en partie occupé par des chasseurs à cheval, les granges qui pourraient nous abriter sont percées de trous d’obus, tant bien que mal on cherche à se caser, sans intérêt d’ailleurs puisqu’à 21 heures, les unités du Bataillon doivent occuper différentes positions en avant du village, et mettre ces positions en état de défense.

 

1er avril.- Le Bataillon est divisé en deux groupements.

1er groupement : 4e,5e,2e C.M.1. est moitié C.M.2. sous les ordres du Commandant, occupent les positions de Chirmont.

Le 2e groupement : 1re, 3e et moitié de la C.M.2.sous les ordres du capitaine Bonnier, quittent Chirmont pour se porter au carrefour des routes : Sourdon-Mailly-Renneval et Louvrechy-Thory derrière le 29e B.C.P.

Durant la nuit le groupement Bonnier est bombardé et reçoit quelques obus à gaz.

 

 

GRIVESNES (avril 1918)

 

2 avril, 3 heures : Le Bataillon quitte Chirmont et se rend dans les bois de Coullemelle. Il commence à creuser des tranchées profondes, car le bois est violemment bombardé. Grivesnes est tout près, le 19 B.C.P. se bat encore dans le village qu’il a repris la veille à l’ennemi. Nous devons relever ce bataillon cette nuit, sur les positions qu’il a reconquises.

16 heures :

Le groupement Bonnier est avisé qu’il sera relevé par des éléments du 294e R.I. et qu’il devra se porter sur les emplacements laissées libres par le départ du 1er groupement du 25e B.C.P. dans les bois de Coullemelle.

21 heures :

Les 4e, 5e et 2e compagnies, la C.M.1.et la ½ C.M.2. relèvent le 19 B.C.P. dans Grivesnes.

 

Dans la nuit du 2 au 3 avril, une opération de détail, conduite par l’adjudant Fauvel, de la 5e compagnie, vers la Chapelle Saint-Aignan, réussit sans pertes, faisant même quelques prisonniers. Le 4 avril vers 1 heure du matin, un prisonnier déclare qu’une attaque aura lieu dans la journée sur Grivesnes.

En effet, dès le matin de nombreux groupes d’ennemis tâtent notre ligne sans résultats. Puis un violent bombardement d’artillerie de campagne et lourde se déclenche dès la pointe du jour. Le village est soumis à un bombardement de gros calibre.

Le P.C. du Commandant est dans une cave à cent mètres de la première ligne. Les arrières sont soumis à un bombardement par obus à gaz.

A 8 h. 30

L’attaque se déclenche sur tout le front du Bataillon. De nombreuses vagues de la garde prussienne se portent à l’assaut de nos tranchées. Ils débouchent du parc du château, par les brèches existantes dans le mur, menaçant par le nord et le nord-est toute la lisière nord-est du village. La 4e compagnie est au centre, elle est violemment attaquée. Le lieutenant Appy est tué. Des mitrailleuses en position dans le mur avoisinant l’église, brisent l’attaque vers la partie nord-est, d’autres mitrailleuses dans la tranchée suivant le chemin de terre conduisant au Moulin, arrêtent tous les efforts vers l’est du village.

A 9 heures

Vers la partie nord-est de Grivesnes, de forts partis allemands, dissimulés par des murs et des haies, soutenus par de nombreuses mitrailleuses lourdes et légères, qui neutralisent le feu de nos voltigeurs, arrivent à s’emparer d’une maison isolée, dite « Le Chalet. ». La section de l’adjudant Barbary (2e compagnie) recule un moment, puis Barbary rassemblant sa section, rétablit la situation, chassant l’ennemi des points où il avait pu pénétrer.

Le lieutenant Bourchied, commandant la 2e compagnie, et le sous-lieutenant Le Dieu-De-Ville arrivent avec la section de soutien. Le lieutenant Bourchied tombe blessé par des grenades, ainsi que plus de la moitié de l’effectif qui partait à la contre-attaque. Le sergent Bertrand est atteint d’un éclat de grenade qui lui crève l’œil gauche. Le chasseur Guyard est atteint très grièvement à la jambe droite. Le lieutenant Cros prend le commandement de la compagnie.

A 9 h. 15

Nouvelle attaque toujours sur les mêmes points. Le caporal Carliez est chef de pièce, commandant la 3e pièce de la C.M.1. Pendant deux heures il reste en position sous un violent bombardement, jusqu’au moment où il tombe mortellement atteint. Les Allemands ne passeront pas de ce coté.

Le caporal Pouvreau est en position vers la route de Malpart avec la 6e pièce de la C.M.1., il est attaqué à la grenade, mais ne se laisse pas distraire de sa mission, et fauche les infiltrations allemandes. Il est dégagé par l’intervention énergique des grenadiers voisins.

La section Barbary, que ses mitrailleuses ne peuvent aider, est obligée à nouveau d’évacuer le Chalet. Un peloton du 355e R.I.est mis à la disposition du commandant Lamarche qui ne dispose en ce moment d’aucune réserve.

A 9 h 25

Soutenu par une section du 355e, l’adjudant Barbary réoccupe le Chalet.

Pendant ce temps, le sous-lieutenant Dabos, de la 1re C.M., s’est aperçu que le lieutenant Appy était tombé. Il prend résolument le commandement des voltigeurs du lieutenant qui sont autour de lui, aidant ainsi, par son énergique attitude, le lieutenant Authier, commandant cette compagnie, à soutenir tous les assauts.

Le 5e compagnie à droite n’est pas attaquée directement, elle est par contre violemment bombardée.

11 heures

L’ennemi ne se tient pas pour battu et a recours aux lance-flammes pour venir à bout de la résistance de la section Barbary.

Le caporal Martin est monté à plusieurs reprises sur un mur du Chalet et lance des grenades sur l’ennemi, lui causant de lourdes pertes.

Le sergent Meunier avec quelques chasseurs, tire sur l’ennemi à travers les quelques créneaux qui laissent apercevoir la garde prussienne. Le sergent Beaugitte, de la C.M.1., a réussi à mettre une pièce de mitrailleuse en position près du Chalet, et sert lui-même la pièce jusqu’au moment où les Allemands attaquent avec des lance-flammes. La section Barbary est encore obligée d’évacuer le Chalet. Barbary se replie dans la rue de l’église, une barricade et des barrages sont immédiatement installés. L’ennemi apporte de nombreuses mitrailleuses, et occupe fortement le Chalet qui est solidement construit, et hors de vue de nos engins de destruction.

Néanmoins, le canon de 37 et le Brandt interviennent, mais sans résultats, des renforts ennemis s’infiltrant constamment dans le parc du château par la corne nord-est.

La section du sergent Milord, de la C.M.2, qui flanquait la 4e compagnie à la sortie sud-est du village, arrête tous les mouvements débordant de l’ennemi maître du Chalet.

12 heures

La liaison a été perdue entre la 2e et la 4e. Celle-ci est rétablie vers 15 heures. Enfin une section de la 1re compagnie conduite par le lieutenant Bréche arrive à Grivesnes ; cette section prise sur le groupement Bonnier, en réserve, engage immédiatement la contre-attaque. Energiquement emmenés par le lieutenant Bréche et le sergent Dewult, les chasseurs de la 1re compagnie arrivent à regagner du terrain vers le Chalet.

L’attaque est définitivement brisée, et l’ennemi, qui s’était accroché au terrain en avant de sa ligne, rejoint ses tranchées de départ, sauf au Chalet dont il reste maître. D’un bout à l’autre de la ligne, les mitrailleuses qui n’avaient pas d’objectifs sérieux sur leur mission normale, ont eu l’initiative de se consacrer à leur mission éventuelle. Elles ont contribué à briser définitivement l’attaque, le tir de l’artillerie française ayant été certainement trop long malgré les demandes réitère de T.S.F.

Durant le combat, de part et d’autre peu d’avions ont survolé l’attaque, le ciel étant resté très couvert. Le commandement n’a pu être renseigné que par T.S.F., bien que l’antenne ait été démolie plusieurs fois par le tir de l’ennemie.

Le général d’Anselme, dans une lettre privée écrivait :

«  Le Commandant du 25e, à la T.S.F., me renseigne minute par minute. L’armée, le C.A. des batteries, saisissent à la fois les messages, qui me reviennent ensuite par téléphone de l’armée.Nous vivons toutes les émotions de la première ligne. »

Dans la soirée du 4 avril, le reste du groupement Bonnier, 3e et ½ C.M.2, rejoint le bataillon, ce qui permet de consolider la position tenue contre toute attaque éventuelle de l’ennemi, qui a subi des lourdes pertes, comme en témoignent les nombreux cadavres de la 1re division de la Garde Prussienne.

A 19 heures

Une batterie de chars d’assauts doit être mise à la disposition du Bataillon pour la réduction de nids de mitrailleuses dans la partie nord-est du village.

Le général d’Anselme transmet au Bataillon les félicitations, du général Mangin, commandant le 9e C.A. pour l’héroïque défense de Grivesnes.

 

5 avril.- La nuit a été calme, l’ennemi n’a pas tenté de réagir. La 3e compagnie a relevé la 5e compagnie au matin.

A 13 h 15

Le Bataillon reçoit l’ordre d’attaquer devant son front en coopération avec la 45e D.I. L’attaque aura lieu à 15 heures.

De sa propre initiative et avant  d’avoir eu connaissance des ordres de détail du Général commandant le 9e C.A. ; le lieutenant Clauzolles, de la C.M.2, s’installe dans le clocher, peu solide, de l’église et par des moyens de fortune, avec une audace peu commune, met en position 2 pièces de mitrailleuses.

A 15 heures

L’attaque se déclenche sur la gauche.

Le lieutenant Clauzolles et le lieutenant Couhé, dans la situation périlleuse du clocher, tirent deux caisses de cartouches dans d’excellentes conditions sur le parc et les trous de tirailleurs allemands au sud-est du parc. Impressionné par ce tir, l’ennemi a une défaillance momentanée ; il évacue le Chalet dans lequel les chasseurs, aux aguets, se jettent sans hésitation, reprenant ainsi le seul point où la garde avait pu prendre pied et au prix des pertes les plus élevées.

L’attaque par elle-même insuffisamment préparée, ne réussit pas, le Bataillon reste sans bouger sur ses positions. La 4e compagnie, qui avait tenté de déboucher est immédiatement arrêtée par les mitrailleuses. Le sous-lieutenant Dillard est blessé. Le sergent Belot, de la 4e compagnie, avec une poignée d’hommes, se trouve au contact de groupes ennemis à la grenade ; il résiste énergiquement.

L’ennemi soumet nos tranchées à un violent tir de barrage qui martèle notre première ligne.

La nuit et la journée du 6 avril sont assez calmes.

Vers 20 heures

L’ennemi tente d’attaquer par surprise. Les tirs de barrage arrêtent toutes ses tentatives.

 

Le 7 avril, le 4e Bataillon du 355e R.I, en liaison avec le Bataillon, fait une tentative de nettoyage de la partie occupée du parc de Grivesnes. Cette opération est appuyée par une batterie de chars d’assaut. Pendant la mise sur place, un char est démoli par un obus de 210 devant l’église. L’ennemi résiste devant le front du Bataillon ; il s’est renforcé  de nombreuses mitrailleuses.

Les artilleurs ennemis s’acharnent sur la clocher de l’église qui s’est abattu.

Le caporal Bomblin, de la C.M.2., est blessé en servant sa pièce de mitrailleuse pendant la tentative de progression. Il avait tenu à suivre les voltigeurs et avait avancé sa pièce.

Le sergent Prévot, de la 1re compagnie, commande un groupe de combat. Avec ses grenadiers il attaque l’ennemi ; bientôt il est entouré par de nombreux Allemands, mais réussit à se dégager par un vif combat à la grenade.

Pendant cette attaque, le chasseur Bouillard, de la 4e compagnie, qui assure la liaison entre son commandant de compagnie et le P.C du Bataillon, est grièvement blessé près de l’église en portant un renseignement au Chef de Bataillon.

 

Du 8 au 12 avril, les journées les plus calmes ; l’ennemi ne réagit plus qu’avec des bombardements d’artillerie assez violents. L’artillerie française fait des tirs de harcèlement sur les arrières, gênant les convois de ravitaillement ennemis.

 

Le 12 avril, les chasseurs assistent à un combat aérien. De nombreux avions allemands survolent les lignes. Le temps est clair, quelques nuages blancs de-ci, de-là. Le capitaine Fonck, héros du combat, dans son livre «  Mes Combats. » raconte :

«  Vers 15 heures, la brume commençait à se dissiper et trois quarts d’heure après, je « pouvais prendre le départ en compagnie du capitaine Battle et du lieutenant Fontaine.

«  A peine sur les lignes, nous tombions sur une patrouille composée d’un appareil de « reconnaissance protégé par deux biplans de combat.

« D’un mouvement convenu à l’avance, je donnais immédiatement le signal de « l’attaque et de face, à la première rafale, j’atteignis en plein le pilote ennemi : sans « m’inquiéter de lui davantage, pour éviter d’être touché à mon tour, j’effectuai un rapidement « retournement suivi d’une glissade. Ainsi j’étais placé sous l’aile d’un autre Allemand dont « le mitrailleur cherchait à me reprendre, mais il était trop tard. Une deuxième fois j’ouvre le « feu, le second adversaire culbuta tandis que le troisième échappait à mes camarades.

« Me voyant en train de virer, ce dernier me crut hors d’état de le poursuivre et piqua « droit. Cette erreur causa sa perte. J’étais, au bout d’une seconde derrière lui en position de « tir  et profitai de mon avantage. Son appareil brisé en l’air, descendit en plusieurs « morceaux ; il avait subi le même sort que ses camarades.

« Le combat avait duré en tout quarante-cinq secondes. Les trois biplaces, aux abords « de nos tranchées, furent retrouvés près de Grivesnes, à moins de 400 mètres l’un de l’autre. »

 

On devine aisément notre angoisse pendant cette bataille de l’air, aussi on peut s’imaginer, combien fut grande notre joie dès la chute du dernier avion allemand. Le nom de Fonck était bien dans toutes les bouches, mais nous ne savions pas que Battle, notre ancien camarade, planait au dessus de nos têtes.

Fonck toujours dans son livre, fait ainsi le portrait du capitaine Battle.

 

« Battle, le capitaine de la 103e, porte dans ses yeux brillants la flamme qui brûle son « sang. Il ne peut rester en place. Héros légendaire dans son Bataillon de chasseurs à pied, « blessé sept fois dans la tranchée, on s’étonne qu’un tel type n’y soit pas mort sept fois. »

 

Le 15 avril, le Bataillon était relevé par le 2e bataillon du 125e R.I. Les compagnies relevées gagnent isolément, par le bois de Coulemelle, le point de rassemblement, La Falaise, où les chasseurs ont un repas chaud préparé. Puis les unités attendent l’heure du départ pour Troussancourt où l’on se repose.

Le Bataillon, pendant ces dernières journées, avait perdu, outre notre brave camarade Appy, dont le souvenir reste impérissable : 5 sous-officiers et 39 caporaux et chasseurs tués ; 3 officiers, 5 sous-officiers et 95 caporaux et chasseurs blessés.

Apres une journée passée à Troussancourt, le 17 avril, le Bataillon reprenait sa marche et se dirigeait vers Lihus. Le cantonnement est serré, les compagnies sont mal logées. La division nous informe que ce cantonnement n’est pas définitif. Les deux C.M. vont cantonner à Lihus-le-Petit, et l’on s’installe tant bien que mal.

 

Le 22 avril, notre ami Colignon, organise un service funèbre pour les morts du Bataillon. C’est toujours avec le même dévouement, avec la même activité qu’il prépare ces cérémonies du souvenir.

 

Le 23 avril, le Bataillon est avisé qu’il fera étape  dans la journée du lendemain. Son prochain cantonnement est Songeon, où il doit rester au repos jusqu’au 3 mai.

 

 

EN SECTEUR AUX EPARGES

 

 

Le 3 mai, les compagnies font mouvement par chemin de fer. Le débarquement a lieu à Troussey (Meuse), où le Bataillon cantonne quelques jours, avant d’être transporté en camions-auto jusqu'à Sommedieue, et occuper le secteur des Eparges que nous disputions à l’ennemi en 1915, les Eparges, combats héroïques que la plupart des chasseurs connaissaient déjà par les récits que les anciens avaient pu leur faire.

Mais si le sol affreusement bouleversé, si les ruines informes du village gardaient vivant le souvenir de tant de glorieux et furieux combats, si de tous côtés, on rencontrait encore de petits cimetières témoins de tant de pertes, c’était maintenant le calme le plus complet qui régnait dans tout le secteur. La forêt avait déjà des feuilles, le temps était doux, et par moment, dans le silence des deux artilleries, on pouvait se croire au repos.

 

Cependant de part et d’autre on veillait, et les Allemands l’avaient bien montré déjà pendant la relève du 20 mai en tuant le capitaine Grosdenis, qui se découvrait un peu imprudemment en faisant la reconnaissance du terrain conquis.

 

Puis le 2 juin, l’ennemi lance son fameux coup de main. Après un bombardement d’une violence qui rappelle ceux de 1915, l’ennemi engage le combat à la grenade et réussit à blesser 4 ou 5 chasseurs qu’ils emmènent dans leurs lignes.

Les arrières sont bombardés à obus toxiques et ypérites. Vers 3 h.30, le tir est en décroissance et cesse totalement vers 4 heures. Plus de 5.000 obus sont tombés sur le secteur. Il semble que 14 à 16 batteries amenées spécialement pris part à ce coup de main monté d’une façon colossale, avec un K, et tout en disproportion avec les résultats cherchés et même obtenus.

 

Le 4 juin, le commandant Lamarche, nommé lieutenant-colonel, quitte le Bataillon.

 

Suite : vers la dernière page de l’historique

 

 

 

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