Merci
à Patrick
L’Artillerie de la 69e Division d’Infanterie ne devint 268e Régiment d’Artillerie de Campagne que le 1er avril 1917.
Mais les groupes qui la composaient s’étaient formés et réunis dès le début de la guerre ; ils avaient ensemble pris part à la retraite, à la bataille de la Marne, combattu sur l’Aisne et devant Verdun : l’histoire du 268e R.A.C. commence donc en réalité en août 1911.
Elle s’achève quelques semaines après l’armistice, en janvier 1919, par la dissolution du régiment.
Engagés durant ces quatre années, dans la plupart des opérations du front français, les artilleurs du 268e surent, par leur abnégation, leur endurance, leur entrain courageux dans les situations les plus critiques, mériter à leur corps plusieurs citations à l’ordre de l’Armée et du Corps d’Armée et l’attribution de le fourragère aux couleurs de la Croix de guerre.
La concentration du Régiment fut achevée le 15 août dans la région de marle (Aisne), au nord de Laon.
Il se composait des 30e et 31e
batteries du 46e, et 36e batterie du 44e (1er groupe, commandant Houberdon),
32e et 33e batteries du 46e et 31e du 29e (2e groupe commandant Malandrin), 35e
et 41e batteries du 28e et 37e du 50e, (3e groupe, commandant Fayard).
Le Lieutenant-colonel Florentin, du 46e prit le commandement.
Le 19 et jours suivants
le 1er groupe de division de réserve (général Valabrègue), dont faisait partie
la 69e division d’infanterie, se mettait en route vers le nord à la suite du
18e C.A. Par Harcigny, Neuve-Maison, Sars-Poterie, Sore-le- château et Hestrud,
le régiment gagna la frontière belge et pris position le 23 août à
C’est là qu’il allait recevoir le baptême du feu.
Sa zone d’action s’étendait de Merbes-le-Château à Lobbes, dans la vallée de la Sambre ; il avait pour mission de garder les passages de la rivière de façon à empêcher l’ennemi d’attaquer de flanc le 18e C.A. (5e Armée), dont la gauche tenait Thuin.
A partir de
Mais le soir du 24, la 5e Armée découverte par le repli des Anglais à sa gauche et de la 4e Armée à sa droite, dut battre en retraite.
Laissant devant Bousignies la 31/29 pour protéger le mouvement, le régiment, après avoir dépassé avec de grosses difficultés le village de Cousolre, encombré de civils évacuant les régions envahies et de troupes de toutes les armes, gagna Damousies, Wattignies-la-Victoire, Saint-Hilaire-sur-Helpe, le Nouvion, Esquihéries, wiège-Faty, Renansart et Nouvion-le-Comte, au nord de la Fère (28 août)
Le 29, une attaque était
prononcée en direction de Saint-Quentin pour retarder la poussée allemande sur
l’armée anglaise. Dès
Le 3 on atteignait Montmirail, le 4, Morsains, au nord-ouest d’Esternay. Marches épuisantes de jour et de nuit, coupées d’alerte, de reconnaissances, de mises en batterie pour protéger le repli de la Division, et rendues plus fatigantes encore par l’encombrement des routes, le manque de nourriture et surtout l’angoisse du recul interminable.
Le 5 septembre enfin le régiment gagnait par Courgivaux, la région de Villiers-Saint-Georges, qu’il ne devait pas dépasser : l’armée française tout entière faisait volte-face et, en trois jours de lutte, obligeait l’ennemi, battu et désorganisé, à un recul précipité qui ne s’arrêtera que sur l’Aisne, à 100 kilomètres au nord.
C’était la victoire de la Marne.
Arrivée à villiers-Saint-Georges à 7h.15 du matin, l’artillerie de la 69e division reçut l’ordre de se mettre immédiatement en batterie entre ce village et Brasseaux, de façon à pouvoir interdire par ses feux le passage de l’Aubetin.
Les groupes prirent position au sud de la cote 176, dans l’ordre suivant : 1er groupe, à l’est, chargé de battre le front Saint-Genêt (inclus) – Saint-bon (exclus) – Montceau-les-Provins (inclus) ; 3e groupe à l’ouest, tirant de Montceau-les-Provins à Sancy et sur les passages de l’Aubetin dans le voisinage de la route de Villiers-Saint-Georges à Courgivaux.
Le lendemain matin 6 septembre à 7h.15, le 2e groupe ouvre le feu sur les tranchées allemandes à l’est de Montceau-les-Provins.
A 11h.40, le 1er groupe, mis à la disposition du 3e C.A. pour appuyer son attaque sur Montceau se porte au nord de l’Aubetin, ayant pour objectif Montceau, la station de chemin de fer où les mitrailleuses sont signalées, et l’artillerie allemande placée derrière ce village. Bientôt les 2e et 3e groupes ouvrent également le feu sur cette artillerie par des tirs systématiques à obus explosifs.
A16h.45 ordre était donné de cesser le tir sur Montceau pour permettre à l’infanterie de progresser, et de le reporter, jusqu’à la nuit sur Sancy.
A 20h.30, le 2e et le 3e groupes se mirent en route pour Louan, où ils passèrent la nuit, tandis que le 1er, resté à la disposition du 3e C.A., bivouaquait près du Haut-Charmoy, sur la rive nord de l’Aubetin. Ils avaient eu, toute la journée,à subir les tirs systématiques de l’artillerie allemande lourde et de campagne, le 3e groupe particulièrement qui perdait le commandant de la 35/28, capitaine Rouvillois, l’adjudant Charles, le brigadier Bournand et le canonnier Doucet de la même batterie, ainsi que de nombreux blessés.
Le 7, à 4h.30, le régiment reprit ses positions de la veille, et à partir de 7h.40 se porta en avant : la 69e division progressait en 2e ligne, derrière les 3e et 18e C.A.
A 9h.30, ordre de
doubler l’infanterie et de prendre position au nord du Rû Turenne, vers la cote
184, pour tirer éventuellement dans
Nouveau déplacement à 10h.15,
les 2e et 3e groupes ayant reçu l’ordre d’aller au nord-ouest de Saint-Bon pour
battre le bois au nord-ouest de
Le soir, bivouac aux Chataigniers.
La marche en
avant se poursuivit par les Hublets, Marchais-en-Brie, Artonges, Pargny,
Crézancy, Mont-Saint-Père (le
11, traversée de la Marne à
Le canal de l’Aisne fut franchi au pont de la Neuville (13 septembre).
Averti par une reconnaissance de cavalerie que l’ennemi tenait les bois situés au nord et à l’est de la cote 100 (sud de la route la Neuville – Aguilcourt, le régiment prit ses dispositions pour battre ces bois ainsi qu’Aguilcourt et Merlet avec les 1er et 2e groupes.
La 30/46 surprise en colonne, ouvrit le feu à 1.000 mètres sous les balles allemandes qui lui blessèrent un chef de pièce et 3 servants ; son chef le lieutenant Voituriez, blessé lui-même, continua à diriger sur les fantassins ennemis un tir précis qui les obligea bientôt à se retirer, tandis que le M.P. Schwalm, avec le plus grand sang-froid assurait à lui seul le service et le ravitaillement d’une des pièces. Quant au 3e groupe, mis à la disposition de la 53e D.I. pour agir sur la rive nord de l’Aisne, il alla cantonner à Guignicourt.
Le lendemain 14 toute l’artillerie de la 69e division, y
compris le 3e groupe rappelé de Guignicourt, se mit en batterie entre la
Neuville et la cote 100, ses objectifs étant Aguilcourt et
Mais dès le début de l’après-midi, une contre-attaque obligeait nos troupes à se replier ; repassant alors le canal de la Neuville, le 2e et le 3e groupes s’établirent derrière le moulin de Cormicy, le 1er groupe entre Cormicy et Cauroy.
Jusqu’à la nuit des tirs vigoureux furent dirigés sur les cotes 100 et 91.
Le 15
à partir de
Le tir se reportait le lendemain matin sur la cote 100. Pendant plusieurs jours l’activité du régiment se partagea ainsi entre le camp de César, les cotes 108, 91, 100, soutenant tour à tour l’infanterie de la Division et celle des C.A. voisins dans les attaques et contre les opérations de l’ennemi, profitant ainsi des vues excellentes de la cote 186 pour faire de la contrebatterie observée. Les allemands réagissaient, infligeant aux batteries des pertes sévères : à la 31/29 notamment étaient tués dans la seule journée du 18 le capitaine Tournay, le M.P. Peytot, les cannoniers Claie, Place, Rémy, Richard ; à la 37/50, le 23, les lieutenants Blouet et Nicolas, l’adjudant Lemoine.
Cette dernière unité, très diminuée, fut supprimée le 25. Le 3e groupe se reconstitua à deux batteries en arrière du front, à Bouffigneveux, et vint, le 27, reprendre position sur la pente sud-est de la cote 186.
Peu à peu le secteur se calmait, le front s’immobilisait.
Le 4
octobre, à
Le 1er Groupe s’installe à l’est (les 30et 31/46 au nord de l’Aisne, autour de Soupir ; la 36/44 au coude de la rivière, sud de la ferme de Montsapin) ; à l’ouest le 2e groupe, au nord et au nord-est de Chassemy ; entre les deux, après son retour, le 3e au sud-ouest et au sud de Presles-et-Boves. Nos lignes passaient alors au sommet des pentes qui dominent l’Aisne au nord en avant des fermes de Cour-Soupir et de Folempoise : mais deux violentes attaques contraignirent successivement les deux brigades de la Division à se replier jusqu’à sa rivière : le 30 octobre, les allemands s’emparaient de Vailly ; le 2 novembre, arrivés jusqu’aux pentes boisées qui descendent vers Soupir, ils débordaient les positions des 30 et 31e batteries.
Une pièce avancée de la 31/46, commandée par le lieutenant Génin, fut sortie de son abri : à découvert elle tira sur l’infanterie ennemie toutes les munitions jusqu’à la hausse de 200 m. : après quoi son chef parvint à la ramener dans nos lignes, en lui faisant descendre au moyen de cordes les pentes rocheuses au sommet desquelles elle était placée. Le 1er groupe alla se reformer près de Braisne, au Château de Bellême, et vint, le lendemain (3 novembre), prendre position au sud et à l’est de Saint-Mard pour battre le fond de la vallée, Chavonne et les grottes des Grinons.
L’activité ne
tarda pas à diminuer dans le secteur : la guerre de campagne est dès lors, et
pour longtemps terminée pour
Au sud de la rivière, nos troupes en font autant. Dans chaque batterie les hommes se logent à l’intérieur de grottes naturelles ou d’abris aménagés à quelque distance de la position, tandis que les pièces disparaissent sous d’énormes casemates de rondins ; les liaisons téléphoniques, dans le montage et l’entretien desquelles se spécialise la 5e pièce,se perfectionnent et se multiplient ; le tir de nuit, origine du « barrage », s’organise, chaque pièce étant pourvue d’une consigne écrite à exécuter sur l’ordre du commandant de Batterie ; la surveillance du champ de bataille et l’observation des tirs de l’artillerie ennemie est définitivement assurée par un service d’observateurs permanents de jour et de nuit ; enfin l’artillerie de tranchée est créée (105e demi-batterie du 44, devenue en 1917 105e du 268), pour servir 15 mortiers de 150, puis les canons de 58T : troupe d’élite qui s’illustra par la suite dans tous les secteurs où le régiment fut appelé à agir.
De longs mois
s’écoulèrent, dans un calme relatif, troublé seulement par des bombardements
réciproques et de petites opérations : coup de main allemand devant Vailly la
Au cours d’un tir ennemi sur le 31/29, le
Le
Dès le 22 février, le futur 268e
était relevé des positions de l’Aisne qu’il occupait depuis la fin de 1914, et
était dirigé vers l’est. Après un séjour de quelques semaines au nord du camp
de Chalons, en renfort d’artillerie du 2e Corps de Cavalerie, pendant lequel
seuls le 3e Groupe aux environs de Thuisy, sur des positions mal organisées et
très bombardées, puis le 2e vers Baconne, furent engagés, le 1er Groupe n’étant
placé qu’en 2e ligne devant Sept-Saulx (26février,
Les commandants
des 1er et 3e Groupes, partirent en reconnaissance le 9, à
Nos lignes, sur la rive droite de la Meuse, passaient alors entre les forts de Douaumont et de Vaux, dans le ravin du Baril. Le secteur du 1er Groupe s’étendait entre Fleury et Vaux, celui du 3e entre Vaux et Damloup. Une existence bien différente de celle qu’il avait menée jusqu’alors commençait pour le régiment. Pas d’abris, dans ce secteur bouleversé, encore moins de casemates.
Les hommes se nichent dans les boyaux, dans les trous d’obus : les canons sont recouverts de simples branches destinées à les masquer aux vues des avions ennemis. Les servants sont de garde de jour et de nuit par demi-pièces, toujours prêts à déclancher instantanément le barrage. Celui-ci, la nuit surtout,est presque ininterrompu ; sans cesse les signaux de l’infanterie s’élèvent, fusées rouges, vertes, blanches, se mêlant aux éclairs des départs et des éclatements, et aux lueurs de l’incendie de Fleury. Les batteries tirent jusqu’à 800 coups par jour chacune.
Au bout de 5 jours, les deux groupes étaient relevés, et allaient rejoindre le 2e sur la rive gauche de la Meuse, au bivouac des bois de Sartelles, au sud de Froméréville. Le 22 avril, le régiment prit position dans la région de Mort-Homme : le 1er Groupe au sud d’Esnes et à l’est de Montzéville, le 2e au sud du Bois bourrus, et le 3e au sud de Chattancourt, entre la cote 275 et la ferme la Claire.
La zone d’action du Régiment s’étendait de la cote 304 au Mort-Homme et à Cumières. Les allemands arrêtés sur la rive droite à la hauteur de Vaux et de Fleury, cherchaient à tourner la défense de Verdun par la rive gauche. Sans arrêt s’abattaient sur les lignes françaises des milliers d’obus, pulvérisant les villages, pelant les forêts, effaçant les routes et les chemins, transformant peu à peu la région en un désert grêlé d’entonnoirs, uniformément grisâtre. L’air, empesté de l’odeur des explosifs et des gaz asphyxiants, résonnait d’un perpétuel grondement. Deux fois, le 24 avril et le 23 mai, les Allemands s’élancèrent à l’attaque du Mort-Homme en formations compactes, masses sombres hérissées de baïonnettes, au milieu de la fumée des barrages, des éclatements de grenades et du crépitement des mitrailleuses.
Leurs furieux assauts ne purent avoir raison de la
résistance du 32e C.A., auquel était rattachée la 65e Division. A plusieurs
reprises même des contre-attaques violentes leur arrachèrent le terrain gagné
(prise de
Lorsque le régiment quitta le secteur, le 1er juin, la période défensive de la bataille de Verdun touchait à sa fin ; grâce à l’énergie et à l’opiniâtreté des troupes qui défendaient la place, l’armée franco-anglaise avait pu préparer et déclancher l’offensive de la Somme, obligeant les allemands à abandonner leur attaque sur la Meuse : Verdun était sauvé.
Embarqués à
Blesnes le 4 juin,
les groupes furent transportés à Château-Thierry dans la région de Jaulgonne, sur
Le régiment vécut à nouveau dans la vallée de l’Aisne, pendant toute la fin de l’année 1916, de l’existence facile qu’il y avait menée en 1915.
De loin en loin seulement quelque coup de main venait rompre le calme du secteur, un déplacement apportait un peu de variété à la vie tranquille, mais assez monotone, des batteries (changement de position du 3e Groupe le 18 septembre, du bois de Beaumarais à celui de Gernicourt).
Durant de longs mois, l’artillerie de la 69e Division monta la garde ainsi dans le bois des Buttes et Juvincourt.
Avec l’année 1917 s’ouvre pour elle une période d’activité presque ininterrompue, jusqu’à l’armistice : rattachée en décembre 1916 au 32e C.A. la division allait prendre part aux grandes batailles qui transformeront peu à peu la guerre de tranchées en guerre de mouvement et aboutissant en automne 1918, à la libération du sol français et à la victoire.
Dans la nuit du 3 au
Il était rejoint, le 8 et le 9 février, par les 2e et 3e Groupes.
Après 3 semaines de repos au sud de Château-Thierry, à Essises, Rozoy-Belleval et Ville-Chambon, le régiment revint entre le 2 et le 6 mars, prendre position dans la région qu’il venait de quitter : le 1er et le 3e Groupe à la lisière nord du bois de Gernicourt, le 2e autour de Cormiey. Mais ce n’était là qu’une position d’attente ; immédiatement des positions de batterie avancées furent reconnues en vue d’une attaque prochaine, et les travaux commencèrent : pour le 1er groupe dans le bois Poupeux (est de Gernicourt), le 3e dans le village même. Le 3 avril, ces nouvelles positions étaient occupées.
Entre temps
l’artillerie de campagne de la 69e Division était réorganisée en 268e R.A.C.
(1er Avril), sous le commandement du lieutenant-colonel Lefèvre : 2e Groupe
devenait 1/268 (capitaine Gisselbrecht, puis capitaine Desabaye) ; le 3e II/268
Commandant de Lavalette) ; le 1er III/268 (Capitaine Rosiau, puis capitaine
Berthoin)
Le travail de destructions et de préparation de l’attaque commença bientôt. Si calme jusqu’alors, le secteur prit l’aspect des régions les plus agitées : exécution de brèches dans les réseaux ennemis, entretiens des destructions et tirs de harcèlement pendant la nuit, coup de main sur le saillant du Choléra (10 avril), fausse attaque (11 avril), vérification de barrage roulant (13 avril).
Le régiment devait, le jour de l’attaque, accompagner de ses feux la progression de l’infanterie, et se déplacer derrière elle, groupe par groupe.
Dans la nuit du
14 au 15, les 3 batteries du 3e Groupe vinrent occuper, à 500 mètres des
premières lignes, à l’est du pont de
Le lendemain à
A 8h.40, arrêtée par les tirs de fusil et de mitrailleuse venus de la route de Guignicourt, la reconnaissance dut s’abriter dans la vallée de la Miette, et progresser par bonds, en rampant.
Blessé deux fois, le capitaine Gisselbrecht céda le
commandement de son groupe au capitaine Desabaye, de la 41e batterie. Celui-ci
arrivait à 9h.15 au bois des Vestales. Seule la 43e batterie, sous les ordres
du capitaine Maître et du lieutenant Beluze, avait pu suivre, derrière les
tanks, sous les balles et un violent bombardement par 150 et 210. A
Elle avait perdu 14 hommes et 12 chevaux.
La 41e batterie, sous les ordres du lieutenant Passebois,
n’avait guère dû dépenser moins d’énergie et de ténacité pour s’établir, vers
le soir, dans la vallée de la Miette, à un kilomètre du sud-ouest de
La journée avait été dure pour le régiment ; mais il avait su faire preuve d’une tenue magnifique, que récompensèrent par la suite une citation à l’ordre de l’Armée pour le 1er Groupe, et une à l’ordre du corps d’Armée pour chacun des deux autres.
L’ennemi, auquel la 69e Division avait fait plusieurs milliers de prisonniers et qui avait dû reculer de 4 kilomètres, ne manqua pas de contre-attaquer, le 18 au soir après un violent bombardement : sans résultat d’ailleurs : ses vagues d’assaut, fauchées par le barrage, ne purent aborder la première ligne française. Il se contenta dès lors de réagir par son artillerie en tirs de neutralisation et de contrebatterie, sur le Choléra en particulier, où étaient installés les 1er et 2e Groupes, qui subirent des pertes sévères : à la 43e batterie, le 21 avril, un seul obus blessait le capitaine Maître et tuait le lieutenant Beluze et le canonnier Quillet.
Relevés une première fois le 9 mai, ces deux groupes, après un repos de quelques jours à Rouvancourt et Vaux-Varenne, revinrent prendre position le 16. Le 268e en entier quitta définitivement le secteur le 19 mai.
Passé en revue le 2 juin à Fréloux par le Général Monroë, commandant la 69e division qui décora les fanions des groupes de la croix de guerre qu’ils avaient si bien méritée, le régiment fut dirigé sur le camp de Mailly, et arriva le 15 à Janemey et Donnement (Aube).
Il y passa 3 semaines à reposer hommes et chevaux et à remettre en état le matériel.
Le 5 juillet il se remettait en route et gagnait, par Beuvey, Neuville en Verdunois et le camp des Cinq Frères, le camp de la Béchotte au sud-est de Verdun (13 juillet).
Pour la seconde fois, le 268e venait de combattre dans ce terrible secteur : mais combien différente était alors la situation ! Partout, maintenant, l’ennemi cédait : sa ruée de 1916 l’avait amené jusqu’au pied du fort de Souvillle à 4 kilomètres de la place ; il en avait depuis été rejeté à plus de 10 kilomètres : les forts de Vaux et Douaumont, les carrières d’Haudromont, le village de Bezonvaux et Louvemont, la côte du Poivre, la ferme des Chambrettes, autant de conquêtes pénibles et sanglantes, lui avaient été arrachées en quelques jours, au mois de juin 1917.
Les attaques du 20 août et du 8 septembre, allaient achever de lui ôter à jamais tout espoir d’enlever la citadelle.
Dans la nuit du 16 au 17 juillet le régiment s’établit sur les positions suivantes : 1er Groupe à la lisière nord des bois de la bêche, à 800 mètres au sud au fort de Douaumont : 2e Groupe à l’ouest du fort de Souville : 3e Groupe sur la route de Braz à Louvemont, entre le ravin du bois Carré et le fond de Heurias. Le lieutenant colonel Lefèvre installa son P.C. à l’abri Normandie, dans le ravin de Bazil.
Le 13 août, la préparation d’Artillerie commença. Le front à attaquer était divisé en deux secteurs, ouest et est : le secteur ouest (de la Meuse au bois des Caurières) devait être attaqué en premier : le 268e agissait normalement dans l’autre (des bois des Caurières à Bezonvaux). Un nombre formidable de canons de tous calibres, courts et longs, du 75 au monstrueux 400, avaient été réunis, et se mirent à écraser méthodiquement les positions de l’ennemi : jour et nuit des centaines de batteries déversaient sur lui des tonnes d’explosifs, dans un vacarme ininterrompu.
Le 20 août, puis le 26, nos troupes chassèrent les Allemands de la cote 344 et des bois de Neuville et des Fosses. Le 8 septembre une nouvelle attaque, dans le secteur est cette fois, nous rendit maîtres du bois le Chaume et de toute la crête qui domine au sud le ravin d’Ormes. La bataille de Verdun s’achevait : sur presque tous les points, l’ennemi avait été refoulé jusqu’à ses bases de départ de février 1916.
Relevé le 16 septembre, le régiment gagna par Void et Liffol-le-Grand, les villages d’Andelot, Montaut et Rimaucourt (nord-est de Chaumont, Haute-Marne), où il cantonna jusqu’au 5 novembre, puis la région de Châtenois (est de Neufchâteau)
A part quelques coups de main (sur Remenauville le 12fév.Et le 2 mai : au bois d’Ailly avec la 10e D.I.C. le 10 mai ; sur le saillant du Guichet les 23 et 27 mai), il n’y aurait pas de faits à signaler pour les premiers mois de l’année 1918, que le Régiment passa dans le calme secteur de la Woèvre (janvier-juin), si la division n’avait été mise en liaison avec les premiers contingents de Etats-Unis qui faisaient leur apparition sur le front.
Aux artilleurs incombait la tâche de mettre au courant leurs confrères américains des dernières méthodes de tir et d’observation. Des officiers américains, artilleurs ou observateurs en avion vinrent faire un stage dans un certain nombre de batteries du 268e ; auprès de chacun des groupes d’artillerie américaine était détaché un officier français ; enfin un commandant de groupe français fut chargé de la liaison entre l’artillerie de la 69e division et le général commandant l’artillerie de la D.I. américaine.
Cette collaboration, qui faisait profiter nos nouveaux alliés d’une expérience acquise au cours de trois années de combats, permit aux Français d’apprécier toute la valeur des troupes qui venaient se joindre à eux. La confiance et la victoire de nos armes ne pouvait que s’affermir à leur contact ; par contre et pour les mêmes raisons, se manifestait chez l’ennemi une hâte grandissante de terminer la guerre à tout prix. Une violente attaque en direction de la Marne l’amena, à la fin de mars jusqu’à Château-Thierry. En mai, il tenta par une opération analogue de s’emparer d’Amiens et de Montdidier.
Relevée de la Woëvre, la 69e D.I. fut aussitôt transportée dans cette dernière région.
Embarquée à
Dongermain le 5 juin
et débarquée à Liancourt le lendemain, le 268e vint cantonner en position
d’attente dans
Elle s’en acquitta de telle sorte que le 9 au soir
l’ennemi était fixé sur
Mais ils étaient à bout ; le moment approchait pour eux de la débâcle finale. Tandis qu’ils essayaient par des coups furieux d’élargir les poches creusées dans nos lignes par leurs offensives de printemps vers Château-Thierry et Montdidier, de terroriser la population civile au moyen de la « grosse Bertha » et d’incessants bombardements par avion des arrières, une immense armée se formait dans la forêt de Villers-Cotterêts sous les ordres du général Mangin.
Le 15 juillet le régiment était dirigé vers Pierrefonds, par Compiègne, à la disposition du 20e C.A., puis de la 2e division américaine. En une seule étape (nuit du 15 au 16, et journée du 16 juillet), il gagna la forêt de Retz, qu’emplissait une extraordinaire activité : infanterie allant se mettre en place ; tanks innombrables ; artillerie longue et courte, attelée, portée, à tracteurs, suivie d’interminables colonnes de munitions ; génie, équipages de ponts, cavaliers ; l’énorme et rapide concentration, cachée par la forêt, resta jusqu’à l’heure de l’attaque ignorée de l’ennemi.
Un orage terrible, dans la nuit du 17 au 18, vint à point couvrir le bruit des derniers préparatifs.
Aussi, lorsque le 18 juillet, à
Toujours à la
disposition de la 2e D.I. U.S, le 268 s’établit vers
Le 20, il fut rendu à la 69e D.I. et, remontant vers le nord, alla prendre position autour de Missy-au-Bois. Une âpre lutte s’engagea pour le passage de l’Aisne et la prise des abords de Soissons, au cours de laquelle le régiment eut à subir d’intenses bombardements.
Dans la nuit du 25 au 26 juillet, à la suite d’un tir sur le village de
Vauxbuin, les 3 groupes furent soumis à un marmitage de
Le 2 août, l’infanterie entrait à Belien et Soissons. L’artillerie, suivant aussitôt la progression, vint se placer, le 3e groupe à l’est de la vallée de la Crise, entre Septmont et Noyant-et-Aconin, le 2e sur les pentes sud de la Montagne de Paris. Reconstitué le 8, le 1er Groupe se porta le 11 au nord-est de Vignolles. Une attaque menée le 28 août nous rendit maîtres des faubourgs est de Soissons, au-delà de l’Aisne ; le 31, Crouy tombait à son tour entre nos mains ; le 3 septembre, la Ferme la Perrière ; le 5 enfin, l’infanterie de la 69e D.I. arrivait au moulin de Laffaux.
Le 268 qui n’avait cessé de l’appuyer de ses barrages roulants, la suivit, s’établissant le 3 dans Soissons, le 6 sur le plateau de Crouy, au nord et à l’ouest de la ferme la Perrière.
C’est là qu’il fut relevé le 12 septembre pour aller s’embarquer à Nanteuil-le-Haudoin.
La guerre était
véritablement terminée pour lui. Transporté par voie ferrée jusqu’à Nancy, il
attendit dans le tranquille secteur de la Seille, entre Pont-à-Mousson et
Nomeny, que l’invincible poussée des armées alliées ait achevé de délivrer le
sol français, et obligé l’ennemi à signer l’armistice (
Le 17 novembre, le 268e R.A.C. entrait en Lorraine délivrée et gagnait, par Saint-Avold et Forbach, la région de Neuhkirched dans le territoire de la Sarre, qu’il occupa jusqu’à sa dissolution (janvier 1919).
Ainsi né de la guerre, le 268e R.A.C. disparut avec elle. Au cours de sa brève existence si active, il avait parcouru en tous sens le front français, toujours prêt à faire énergiquement son devoir, toujours égal à lui-même, jamais en défaut. De ceux qui lui ont appartenu, beaucoup sont tombés, sur l’Aisne, en Champagne, à Verdun : leurs compagnons d’armes gardent pieusement leur mémoire : ils savent tout ce qu’ils doivent à leurs efforts et à leur héroïque sacrifice ; ils se souviennent et de ceux qui ont tout donné pour que leur Patrie reste libre et forte.
« Occupant du 1er au 16 avril des positions découvertes, exposées aux vues directes de l’ennemi et battues sans répit par des obus de gros calibre, ont rempli leur mission jusqu’au bout, malgré des pertes sévères. Portés en avant et pris à revers par des jeux de mitrailleuses, n’en ont pas moins puissamment contribué par la précision de leurs tirs à repousser le 18 avril une contre attaque ennemie, donnant ainsi un bel exemple de bravoure et de sang-froid ».
« Le 1er groupe
du 268e Régiment d’Artillerie commandé par le capitaine Gisselbrecht, s’est
porté en avant, le
« Très beau Régiment, qui dès sa formation, sous les ordres du Lieutenant-colonel Lefèvre, a fait ses preuves sur l’Aisne, puis à Verdun, dans des circonstances extrêmement difficiles. Engagé depuis 2 mois dans les opérations les plus actives, a montré sans la moindre défaillance les plus belles qualités d’endurance, d’énergie et de bravoure. Accompagnant son Infanterie au plus près, la soutenant efficacement de ses feux, contribuant pour une large part à ses succès, a toujours conservé un mordant superbe et un moral que l’âpreté de la lutte a exaltés ».
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