HISTORIQUE

DU

353e  Régiment d’infanterie

EPINAL

Imprimerie Paul KAHN

1920

 

 

 

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Merci à Alain (pour l'historique)

 

SOMMAIRE :

Formation et départ. Août 1914

Le Grand Couronné. Août 1914

Saint-Mihiel. Sept. 1914

Le bois Le Prêtre.sept. à mars 1915

Les Eparges. Avril 1915

Combats d'usure. mai-juin 1915

Contre-attaque allemande. Juin- juil. 1915

Repos. Sept. 1915

L'hiver au bois Le Prêtre. Oct. 1915- mai 1916

Dissolution.

 

 

 

 

I. - Formation et départ. Août 1914

 

Le 353° Régiment d'infanterie est formé à deux bataillons à Fontainebleau, les 3 et 4 août 1914. avec des cadres du 153° régiment d'infanterie, des officiers et hommes de complément, provenant de la 5° région de la Seine-et-Oise, Seine-et-Marne.

Parti le 5 août dans la matinée, en tête des trans¬ports de concentration, il gagne par Dijon, Toul, pour être endivisionné dans la 73° division et dans La 145° brigade, et coopérer à la défense active de cette der¬nière place.

Débarqué au sud de l'enceinte fortifiée, il rejoint par étape (trois), la caserne de la Justice, à Toul.

Au cours de son séjour dans la place, continuation de l'amalgame, du perfectionnement, de la mise en mains, jusqu'au 18 août. Puis il est envoyé à l'effectif de 40 officiers, 2029 hommes, 128 chevaux. dans la région nord-est de la place, vers Remenauville, - en liaison avec la 51° division, - pour s'opposer à des troupes ennemies signalées, venant de Metz

 

II. - Le Grand Couronné. Août 1914

 

Les Allemands faisant effort, quelques jours plus tard, sur Nomeny, la 73° division sous le commandement du général Chatelain, fait, le 21 août, face vers l'est, dans la direction de Pont-à-Mousson, en occupant les pentes du Haut-de-Rieupt et Villers-sous-Preny, - voir même, Pont-à-Mousson et Atton.

Puis la mission de la division étant de tenir le plateau de Saizerais, avec les ponts de Dieulouard et de Marbache, le 353° est reporté en arrière sur Villers-en-Haye, qu'il atteint le 22 août après un grand orage.

 

Le 25, pendant l'exécution des travaux de la vallée de l'Ache, ordre parvient de diriger six bataillons de la 73° division, sans chevaux, sous les ordres du colonel

Malagutti, commandant la 146° brigade, pour être embarqués à Liverdun, à destination de Bayon, où les Allemands sont en progrès et essayent de gagner la trouée de Charmes.

Par un détour assez sérieux (Toul, Pont-¬Saint-Vincent, Mirecourt, Epinal), le régiment débarque à la gare de Bayon, le 26, et prend le soir même les avant-postes à Einvaux (sud-ouest de Gerbéviller), en liaison avec la 74° division.

Le 27, la brigade de marche s'embarque à nouveau à Bayon pour regagner Toul, réclamée par le gouverneur : elle débarque à Toul le 28 à l'aube.

Après une grand'halte aux abords de la Croix-de-Metz, le 353° gagne Royaumeix, pour reprendre sa place sous les ordres du colonel de Nansouly. commandant la 145° brigade.

Le régiment procède à l'organisation défensive d'une portion de terrain au sud de I'Ache, jusqu'au 2 septembre, lorsqu'un nouvel ordre d'embarquement lui prescrit de gagner Toul à destination de Jarville. Les Allemands progressaient dans la direction de Nancy, Rosières-aux-Salines (Retraite de Morhange).

Après une nuit de bivouac, aux abords de La Mal¬grange, le 353° est placé en réserve, derrière le 20° corps, au sud-ouest de Saint-Nicolas.

Réclamé de nouveau par le gouverneur de Toul, il allait rejoindre Liverdun, lorsqu'à la suite d'une nou¬velle action sur le front du 20° corps, il reçoit l'ordre de rester sur place jusqu'au 6 septembre, (Bataille de Crévic).

Dans la soirée, vers 21 h. 30, ordre parvient de regagner immédiatement Toul, et d'une seul traite, par une marche de nuit. Traversant Nancy, le régiment gagne Fontenoy, puis, dans l'après-midi du 7, il atteint Jaillon (Marche de 45 kilomètres en 12 h. ½).

 

III. - Saint-Mihiel. Sept. 1914

 

Poussé le 8 vers Domèvre. il y prend les avant-postes, lorsque dans la nuit suivante, le 9 septembre, à une heure du matin, ordre arrive de s'embarquer à nouveau à Toul à destination de Lérouville, pour prendre part à la bataille de la Marne vers Verdun.

La 73° division est appelée, en effet. par le général Sarrail, pour empècher que le 5° corps allemand ne puisse forcer le passage de la Meuse vers Troyon.

Sous le commandement de son nouveau chef, le général Lebocq, le régiment gagne Apremont et sert de soutien à la 2° division de cavalerie ( général Varin), qui opère dans la Woëvre.

Puis. par Saint-Mihiel, la 73° division arrive à tcmps pour dégager le fort de Troyon. L’ennemi, surpris par notre attaque, bat précipitamment en retraite, laissant entre nos mains plusieurs de ses canons de 150, dont ils se servaient contre le fort, et que notre artillerie a démontés.

Poursuivant l'ennemi, le 14 septembre, le régiment, par Dompicrrc-aux-Bois et Dommartin-la-Montagne, atteint la crète est des Hauts-de-Meuse jusque vers les Eparges.

La 23° compagnie, sous les ordres du capitaine Spelzl, est rcstée à Apremont comme soutien de la 2° division de cavalerie : elle eut un engagement de nuit le 10 septembre, à Mézeray et aux environs d'Essay : 4 tués. 10 blessés : elle rejoint le régiment le 16.

 

Relevé le 18 septembre par des éléments du 8° corps, le régiment rejoint à nouveau le nord de Toul, par une marche forcée, car il s'agit de gagner Seichcpray le jour même (35 kilomètres).

Le 19, par Beaumont, il atteint Bernécourt.

Le rappel de la division sous Toul est urgent. L’en¬nemi menace le nord de Pont-à-Mousson, et en partie la région de la Voëvre.

La situation générale, qui s'était aggravée de ce coté, est la suivante: les Allemands reprennent leur manoeu¬vre vers le front de la Meuse, afin d'investir Verdun par le sud.

Ils revenaient sur cette place forte, non plus avec un corps d'armée, mais avec une armée de trois corps d'armée, et leur offensive sera de plus grand style. Au lieu d'être rabougrie, elle sera élargie.

La 2° division de cavalerie, qui, seule, lui est opposée, ne peut tenir le coup. Elle cède donc le terrain progres¬sivement.

D'autres troupes sont appelées. En attendant, la 73° division se porte résolument en avant : ses trois brigades en ligne s'étendant de la forêt de Puvenclle, par Lironville, Flirey, à Beaumont.

Ce mouvement force le 14° corps badois à suspendre sa marche et à lui faire face, c'est-à-dire à servir de flanc-garde au reste de l'armée.

Le kronprinz de Bavière, amputé d'un corps d'armée, ne peut continuer sa marche sur Pagny-sur-Meuse. Essouflé, il s'arrête sur les Hauts-de-Meuse, sans pouvoir pousser plus loin son effort.

Il a une épine dans le flanc ; « La bataille de Liron¬ville est ouverte ».

 

Dès le 20 septembre. le 6° bataillon du 353°, sous les ordres du commandant Leroy, coopère à l'action du 168° sur Limey.

Déployé comme sur le terrain de manœuvre, ce bataillon marche résolument à l'attaque de la position, et malgré le feu de l'artillerie adverse, gagne la forèt de Voisogne, pour déboucher, à la fin de la journée, à l'ouest de Limey, entre cette localité et le bois de Mort-Mare.

Le 5° bataillon se tient à la lisière du bois de la Voisogne, en réserve, à la disposition du général de division.

Au cours de la nuit, les Allemands se sont infiltrés dans le bois de Mort-Mare, y progressent suffisamment pour nous obliger, à l'aube du 21, à céder une partie du terrain.

Disposant d'une artillerie plus nombreuse, nous résistions en arrière de la ligne Limey-Flirey.

Le régiment est remis en réserve aux environs de Noviant-aux-Prés.

La situation étant des plus tendues du côté de Pont-à-Mousson, le 5° bataillon, sous les ordres du chef de bataillon Pourel, est poussé vers l'Est du Bois-Brulé, dans la direction de l'Ache, en liaison avec le 367°.

Il prend part à une petite action défensive et laisse quelques blessés sur te terrain.

Des renforts du 16° corps, étant débarqués dans la journée, s’opposcnt au mouvement en avant de l’ennemi, et la journée se passe sans gros progrès de part et d'autre.

Néanmoins la situation devient sérieuse au nord de Manonville. L'ennemi veut forcer notre ténacité.

Le 22 septembre, le 6° bataillon est mis en ligne et participe à l'attaque générale de la 145° brigade sur Lironville, en liaison à gauche avec des éléments du 16° corps, qui marchent sur le bois de la Voisogne.

Ces éléments étant en retrait et en arrière, le 6° ba¬taillon qui s'élève au nord de l'éperon qui longe à l'est la route Noviant-Limey, est pris d'enfilade par l'infanterie et les mitrailleuses ennemies qui tiennent les bois de la Voisogne et ses abords au sud.

Ce bataillon ne peut progresser, ayant subi des pertes très sévères, principalement entre 16 et 18 heures : il reste accroché, au prix d'héroïques efforts, aux abords sud-ouest du village. sans pouvoir y pénétrer.

Le 6° bataillon, privé de son chef, blessé, reste toute la nuit sur ses positions, face à Lironville.

Le 5° bataillon, rappelé du Bois-Brûlé, où la situation semble s'améliorer au détriment de celle des abords de Lironville, pénètre dans Noviant-aux-prés à 18 heures, y est placé en réserve générale aux abords immédiats de ce village, et en arrière de la crète et à cheval sur le chemin Noviant-Limey.

Le 23 septembre, sous l'action de toute l'artillerie du 16° corps, mise en ligne, crache ses feux sur Liron¬ville, l'attaque générale de la 145° brigade est renouvelée.

Le 6° bataillon couvre cette attaque face au bois de la Voisogne.

Le 5° bataillon reçoit, à 9 h. 20, l'ordre de s’efforcer de déborder par l'ouest les défenseurs de Lironville. Ce bataillon se porte en avant, se déploie à gauche du 346°, gravit les pentes au nord de la route Noviant-Lironville : deux compagnies en ligne: la 18° (capitaine Petit), la 19° (capitaine Bonhomme), les autres en réserve.

Malgré tous leurs efforts répétés, ces compagnies ne peuvent dépasser un petit bois de sapins situé à l'oucst de Lironville.

Vers la fin de la journée, à la suite d'un reflux se produisant à droite du bataillon, la 17° compagnie est déployée à son tour, à cheval sur la route précitée.

Mais l'ennemi est trop fortement organisé : il est appuyé par de nombreuses mitrailleuses, et comme les pertes du régiment sont sérieuses, il ne peut parvenir, de haute lutte, à enlever le village à l'ennemi.

Les pertes, pour l'ensemble du régiment au cours de ces dcux journées ont été sévères.

273 hommes, 10 officiers, dont le colonel Esnol, commandant le régiment ; le commandant Leroy ; 3 capitaines : Hipolite, Lorrain, Le Large.

Le régiment a dû être relevé le soir même par un régiment de la 140° brigade.

Par ses assauts répétés. le régiment a réussi à arrè¬ter, à refouler un ennemi très supérieur en nombre, doté d'une artillerie puissante. Il a obtenu au cours des journées héroiqucs des 20, 21, 22, 23 septembre 1914, dites « de Lironville », un succès magnifique.

Des braves du 353° sont tombés nombreux à Lironville, mais ce sacrifice a permis un résultat d'une extréme importance : il n'était pas vain, puisque le régiment s'y est couvert de gloire.

Le commandement du régiment est exercé à dater de ce jour par le chef de bataillon Pourel.

Au cours de cette première période de guerre, il est à remarquer que ce régiment destiné à la défense mobile de la place de Toul, est au fur et à mesure des besoins, appelé à boucher des trous, soit à Pont-à-Mousson-Nomény, soit à Rozelieures (retraite de Sarrebourg), soit à Saint-Nicolas (retraite de Morhange), soit à Troyon (investissement de Verdun), pour enfin reprendre sa véritable mission à la bataille de Liron¬ville, à la suite de laquelle le 14° corps badois n'a pu prendre part à l'action de Saint-Mihiel, et, ou - même cruellement décimé, - il a dû abandonner, le 23, Lironville et la Voisoigne.

 

 

IV. - Le bois Le Prêtre.sept. à mars 1915

 

 

A partir du 28 septembre commencent en réalité les actions du Bois-le-Prêtre et ses abords. Après Lironville. ce bois va devenir à son tour célèbre et nécessi¬ter, à un moment donné, l'intervention de forces enne¬mies très sérieuses. La garde impériale y viendra à son tour prendre part à la défense de « ce bois de la Mort », comme ils l'ont appelé.

Dès eette date, c'est successivement Mamey, l'auberge Saint-Pierre, la forêt de Puvenelle, qui récla¬ment le régiment pour l'organisation du terrain et la mise en valeur de sa force défensive, puis enfin, Lironville, à la gauche du secteur de la 145° brigade.

Cette situation reste sans changement pendant prés d'un mois, 20 octobre.

Le 5° bataillon, sous les ordres de son nouveau chef de bataillon Roquettaillaide, coopère, le 21, à une attaque sur le bois de Mort-Mare. Pris sous un feu des plus intenses de mitrailleuses ennemies et d'artillerie, l'attaque échoue.

Dès le 27, un ordre prescrit une série d'opérations, ayant pour but de se rendre maitre de la forêt du Bois-¬le-Prêtrc et de la rive gauehe de la Moselle au nord de Pont-à-Mousson.

Commencée le 28 octobre, cette série d'opérations est continuée dès le 30, sur le Quart-en-Réscrve : le 5° batail¬ton coopère à cette action à l'ouest du Bois-le-Prêtre, vers I'auberge Saint-Pierre.

 

Le 31 octobre et le 1er  novembre, la progression continue pour dépasser à droite le Haut-de-Rieupt, au centre la tranchée du Père-Hlilarion. à gauche le Pille¬ment et la tranchée de Fey.

Arrêté sur tout le front devant une solide organi¬sation ennemie, le mois de novembre a été consacré à la préparation de l'attaque de cette position et du perfectionnement de notre nouvelle base de départ.

Période d'attente, de mise en oeuvre de nos éléments de reconnaissance, de nos travaux défensifs et offen¬sifs, et petites attaques partielles pour 1a possession de divers points intéressants du terrain.

En décembre, la position allemande est prise, et nos efforts couronnés de brillants succès locaux.

 

Le 10 décembre, le 5° bataillon appuyant à gauche le 346°, avance sa droite jusqu'à la maison de Pille¬ment.

Le même jour, trois compagnies du 6° bataillon prennent part à une action défensive, venant du coté du Haut-de-Rieupt, en relation avec le 167° , puis, en fin de journée, font face à la maison du Père-Hilarion, à cheval sur la route de Pont-à-Mousson. (Quelques pcrtcs).

Tout le monde organise ensuite le terrain.

Le 16 décembre, le 5° bataillon élargit la position du côté du Mouchoir, en s'installant sur les lisièrcs sud et est du bois du même nom.

Toute la fin de décembre est employée à progresser, à travailler, à préparer l'attaque d'une position alle¬mande plus forte, car l'ennemi aussi n'est pas resté inactif.

Cest sous ces auspices que s'ouvre l'année 1915.

Dès le 12 janvier, le colonel Pourel est cité à l'ordre de l'armée pour ses opérations du mois de novembre et de décembre.

Le 18, des actions séparées et de consolidation du terrain recommencent. Le 5° bataillon doit attaquer à cheval sur la tranchée de la Croix-des-Carmes : une fraction de la 18° compagnie réussit à déboucher, mais ne peut atteindre la ligne ennemie.

Le 6° bataillon, sous les ordres du commandant Matter, est en réserve au sud du Père-Hilarion, prèt a intervenir.

Néanmoins, la position conquise est améliorée et transformée en parallèle de départ.

Après des alternatives d'alerte, de travaux et de repos, les bataillons occupent les tranchées de pre¬mière ligne ou le cantonnement de Montauville.

La fin du mois de janvier se passe sans gros incident. Il y a tout de méme à signaler que chaque jour le régiment subit des pertes. Rares sont les journées où il n'y a point de blessés.

Chaque mois apporte son attaque partielle.

Les glorieuses opérations du 17 au 26 janvier nous avaient rendus maîtres de la partie sud du quart en réserve, et pour compléter ce succès, il restait à délo¬ger les Allemands des positions qu'ils occupaient à l'est sur la crète de la Croix-des-Carmes, d'où ils mena¬çaient notre droite et arrétaient notre progression.

Le 16 février, une nouvelle attaque partielle est ordonnée.

Trois bataillons, sous les ordres du lieutenant-coloncl Pourel, dont le 5° bataillon avec le 6° bataillon en réserve, sont chargés d'emporter la première ligne ennemie.

Appuyés par des canons poussés jusqu'en prcmière ligne, qui crachent à bout portant la mitraille sur les ouvrages et les blockaus allemands, ces fractions s'élancent sur leurs objectifs malgré le terrain obstrué par des obstacles inextricables, l'explosion des four¬neaux de mines, le feu des mitrailleuses qui les prend en écharpe : elles réussissent à droite et gauchc à prendre pied dans les ouvrages ennemis. Une section de la 19° compagnie du 353°, commandée par le sous-lieutenant Bourgon, s'est installé dans une tranchée entre deux blockaus défendus par des mitrailleuses.

 

Assaillie de tous cotés, privée de communication avec l'arrière, accablée sous un feu violent de mitrail¬leuses et de grenades. elle se maintient sur la position conquise. Par trois fois elle est sommée de se rendre. Elle résiste toujours. La nuit venue, le sous-lieutenant Bourgon évacue ses blessés, mais refuse de se replier. A l’aube, seulement, il reçoit l'ordre de ramener dans nos lignes la poignée de braves qui lui reste, et évacue le dernier la tranchée au moment où les Allemands se disposaient à la faire sauter.

Le sous-lieutenant Bourgon obtint la croix des la Légion d'honneur, et sa section fut citée à l'ordre de l'armée à la suite de celle brillante action.

Pertes de ce jour : 43 hommes de troupe.

La fin du mois s'achève ainsi avec les pertes quo¬tidiennes signalées ci-dessus, car les Allemands ne nous laissent aucun répit et ne veulent point nous voir progresser dans cette partie de leurs lignes : ils cherchent même à nous refouler et entreprennent une guerre de mines¬.

C’est ainsi que le 16 mars la 21° compagnie du 353° prend part à une action en vue de repousser l’ennemi qui sest jeté près de nos tranchées dans un entonnoir, creusé par l’explosion d'une de leurs mines souterraines.

L’ennemi est obligé d’évacuer cet entonnoir.

Le 23, l'ennemi fait exploser deux nouveaux fourneaux de mines sans pouvoir passer à l'attaque.

 

V. - Les Eparges. Avril 1915

 

Pour comprendre les attaque à venir du mois d'avrit et de mai, il faut savoir que la 73° division avait reçu pour mission de rejeter les Allemands au nord de Fey, et d'achever la conquête du Quart-en-Réserve pour faciliter les opérations en vue, et l'entrée en ligne du 12° corps.

La première rupture de la hernie de Saint-Mihiel est envisagée. Pendant que cc dernier corps d'armée devait s'élancer sur Remenauville, le bois du Four, le 1er corps devait, des Eparges. s'élancer dans la plaine, au-devant du 12° et se rejoindre dans la direction de Thiaucourt.

La 73° devait coopérer au mouvement général au nord de Fey, sur Viéville-en-Haye et Fey-Norroy.

Le 1er avril, nos tirailleurs sont au nord de la route Fey-Norroy.

Il ne leur reste plus qu'à enlever les tranchées Hors¬ Bois, du Bois-lc-Prêtre, au nord du Quart-en-Réserve. Cette trâche est dévolue au 353°.

L'ennemi s'est épuisé en contre-attaques au cours de cette période et a dù amener six bataillons en hâte sur notre front pour pouvoir tenir le coup.

Des travaux préparatoires sont entrepris au cours des nuits du commencement d'avril, aussi des pertes assez importantes en découlent-elles !

Le 5° bataillon est dirigé sur le secteur Hors-Bois, puis le 6° bataillon y est appelé à son tour.

Du 2 au 14 avril va se dérouler une longue lutte pour la conquète de cette position, lutte à peine inter¬rompue, aussi ardente. sinon aussi heureuse que celles des journées antérieures, au cours de laquelle tous les corps engagés rivalisent d'endurance, d'abnégation et de courage.

A la suite de flux et de reflus, la tranchée Hors-Bois, sud-est, est enlevée jusqu’à sa jonction avec la tran¬chée nord, qui, elle-même, est occupée. Une petite enclave ennemie dans notre nouvelle ligne, menaçante pour nous, est supprimée le 12.

Enfin, le 14 avril, c'est un dernier effort pour chasser les Allemands des derniers éléments de tranchées Hors-Bois qu'ils tiennent encore.

Sans y réussir complêtemcnt, nous enrayons une attaque allemande et tenons

ferme le terrain conquis.

Le 5° bataillon, sous les ordres du chef de bataillon de Roquetaillade, prend part à l'attaque avec le 169°, dans le secteur Hors-Bois, mais ne peut atteindre l'objectif assigné, pris sous un feu violent d'artillerie et de mitrailleuses.

Le 6° bataillon, sous les ordres du commandant Matter, au Quart-en-Réserve, est en butte à plusieurs atta¬ques ennemies, qu'il repousse chaque fois : il y fait même plusieurs prisonniers.

Les pertes de la journée sont sévères pour le régiment : 2 officiers, 160 hommes de troupe.

Ces combats incessants avaient eu pour effet de bou¬leverser complètement nos  tranchées.

 

V I. - Combats d'usure. mai-juin 1915

 

 

L'attaque générale sur Thiaucourt n'ayant pas réussi, la 73° division, portée sur Regnéville, reprend sa mission du Bois-le-Prêtrc.

Après un arrêt pour s'organiser, la lutte va reprendre dès le 1er mai.

Le 6° bataillon, désigné pour étayer nos positions dans le secteur Hors-Bois, attaque, mais pris violcm¬ment à partie par l'artillerie et la fusillade ennemie, ne peut déboucher.

L'opération est reprise le 12, et a lieu principale¬ment à la droite du 6° bataillon qui l'appuie par le feu.

Le 15 mai, à la suite de l’explosion de trois chambres de mines ennemies, enfouissant une quinzaine d’hommes devant le secteur de la 21° compagnie (capitaine Sutils), cette compagnie repoussait une violente atta¬que allemande, tenait la position et était l'objet d'une citation à l'ordre de l'Armée pour son énergique fait d’armes.

Nuit et jour, jusqu'au 17, l'ennemi fait des tentatives désespèrées pour nous disputer le terrain conquis. Ecrasé par des tirs de barrage énergiques, il se heurte partout à une résistance inflexible.

Sous un bombardement extrémement violent qui nous occasionne de très sérieuses pertes, nous organi¬sons néanmoins la position si vaillamment conquise.

Après quelques jours de repos, le 6° bataillon re¬prend sa place dans le secteur Hors-Bois, et procède, 23 et le 24 à des attaques par surprise qui échouent, et où il subit quelques pertes.

Le 27 mai, malgré de très violents tirs nocturnes d’artillerie et d'énergiques contre-attaques ennemies, le 6° bataillon tient toutes les tranchées conquises, malg¬ré les trés grosses pertes subies : 2 officiers. 124 hom¬mes de troupe.

L'ennemi ne veut pas avouer son échec, il réitère ses retours offensifs au cours de la nuit et du lende¬main : le 6° bataillon ne lache pas le terrain.

Le 30, la situation est même assez délicate, mais le 6° bataillon n'ayant pas laché pied, rétablit la situation. Il ne restait plus que 4 officiers à ce bataillon, et une compagnie était commandée par un sergent.

La lutte opiniâtre, pied à pied, ardente, a eu raison des défenses accumulées par les Allemands au quart en réserve, et des efforts désespérés qu'ils ont tentés. Dcux divisions ennemies ont été brisées par la 73°.

Démoralisé par notre sucrès, l'ennemi renonce mo¬mentanément à se mesurer avec elle et nous aban¬donne le terrain conquis.

Officiers et hommes ont été admirables dans cette haute lutte de terrain.

Pour le récompenser, le 6° bataillon est envoyé, le 1er juin, au repos à 15 kilomètres en arrière, à Saize¬rais.

Le 7 juin, le Président de la République, accompagné du général Dubail, commandant le groupe d’ar¬mées, et le général Roques, commandant la 1ére armée. tient à  honorer de sa visite les vaillantes troupes du Bois-le-Prètre .

 

VII. - Contre-attaque allemande. Juin- juil. 1915

 

Le mois de juin se passe sans gros incident. Est-ce le départ des régiments actifs de la place de Toul qui réveille l'animosité des Allemands ? Toujours est-il que vers le 1er juillet, ils semblent vouloir se venger de leurs échecs précédents en profitant de la disparition de certains éléments : 167°, 168°, 169°, pour frapper un coup.

Dès le 29 juin, l'artillerie ennemie redouble ses feux, les pertes qui avaient été insignifiantes les jours précedents, augmentent. Les Allemands tirent également sur les arrières : le 3 juillet, le bombardement devient plus violent sur le secteur de la tranchée des Carmes, les organisations y sont bouleversées.

Le 4, même bombardement, mais plus accentué à partir de midi.

A 14 h. 45, le 6° bataillon, par son feu, arrète net une attaque allemande qui tente de déboucher.

Les Allemands se rendent maître d'une portion de terrain vers la gauche du 6° bataillon, et le 5° bataillon est alerté à Blénod, puis porté sur le Bois-le-Prêtre, et enfin dirigé sur la partie est de ce bois où l'ennemi gagne du terrain.

Sous la direction de son chef, le commandant de Roquetaillade, le bataillon ramène l'ennemi jusqu'au gros Chêne.

En présence de cette attaque allemande à assez grosse envergure, une brigade, puis une division colo¬niale de nouvelle formation est alertée et amenée dans la région de Dieulouard.

Le 6, une vigoureuse attaque allemande se produit sur tout le front : elle échoue grâce aux efforts combi¬nés de l'infanterie et de l'artillerie. L'attaque est repoussée dans la nuit suivante.

Le 5° bataillon, toujours au gros Chêne, soutien l'attaquc : le 6° bataillon, à la tranchée des Carmes résiste aussi énergiquement.

Le 8 juillet, le même bombardement violent reprend pour augmenter d'intensité et même prendre un caractère d'une extrème violence. La première ligne du 6° bataillon est détruite, la position devient intenable. A 16h. 45, l'ennemi sort et réussit à gagner quelques mètres de terrain.

Grâce à son énergie, et malgré ses grosses pertes, ce bataillon réussit à reprendre une partie du terrain cédé, et résiste avec succès aux contrc-attaques ennemies qui se sont multipliées dans la soirée.

De son coté, le 5° bataillon attaque, et l'opération vigoureusement menée réussit à la satisfaction de tous. Ce bataillon retranché sur sa position conquise, résiste à toutes les contre-attaques ennemies.

L'infanterie de marine signalée ci-dessus, alertée, est mise en réserve à Montauville et au Père-Hilarion.

Pertes de ce jour : 310 hommes environ au 6° batail¬lon.

Le 9, ce bataillon, avec l'appui du 37° colonial, livre un combat pied à pied, résiste ainsi aux contre-attaques ennemies et continue à progresser, prenant pied dans unc de nos précédentes lignes.

Les jours suivants se succèdent sous un bombarde¬ment intermittent, sans que l'ennemi ait pu progresser, c'est ainsi que le 5° bataillon supporte une nouvelle attaque le 14 juillet, mais l'ennemi ne peut réussir à prendre pied dans notre position.

Le 18, le régiment se regroupe à l'arrière, le 6° batail¬lon doit, pour se reconstituer, et amalgamer ses ren¬forts, se rendre à Diculouard.

C’est à cette époque que se termine la première partir des opérations du Bois-le-Prêtre.

Après six mois d’efforts continus et tenaces, nous avions affirmé notre ascendant sur l'ennemi par des progrès sensibles et une résistance vigoureuse dans cc bois, que les Allemands étaient habitués nommer avec effroi et où ils ne venaient point avec plaisir.

Malgré l’acharnement des Allemands, peu de terrain fut cédé, les grenadiers de la Garde impériale en savent quelque chose.

 

VIII. -    Repos. Sept. 1915

 

Le 1er septembe, en raison de l'effort considérable et continu fourni depuis un an, dit l'ordre secret du général commandant la 1ére armée, la division est relevée du Bois-lc-Prêtre par la 16° division coloniale, elle vient du repos dans les environs de Toul.

Le 14 septembre, le colonel Pourel, blessé depuis le mois de mai, et qui a tenu à conserver son commande¬ment, est obligé de le céder.

Après un repos de quelques jours, le régiment était sur le point d'être embarqué pour être dirigé sur la Champagne. lorsque le contre-ordre arrive et oblige la division a reprendre le secteur du Bois-le-Prêtre, le 20 septembre.

 

IX. - L'hiver au bois Le Prêtre. Oct. 1915- mai 1916

 

Au cours de cette deuxième partie d'occupation et de défense du Bois-le-Prêtrc, la 73° division a continué à affirmer sa ténacité, son endurance, son esprit de sacri¬fice.

Bien que cette période soit moins mouvementée que la précédente, il n'en reste pas moins acquis que la défense à laquelle elle va être vouée, sera active, offen¬sive même, et que les coups de main se répéteront presque sans interruption.

A la fin de septembre, et au commencement d'octobre 1915, les Allemands sont également sur le qui-vive : aucune journée ne se passe sans un bombardement assez sérieux. soit par minen, soit par torpilles, soit par lacrymogènes.

Souvent mêmes les troupes sont alertées puisque les desseins de l’ennemi ne peuvent être devinés.

Les bataillons se succèdent altcrnativement par pério¬des déterminées, dans le secteur du Mouchoir et de la tranchée des Carmes. Par alternance avec des batail¬lons du 346° et chaque jour amène des pertes quoti¬dicnnes.

Le secteur Bourgon, - nom donné au secteur où eu lieu l'affaire du sous-lieutenant Bourgon, le 16 février 1915 - , est toujours plus particulièrement agité.

Les deux lignes sont si rapprochées que la nôtre est continuellement arrosée par le feu de grenades à fusil, qui rendent ce secteur très pénible.

Les bombardements prennent une très violente intensité les 8, 9, 10, et particulièrement les 11 et 12 octobre : une attaque ennemie est à craindre dans le secteur Carrefour-Mouchoir. Les minen ont détruit nombre d'ouvrages et même enterré quelques hommes, à tel point que dans ces deux jours, 25 hommes sont hors de combat.

Le 14, un camouflet ennemi fait ébouler le parapet de la première ligne du 6° bataillon sur une longueur de 20 mètres environ.

Le 15 novembre. le Président de la République se rend au Bois-le-Prêtre. Par un temps de neige, il le visite et remet, à 500 mètres des lignes allemandes, la croix de la Légion d'honneur au capitaine Speltz, sur la tranchée de Fey.

Au cours de ce mois et du suivant, des tirs de démolition sont prescrits par le général de division, ce qui amène chaque fois des ripostes assez sérieuses de la part de l'ennemi. Des lance-minen ennemis, quand ils sont en action, gênent considérablement les travaux du secteur. Le mauvais temps persistant est cause, de son côté, de nombreux éboulements presque quotidiens.

Des travaux de deuxième position sont entrepris au cours du mois de décembre, à hauteur de Jezainville et du bois de Cuite.

Cette nouvelle organisation défensive de l'arrière est poussée assez activement et est dévolue aux bataillons qui sont au repos à Dieulouard et à Jezainville .

Avec des alternatives de calme et de lancement de minen, le mois de décembre se passe dans l’expectative.

L’enncmi continue aussi concurremment avec nos sapeurs, à se livrer à une guerre de sape et souterraine, ce qui rend les observateurs plus vigilants et plus attentifs.

L'ère des bombardements par grosses torpilles s'ouvre avec le mois de janvier, et chaque fois qu'un tir à démolir est prescrit par le général, il est envoyé une moyenne de 1.800 à 2.000 grosses et petites mines.

L'artillerie qui, de son côté en envoie autant, fait penser à l'ennemi que nous ne voulons point le laisser s'endormir.

La réciprocité des tirs ennemis rendent, les 26 et 27 janvier et 21 février (attaque de Verdun), le secteur du Mouchoir-Carrefour, particulièrement pénible, car beaucoup de travaux et de tranchées sont démolies, et il faut les reconstruire au plus vite.

L'ennemi envoie de son côté simulanément des minen de 245, de 170, des obus de 210, 150, 105 et 77, et ces bombardements durent souvent plusieurs jours.

En mars, deux tentatives de coups de mains ennemis sont enrayés les 13 et 14 mars. L'ennemi devient même plus nerveux en avril, chaque nuit il essaie de deviner nos intentions et envoie des patrouilles sur notre front¬ .

C'est avec ce régime que se passent les mois de février, mars, avril, mai 1916.

Malgré tous ces ennuis, le 353° a continué à assurer 1a garde de son secteur et à le perfectionner. Il a fourni après une fort mauvaise période d'hiver, un très gros effort.

Ses unités sont néanmoins restées en parfait état moral et physiquc, surtout au moment où commençait a se déclancher, fin février, l'attaque allemande sur Verdun.

Tout le monde attendait avec calme la suite des évènements.

 

X. - Dissolution.

 

Le 25 mai, la décision de former la division à deux régiments de trois bataillons parvient au corps.

Le 353° est dissous, au profit des autres régiments de la brigade.

Le 5° bataillon (commandant de Roquetaillade), passe au 346° pour y former le 3° bataillon de ce régiment.

Le 6° bataillon (commandant Matler), passe au 356° pour y former le 3° bataillon de ce régiment.

 

Le 7 juin 1916, le 353° avait vécu, et sa disparition coïncidait presque avec le départ de la division pour Verdun.

A la suite de cette dissolution, le général Lebocq fait paraître l'ordre suivant :

« Au moment où le 353° disparait, le général de division s'incline avec émotion devant son drapeau.

Pendant 22 mois de campagne, devant Toul, sur les côtes de Meuse, en Woêvre, au Bois-le-Prêtre, le 353° a eu sa part dans les luttes engagées par la divi¬sion.

Il a inscrit son numéro sur toutes les pages sanglantes et glorieuses de son histoire : à Lironville, où le 353° s'est noblement sacrifié, au Père-Hilarion, à la Croix-des-Carmes, à l’Eperon, sur tous les champs de bataille, il a fraternellement combattu avec les autres corps de la division.

Bien des braves sont tombés pour l’honneur de son drapeau.

Le 353° n'existe plus, mais son drapeau vivra dans le souvenir ému des anciens du 353° qui a du changer son chiffre, dans le respect recueilli de l'Histoire. »

Si, au 21 février 1916, les régiments du Bois-le-Prêtre, anxieux, sont l'arme au pied, près à intervenir, en cas d'offensive de plus grande envergure, si le canon de Verdun apporte en Lorraine le bruit sourd de ses détonations, le 353°, - bien que numéroté en 346° et 356°, - est prêt à supporter en juin l'effort allemand sous Verdun.

Préparé au Bois-le-Prêtre, il a affronté le secteur de Verdun avec courage. confiance et sérénité.

Que ce soit en 1916, dans le secteur de Vaux-Chapitre, que ce soit à la cote 304 en 1917, que ce soit à Château¬-Thierry, à Condé-en-Brie, dans la forêt de Ris, à Vou¬ziers, en 1918, le 353°, survivant dans ses nouveaux numéros, a prouvé à tous qu'il était et demeurait un régiment glorieux, sur lequel la France pouvait compter.

 

Enfin, au lendemain de l'armistice, les vétérans du 353°, - post numéroté 346° et 356°. - ont eu aussi la joie de pénétrer les premiers dans les provinces reconquises, le 19 novembre 1919, par la route Lorquin, Sarrebourg, Lutzelbourg, Saverne, Hochfelden.

 

 

 

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