CORRESPONDANCE DE PRISONNIER
DE GUERRE De François BERNARD
soldat du 3ème régiment territorial, prisonnier aux camps de Münster et Cottbus
Mise à jour : novembre 2015
« Comme beaucoup
d'anciens combattants de la guerre de 14/18 il était muet sur les souvenirs
accumulés et ce n'est qu'après son décès que j'ai eu connaissance de sa
correspondance, pieusement conservée par sa fille Eliane, mais jamais réouverte...
Je ne sais pas s'il
aurait souhaité voir publié ce qu'il écrivait à sa famille, je jurerais que non,
car il était aussi très pudique. Si je me suis résolue à la mettre sur un site
de mémoire, c'est qu'à moi il est apparu nécessaire de contribuer au
rassemblement des souvenirs de cette guerre qui a fait tant de dégâts matériels
et humains. J'espère qu'il me pardonnera. »
Janine, novembre 2015
François Alexandre Joseph est né le 1 avril 1874 à Genech (Nord).
Classe 1894, Matricule n° 30 du recrutement de Cambrai, cordonnier à Beuvry-la-Forêt (Nord), il est mobilisé au 3e régiment d’infanterie territoriale.
Il est fait prisonnier durant la bataille de Maubeuge.
Prisonnier à Münster, puis Cottbus (en 1917), François est libéré en 1919 et passe finalement par le Danemark pour rentrer chez lui.
Seuls les documents ayant un intérêt pour les autres internautes sont publiés sur cette page, les documents plus familiaux sont volontairement omis.
François BERNARD est décédé en 1963, à 89 ans…
Ma chérie
« Courage et patience. Je suis toujours en excellente santé, mais prisonnier. Donne des nouvelles de suite.
J’espère que tu n’as pas trop souffert depuis mon absence. Je n’ai reçu que ta première lettre du 9 août
Comprend mon impatience d’être libéré. Jusque là nous sommes bien.
J’ai été séparé de Désiré et de Mermier (?) le 11 7bre à Jeumont, je ne sais où ils sont.
Nous sommes beaucoup du Pays. Entre autres : Jules Dobignies, Fois Nanier ; Louis Dubois rue Bouteau. Edouard Hache. Juvénal Sion d’Aix. Auguste Dobignies charron au Sars.
Si possible préviens leur famille qu’ils sont en bonne santé.
Bien le bonjour à tous. Je t’embrasse de bien loin et donne un gros baiser pour moi à nos enfants. »
Ton mari qui t’aime pour la vie,
François
Prisonnier de guerre 1er écrit, 5e groupe au camp de Munster, Wesphalie Allemagne.
Munster
Ma chérie
« Je te répète comme à ma première carte car c’est la seconde : courage et patience.
Donne-moi de suite de tes nouvelles ainsi que de nos enfants et de nos familles. Tu comprendras mon impatience car j’ai appris une partie de ce qui s’est passé chez nous fin septembre ayant vu l’Echo du 2 et 3 8bre.
Que de ruines mon Dieu.
Mais pourvu que je te retrouve en bonne santé avec nos enfants, pour le reste nous en sortirons. Que sont devenus nos frères Louis et Albert je tremble pour eux. J’espère que malgré ces terribles épreuves tu es encore en bonne santé. Je tremble d’horreur rien que d’y penser
Ne t’inquiète pas pour moi je vais on ne peut mieux nous sommes très bien traités surtout depuis samedi dernier nous avons changé de camp nous sommes dans de bonnes baraques en bois il ne me manque absolument rien j’ai encore suffisamment d’argent n’ayant presque pas dépensé.
Si toutefois par hasard notre magasin soit intact soigne bien les marchandises pour qu’elles ne moisissent pas.
Pour le reste j’y mettrai ordre. Nos lettres partent le 1er et le 15 du mois. Répond par lettre ouverte ou par carte.
Ton mari qui t’aime et aspire à te serrer sur son cœur avec nos chers enfants. »
François.
Chères sœurs
« Je suis en excellente santé (mais prisonnier) j’espère qu’il en est de même pour vous malgré ce que vous avez dû voir.
Nous sommes bien traités. Le pain doit être le même que parrain devait avoir. La nourriture est variée, pommes de terre, pois, riz, orge perlé, pommes, soupe aux choux, bœuf, lard, saucisse, boudin, mouton etc.…
Je suis toujours sans nouvelles du pays.
Bien le bonjour à toute la famille. »
Votre frère François
BERNARD Fois , 3ème territorial, 1 chambre, Camp de Rennbahn à Münster, Wesphalie, Allemagne via Genève.
Chers père et mère
« J’espère que malgré les épreuves que vous avez dû traverser vous êtes toujours en bonne santé.
Ne vous chagrinez pas pour moi, ne pensez qu’à vos enfants. J’espère avec l’aide de Dieu rentrer bientôt en aussi bonne santé que je vous ai quittés car il ne me manque rien surtout depuis dix jours que la cantine est ouverte où l’on trouve du pain.
Embrassez Mathilde et tous nos enfants pour moi. »
Votre fils dévoué, François
BERNARD Fois, prisonnier de guerre.
3ème territorial, 1re chambre, camp de Rennbahn à Munster, Wesphalie Allemagne via Genève.
Cette carte est
datée du 7/8/1914. Cependant d’après un autre exemplaire conservé dans la
famille, cette photo a été prise en mai 1915. Il convient donc de lire :
7.8.1915. Elle est envoyée à Edouard HERMAND (c’est le père de Mathilde). Le
texte occupe toute la surface, il n’y a pas d’adresse.
Cher père
« Ayant reçu 2 photo de ma petite famille je vous en envoyé une, certain que ce sera avec grand plaisir que vous recevrez le portrait de votre fille et petits enfants. J’ai v. carte 26-7. J’ai reçu 1 carte de Mathilde 27-6. Tous sont en bonne santé, 1 carte de Céline (*) m’apprend la mort de mon oncle Henri Dubois. Faîtes-en part à tante Joséphine.
Je suis toujours en bonne santé. Bonjour à tous. »
Votre fils dévoué, Louis François. (**)
Note :
Edouard Hermand n’est donc pas à Beuvry où il
réside et où résident aussi Mathilde et ses filles. D’après souvenir familial,
il aurait passé un temps de la guerre à Borre en Flandres. Zone non occupée ? ?
?
(*) : Céline
est une sœur de François
(**) : Louis
fils d’Edouard est au front. François qui écrit est le gendre d’Edouard.
Pourquoi a-t-il signé Louis François ?
(Pas d’adresse
indiquée, texte occupant tout le verso)
Ma chère Mathilde
« J’ai reçu le 23.8 ton 1er colis intact pom , gaufres. chaus. etc…
Père et tous nos parents sont en bonne santé. Julot réclame photo fille. Reçu 1ère carte Marie (*). 1 de Constance et Marie de juillet. 1 de Claudia (*) elle va bien mais je n’ai pas la tienne de juillet, ma chérie.
Laur. Eloir, Ubald Simon, Ed. et Henri Fache, Paradis. Benoit Aug., Ad. Piedanna , Desmons Hect., Pi. Rousselle, Louis Delannoy, Maurice Dufour est avec L. Hermand, Alb. Mallet, Const. Dubois, Aug. Delzenne, Renard et sont tous en bonne santé.
Embrasse nos enf. famille pour moi. Reçois les meilleurs baisers de ton mari. »
BERNARD François
Note :
(*) : Marie
et Claudia sont sœurs de François, Constance est sa belle-sœur.
Il semble que François
donne ici des nouvelles de soldats qui étaient au front et ne pouvaient
correspondre avec leur famille alors que lui pouvait en recevoir des nouvelles
(peut-être de soldats nouvellement prisonniers), car il cite L. Hermand (qui pourrait être Louis ?),
frère de Mathilde et n’a jamais été fait prisonnier, mais était au front.
Chère Mathilde n°10 (dans le coin gauche)
« L. Dobig(nies) (*) permission fait photo avec Albert BERNARD je n’en ai qu’une, date 1er J. ne peut v. l’envoyer, il a écrit dessus.
Parais bon. santé : petit François (**) permis. le 8 m’a écrit.
Les famil. Bouvignies, Flines, P. Claise touj. bon. santé tous.
Alex. Hermand m’écrit p . don. nouv. à sa fem. Clém.
Dupont attend 2ème enf. L’un a 13 mois, son mari mal. J’ai 1 carte Claudia,L. Becquet demande instam. p. Claudia le rejoindre. (***)
J’att. ta carte décembre. Suis touj. bon. santé, hiver pluvieux ici.
Mes petits enf. soyez sages papa rentrera bientôt. Rapportera souvenir.
Si Marie (****) veut rasoirs je paie 2 marks pièce, n’envoie pas d’argent. »
Mille baisers chéris.
BERNARD François
(*) : Louis Dobignies = beau-frère de François,
époux de sa sœur Marie. Albert BERNARD est son frère.
(**) : Petit
François se nomme aussi François BERNARD, il est le fils reconnu d’Albert et de
son épouse Constance Derodde et
sera plus tard tué à la guerre.
(***) :
Claudia = sœur de François, qui écrit, épouse de Louis Becquet.
(****) :
Marie, la dernière sœur de François utilisait des rasoirs car elle était
coiffeuse barbière.
Par ailleurs la
correspondance de François répercute toujours les nouvelles qu’il pouvait
recevoir mais qui ne pouvaient pas atteindre autrement la zone d’occupation.
Texte
sur tout le verso
Chère Mathilde n°12 (dans le coin gauche)
« Reçu 1 lett. Albert il me dit que tous sont en bon. santé. L. et Al. Dobignies, Fois (?), les Debergue, les cousins etc.. Émilie Vanoverschelde, Mme et Mle Pouilly sont arrivées à bon port.
Clémence Dupont a une 2ème fille. Paul Charlon va bien. 1 lett. Louise Fiévet rue Mesnil Paris dit à sa cousine Berthe D. a travaillé p. elle.
Paul décédé à Avort (?) bien des choses à maman Derôme, sincères regrets à Berthe.
Dit aux parents Carneau Falempe que tout va bien.
Ai reçu aujourd’hui un colis conser. de Thérèse Carneau. 1 postal chaussettes de Mlle Gaudin.
Com. tu vois il ne me manque rien.
Gros baisers à toi chérie et à nos enfants. Ai demandé p. Eloi et Joseph.
Ton mari qui t’aime. »
BERNARD François.
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Pancarte aux
pieds du groupe devant : « Les gars du Nord camp de Rennbahn
», le reste du texte illisible.
Münster 31.3.1916
Texte sur tout le verso n°16 coin gauche.
Chère Mathilde
« Ai reçu ta carte du 1er mars et celle de Marie du 12.2 ainsi que Sophie et Robert Dereumez que j’ai envoyés mais je n’ai pas la carte de Céline qui l’accompagnait. il y a bien longtemps que je n’ai eu de nouvelles de Céline. J’ai écrit il y a 8 jours à Thérèse Carneau. Je ne comprends pas Jules Sallez je lui ai écrit 1 fois je n’ai pas eu de réponse mais il doit avoir mon adresse par père mais Berthe doit se rassurer je le crois en bon. santé. J’ai déjà demandé les photos de père. Ai colis du Sart.
Embrasse nos enfants pour moi.
Ton mari, »
BERNARD François
Le destinataire
en est certainement Louis Becquet,
époux de Claudia, sœur de François.
Cher Louis
« J’ai avec plaisir reçu ta carte te sachant toujours en bon. Santé, quoique fatigué tu me dis.
J’ai reçu aussi des nouvelles de Claudia et Marie elles sont en bon. Santé.
Claudia me dit qu’il serait de son devoir de te rejoindre : mais qu’elle ne sait comment. Il ne leur manque rien et attendant avec patience la délivrance, l’heureux jour de te revoir, elles t’envoient toutes deux leurs meilleurs baisers.
Bonjour à tous parents et amis. J’ai 1 carte de Constance tout va bien.
Ton frère dévoué Varlet Alphonse Fois » (*)
Note :
Claudia BERNARD
est l’épouse de Louis Becquet, Marie leur fille. Constance est l’épouse
d’Albert BERNARD frère de François.
(*) :
Pourquoi François a-t-il signé Varlet Alphonse puis son seul prénom en abrégé ?
? ?
Texte sur tout le verso, la carte est adressée à sa fille aînée,
Claire, née le 2/12/1906
Ma chère Claire n°29 (dans le coin gauche)
« Content en recevant ta carte du 26 juillet et que vous soyez tous, maman et toutes nos familles toujours en bonne santé. Il en est de même de moi et d’Alphonse, petit François et Albert.
Je suis étonné qu’au 26, tu n’aies pas encore reçu ma carte que je t’ai envoyée le 9 juin. Je suis content que tu ailles toujours en classe tâche de bien apprendre et d’être toujours bien studieuse, si c’est encore Mme Denis qui te fait la classe souhaite-lui le bonjour de ma part ainsi qu’à tante Thérèse Carneau, je viens de recevoir sa carte.
J’espère bien être près de toi ma petite fille à ta communion, qui j’espère sera plus gaie que celle Camille. (*)
Mes camarades Louis Dob. et L. Her. sont touj. ici en bon. santé. (**)
Embrasse donc bien fort maman, ta petite sœur Eliane et tous nos parents p. moi.
Ton papa qui t’aime et pense toujours à vous trois. »
Bernard François
(*) : Camille = Camille Hermand,
fils de Louis et Augustine Ochin., cousin de Claire.
Il avait fait sa communion cette même année alors que son père
était au front.
(**) : Les camarades Louis Dobignies et Louis Hermand,
cités comme présents au camp, sont en fait les beaux-frères de François, le
premier époux de sa sœur Marie, le second frère de sa femme Mathilde. Ils sont
tous deux au front mais François en répercute des nouvelles, car le Nord étant
occupé par les Allemands.
Cliquer pour agrandir
François est à l’extrême gauche.
Ma chère Mathilde n°36 (dans le coin gauche)
« Reçu ta carte du 4 oct.
Content de la joie de mère seulement pour les autres il n’y faut pas compter c’est maintenant impossible.
Je t’envoie la photo avec camarades ateliers. Tu verras que je me porte touj. bien ainsi que mes amis L. Dobig., Albert, p. Frçois, L. Hermand et tous les autres camarades (*) . Je serais heureux de recevoir la photo de mère et même d’autres.
Albert que j’ai vu il y a 2 jours n’est pas satisfait de ne pas avoir celle de Constance et Florentia. (**)
Il y a eu une visite de docteurs suisses les plus malades vont partir pour la Suisse sous peu. Moi, ce n’est pas la peine de me présenter je suis touj. Trop fort. De gros baisers à nos enfants bien le bonjour à tous.
Ton mari qui t’aime de tout cœur. »
BERNARD Fçois
(*) : Toujours des nouvelles de soldats au front : Louis Dobignies, Albert BERNARD et son fils
François dit petit François, Louis Hermand.
(**) : Constance et Florentia
sont l’épouse et la fille de son frère Albert qu’il n’a sûrement pas pu voir
comme il le dit.
Représentant Angéline BERNARD, sœur de François, assise à
gauche, et son mari : Émile HOT, Constance BERNARD-DERODE et sa fille Florentia (épouse et fille d’Albert BERNARD, frère de
François)
Cette carte est rédigée par Mathilde, épouse de François.
Sur la partie droite du verso : Monsieur François BERNARD, 3ème
territorial. Gefangenenlager 2 Münster in Westfalen. Block 1 chambre 12. Deuschland,
Kriegsgefangenensendung.
Mon cher François
« Heureuse d’avoir reçu avant-hier tes lettre et carte du 25 et 30 mars. J’ai aussi celle du 11. Claire fait sa communion le 20, triste pour aujourd’hui je t’envoie un colis.
Cher François ne t’alarmes pas trop, s’il y a du danger je ferais mon possible pour y échapper et tu sais, ce que Dieu garde est bien gardé j’en sais quelque chose ; plus tard nous causerons. Pour le moment je suis tranquille chez moi.
Si Constant Dupuis est encore avec toi prie-lui le bonjour de Victoire. Constance et sa fille sont parties.
Gros baisers des enfants et de ta dévouée »
Mathilde
Texte sur tout le verso, n° 73, coin gauche
Chère Mathilde
« Je suis en bon. santé et j’ose espérer qu’il en est de même de toi, de Claire et Eliane ainsi que de tous nos parents. C’est avec impatience que j’espère avoir de tes nouvelles dont je suis privé. Depuis carte du 4 juillet je n’ai encore rien reçu, pas plus d’ailleurs que des autres parents. Le travail va régulièrement l’on rentre les avoines.
Deux de mes camarades ici ont reçu des lettres de leur fem. les informant qu’elles avaient reçues des feuilles à remplir de la mairie concernant l’échange de prisonniers ils ont dix à douze ans de moins que moi je me demande comment on opérera pour nous des pays occupés.
De gros baisers à nos enfants ainsi qu’à toi ma chérie »
Ton BERNARD François »
Texte sur tout le verso n°75 en haut à gauche
« Ma chère Mathilde
J’ai reçu ton colis d’août le 1er sept. Avec ta photo et nos deux chères fillettes elles sont jolies com. Deux amours nos chères enfants, j’en suis ravi. Mais par contre pour toi c’est tout autre chose ; ma Mathilde, com. Elle est changée triste, bien maigrie, serais-tu malade que tu ne veux pas me le dire ; il serait temps que tout cela finisse, hélas on n’en voit pas le bout.
Si je pars pour la France viens de suite m’y rejoindre, notre séparation est trop longue pour toi, je ne veux pas que tu t’étiole loin de moi, profitons du présent advienne que pourra, l’avenir est trop incertain. J’ai la carte L. Dob. il attend voir bientôt Marie et ses enfants mais je n’ai pas encore ta carte d’août.
Courage ma chère Mathilde.
Gros baisers à toutes trois.
Ton mari BERNARD François »
N°77 coin gauche
« Ma chère Claire
Aujourd’hui encore je t’envoie ma photo. Elle est totalement manquée il faisait trop de soleil. En voilà trois ou quatre que j’envoie à maman j’espère qu’elle les aura reçues je compte bientôt lui en envoyer une faite seul si toutefois elle est bien car notre photographe ne les réussit pas toujours La tienne avec Eliane et maman m’a fait bien plaisir de te voir avec ta sœur aussi gentilles ; si tu es toutes deux aussi sages que tu es bien maman doit être satisfaite de ses deux petites filles
Embrasse bien fort maman et Eliane pour ton papa qui vous aime bien tendrement toutes trois
BERNARD François »
« Ma chère Mathilde
Je croyais recevoir ta carte d’octobre cette semaine ainsi que ton colis que j’attendais hier, mais je n’ai encore rien autre que la carte de Céline du 11 oct. Par contre je n’ai pas reçu sa carte de septembre. Je t’envoie 3 photos il y en a une pour ma mère et une pour Angéline, j’en enverrai d’autres sous peu pour les autres.
Si c’était com. autrefois je serais aujourd’hui à la ducasse de Beuvry à boire une bonne bouteille en d…(mot manquant) chez ma mère. Quand reverrons-nous tout cela ? nos ( ?) mot qui manque enfants vont-elles me reconnaître ?
De bien gros baisers à toutes trois Ton mari dévoué
BERNARD François »
N° 93 coin gauche
« Ma chère Mathilde
C’est avec tristesse que j’ai appris par ta carte du 7 novem la mort de mon ami Alphonse VARLET. (*)
Depuis qu’il m’avait quitté pour aller au camp 3 je n’avais eu qu’une fois de ses nouvelles. Je t’envoie la photo du monument élevé par souscription au cimetière où reposent les prisonniers qui n’auront pas la joie de revoir leur famille.
C’est hier après le départ du commissionnaire qui a dû te rendre visite que j’ai reçu ta carte et celle de Claudia du 14 nov. qui souhaite le bonjour à tous.
Mes amis Louis HERM., Edouard JUSTE, Louis DOB., Aug. LEGRAND (**) se joignent à moi pour embrasser toutes nos familles.
De gros baisers à Claire, Eliane, ainsi qu’à ma chère Mathilde.
Ton mari tout dévoué BERNARD François »
(*) Alphonse VARLET, soldat au 1e régiment
d’artillerie à pied, mort pour la France le 5 octobre 1917 au lazaret du camp
de Friedriensfeld (Allemagne), mort en captivité. Il
était né à Beuvry-la-Forêt (Nord), le 3 juillet 1876. Il est inhumé au
cimetière des prisonniers de guerre, à Sarrebourg (57), tombe 4530.
(**) : Toujours des nouvelles de personnes qui ne sont pas au
camp : Louis HERMAND est au front. Edouard JUSTE = Edouard HERMAND doit
être en zone libre, à Borre ? Voir notes précédentes.
Puis une série de cartes postales sans texte, que vous retrouverez >>> ici <<<, dont certaines avec groupe de soldats.
« Ma chère Mathilde
Enfin ma chérie je suis sur le retour. Je t’envoie à toi à nos chères fillettes Claire et Eliane mes meilleurs vœux de bon. année et de bon. santé. J’ai quitté Cottbus le 4 janv. pour Stettin où j’ai embarqué le 6.
Le 7 j’ai, après une excellente traversée, débarqué au Danemark où nous attendons un autre navire pour rentrer en France.
J’ai reçu le 5 déc. Ta lettre du 30 oct. Qui m’a bien soulagée de te savoir sains et sauf n’ayant pas de nouvelles depuis ta carte d’août. J’espère embarquer sous quelques jours et ne plus tarder à rentrer près de toi si tout va bien.
Je t’embrasse bien tendrement ainsi que Claire et Eliane »
Ton François
« Ma chère petite Eliane
Ton papa compte bientôt rentrer et avoir enfin le bonheur de te revoir et d’avoir sa chère petite Eliane sur ses genoux. Depuis si longtemps que j’en suis privé, ce bonheur là me sera-t-il bientôt accordé, je l’espère.
J’aurais vu bien du pays et bien des choses que je ne pensais pas voir. Jusque là le voyage par mer 17 heures de Stettin à Helsingor fut excellent. Pas malade du tout. La mer très calme sur un joli bateau nous étions 250.
J’ai fait parti du premier convoi parti du camp de Cottbus 400 pris.
De gros baisers de ton papa »
BERNARD François
« Ma chère Mathilde
Ici la photo du navire suédois Gauthé de Stockolm qui nous a amené de Stettin à Helsingor. C’est un joli petit navire si tu voyais comme c’est bien agencé nous avons été très bien dessus. Ici l’on veut je crois nous faire oublier nos 52 mois de misère belle chambre, bons lits, réveil à 7 h ½ dejeuner à 8 h., thé pain blanc, 1 petite tranche de pain noir, biscuits, beurre, fromage, confiture.
On ne peut tout manger on croit rêver
De gros baisers à Claire Eliane et Mathilde »
De ton François
« Ma chère Mathilde
Nous sommes ici partout les bienvenus partout où nous allons.
Hier soir au souper on nous a distribué à tous de jolis petits cadeaux en souvenir de notre passage au Danemark. Cigares, cigarettes, couteaux, porte-monnaie, etc… J’ai été à la ville hier c’est à 8 kilom. L’on a aussi des permissions pour Copenhague. on peut aller au cinéma, tout cela gratuitement, mais ce n’est pas cela qu’il faudrait, c’est le retour près de toi et de mes chers enfants
Je t’embrasse toutes trois bien fort »
Ton François
« Chère Mathilde
C’est difficile de gagner Boulogne. Parti de Cherbourg le 24 à 1 heure du matin nous restâmes 12 heures à Rouen.
Maintenant nous sommes arrêtés à Serqueux depuis midi. Partirons-nous ce soir ? Nous sommes une centaine dans 3 wagons et voyageons avec les trains de marchandise aussi c’est long. Prends donc patience.
De gros baisers à toi et à nos enfants »
De ton François
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