Les carnets de guerre de Lucienne Courouble  14/18

 

 

I : Période août 1914 à décembre 1916

 

 

Mise à jour : août 2014

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Préambule

 

Lucienne a écrit, au jour le jour sur un cahier et deux carnets, les événements petits ou grands de sa vie sous l’occupation allemande.

Les deux premiers documents ont été recouverts de papier peint et ont été perforés de part en part, ce qui laisse à penser qu’ils ont été cloués et dissimulés sous la tapisserie pour échapper à l’interdiction qui était faite d’écrire.

 

Lucienne a épousé Adolphe COUROUBLE le 25 septembre 1911 à Etrœungt.

En août 1914, deux enfants étaient nés de cette union : Louise et Lucien.

Ce qui est extraordinaire, c’est qu’Adolphe COUROUBLE a, lui aussi, écrit son propre carnet de guerre. Il a été mobilisé aux 100e, puis 126e régiments d’infanterie. Il est mort pour la France à Neuville-Saint-Vaast (62) le 25 septembre 1915.

Il est donc très intéressant de suivre les 2 récits dans le même temps. C’est pour cette raison que j’ai ajouté des liens direct de l’un vers l’autre et réciproquement.

 

Dernière précision, le village d’Adolphe et de Lucienne est Etrœungt, dans le Nord. Une route nationale le traverse conduisant vers Reims. Lucienne y restera durant toute la guerre et verra défiler toutes les troupes militaires françaises et allemandes, avec leur cortège de misère, d’horreur et de pillage systématique…

 

 

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Avertissement

 

Avertissement : la retranscription des noms propres et des noms de hameaux ou de villages ayant été difficile à la lecture, leurs orthographes peuvent être erronées et n’ont fait l’objet que de vérifications partielles.

La recherche des documents a été réalisée par Michel Decaux, la conception du projet  et la transcription des textes par Etienne Courouble, tous deux petits-fils d’Adolphe Courouble.

 

Leur reproduction ou copie même partielle ainsi que la mise sur site Internet sont interdites sans leur autorisation (mails : michel.decaux-arobase-wanadoo.fr, etienne.courouble-arobase-laposte.net)

Retranscrits en Juillet 2002 et complétés en octobre 2003 et publiés avec autorisation sur le site www.chtimiste.com en août 2014

 

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" L 'Allemagne n'a pas le droit de voir dans le maintien de la paix le but de sa politique (...).La guerre est un facteur indispensable de la culture, l'expression même de la vitalité et de la force des peuples civilisés."

      Général Friedrich von Bernhardi (1849-1930), théoricien militaire du pangermanisme.

 

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Lucienne COUROUBLE

Par elle-même

 

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Lucienne COUROUBLE

 

Carnets de guerre, Etrœungt (Nord)

 

Août 1914

Dimanche 16 août 1914

(Adolphe est parti depuis 5 jours à la guerre)

Passage d’autos camions anglaises amenant le matériel de guerre.

Tout le village acclame les conducteurs. On leurs offre des fleurs.

Vendredi 21 août 1914

5 000 Anglais passent et achètent tous les biscuits et le chocolat. Il en loge un millier environ. Nous avons ici, chez nous, deux officiers dont l’un parle le français.

 

À trois heures du matin, alerte ! Le départ est avancé ; ils partent.

L’un deux laisse une canne, en souvenir.

Samedi 22 août 1914

Arrivée du 228ème de Bordeaux (*) qui loge ici. Avons du logement rue du Moulin et ici.

Dans la semaine, passage d’une division d’artillerie. Tous les jours passent des soldats. On apprend que l’ennemi s’avance. Walcourt brûle, dit-on. Les arrêtera-t-on à la frontière ?

 

Depuis huit jours, des émigrés belges passent se sauvant de leurs villages en cendres. La population commence à s’inquiéter.

 

(*) : Elle a raison, voir ci-dessous l’extrait du journal du 228e RI

 

 

Mardi 25 août 1914

Les Avesnois partent d’Avesnes. Les soldats du 228ème reviennent à Etrœungt. L’état-major passe la nuit dans nos deux chambres. Quatre gendarmes soupent ici.

L’un d’eux revient à 9 heures, ayant été surveiller un convoi de munitions que l’on décharge à la chapelle Ignace (route de Fourmies). Beaucoup de personnes du village parlent de se sauver.

Je demande à un officier ce qu’il en pense ; il me conseille, pour les enfants, de partir à quinze ou vingt kilomètres ; les troupes françaises reculant un peu, pour encercler l’ennemi dans la vallée de l’Oise.

Nous passons une nuit blanche.

Mercredi 26 août 1914

Une file incalculable de voitures qui émigrent et cela depuis 8 jours ! Nous partons.

Pendant ce temps les soldats préparent la défense du village. Des meurtrières sont faites dans les murs des côtes menant au bas du village. Le mur du jardin de la rue du moulin est percé de trous, derrière lesquels sont des soldats et peut-être bien des mitrailleuses.

L’artillerie anglo-française est en batterie au Tombois (*) et tire sur l’armée allemande qui est à Solre-le-Château. Le bombardement commence à 11 heures du matin.

Heureusement les Allemands dépassent le but et leurs obus labourent le Calois.

Des Uhlans arrivent, semant le feu. Un groupe de chasseurs à cheval est surpris à Zorées. Là deux hulans tombent.

La maison Fauconnier brûle.

 

(*) : Hameau sur la route de Floyon

Jeudi 27 août 1914

Les Français sont reculés, impuissants devant le nombre. L’armée allemande arrive en triomphatrice. Ils mettent le feu à la Grand Faux, déjeunent chez Algénus Marchand et brûlent la maison avant de partir ; de même à une autre. Ils arrivent sur la place. Le drapeau français flotte encore à la mairie. Ils le font enlever de suite sous peine de fusillade.

Grâce à un conseiller O. Carlier, ils épargnent le village de l’incendie.

Vendredi 28 août 1914

Passent 40 000 hommes, moitié de la route d’Avesnes, moitié rue du moulin. Ils logent tous les jours et pillent les maisons abandonnées. Les caves sont vidées, les armoires bouleversées, le linge sali, piétiné, les literies enlevées, les chaussures, les chemises d’homme, les mouchoirs. Tout leur convient.

Ils vont chercher les instruments de la fanfare, les graphophones du village et font le tour du village en jouant et en dansant. Ils font bombance tous les jours. Tous les jours il faut les loger, les nourrir et subir toutes leurs exigences. Ils sont les maîtres.

 

Quant à nous, depuis le mercredi 26, nous sommes partis.

Pour sauver les enfants (on les disait si barbares), je veux partir.

Où ? Suivre la foule qui se sauve ? Maman parle d’aller à Villers,  papa conseille Rozoy et moi Toulouse… Enfin, on nous assure que les trains partent encore du Nouvion. On décide de partir.

 

Nous partons le mercredi 26 à 9 heures du matin. La route est barrée chez Déramaix (au bas du village). Nous sommes obligés de suivre la caravane par les Bahardes, nous prenons un chemin de traverse qui nous mène au pont de Fontenelle.

Là, attente d’une demi-heure pour laisser passer de l’artillerie qui recule vers le Nouvion. Rattrapons la caravane. À l’entrée du Nouvion, défense d’avancer car la route doit être libre pour l’armée. Des gendarmes menaçants nous font faire demi-tour et nous parquettent trois heures durant dans une pâture sur la route du Nouvion à Hennepieu.

Là coule un ruisseau où l’on fait boire les chevaux et où on lave les biberons. Nous y rencontrons Louis Mercier et ses enfants, Laturasse, Juglard.

 

Pendant le séjour, deux aéros allemands nous survolent. Un cheval s’emballe, vient s’abattre près de nous ; pas d’accident.

Enfin à 5 heures du soir, on nous permet de partir, non pas sur le Nouvion mais vers le bois. Dans le bois on coupe les haies, on tend des fils de fer à ronces.

À la Croix du Grand Veneur, l’état-major cherche sa route. Les officiers français n’ont même pas de cartes. L’ennemi approche de La Capelle ; on nous oblige à partir vers Leschelles. À travers bois pendant 2 heures, nous arrivons à Hennepieu vers 6 h ½ du soir et cherchons un logement.

Trouvons chez Mme Vieville une chambre avec un lit pour maman et ma tante, une paillasse pour Louise et moi, une voiture pour Lucien. Papa et Léon couchent dans la voiture. Passent des voitures. Mme et Mr Hédon Madeleine, Antoinette Renée, les Glim vont coucher à Chigny où ils ne trouveront personne.

Nos hôtes nous donnent des œufs, du lait ; soupons et nous couchons. À peine couchés, des gens de La Flamengrie passent et disent que des maisons brûlent là-bas.

Nuit tranquille, sans beaucoup dormir. Les voitures de la Croix Rouge et les turcos passent la nuit allant vers La Capelle.

 

Nous partons le samedi à 5 heures du matin. (samedi 29 août 1914) Il a plu toute la nuit, le temps est beau, les enfants bien dispos.

Vers 6 heures, nous arrivons sur la route de Leschelles.

Halte !! Passage de troupes allant du Nouvion vers Guise et Sains-Richaumont, tournant encore, par conséquent, le dos à l’ennemi. Sommes obligés d’attendre deux heures durant.

Enfin nous suivons le convoi, nous dirigeant vers Guise, passons à Villers-lès-Guise, rencontrant, çà et là des soldats égarés cherchant leur régiment. Ils paraissent fatigués et découragés.

 

La file d’émigrés augmente toujours. Nous voyons assez bien de connaissances. Arrêtons dans une grosse ferme où Edmond Godbille nous rejoint avec sa famille. Nous ne nous quitterons plus du voyage. Ils ont des provisions de route : fromage, œufs, confitures.

Après avoir fait chauffer du lait pour Lucien et préparé du ‘Château La Pompe’ pour nous, nous nous mettons en route, en tout cinq voitures. On nous dit de nous presser ; l’ennemi arrive, le fort de Guise va tirer sur nous ; tous nous suivent, femmes, enfants, et même un paralytique.

Nous arrivons à Guise vers 4 heures du soir, après bien des attentes et des détours.

Une boulangerie est ouverte : papa y court et attend. J’aperçois la maison Georgette Lefebvre, je rentre et lui achète des biscuits ; elle me donne un pain de 2 livres et me dit avoir confiance, que l’encerclement est fait près de là et qu’un combat décisif refoulera l’ennemi.

Nous ne partirons pas, dit-elle.

Elle ne pensait pas nous suivre la nuit suivante et retrouver plus tard sa maison incendiée. Je sors de chez elle, un soldat me dit :

" Les Allemands sont à 10 kilomètres venant de La Neuville Dorengt.

Passez le pont de bois ; on va le faire sauter ".

 

Je cours à la boulangerie chercher papa qui revient sans pain et demande à Georgette (amie de Lucienne) par quelle route il faut nous sauver:

" Par Marle "

nous dit-elle.

 

L’artillerie anglaise venant de la route de St-Quentin descend à la charge. Lucien y a des battements de cœur. Sitôt son passage, les habitants de Guise eux aussi s’enfuient. Nous partons vers Marle suivant des gens de Glageon accompagnés de leur curé. À gauche, une grosse auto, les roues en l’air ; arrivons à un hameau la Hérie où il y a quelques fermes. Nous arrêtons.

Il est soir, nous couchons dans les voitures, les enfants dorment bien. Dans la grange près de laquelle nous sommes, des enfants pleurent ; un nouveau-né arrive sur la paille.

Quel tableau !

 

Nous sommes peut-être là cent voitures, chariots etc. Près de nous, deux voitures de romanichels. On sommeille à peine deux heures. Des soldats qui passent nous recommandent de souffler les lanternes de crainte de recevoir des obus ; cela ne nous rassure pas.

 

Vers 1 heure du matin, on décide de partir. Des signaux lumineux s’aperçoivent au loin, nous prenons la tête. Un brouillard à n’y rien voir ; papa prend le cheval par la bride. Nous sommes tellement fatigués et avons tellement la tête vide que nous nous figurons voir, dans l’ombre des bois, des cavaliers. Les enfants dorment bien sur nos genoux.

Après quatre longues heures de route à travers champs et bois, nous arrivons à Housset. Arrêtons à une ferme pour avoir du lait. La pauvre femme a sa maison pleine d’émigrants de Solre-le-Château. Elle nous fait du feu et nous vend du lait, du foin pour le cheval.

Une boulangerie est à 2 kilomètres ; nous y allons et rapportons 10 livres de pain. Nous sommes 15 bouches à nourrir et le pain est rare.

 

Nous reprenons la route de Marle. Sur le haut, avant Marle, nous passons devant une haie d’au moins un kilomètre, haie de canons ; cela nous donne le frisson.

Arrivés à Marle, défense d’entrer en ville. On nous fait prendre un chemin à gauche, chemin affreux de terre glaise où les roues s’enfoncent de 20 centimètres ; côtes fantastiques où les hommes abandonnent leurs fardeaux, où les femmes, poussant les voitures d’enfants, pleurent, geignent et y laissent parfois les roues.

Enfin le chemin s’améliore.

Nous y rencontrons Paser et sa famille ; Louis Mercier nous précède. Une maison forestière est là. Beaucoup courent à l’eau. Ces gens ignobles ne veulent pas en donner. Certaines personnes donnent deux sous pour en avoir un verre.

 

Enfin un village est devant nous : Le Bois-les-Parcy. Nous arrêtons dans une pâture pour donner la pitance aux gens et aux bêtes. La place est belle, nous nous y installons ; il y a de l’eau tout près.

La caravane de voitures défile toujours. Beaucoup s’arrêtent au village.

On nous promet du pain pour 6 heures du soir.

Je fais une petite promenade dans quelques rues où je rencontre une dizaine de gens d’Etrœungt qui pensent coucher là. Nous trouvons une petite carte de l’Aisne et examinons où nous nous trouvons.

Crécy-sur-Serre est à quelques kilomètres, je décide tout le monde à aller y coucher, ne désirant pas passer la nuit au coin de ce bois. Nous partons.

 

Arrivés à Crécy, encombrement général. En forçant, nous contournons la ville et arrivons dans une grande terre où il y a déjà deux voitures qui stationnent.

Le soir arrive. On cherche un abri pour les enfants. Les hommes préparent un campement autour des voitures. On cherche du pain pour préparer le souper. Nous rencontrons un habitant de Crécy qui nous offre une paillasse chez lui.

Bonnes gens ! La femme et son neveu nous reçoivent de bon cœur. Nous couchons, maman, Louise et moi, sur un matelas à terre, Lucien sur des couvertures sur des chaises. Cela ne fait pas de mal de s’étendre ; on est si fatigués, que l’on ne sait dormir.

 

Le surlendemain dimanche 30 août 1914, nous allons à la messe où le curé nous fait une allocution de circonstance ; nous y rencontrons Albert Vins et sa famille.

Le temps semble long. Si l’on pouvait, comme on ferait demi-tour pour rentrer chez soi !

Mais impossible, le canon tonne depuis le samedi 29 matin et toute la journée du dimanche. L’artillerie française, étant à Landifayt et à Sains-Richaumont, tirant sur les Allemands à Guise. Ils sont nombreux nos canons, toute la journée du samedi, il en est passés !

Pourvu qu’ils ne soient pas arrivés trop tard !

 

Depuis notre départ, nous n’avons vraiment rien mangé. On décide de faire la soupe. Achat de marmite, assiettes, cuillères ; une poule est achetée, bien vite on la prépare.

Madame Florentin nous laisse sa cuisine. Nous sommes chez nous. Comme cela sent bon ! Que l’on va se régaler ! La soupe à peine cuite, le garde champêtre arrive, ordonnant aux émigrés d’évacuer la ville.

Quel malheur !

On se presse ; on boulotte avec appétit la première soupe depuis huit jours. Il faut bien partir. Nous décidons d’aller le moins loin possible et de ne plus nous éloigner de chez nous, le fameux encerclement se faisant par trop attendre. Des trains pour partir au loin ? Il n’y en a sans doute plus nulle part aux environs. Nous sommes dans l’ignorance absolue de tout ce qui se passe.

 

À Crécy, nous avons vu bien des gens du pays qui sont partis en même temps que nous ou quelques heures plus tard.

Les soldats français logés à Crécy nous disent avoir refoulé les Allemands et les avoir écrabouillés !! Hélas plus on les écrabouille, plus il en revient. D’autres, les zouaves ou Turcos sont désolés :

" Le combat allait bien,"

Nous disent-ils

" Nous avions attaqué, soutenus par l’artillerie. L’ennemi recule, nous les poursuivons ; l’artillerie ne nous suit pas et tire sur nous. Quelle abomination !!

Et tous les jours c’est la même chose ! "

ajoutent ces pauvres soldats.

 

Enfin le dimanche 30 après midi, nous partons avec l’intention de ne plus nous éloigner, arrivons à Barenton-sur-Serre où nous  croisons bon nombre de voitures de ravitaillement. Sur place nous trouvons de la boisson fraîche, cela fait plaisir !

Une cour de ferme nous est offerte, nous nous y installons. Papa va chercher du lait et rencontre une jeune fille de Fontenelle qui le reconnaît. Étant chez des parents, elle lui offre une chambre où les enfants et moi couchons pour la première fois dans un lit depuis huit jours !

Bonne nuit.

 

Le lendemain, (lundi 31 août 1914) prière d’évacuer. Je rencontre une vingtaine d’infirmiers du 201ème régiment et m’informe si Adolphe n’est pas là.

Le docteur me répond :

" Pas de mon bataillon, mais en bonne santé "

 

Histoire de me rassurer !! (*)

Où aller ? Décidons de remonter sur Liesse afin de nous rapprocher de chez nous. Alfred Pénin prend la tête et changeant d’avis, nous mène sur la route de Laon.

Arrivons à Athies, laissant Laon à droite. Une petite pâture à gauche où se trouve un calvaire, c’est là que nous arrêtons. On ne peut plus rentrer à Laon, parait-il. On nous offre pour le soir, une paillasse dans une ferme mais comme il loge déjà six personnes dans l’unique chambre, nous refusons.

 

Vers le soir, arrive un régiment débarquant tout frais du Havre. Le ravitaillement se fait attendre. Les uns courent guillotiner un canard, un lapin, une poule ; les autres allument le feu.

Le ravitaillement arrive. Les soldats viennent nous demander si nous n’avons pas faim. Ils nous apportent des biscuits pour les enfants, des boîtes de conserve, des haricots verts ; un même nous offre la moitié de sa gamelle.

Tout d’un coup un aéro s’envole du camp d’aviation sis sur la droite de Laon ; un autre suit, vingt se succèdent ainsi. Nous demandons aux soldats ce que cela signifie :

" On ne sait plus où se trouve l’ennemi ; les aéros vont à sa recherche "

 

Nous ne croyons pas ces mensonges.

C’est simplement les aéros qui se sauvent car l’ennemi arrive ; aussi nous ne nous soucions pas de rester là à la belle étoile et partons vers 4 heures.

Passons à Vorges, Nouvion-le-Vineux, arrivons à Ursel.

Un homme du pays préfère vendre son vieux vin aux émigrés que de le voir prendre. En achetons quelques bouteilles et remplissons toutes nos bouteilles vides au Château La Pompe, sis sur la place.

Nous descendons dans la ville où un ouvrier d’Etrœungt que nous rencontrons nous conseille de prendre un passeport " sauf-conduit à Mr Mercier et sa famille pour se rendre … à l’aventure. Cachet de la Mairie ".

Avec cela nous sommes crânés.

 

Un régiment d’artillerie nous barre la route. Il faut le laisser passer avec patience. Nous le suivons. Des convois nous dépassent ; nous partons. Devant nous dix voitures de ponts de bateaux.

À un tournant, à travers bois, des coups de feu. Cela devient effrayant. Il paraît qu’un aéro allemand nous survole et qu’on lui tire dessus. Tant mieux ! Enfin la route est libre.

Nous laissons les convois qui stationnent et les troupes qui partent vers la droite et filons, toujours à la grâce de Dieu, vers un village quelconque. Route toujours en plein bois. Ce village d’aspect accueillant est Chevregny.

Nous trouvons chez monsieur Courtefoy une aire à grange, de la paille à discrétion et bon accueil. Sa fille, débitante, nous offre une grande salle où nous soupons.

Arrive le garde-chasse qui nous dit que les Uhlans sont dans les bois voisins. En effet, des ponts sautent aux environs. Nous mangeons les conserves des soldats et (ô délice !) buvons de la bière. Après, retour au dortoir, sous l’aire de grange sur la paille.

Les enfants dorment comme dans leur lit et nous, nous sommeillons un peu.

 

(*) : Adolphe était à cette date à Tulles (Corrèze) depuis le 13 septembre. Il vient d’intégrer le 100e régiment d’infanterie, il dit :

« Couché dans un lit au 100ème. Grande caserne. Ancien établissement religieux. On nous fournit des armes et le campement.

Nous voilà prêts ! Où allons-nous ? Et que me réserve demain ? Et pas de nouvelles de Lucienne ?? »

Voir ce passage dans le carnet d’Adolphe  >>>   ici   <<<

Septembre 1914

Le lendemain matin, (mardi 1 septembre 1914) le patron nous offre sa cuisine et ses fourneaux. On fait pour la première fois du café ; cela fait plaisir.

Après déjeuner, on parle de partir vers Reims par Craonne. En route.

Passons par Grandelain devant le meunier boulanger.

 

À Panoy où nous rencontrons Albert Lahanier qui nous suit. Arrivés à Chamouille, trois zouaves nous disent que deux régiments d’Allemands viennent de traverser le pays venant de Laon. Demi-tour.

A.Lahanier et E.GODBILLE partent au trot, nous les suivons.

 

À Parcy, nous rencontrons un convoi français marchant sur Chamouille ; une cinquantaine d’hommes, revolver ou fusil en main, nous demandent si nous avons vu l’ennemi. Nous leur répondons ce qu’on nous a dit. Suivent une trentaine de chariots, un canon et une centaine d’hommes. Nous continuons notre route sur Chevregny.

 

À Grandelain, papa descend pour avoir du pain. Tout à coup, Boum ! Boum ! Le canon tonne derrière notre dos. Arrivent derrière nous et nous dépassent quelques soldats en vélo, un chariot du ravitaillement qui vient de nous croiser. Nous les suivons, ventre à terre : les chevaux s’emballent ; maman sait à peine retenir le nôtre ; Louise perd son chapeau, Lucien rit toujours.

 

Enfin nous voilà à Chevregny. Notre hôte nous rouvre ses portes. Au moins cent voitures d’émigrés sont à loger. Le maire, vieil alcoolique mais très bon homme, ne veut pas qu’aucun émigré couche dans la rue. Tout le monde trouve donc du logement, tout est calme. Une auto passe… Des " Anglais et des Russes " disent les braves gens.  Illusion ! Papa revient sans encombre avec ses pains. On prépare le dortoir et on se recouche sur la paille.

Bonne nuit malgré tout, l’on est si fatigués !

 

Le lendemain, jeudi matin (3 septembre 1914) papa retourne au pain à Grandelain ; il y trouve deux soldats attablés au moulin :

" Salut messieurs les Anglais "

dit-il.

" Nous pas Anglais, Allemands ! ".

 

En effet les Allemands étaient passés la nuit précédente de chaque côté du village, sans y entrer. Chevregny méritait bien protection pour le bon accueil fait aux émigrés.

 

À midi, le maire fait annoncer que la route étant libre de tout combat, les émigrés peuvent rentrer chez eux. Dieu soit loué !  Nous décidons d’attendre le vendredi matin (4 septembre 1914) pour laisser passer l’encombrement.

Nos hôtes nous vendent un lapin qu’on fricote. Le patron nous offre du cidre et du vin.

Nous allons visiter l’église, très bien ornée. En revenant, Louise a de la fièvre. La diarrhée lui prend et la nuit est assez mauvaise à cause de cela. Des gens de Montrepuis, logés près de nous, doivent repartir à 5 heures du matin. Nous les suivons, passant sans encombre à Lierval, Vorges, Ardon.

Quelques soldats français perdus errent, malheureux, à travers bois.

Nous commençons à rencontrer les troupes allemandes marchant comme pour une promenade. Nous passons à Vaux pour contourner Laon. Toujours des troupes et des convois. Les Allemands nous saluent. L’un d’eux, voyant Louise, lui jette un paquet de petits beurres.

 

Nous arrivons vers 11 heures à Froidmont où l’on fait halte ; les chevaux mangent, les hommes idem. Les autobus allemands succèdent aux voitures, des centaines d’autos suivent. Sont-ils outillés ! Organisés !!!

Un petit temps de calme, nous remettons en route pour Marle.

À l’entrée de la ville, défense de passer. Nous contournons à gauche et arrivons à 5 heures du soir à Saint Gobert-Rougeries. Les chevaux ont fait 45 kilomètres depuis le matin, c’est suffisant. Nous dételons sur place. Les habitants reviennent avec une quantité de sacs de soldats français tués à Voulpaix et environs ; l’école en est remplie.

Nous trouvons un logement dans une ferme, chez Madame Noullet qui nous offre gratis du foin pour les chevaux, de la paille pour nous coucher et un lit où je couche bébé sur le pied, Louise et moi sur le haut.

Le lendemain, samedi 5 septembre 1914

Signal du départ à 5 heures. Nous rejoignons nos gens de Mondrepuis qui reprennent la tête de la colonne. Passons sur le côté de Fontaine-lez-Vervins.

 

À Etréaupont, le pont a sauté. Nous prenons la route de Sorbais et nous rencontrons encore des chariots chargés des produits de leurs vols. Des réveils, des horloges y sont pendus ; voitures de bric à brac. Arrivés chez mon oncle Chantraine, nous déjeunons.

Eux, sont revenus depuis quelques jours. Que c’est bon d’être dans une maison connue ! Que c’est bon de manger à table ! Et que le vin de mon oncle nous échauffe vite les oreilles !

 

Le déjeuner est bref. Tous, nous avons hâte de rentrer.

Nous nous remettons en route pour la dernière fois. À La Flamengrie, triste tableau ! 27 maisons incendiées ; à La Rouillies quatre ; on nous dit qu’au Nouvion il y en a 121 ! Nous rencontrons Octave Huriaux et Garin qui nous disent qu’Etrœungt a été épargné.

Trois fermes incendiées au hameau mais le village indemne :

" N’allez pas chez vous, disent-ils, tout est pillé ; le spectacle est trop triste ! ".

 

Sitôt arrivés, trouvons les grand-mères bien portantes. La maison sur la place n’a aucune perte.

Après dîner, je descends à la rue du moulin avec papa. Quel tableau ! Fumier, infection, pillage, partout. Tout y est pêle-mêle : le linge souillé, la vaisselle salie, les tiroirs du bureau forcés, le mobilier respecté.

Seules les médailles d’Adolphe (argent et vermeil) ont disparu et les lampes électriques sont brisées. La porte du bureau à l’atelier est brisée ; tous les vêtements ont été piétinés, les armoires vidées. La cave est vide, des bouteilles traînent partout, dans le jardin comme sur la route.

À la brasserie, il ne reste que 7 sacs de malt, le matériel a été respecté ; seules les caves, la cuve matière, sont infectées.

 

Le lendemain, on nettoie tout cela.

Je trouve manquants et j’en oublie encore :

 

Outils 50 f

1  marteau

1 tenaille

1 sécateur

1 pince

1 clef anglaise

1 clef à molette            

1 vilebrequin

2 tournevis

1 valet

 

3 paires souliers 25

6 p chaussettes   9

1 p caoutchouc 25                               

1 p jambières  3      

1 vêtement caoutchouc 25   

1 robe 50

3 p pantoufles 6

mouchoirs 5

7 chemises div.

7 chemises noires α- bl.

6 chemises blanches

5 p caleçons 12

1 rasoir 5

savons 2

casseroles 4

1 feuillette vin rouge

100 livres blé 14

40 sacs orge  1 500

1 sac avoine 18

1 litre triple sec

5 litres cassis

12 belles serviettes 15

6 torchons  6

1 chapeau haut  10

2 chapeaux homme 10

1 chapeau femme  10

1 timbale argent 3

1 couvert 5

1 dz. couteaux 6

15 pots confiture  15

Paille

luzerne

1 cric

½ baril graisse

10 kilos tanin

1 feuillette vin rouge

1 quarteau vin blanc

5 litres alcool

15 bouteilles vin rouge fin

1 livre chocolat

6 bouteilles champagne

1 paire gants de laine

1 paire gants peau noir

1 paire gants fourrés laine

1 édredon

30 bouteilles bière                  

10 bouteilles cidre              

3 médailles argent et vermeil

1 appareil photogr. détruit 35

1 jumelle 5                      

4 couvertures laine 120    

1 canne 1 parapluie 6          

1 cheval

2 paires harnais camion

1 table

1 pot plein de sel

1 pot avec 40 œufs

1 cierge bénit

2 tire-bouchons

1 réveil

1 brosse habit

2 brosses à cirer

6 lampes électriques

2 tulipes électriques

 

On rapporte trouvé dans la rivière ?

1 botte-1 tinet- une roue de vélo

 

 

Nous logeons le cheval et la voiture chez Contesse
On se remet doucement mais tous nous avons maigri.

Tous les jours, passage et logement de troupes qui s’installent et pillent les maisons vides.

Jeudi 10 septembre 1914

Lucien perce sa 2eme dent.

Vendredi 11 septembre 1914

Le cheval est réquisitionné par la mairie pour conduire de l’avoine à Esquehies. Léon Garin part. Reviendra-t-il avec son équipage ?

Samedi 12 septembre 1914

En revenant, malgré un sauf conduit, quatre Allemands, revolver en mains, saisissent cheval et charrette. Encore 1 000 Frs à inscrire aux ‘Pertes et profits’.

À la rue du moulin, encore du logement. Papa n’y est pas arrivé que les portes sont enfoncées. Des chevaux partout, des hommes couchent dans le bureau et en haut. Ils soupent. Papa est invité et doit trinquer avec eux ‘à la Prusse’.

Triste chose !

Dimanche 13 septembre 1914

Passage de troupes, musique en tête.

Lundi 14 septembre 1914

Passage de ravitaillement jusqu’au mercredi 16.

Dans la semaine le canon a tonné sur Maubeuge et chose incroyable, Maubeuge s’est rendue !  45 000 hommes prisonniers. Encore une trahison, sans doute !

On raconte qu’un terrain près de Maubeuge avait été acheté par des Allemands qui y avaient enfoui des gros canons de marine qui ont fait sauter ainsi les forts. Il parait aussi que 20 000 hommes n’ont pas tiré un coup de fusil !

 

Voir sur mon site la bataille de Maubeuge  >>>   ici   <<<

Jeudi 17 septembre 1914

Le canon tonne au loin.

On nous annonce que les Allemands ont été jusque Chantilly et ont été repoussés de Creil à Compiègne. Une dépêche du général Joffre annonce un recul de 100 kilomètres du 4 au 12 pour l’ennemi.

On parle que les Russes vont arriver. Est-ce vrai ?

Samedi 19 septembre 1914

Rien de nouveau.

Une dizaine de voitures de la Croix Rouge vient d’Avesnes accompagnée d’infirmiers, dont deux français, qui doivent être bien traités. Un officier en moto me demande la route de Trélon.

Dimanche 20 septembre 1914

Quarante uhlans arrivent le matin, allant vers Floyon ; après 15 autos où il y a des religieuses, des prêtres, des pasteurs. D’autres vont sur Avesnes emmenant des blessés.

 

Le soir, quelques soldats passent par les petits chemins venant de Boulogne allant sur Avesnes. Cartignies et Boulogne en sont remplis ; ils viennent de Belgique, disent-ils.

On nous communique une soi-disant dépêche datée du 19 :

 

" Le général Pau a pris le commandement des troupes du Nord, ayant à sa droite le général French et à sa gauche le général d’Amade. Le milieu des troupes allemandes a été coupé à Brie, l’aile gauche se replie sur Landrecies, le général French a écrasé l’aile droite. La garde impériale anéantie voulait se rendre, la reddition acceptée par les Français est repoussée par les Anglais qui pensaient prendre le Kronprinz à Cambrai.

L’armée allemande bat en retraite sur Bapaume. Les troupes françaises sont en Allemagne ".

(Est-ce vrai ??)

Lundi 21 septembre 1914

La matinée, passage d’Allemands, bien fatigués, venant de Couvin (Belgique), se dirigeant vers Le Cateau. Ne traversent pas Etrœungt mais passent par le hameau de la Cibilette.

Au salut, Monsieur le Doyen, donne les nouvelles officielles suivantes, sous toutes réserves…

 

" Les Serbes sont entrés en Bosnie et en Autriche-Hongrie, marchant sur Budapest. Les Russes ont eu un peu de recul mais remarchent de l’avant, avançant sur les Autrichiens et les Allemands. En France, les Allemands se sont avancés jusque Senlis, Creil et Chantilly. Ils ont été repoussés et s’échelonnent maintenant sur Soissons, Laon, La Fère, Saint-Quentin. L’armée française occupe Montdidier, Lassigny. Une autre aile s’est avancée jusque Château-Thierry, se dirige sur l’Est, par les défilés de l’Argonne.

Grâce aux forts de Verdun, ils n’ont pu réussir. Le Kronprinz a failli être prisonnier mais a pu se dérober au mouvement enveloppant. Un document lu à la chambre des Communes à Londres, explique la tactique française, ordonnant la retraite, ne pouvant résister à l’arrivée foudroyante d’une telle quantité d’hommes. Malgré tout, l’armée allemande vise Paris. Les Belges auraient repris Bruxelles. Une partie des prisonniers de Maubeuge est à Bruxelles, l’autre à Mons. "

Mardi 22 septembre 1914

À 6 heures du matin, 17 autos camions passent, allant sur Avesnes.

 

De 8 à 9 heures passent, allant vers La Capelle, 500 infirmiers et voitures de la Croix Rouge ; suit un long convoi de ravitaillement. Les chevaux paraissent exténués.

Mercredi 23, jeudi 24, vendredi 25, samedi 26 septembre 1914

Passages d’artillerie, d’hommes et de convois du matin au soir. Logement et pillage tous les jours. Ces soldats viennent de Belgique, s’étant déjà battus à Lunéville et Mulhouse. Le canon tonne tous les jours sur Laon
Saint-Quentin.

 

Samedi soir enfin, pas de logement, on respire un peu.

Dimanche 27 septembre 1914

Toujours le canon. Saint-Quentin est repris, dit-on, Valenciennes également.

Les Anglais seraient au Quesnoy (Mensonges).

Lundi 28 septembre 1914

La nuit, 35 autobus passent. (*)

 

Le soir, 76 hussards (*) de la mort arrivent et logent sur la grand-route, le plus près possible de la route de La Capelle. On a la dépêche suivante :

 

" Le général Dufour a battu l’aile gauche allemande, le général French, l’aile droite. Le centre est battu vers Amiens où la garde impériale est anéantie. La révolte à Berlin est confirmée, l’impératrice est en fuite.

Les japonais débarquent à Toulon. La Hongrie se sépare de l’Autriche. Les Français vont prendre l’offensive dans l’Est. On s’attend sur Maubeuge à un important combat. "

 

(*) : Lucienne compte un par un les autobus et les hussards…Elle est très précise…

Mardi 29 septembre 1914

Pas d’autobus. On raconte qu’ils ont été pris.

Rien de nouveau.

Mercredi 30 septembre 1914

Le canon tonne toute la journée.

Des hommes réquisitionnés ici par des troupes de passage, pour aller au Nouvion, sont revenus. Les soldats, qui ne savaient déjà plus marcher ici, sont partis d’une étape à Péronne.

 

Là, les chevaux dételés, attelés à des camions, les conducteurs sont obligés d’aller chercher des blessés sur le champ de bataille et les conduire à Péronne et Saint-Quentin. Le champ de bataille étant Manaucourt, Le Forest ; Villers-Guislain doit être en pleine ligne de feu ! Une trentaine de soldats viennent donner ordre de déposer les armes à la mairie. Une trentaine d’antiquités sont portées, ils les emmènent à Fourmies. Il parait qu’ils enlèvent de Fourmies 34 fours qu’ils avaient installés sur la Place Verte.

Il passe maintenant des Bavarois d’au moins 50 ans, vêtus d’uniformes antiques, vert foncé, petit coupe chou, schakos. Ils commencent, parait-il, à voir que c’est Guillaume qui a déclaré la guerre et sont prêts à mettre crosse en l’air.

On leur raconte qu’ils ne vont pas directement à Paris, à cause du choléra qui y règne.

Octobre 1914

Jeudi 1er octobre 1914

Toute la nuit et toute la journée, le canon gronde tout autour.

 

L’après-midi, on nous dit que les Français sont près du Cateau. Le 84e ayant été 10 fois au feu est retiré à Évreux, décoré de la légion d’honneur !

Vendredi 2 octobre 1914

Va et vient d’autos et d’autobus dans chaque sens.

À midi, une trentaine d’autos remplies d’infirmiers, allant vers La Capelle. On apporte la dépêche suivante :

 

" L’impératrice d’Allemagne prisonnière du peuple. Entre Marle et Vervins, le ravitaillement allemand n’a pu passer. On s’est battu à Coucy, Saint-Gobain, Craonne.

Le fort de Montbriand est repris par les Français ainsi que le camp de Sissonne. Des aéros anglais ont lancé des bombes sur les troupes allemandes. Un obus français a détruit un aéro allemand. Les Japonais sont à Toulon. La Lorraine et l’Alsace sont reconquises. François Joseph est mort ; le général Pau promet à ses troupes d’être à Hirson le 5 octobre. Un avion français a détruit un train de munitions ; un Anglais a fait sauter un train de blessés et d’approvisionnements. Védrines a été fusillé. La cathédrale de Reims brûlée à cause de la télégraphie sans fil. Près de La Fère, les Anglais coupent les vivres.

À Crécy-sur-Serre les Allemands reculent de 15 kilomètres attendent des renforts pour reformer un corps d’armée. À Barenton, l’instituteur français a été fusillé pour trahison. À Laon, beaucoup d’émigrés français et belges ont été tués. Les Anglais sont à Feignies, aidés des Canadiens. Ils se proposent de reprendre Maubeuge sous peu ".

(Fausses nouvelles tout cela).

Samedi 3 octobre 1914

Dépêche du général Joffre :

" L’armée allemande exterminée à Monthermé, les débris se retirent sur Mézières abandonnant canons et munitions. Des souvenirs de guerre, jamais l’histoire n’a enregistré pareille victoire’’.

 

Au Cateau et environs des tas de cadavres de 1 mètre de haut enlevés par des wagons. Les Anglais se séparent des Français et préparent un coup dont le monde entier sera étonné. Combats à Caudry, Clary, Ligny, Bertry.

Toujours le canon tonne.

Dimanche 4 octobre 1914

Toujours le canon.

À midi, des Allemands en vélo viennent annoncer du logement. Les vieux qui sont passés il y a trois jours, reviennent loger 4 ou 5 jours disent-ils. Ils sont habillés de gris, de vert, de velours même. Ce sont des gardes voies dit-on. Ils viennent nombreux chez J. Cuit demandant du café.

Je vais les servir (On voit bien que c’est la ducasse).

Toujours des autos passent et repassent. Certaines ont l’inscription " Paris – London ". Elles sont remplies d’objets volés ou réquisitionnés : pneus, sacs, valises, pièces de toile même.

Lundi 5 octobre 1914

Les soldats arrivés hier sont des pillards de 1er choix.

 

Le matin, ils partent dans les hameaux pour ramasser les chevaux, les provisions et marquer le nombre de bêtes dans chaque ferme. Ils logent dans les écoles et les arrangent d’une belle manière. Tout leur convient. Tout est à eux.

 

La nuit, ils volent partout dans les maisons abandonnées, jusqu’à l’auto du notaire qu’ils essaient de faire marcher.

Ils ramènent 35 chevaux.

Mardi 4 octobre 1914

Même journée qu’hier.

Au moins 60 chevaux, voitures, chariots, ont été ramassés. Des provisions de toute sorte sont ramenées, des harnais, des couvertures, des pièces de cuir, même. On met des affiches punissant de 1 000 FR d’amende tout détenteur d’armes. Tout homme qui donnera asile à un soldat français sera fusillé et la commune en ce cas paiera 2 000 Frs d’amende.

 

Le soir, six autos passent la nuit sur la place près des chariots. Jusqu’ici les maisons du village ont été épargnées de leur visite. Y échapperons-nous ?

Mercredi 7 octobre 1914

Le matin on sonne : avis du Commandant :

" Les habitants doivent se trouver à 9 heures sur la place’’.

 

Ce monsieur nous débite le discours suivant :

 

" Pour éviter le pillage de vos maisons, vous êtes invités à apporter à la mairie des pardessus, des chemises, gilets, pantalons, caleçons, chaussettes, flanelle, couvertures de laine surtout qui seront estimés approximativement et payés par des bons après la guerre. Nos soldats, disent-ils, n’étant pas bien habillés, ayant froid. Puisque vos hommes sont à la guerre, ils n’ont pas besoin de leurs vêtements. C’est donc juste que vous leur donniez ce qui leur manque.

D’autre part, le soldat français a du vin tous les jours, le soldat allemand doit en avoir. Pour éviter que nos soldats vous pillent, nos officiers iront dans vos maisons voir ce que vous avez, noteront le nombre de bouteilles et en cas de besoin nous vous l’achèterons. Pour les autres provisions également, il nous faut voir si le pays a suffisamment de ressources pour vivre, le civil comme le soldat, aussi direz-vous ce que vous possédez. Ce sera inscrit. De même pour les bestiaux, ce sera noté et on ne vous les achètera que si l’on en a besoin. Les gouvernements s’arrangeront entre eux après la paix, ce que je souhaite au plus tôt, pour vous comme pour moi ".

(Amen, disons-nous)

 

Tout le monde se prépare. Il faut commencer à tout cacher. La journée se passe. Nous portons 3 gilets de laine et un veston.

Le canon a tonné tout autour, toute la journée.

Jeudi 8 octobre 1914

Dépouillement des ballots. Il y en a un wagon.

 

Ces messieurs sont difficiles.

Ils ne prennent que les chemises chaudes, les gilets et caleçons de laine, les chaussettes, les couvertures. Tout cela est enlevé dans un chariot. Le reste est remis à la mairie.

Des groupes de soldats accompagnés d’un civil, visitent les maisons, inscrivant les provisions, la cave. Une croix est faite sur les maisons visitées. À la rue du moulin, papa les accompagne. Ils visitent la maison, de la cave au grenier et inscrivent sur la porte " nicht provisions ".

Ici, nous passons à côté de la visite. Peut-être sera-ce pour demain ?

 

Le canon tonne fort. Le soir arrive un chariot de bicyclettes, des chevaux, etc. Des officiers arrivent en auto de La Capelle. Va et vient inusité.

 

Vers 9 h ½ passe une auto éclairée d’une petite lanterne et des cavaliers ; malgré le clair de lune, on ne peut voir par où ils s’en vont.

Au salut, monsieur le Doyen dit que le capitaine lui demande de prévenir les hommes qui sont en âge d’être soldats et qui ne le sont pas, pour une raison ou une autre, doivent se présenter à la mairie avec leur livret afin de savoir pourquoi ils ne sont pas soldats. (Ceci sans doute pour connaître les prisonniers évadés de Maubeuge).

 

Le soir passent sur Montorgueil, Basse-Boulogne des troupes venant de La Capelle. D’autres sont passées à Cartignies.

Vendredi 9 octobre 1914

Le matin, même système que les autres jours ; départ pour le pillage.

On prépare à l’école maternelle 3 porcs à tuer (là est l’abattoir de ces messieurs).

Une garde était établie sur le pont, depuis leur arrivée, qui arrêtait chaque auto, qui devait dire le mot de passe. Autobus vont et viennent ; autos viennent d’Avesnes et de Sains.

 

À midi, ordre de partir.

On court au-devant de ceux qui sont partis piller à Fontenelles et Rainsars, on reconduit Mrs les porcs et nos hôtes se préparent à nous débarrasser de leur présence. Dieu les emmène ! Les chariots arrivent combles et chargés à crouler.

Tout à coup, un bruit d’aéros. Deux, trois aéros venant du sud au N-Ouest. Cela nous fait plaisir ; les officiers allemands courent aux lunettes et se pressent pour partir.

 

Enfin à 5 heures du soir, au son de leur tam-tam, ils s’en vont (disent certains d’eux) chercher à Saint-Quentin 80 000 prisonniers, les conduire en Allemagne et peut-être revenir ici.

D’autres disent aller à ‘Parisse’ faire la police. Paris étant toujours pour ceux-ci, comme pour leurs prédécesseurs à 7 kilomètres d’ici, Etrœungt étant banlieue. La canonnade que l’on entend vient sûrement de ’’Parisse !!!’’.

 

Le soir, on raconte qu’hier à Rocquigny sont passés 5 aéros français.

C’est égal, depuis dimanche, quelle rafle ici et aux environs ! 200 chevaux environ, 10 autos, 20 chariots, beurre, fromages, vélos, couvertures, vêtements, harnais, légumes etc.

Mes brigands ! Ils ont jusque brûlé les bancs de l’école pour cuire leur soupe ! Quelle gloire pour eux !

Samedi 10 octobre 1914.

De nos hôtes d’hier, il ne reste qu’une auto en panne. Une autre a été remorquée la nuit. Celle-ci l’est par un chariot à 10 heures du matin.

La matinée, des télégraphistes grimpent à la poste avec une scie et un grand crochet et coupent les fils.

 

Le soir, nous apprenons qu’une grande victoire a eu lieu à La Bouteille où les Allemands auraient perdu 200 canons et 150 000 hommes hors de combat. Les autres se seraient sauvés sur Glageon, Féron ; d’autres sur Rainsars, Sains. Les gares d’Anor, Sains, Avesnes en emmènent.

Où ??

Certains disent qu’ils se sauvent, d’autres qu’ils vont vers Le Cateau renforcer leurs effectifs. Une déroute complète ! Si c’était vrai !

Les autos de la Croix- Rouge repartent sur Avesnes. Pouvons-nous espérer une délivrance prochaine ?

Dimanche 11 octobre 1914

Le matin, passage d’un convoi et de 1 000 hommes venant d’Avesnes, allant sur La Capelle. Le canon tonne direction Vervins.

Lundi 12 octobre 1914

Dépêche apportée par un Belge :

 

" La bataille de l’Aisne est terminée par un succès des alliés – 20 000 prisonniers allemands, 50 canons saisis, 200 000 hommes hors de combat. Deux trains de munitions pris par nous. Retraite sur Namur et Waterloo. Le gros de l’aile droite se replie sur Mons. Jonction des Belges et des alliés à Tournai ". (*)

 

À 7 heures du soir, 20 autobus filent sur Avesnes.

Monsieur Charolais (c’est le voisin), nous montre une jolie comète en dessous de la Grande Ourse. (**)

 

(*) : C'est évidemment faux, car le front de l'Aisne s'est stabilisé, entrainant la construction massives de tranchées.

(**) : Il s’agit de la comète Delavan, observée en 1914, qui ne reviendra pas avant au moins 24 millions d'années selon les estimations des astronomes.

Mardi 13 octobre 1914

Le Gouverneur d’Avesnes convoque les maires pour le lendemain.

Toujours va et vient d’autos.

 

La nuit passe, allant sur Avesnes, un convoi de ponts de bateaux, de canons, de cavaliers, sans lumière.

Mercredi 14 octobre 1914

Le canon tonne près, de midi à 5 heures tout tremble.

Le maire rapporte les ordres suivants :

 

" Obligation :

1er de mettre les horloges à l’heure allemande sous peine d’amende.

2e faire la classe le lundi suivant.

3e livrer chaque semaine un porc, 20 livres de beurre et 40 fromages pour la table de sa majesté.

Jeudi 15 octobre 1914

L’affiche suivante est posée :

 

" Le Commandant Gouverneur d’Avesnes prévient les communes qu’il a nommé comme maire d’Avesnes : Morty, adjoints Naveau et Landouzy.

- Les établissements et magasins seront fermés à 8 heures le soir (ce qui fait 6 heures au soleil) et la circulation interdite à 9 heures.

- Les habitants sont invités à être calmes et soumis.

- Les réquisitions de voitures, chevaux, vélos sont interdites sans un papier portant le cachet du maire et du Gouverneur "

 

Certaines personnes disent qu’une escarmouche a eu lieu hier au bois de St Michel, que les Allemands font des tranchées et coupent des arbres à Anor, ont fait sauter le pont de Blangis à 4 Km d’Hirson. Des autos passent vers Avesnes, emmenant des infirmières.

 

La nuit, il nous semble entendre des bruits de troupes au loin.

Vendredi 16 octobre1914

Rien de nouveau, on n’entend pas le canon.

Des autobus passent.

Samedi 17 octobre 1914

Pas de canonnade.

Un homme venant dit que les Allemands ont pris Lille dimanche. Une famille de Floyon qui revient de Rouen, a mis un mois pour revenir. Elle a été retenue 3 semaines à Bapaume où on se battait. Elle y a vu des aéros français jeter des bombes et faire sauter des caissons allemands.

Autobus passent.

Dimanche 18 octobre 1914

Le matin passent rue du moulin 300 hommes du génie, allant vers Rainsars. Une infirmière d’Avesnes ayant été en vélo à Paris, rapporte des journaux disant que nos troupes ont toujours les mêmes positions depuis un mois. L’artillerie française étant invisible à l’ennemi.

Le front est Soissons, Vic-sur-Aisne, Bapaume, Péronne.

De l’autre aile, on ne parle pas et pourtant, il y a quelques jours, le canon tonnait tout près.

On dit également que des patrouilles d’uhlans ont jeté des bombes incendiaires à Armentières, Hazebrouck, Cassel.

On dit encore que Saint-Quentin est repris (pour la nième fois). Nous sommes arrivés à ne plus rien croire. La farine va devenir rare, les allemands se réservent tout le blé des moulins qui approvisionnaient le pays. Ils l’ont bien dit :

" Nous vaincus, mais vous mourir de faim ".

 

Trois autos camions remplies de soldats vont vers Avesnes. Six forts d’Anvers seraient pris.

Lundi 19 octobre 1914

On dit qu’un armistice de 10 jours étant demandé par les Allemands, un de 4 leur est accordé. Douai aurait été pris et repris trois fois par les Allemands qui y sont encore maintenant. Lille ne serait pas pris et attendrait 200 000 Anglais ??

 

Il est passé sur Prisches 1 500 Allemands environ allant sur Avesnes ; ici une soixantaine ; les autos passent toujours chargées de butin. Un officier trouvait (il y a quelques jours) assez bizarre qu’étant battus, leur armée n’était jamais poursuivie, que les Français étaient moins prodigues qu’eux de soldats.

Tous assurent que cette tactique permet de tuer le plus possible et de ménager le plus possible les nôtres.

Mardi 20 octobre 1914

Toujours le canon muet.

Le Gouverneur d’Avesnes ordonne de porter le beurre à Avesnes tous les vendredis. Interdiction d’en vendre aux beurriers belges qui passent. Le paiement se fera moitié pour argent, moitié farine. Ils ont réquisitionné tous les blés, les font moudre et vendront la farine contre notre or.

Tout bénéfice pour eux.

Mercredi 21 octobre 1914

On entend un peu le canon. 

Jeudi 22 octobre 1914

Le canon tonne toute la journée. Un aéro passe sur Sains, Avesnes, très haut filant vers Le Quesnoy.

On raconte (invention nouvelle sans doute) que le général Pau marche pour reprendre Lille avec le 3eme corps d’armée, qu’une armée belge marche sur Maubeuge. Certains disent avoir entendu à 6 heures du matin une fusillade vers le Nouvion.

Toujours passent des autobus.

Vendredi 23 octobre 1914

Canon assez près toute la journée direction Cambrai, Le Cateau, Cambrai. Les autos vont et viennent à toute vitesse, chargées de tables, mobiliers.

Pillage des maisons non habitées.

 

Papa va à Avesnes avec Garin pour avoir un bon pour le cheval. Convoqués à 9 heures du matin, le Gouverneur les reçoit à 4 heures (Monsieur se repose à ses heures..) les interroge et les renvoie. Il exige à partir de dimanche un otage pour trois jours, un autre le remplaçant 3 jours après et nourri aux frais de la commune. En supplément, une vache par semaine.

Les camions ne passent pas.

Samedi  24 octobre 1914

Journée calme.

On entend sur Laon le canon. Il paraît qu’hier le combat était à Hanappes où étaient les Allemands où ils ont perdu beaucoup d’hommes. Un combat aurait eu lieu également à Arras. Des omnibus passent remplis de soldats et retournent à vide.

Il paraît que le Gouverneur est à la chasse au Nouvion. Il a si peur pour sa peau qu’il veut faire combler le souterrain de la sous-préfecture.

Dimanche 25 octobre 1914.

Les appétits de ces messieurs sont de plus en plus forts. On parle qu’ils enlèvent dans les villages voisins, les hommes de 16 à 45 ans.

Le canon s’entend, comme hier, au loin.

Depuis hier, il est repassé 10-20 soldats perdus qui s’en vont sur la Belgique. Quelques autos vont et viennent, plus d’autos camions.

À Avesnes, ils affichent des succès complets : les Japonais retournés chez eux, les Russes exterminés, la flotte anglaise coulée par eux.

(Quel culot !!).

Lundi 26 octobre 1914

Des autos, genre nouveau, drapeau bavarois, passent.

À Mondrepuis, les hommes doivent aller tous les jours près de Laon chercher des blessés, pour les embarquer à Hirson au train. Relativement aux leurs, nos pertes seraient minimes.

Le général Pau use de finesse avec eux ; il aurait fait brûler quantité de meules ; l’ennemi voyant un incendie croit le village occupé par ses troupes, s’avance et est ainsi pris sans combat. Les fils télégraphiques auraient été coupés à Aulnoye. (Bébé dit : « Maman, Mamin »)

 

(*) : Lucien a 8 mois

Mardi 27 octobre 1914

Une trentaine de gendarmes viennent à La Rouillies et Floyon chercher après des armes ou des hommes. Ceux-ci se sauvent. Quelques uns toutefois sont emmenés.

Ordonnance de Monsieur le Major Von Moeking, Gouverneur d’Avesnes :

 

" À partir de demain, à 9 heures du matin, les fermiers et propriétaires devront conduire la moitié de leur lait à la laiterie d’Orniaux. Paiement comme d’habitude. "

 

Le mark, maintenant est diminué de 10 centimes, ne vaut plus que 1 Fr 25. Nous avons un bon pour le cheval. Mme Greffe (secrétaire de mairie) le lit :

 

" Le Gouverneur reconnaît qu’on nous a pris un cheval et une voiture et souhaite qu’il nous sera rendu.

Avec cela nous pourrons en racheter un ! "

Mercredi 28 octobre 1914

On raconte qu’un général Bavarois s’est rendu à Namur avec 60 000 hommes ne voulant pas marcher contre la reine des Belges. Il repasse sur Anor des soldats retournant sur la Belgique.

Le Gouverneur fait annoncer :

 

" Obligation de déclarer les autos, motos pour le lendemain et de conduire à la mairie tous les vélos restants dans le pays sous peine d’amende. "

 

Demain, que nous voleront-ils encore ? Les pigeons doivent être tués.

Jeudi 29 octobre 1914

Espoir ! La matinée, il repasse onze Allemands, puis une centaine, bien fatigués, boiteux, chantant malgré cela “Gloria Victoria’’. Mensonge !

On confirme qu’ils sont en déroute. (*)

Depuis lundi, il en repasse dans tous les petits chemins. Il paraît qu’un corps d’armée français vient de Givet, qu’il y a de Paris à Saint-Quentin 500 000 hommes et 200 000 de Dunkerque à Lille. On raconte que 150 000 Allemands ont été noyés à Anvers.

 

(*) : C'est évidemment faux, car le front de l'Aisne s'est stabilisé, entrainant la construction massives de tranchées.

Vendredi 30 octobre 1914

Le canon a grondé toute la nuit et toute la journée.

 

À 11 heures, 6 détonations formidables sur Hirson. On dit que ce sont les ponts de Vimy, Effry qui sautent. Il paraît que le nombre de vélos conduits à Avesnes est incroyable.

Encore un nouvel avis : interdiction d’exporter beurre, fromages, bestiaux.

Samedi 31 octobre 1914

Toujours le canon dans la même direction.

 

Vers 11 heures, encore une détonation, comme hier. Lundi, la commune doit fournir 200 cochons et un veau en plus toutes les semaines. (Cette semaine la vache a été remplacée par 10 bouteilles de champagne pour Monsieur le Gouverneur !!).

La commune doit également payer les contributions qu’elle redoit à l’état. Les habitants devront montrer leurs feuilles de contributions et leurs reçus. 

Novembre

Dimanche 1er novembre

Rien de nouveau – Toujours le canon.

Dépêche (fantaisiste sans doute) du 24 octobre : lancée d’un aéro anglais à Grandieux (Belgique) :

 

“Brave nation Belge, l’heure de la délivrance pour vous sera bientôt venue. Je tiens à vous mettre à l’abri des méfaits de la guerre. Nous avons eu sur le front du Nord de la France une grande victoire. Vous devez vous attendre à voir sous peu le passage de l’ennemi. Mon rôle est de vous avertir que des aviateurs anglais survolent les troupes ennemies pour y jeter des bombes et que des autos mitrailleuses pourront passer à proximité de vos foyers. Restez donc calmes et chez vous le plus possible au moindre bruit des moteurs.

On vous a parlé d’Anvers ; 7 forts sont réduits. Vos frères, pères et enfants se sont retirés sur Ostende laissant aux alliés le soin de la défendre. Patience, braves Belges, des bruits de révolte en Allemagne sont éminents ; l’heure de la délivrance sonnera bientôt.’’

Lundi 2 novembre

Le canon gronde sur St Quentin.

Metz et Strasbourg seraient repris nous coûtant 80 000 hommes. Les Allemands disent avoir forcé nos lignes à Soissons.

Mardi 3 novembre 1914

Le canon tonne direction Cambrai, Lille.

Il parait que les Turcs ont déclaré la guerre à la Russie, bombardé Sébastopol, coulé 2 navires russes. Au centre, toujours les même positions. St Quentin, Lille toujours aux Allemands. Lille cernée par les Indous.

Un violent combat où nous avons été victorieux a eu lieu hier au-dessus de Lille sur la Lys ; un autre à Ypres. Les Russes ne seraient pas encore en Allemagne.

Mercredi 4 novembre 1914

De temps en temps une détonation au loin, l’après-midi des coups assez forts, paraissant près. Il paraît que depuis quelques jours de nouveaux canons lourds sont employés. Les Allemands cherchent à prendre Calais, Dunkerque, Ostende afin de là, bombarder l’Angleterre.

 

 Sur Trélon, Anor, toujours des débris qui repassent allant sur la Belgique.

Jeudi 5 novembre 1914

Le maire porte à Avesnes le relevé des contributions reçues.

 

Nouvelle ordonnance :

Les hommes de 18 à 48 ans doivent se faire inscrire à la mairie. La commune doit faire le relevé du vin qui se trouve dans toutes les maisons et en faire la déclaration. On dit qu’un fils de Guillaume est tué à Fumay.

Des artilleurs, partant prisonniers, ont jeté une lettre disant que les affaires allaient bien, qu’ils s’étaient fait prendre à 200 allant rechercher leur 16ème canon à l’ennemi.

 

Sitôt dîner, il passe 56 chariots à deux chevaux, allant de La Capelle à Avesnes ; les uns vides, d’autres paraissant chargés, dans un des vaches, dans un autre des porcs. Ils viennent, dit-on de Pierrepont où ils ont eu une raclée. Où vont-ils ?

Se sauvent-ils ou vont-ils au ravitaillement ?

La matinée, de temps en temps, un coup de canon ; vers le soir des gros coups plus rapprochés. On prépare, dit-on, le château du comte de MÉRODE (à Trélon) pour l’état-major qui se trouvait à Hirson.

Vendredi 6 novembre 1914

Pas de canonnade !

La caravane d’hier au point d’arrêt sur la route de Sains est partie vers Sains.

À Trélon, il y a en beaucoup, paraît-il. Rien de nouveau. L’affiche concernant le vin et les hommes est apposée.

" On " dit que l’Italie s’allie avec nous contre l’Allemagne ?????????????

Samedi 7 novembre 1914

Une partie des voitures qui sont passées jeudi revient chercher 5 000 kilos de foin. De temps en temps, on entend le canon très loin.

Depuis hier, passent à Avesnes des trains complets de soldats venant de la direction d’Hirson, allant vers Aulnoye.

Troupes nouvelles ?

Ou troupes évacuant l’Est ?
 " On " dit que le gouvernement est rentré à Paris, que 6 divisions de cavalerie anglaise viennent sur Maubeuge, que les alliés sont entre Le Cateau et Busigny, que 3 corps d’armée allemands occupent Lille, Valenciennes, Courtrai.

150 000 Français seraient près d’Arras, Péronne, St Quentin. " Combien de mensonges dans tout cela ? "

Eux, prétendent avoir pris le général PAU avec 80 000 hommes.

Dimanche 8 novembre 1914

Triste.
Dimanche brumeux – Rien de neuf. Des Belges disent avoir vu des Russes à Charleroi !! Une soixantaine d’hommes se fait inscrire.

Lundi 9  novembre 1914

Le canon toujours muet.

 

Le soir, on apprend que les Allemands ont eu une grande défaite à Arras où ils ont perdu beaucoup d’hommes. Leurs forces se portent sur le nord du Nord. Ils auraient été défaits également au centre et à l’Est. Le général FRENCH viendrait avec 100 000 hommes pour délivrer le Nord. Quand donc aurons-nous un peu de certitude dans les nouvelles ?

Le Gouverneur apprenant que les hommes hésitent à se faire inscrire, certifie qu’il ne leur sera rien fait, que leur liberté sera entière. Ceux qui seront inscrits auront un passeport. Quiconque sera rencontré sans papiers, encourra les peines les plus sévères.

 

(*) : Il s'agit des batailles que les historiens ont appelées "la Course à la mer"

Vous pouvez lire un résumé sur mon site  >>>   ici   <<<<

Mardi 10  novembre 1914

Journée très calme, aucun bruit. Il paraît qu’il y a beaucoup d’Allemands à Sains, à Prisches.

Le Gouverneur VON MEHRING fait afficher un avis :

 

"Quiconque abritera un soldat ennemi sera fusillé !"

"Quiconque lui procurera des effets, des vivres, de l’argent, idem."

"Quiconque sera près des lignes allemandes sera suspect, considéré comme espion."

"Quiconque sera près des lignes allemandes avec une arme sera fusillé."

"Tout fonctionnaire qui abritera un ennemi dans sa commune sera passible de la loi martiale."

"Toute personne qui connaîtrait la retraite d’un ennemi doit le faire savoir à l’autorité allemande."

 

Passent très peu d’autos.

Mercredi 11 novembre 1914

St Martin
 Rien de neuf. Il passe et repasse un homme ou deux à pied ou à cheval ou à vélo, allant dans un sens ou un autre.

Dans les trains, il y a des aéros démolis, des canons couverts de boue.

(Un faux bruit circule encore : Le Kronprinz aurait été tué par un de ses officiers !).

Ostende serait pris.

Jeudi 12 novembre 1914.

Un vent de tempête ne permet pas d’entendre quelque chose.

La nuit, il semble entendre des chariots. Certains disent avoir entendu le canon hier.

 

Le soir, (au salut, qui a eu lieu tous les soirs de la guerre), Monsieur le Doyen dit que d’après les journaux allemands, ils ont, en Flandres, à Ypres, sur Dunkerque, eu un corps d’armée complètement anéanti.

Il repasse dans les petits chemins des soldats, par-ci, par-là. Des canons sont restés embourbés à Liessie. Il paraît qu’à Trélon, ils ont fait chez le comte de MÉRODE, un banquet de 200 couverts, chasse au bois, etc. Pillage du château.

Les laitiers à Orniaux (Allemands, qui font marcher la laiterie), ont eu des lettres et auraient dit en pleurant : ’’Oh ! Berlin ! Pauvre Berlin !’’

 

Lucien a sa 3e dent. Le 4e est prête à passer.

Vendredi 13 novembre 1914

 Journée affreuse – Vent et pluie font rage.

 

Le matin, on entend le canon.

Hier est revenu CRÉQUET étant depuis 6 semaines à Lille, ayant été jusque Niort où, dit-il, Mme GILBERT est morte d’après une lettre vue à Lille par les facteurs. Il paraît que les Allemands sont à Sains Richaumont. Beaucoup sont repartis en chemin de fer de Guise par St-Quentin retournant en Allemagne ; les Russes avançant, disaient-ils.

Aujourd’hui à Avesnes ils ont coupé le télégraphe.

Samedi 14 novembre 1914

Rien de nouveau.

Triste après-midi. Il pleut à verse. La nuit gelée.

Dimanche 15 novembre 1914

Le canon gronde dès le matin.

Arrive une averse de neige fondue, de vent jusque midi.

 

L’après-midi il pleut sans arrêt. La nuit se prépare bien froide et humide pour les soldats.

Lundi 16 novembre 1914

 Il faut encore à ces messieurs 40 moutons et 20 vaches à lait pour emmener en Allemagne. Il paraît qu’à Clairfontaine, un officier allemand s’est suicidé après avoir reçu une lettre de sa femme, une lettre disant qu’elle et ses enfants meurent de faim.

On dit également que les Russes sont à Berlin !

Triste et froide journée encore.

Mardi 17 novembre 1914

 Pour la redevance des contributions, la commune doit verser à Monsieur le Gouverneur 8 500 Fr. Rien que cela ! Au mois de janvier, il faudra encore verser la moitié des contributions ! Où veulent-ils que l’on trouve cela ?

Il paraît que les Allemands, à Laon, ont le typhus, ce qui explique le silence du canon ; les Français étant reculés de crainte de la contagion.

On certifie encore l’assassinat du Kronprinz.

 

Depuis hier, à Avesnes, les trains n’emmènent plus les soldats sur le Nord mais les remmènent vers la Belgique. Il y a aussi des trains de blessés. Les blessés ont évacués Bagatelle hier.

Autour de Lille, depuis un mois, les Anglais, Canadiens et Indiens (**) avancent tous les jours, et tous les soirs retournent à leurs positions.

 

Ce soir, on a ramené de Maubeuge monsieur BONTAUT mort à l’hôpital. Monsieur le Doyen est allé voir à Maubeuge si d’autres (soldats) d’Etrœungt ne sont pas morts.

Un fort est encore à déblayer ! (*)

 

 

(*) : Les Indoux qui faisaient partis de la couronne britannique.

 

(**) : Oui, c'est exact, Maubeuge était protégé par une ceinture de forts. Certains de ces forts ont été bombardés et détruits par l'artillerie lourde allemande. Artillerie de très gros calibre.

Il est certains que des soldats français ont été enterrés dans ces forts. Voir sur mon site la description de la bataille et reddition de Maubeuge qui a permit de "bloquer" de nombreuses troupes allemandes qui leur ont manqué durant la bataille de la Marne.  >>>   ici   <<<

 

Mercredi 18 novembre 1914

 Les moutons qui avaient été conduits à Avesnes, ont été ramenés aussitôt. Il parait qu’il n’y a plus de wagons pour les emmener. Les trains de blessés qui passaient à Maubeuge se dirigeant sur Mons ont fait demi-tour et sont revenus avec leurs blessés. Il paraîtrait que leur route est coupée. Peut-être aura-t-on d’autres nouvelles demain.

On rapporte que mardi soir, à Avesnes, deux officiers allemands auraient dit que si les Avesnois savaient ce qu’il se passe, les Français auraient illuminé.

 

Monsieur le Doyen n’a rien trouvé à Maubeuge, beaucoup de croix sont sans nom marqué. Dans la liste des morts, donnée par l’aumônier militaire, aucun nom de ce pays. Beaucoup sont enterrés avec leur médaille, d’autres ne l’avaient plus. On trouve des tombes dans les champs. Certains y ont été enfouis avec leur sac à dos !

Un fort est à déblayer, l’autorité allemande interdit d’y aller. Monsieur le Gouverneur est même gêné par la circulation des chiens ; il l’interdit dans tout le territoire placé sous sa domination.

Les 8 500 Frs devront être versés pour demain matin. Les Français seraient à Coblence. Il paraît qu’au Nouvion, il y a une quantité d’Allemands. Ils sont enfin cernés, paraît-il.

Jeudi 19 novembre 1914

Depuis midi, il neige.

Il y en a une légère couche et il gèle. Rien de nouveau.

Ordre de sa Majesté MEHRING de reconduire demain les moutons ramenés hier et y joindre les 20 vaches à lait. Il en est logé 2 000 hier à Avesnes. À Rocquigny, il faut une couverture de laine par maison et tout le pétrole et les bidons vides que l’on possède. Les facteurs de Fourmies, revenant de Lille disent que Lille doit être repris.

Est-ce vrai ? 

Vendredi 20 novembre 1914

Froide journée d’hiver. Il gèle encore.

La matinée, il vient d’Avesnes allant sur La Capelle, 175 Allemands. Les uns chantent, les autres pleurent.

À La Flamengrie, réquisition des poêles !

Ici, il faut que la commune dise le nombre de chevaux restant dans la commune. Me MATIER a été hier à Maubeuge. L’avis des officiers est que cela va bien autour de Lille. D’après eux, ils perdent 6 000 hommes par jour. Toujours, nous gardons nos positions. Il serait temps que cela aille vite car le temps nous semble bien long !

 

Et ces messieurs en prennent à leur aise. À Rocquigny, devant le directeur de la brasserie, ils ont enlevé les robinets et tuyaux de cuivre. Qu’ils prennent tout et brûlent tout, ils seront peut-être satisfaits !

On leur a porté 4 500 Frs sur les 8 500 demandés, conduit les 40 moutons. Quant aux vaches, encore du répit. Elles doivent être prêtes au moindre signal de ces messieurs.

À Maubeuge, un officier allemand s’est noyé après avoir écrit à sa femme que leurs 5 fils étaient tués. D’autres se pendent aux bois environnants.

Les Russes seraient enfin en Allemagne.

Au fort LEVEAU (à Maubeuge) où était NATIER, sur 317 hommes, 7 sont sortis vivants ! (*)

 

(*) : Le fort LEVEAU faisait parti des forts de la ceinture de protection de Maubeuge.

Samedi 21 novembre 1914

À 5 h ½ du matin, réveil en fanfare ; 5 ou 6 fortes détonations sur l’Est. Signaux sans doute ! En effet, toute la journée, le canon a enfin grondé tout autour. Espérons qu’il aura fait du bon ouvrage ! Il paraît que par le Luxembourg leur route est coupée.

Quand la sera-t-elle complètement ? Sa Majesté VON MEHRING exige que les 4 000 Frs restant à verser soient versés aujourd’hui même. Des femmes émigrées de Jeumont, revenant des environs de Laon, disent qu’il y a grande misère. Dans la forêt de St Gobain, 2 000 émigrés sont là, sans feu, sans vêtements et sans pain. À Laon, il y en aurait encore 8 000 !

 

Depuis quelques semaines, il passe parfois des autos cravatées de crêpes. Serait-ce vrai que le Kromprinz est mort ?

Dimanche 22 novembre 1914

Ste Cécile.

Le canon s’entend encore au loin, il fait très froid.

Lundi 23 novembre 1914

Même journée qu’hier.

Le canon s’entend encore au loin, il fait très froid.

Mardi 24 novembre 1914

Plus de canon.

La Rouillie fait maintenant partie du gouvernement de La Capelle. On y prend aujourd’hui le mobilier des maisons abandonnées. Le Gouverneur est encore plus exigeant que le nôtre. Les chaudières et cuivre des brasseries sont démontés (pour en faire des cartouches, dit-on). Des couvertures sont exigées dans toutes les maisons. Des poêles sont enlevés !

À Fourmies, le pont de bois refait par eux est imbibé de pétrole. Ils seraient coupés dans le Luxembourg ?

Aujourd’hui, Etrœungt doit fournir 200 fagots au Gouverneur d’Avesnes.

 

Le soir, on annonce :

“Tous les ânes, mules, mulets, de selle ou de trait, ainsi que les voitures sont réquisitionnés pour l’armée allemande ; leur déclaration doit être faite à la mairie pour jeudi.”

Mercredi 25 novembre 1914

Sa majesté MEHRING s’amène nous rendre visite à 9 heures du matin.

À sa suite, une soixantaine de vieux, vêtus de noir.

À son arrivée, il fait annoncer que tous les inscrits, c'est-à-dire tous les hommes de 18 à 48 ans doivent se rendre à la mairie où le Gouverneur en fera l’appel. Aussitôt des hommes de garde gardent toutes les routes où toute personne qui passe est arrêtée et amenée à la mairie.

Pendant ce temps, d’autres fouillent les maisons, de la cave au grenier, pour chercher qui ? Ou quoi ?

Les non-inscrits, peut-être.

 

Vers 11 heures, rassemblement.

Discours de Monsieur le Gouverneur. Il fait l’appel des inscrits. Il en manque 18 qui sont aux hameaux. Ils doivent se présenter à quatre heures pour montrer qu’ils sont présents. :

 

“Liberté entière est laissée aux inscrits qui peuvent circuler dans la kommandantur; pour s’en absenter, ils devront aller chercher un passeport. S’ils quittent le village, leur famille en est responsable et leurs femmes et enfants seront emmenés prisonniers.

Quant aux riches, assez lâches pour s’enfuir, leurs maisons seront vidées, leur mobilier à nous. Aussi la mairie doit aussi fournir demain, 50 lits, 30 couvertures de laine, 30 matelas et 500 bouteilles de vin. Tout le vin des maisons abandonnées devra être conduit à la mairie et amené à Avesnes au fur et à mesure de notre demande.

Quant aux familles pauvres, qu’elles se fassent inscrire et je leur donnerai du charbon, du pain ou de l’argent, du vin également leur sera distribué”.

 

Amen !!

 

Ici et à la rue du moulin, nous passons encore à côté de la perquisition.

 

La neige tombe drue depuis hier soir, heureusement une pluie fine y succède et la fait fondre un peu. Il semble que l’on entend le canon.

On raconte qu’ils ont encore eu une raclée sur Lille, que Lille est repris et que les Français seraient à Inchy-Beaumont. Si c’était vrai !

 

Le soir, ils viennent encore chercher 24 cochons. Ils vont à la filature, conduits par le directeur de chez LEFOUR, réquisitionner la laine et l’enlever.

Le canon a grondé assez fort.

Jeudi 26 novembre 1914

L’histoire d’hier se continue.

Trois charrettes sont parties, emmenant les literies, matelas, couvertures prises dans les maisons des gens absents. Deux gendarmes vont chez les bourreliers, quincailliers, menuisiers, maréchaux charrons, faire l’inventaire des outils, fils de fer, toile goudronnée, clous, vis, poêle, etc. Ils vont à l’usine électrique visiter.

De là, ils demandent ce que c’est que la maison. Monsieur HULT répond :

 

" C’est une brasserie, toute pillée, ravagée, abîmée. Le patron soldat, la femme habite sur la place, chez ses parents ".

 

Bien !

Cela passe ainsi. Que Dieu veuille que cela soit tout !

 Il paraît que le Gouverneur a la liste des émigrés et qu’il fera enlever tout le mobilier de leurs maisons. Quand cela sera-t-il fini ? On nous affirme qu’après avoir été repris trois fois par les Allemands, Laon est enfin libéré définitivement ainsi qu’Arras, Hazebrouck, Armentières. (*)

Nous ne croyons plus rien !

À Avesnes, les trains circulent sans arrêt, allant maintenant sur Hirson.

À Sémerie, les écuries doivent être prêtes et libres pour demain. Pourquoi faire ?

À Fourmies, les drapeaux sont en berne et cravatés de crêpe ???

Demain, ils doivent revenir, continuer leurs pillages. Pour samedi, il leur faut encore 40 vaches à lait.

(Lucien dit « Papa »).

 

(*) Arras n'a jamais été allemande. Laon, Armentières et Hazebrouck seront libérées qu'en octobre 1918

Vendredi 27 novembre 1914

Dépêche fantaisiste encore : 112 000 japonais sont avec les Français. Le centre allemand est repoussé sur Valenciennes. Les Anglais avancent ; la bataille du Nord est gagnée, l’armée allemande repoussée par des charges héroïques, la garde impériale en déroute, 138 canons pris par les Belges, les Allemands repoussés sur Roubaix, 100 000 hommes hors de combat, 40 canons et 55 mitrailleuses pris.

Notre nouveau canon 105 est braqué sur Lille pour déloger le reste des Allemands. Ils n’occupent plus que Cambrai, Douai, Maubeuge.

Le corps du Kronprinz est transporté en Angleterre. Les Allemands offrent 40 000 prisonniers en échanges de son corps ; les Anglais refusent. Le but des alliés est de repousser les Allemands sur Valenciennes et Tournai.

 

L’Italie et le Portugal déclarent la guerre à l’Allemagne ; l’Allemagne déclare la guerre à la Suisse. 400 000 hommes marchent sur Maubeuge, venant de Compiègne. (Dépêche venant de Belgique).

 

 Aujourd’hui, la municipalité va voler le vin des émigrés pour Monsieur le Gouverneur. Tout est conduit à la mairie. Le maire donne sa démission.

Le canon gronde assez fort toute la journée. Il paraît que nos troupes sont près de Valenciennes. On se battrait à Aubenton. Les émigrés reviendraient, seraient à Crécy-sur-Serre. Nous n’osons croire ces bonnes nouvelles ! Un Allemand aurait raconté que 6 millions de Russes s’avancent sur Berlin semant la terreur partout.

 

Le maire ayant été donner sa démission, le Gouverneur le retient pour 24 heures, dit-il.

Samedi 28 novembre 1914

Le maire n’est pas revenu. Il avait été condamné à 1 000 Frs d’amende pour n’avoir pas déclaré tout le vin. Pourquoi le garde-t-on ?

Il paraît que le Gouverneur a dit qu’Etrœungt n’avait pas fini. Les corps des deux Allemands tués ici, doivent être pour demain à midi dans un cercueil au cimetière. Les conseillers ont continué leurs visites aux caves. Déjà 6 000 bouteilles à la mairie !!

Les hommes de 18 à 48 ans ont encore un délai de 5 jours pour se faire inscrire. Ceux qui ne le feront pas, la commune répond d’eux, doit les faire travailler et les indiquer. Ils seront alors immédiatement conduits en Allemagne.

 

On entend un peu le canon. À la Tape-Jean, ils abattent des arbres et font des tranchées. Nous verrons bien demain si sa Majesté viendra apporter de l’argent aux pauvres et s’ils auront du vin.

Ils ont le culot, à Avesnes, de dire qu’un armistice de 3 mois leur est accordé du 1er décembre au 1er mars. Les passeports ne sont plus délivrés que pour 1 jour. Comment aller à la farine ?

À Rocquigny et environs, tous les chevaux, petits ou grands, ont été emmenés à La Capelle. Sur 100 présents, 30 ont été pris et les autres inscrits.

À La Rouillies, doivent être déposés à la mairie les serpes, bêches, brouettes, etc.

Au Cateau, 10 personnes fusillées pour avoir conservé des pigeons.

À Larouillies, doivent être déposées à la mairie les serpes, bêches, brouettes, etc. J’oubliais qu’il faut à S.A. MEHRING (*) une peau de bique pour mettre sur sa peau d’ours ou 300 Frs pour en acheter une. (Il ne devrait pas connaître le mot " acheter ")

 

(*) : S.A. : Son Altesse. C'est ironique, bien sûr !

Dimanche 29 novembre 1914

Journée sans rien de remarquable.

La nuit le canon a grondé très fort et malgré le grand vent, on l’entend encore un peu l’après-midi. Le reste du vin est conduit à la mairie, environ 6 000 bouteilles !!

Lundi 30 novembre 1914

Le maire a la liberté. Il ne s’est pas trop ennuyé, étant en compagnie de 4 autres maires en pension à la gendarmerie. Sa démission acceptée, Albert HOSSELET est nommé maire.

Les corps des deux Allemands sont conduits au cimetière ; le vent est très grand ; on n’entend plus le canon. À La Rouillies, défense aux voitures de circuler jusque La Capelle, la route devant être entièrement libre. Pourquoi ?

À Féron, à partir de 4 heures, défense de passer sous le pont de chemin de fer. Une personne venant de Fourmies a croisé 32 voitures de laine emmenée !

Décembre 1914

Mercredi 1er décembre 1914

Le canon gronde fort sur Cambrai. Tant mieux !

Une affiche est apposée :

 

“Certaines personnes racontent que les forteresses de Metz, Strasbourg, Laon, St-Quentin vont nous être arrachées. Pour couper court à ces faux bruits, il est interdit de colporter ou de copier les soi-disant dépêches autres que celles affichées à la commandanture. Toute personne qui le fera aura une forte amende.

(Il paraît que le curé de Trélon a été emmené pour avoir dit qu’ils étaient en déroute)

Toute personne qui aura procuré des vivres, vêtements ou abri à un soldat français ne sera pas punie si elle le déclare d’ici 24 heures. Sinon elle sera punie. Elle devra dénoncer où est ce soldat’’.

 

À La Capelle, Trélon, Féron, Sains, des tranchées partout. Pourquoi ?

À La Rouillies, défense d’allumer le soir après 5 h ½.

La matinée, il passe 21 voitures à 2 chevaux, vides, allant sur La Capelle.

Mercredi 2 décembre 1914

Ordre est donné, paraît-il, de prendre chez les émigrés linge, vêtements et chaussures pour les pauvres.

Le canon s’entend comme hier l’après-midi.

À Sémeries, un train de marchandises est en gare avec des mitrailleuses.

À Fourmies, ils font une grande route dans le bois, idem à Trélon Glageon.

À La Capelle, des tranchées au champ de courses. Le Gouverneur fait annoncer que les étrangers ne peuvent plus venir avec des voiturettes de marchandises. Il paraît que les jeunes soldats de 19 et 20 ans, environ 300 000 hommes, commencent à donner de l’avant. 20 chariots viennent chercher 20 000 kilos de laine à la filature.

Les 21 chariots qui sont passés hier, repassent, les uns pleins, les autres vides.

Jeudi 3 décembre 1914

Le canon qui a grondé la nuit, gronde encore toute la journée. Monsieur le Gouverneur envoie 300 Francs aux pauvres (vive Monsieur le Gouverneur). Il est vrai que Monsieur GODBILLE lui a porté hier 1 000 Francs d’amende. Il réclame deux chiens policiers.

Il passe une quinzaine de cavaliers.

Vendredi 4 décembre 1914

Il paraît que le canon a tonné toute la nuit ; il faut bien fêter Sainte Barbe !

Un vent de tempête ne permet pas d’entendre aujourd’hui si cela tonne. Les chiens de Monsieur AUBERT sont conduits à Avesnes, 54 y étaient amenés ; pour la garde de Sa Majesté ? Ou pour expédier en Allemagne ?

 

Une auto vient s’écrabouiller au tournant de chez DERAMAIX, brise un poteau électrique – Résultat – Plus de lumière ce soir ; quant aux chauffeurs indemnes…

Deux officiers viennent visiter la Poste afin d’en enlever tous les appareils. Le chauffeur dit qu’il pense que cela ne va pas pour eux. Tant mieux : si c’est vrai !

Quant aux maisons des émigrés, le maire fera son possible pour allonger le jour de la visite et de la dévastation.

 

Les Français seraient à Signy-le-Petit ?

Arras serait repris ?

Hier, à Avesnes, 3 fantassins français ont été amenés en voiture, prisonniers, vendus par une femme ! À Anor, Landrecies, etc. après 7 heures du soir (heure allemande), défense d’allumer aucune lumière !!!

Hier à Prisches, ordre était donné de laisser les écuries libres.

 

À 8 heures ½ du soir, de grandes lueurs au nord-est vers le Quesnoy. Une vingtaine se succèdent. Signaux lumineux ou projecteurs ? En tous cas, cela ne semble pas loin.

Samedi 5 décembre 1914

À Avesnes, logement. Rien de nouveau. Encore un vent de tempête et de la pluie l’après-midi. Des Allemands viennent démonter les appareils téléphoniques ; l’un d’eux dit :

 

" Vous serez débarrassés de nous d’ici 15 jours ".

 

Dieu veuille qu’il dise vrai.

Dimanche 6 décembre 1914

St Nicolas – Vendredi à Avesnes, il est affiché que Lille a été lâchement repris par les Anglais. On entend le canon tout autour. Le soir on annonce :

 

Ø  1er – Toute personne qui détient encore des armes a encore 48 heures pour les déposer à la mairie.

Ø  2e – Quiconque possède des armes ou des vêtements ayant appartenu à un soldat allemand doit les déposer aussi à la mairie.

Ø  3e  – Une peine sévère sera dressée à quiconque aura encore des pigeons voyageurs.

Ø  4e  – Les clefs des maisons abandonnées doivent être déposées à la mairie. Tout gardien de ces maisons ou tout détenteur d’effets ou de biens de ces maisons sera puni s’il ne le fait pas aussi.

Ø  5e  – Les vieux cuivres ou laitons hors d’usage sont achetés bon prix et payés argent comptant. (J’te crois qu’on t’en vendra !)

Ø  6e  – Les habitants doivent faire connaître par écrit leurs habitations et le nombre, l’âge des personnes y résidant.

Ø  7e  – Les habitants sont invités à consulter et lire les affiches apposées à la gare et à la mairie.

(Demain je dirai ce qu’elles disent).

Lundi 7 décembre 1914

Affiches apposées hier :

 

“Le commerce est interdit avec la Belgique. Tous les objets ou marchandises devant payer un droit de douane ne peuvent plus être vendus. Les commandantures d’Avesnes et de Trélon ne permettent plus de circuler sur les frontières des commandantures de Maubeuge et sur la Belgique.

La circulation est seulement permise sur les routes de Macon à Trélon, Eppe-Sauvage à Divry, Sivry à Clairefayts et par Solre-le-Château, d’Avesnes à Maubeuge, d’Aulnoye à Leval, de Saint-Aubin à Dompierre.
Quiconque circulera sur les autres routes sera considéré comme un espion et en subira les peines.
Au sud, défense d’aller plus loin que la rivière de la Serre, dans toute son étendue, à l’est de La Fère au canal qui relie la Serre à l’Oise au nord de La Fère jusque Fargnies et au-delà de Jussy dans la direction de Ham’’

 

(C’est bien embrouillé et compliqué !)

 

Il paraît que le bruit de la prise de Lille est encore une invention, les Français n’étant qu’à Armentières et toujours à 8-10 kilomètres de Cambrai. Jamais d’avance.

 

Il leur faut encore aujourd’hui un mulet, pour mercredi 50 000 fromages payés 0 Fr. 75 paraît-il, pour vendredi les juments poulinières !

Si cela dure encore un peu, que nous laisseront-ils ?

 

Encore une journée de tempête qui empêche d’entendre si on canonne.

Mardi 8 décembre 1914

Le canon tonne bien toute la journée sur Saint- Quentin et le soir vers Cambrai. Cela rapproche sûrement.

Il paraît que l’affiche concernant la prise de Lille était bien à Avesnes mais y a été seulement apposée deux heures.

 

Le matin, une quarantaine de chevaux venant de Beaurieux vont à La Capelle, réquisitionnés. Ici, ils en exigent 10 juments poulinières et 18 poulains pour vendredi. Il y a sans doute du grabuge chez eux.

 

Hier le Gouverneur envoyait promener tout le monde qui l’approchait.

À Wignehies, ils ont emmené 30 inscrits hier. Il paraît que l’on doit tuer demain 300 bêtes à Avesnelles.

Depuis quelques jours, on fait courir le bruit, qu’à certains endroits, ils vaccinent les enfants pour les faire mourir. C’est incroyable ! Et démenti ensuite.

 

Hier soir, des feux se voyaient encore sur Maubeuge, Valenciennes. Ce soir encore.

Mercredi 9 décembre 1914

Après avoir tonné toute la nuit, le canon tonne encore jusque dans l’après-midi. Il paraît qu’après avoir essayé 9 fois de passer sur Soissons, ils se retirent sur Saint-Quentin.

 

Depuis midi, les autos se succèdent, retournant sur Avesnes.

 

Vers 4 heures du soir, passent 65 autos camions, les unes chargées de bicyclette démolies, une ayant des cercueils. Serait-ce la débandade ? Nous l’espérons.

 

Hier à Avesnes, le Gouverneur et les officiers ne se sont pas couchés. Les soldats qui étaient à La Capelle sont partis à Glageon. Ils demandent et souhaitent, paraît-il, rentrer chez eux.

À Avesnes, on attend plusieurs milliers de cavaliers qui repassent. Le mulet réquisitionné hier étant arrivé 10 minutes après l’heure fixée, la commune doit verser une amende de 110 litres de vin en fût.

 

À 7 heures ½, encore des camions automobiles qui retournent vers Avesnes.

 

À huit heures, il en repasse une vingtaine revenant sur La Capelle et encore d’autres jusque minuit.

Jeudi 10 décembre 1914

Le canon est muet. Quelques autos camions vont et viennent. Des cyclistes ont été hier couper les fils téléphoniques à Tatimont. Une auto a été ensuite voir si l’ouvrage était fait.

 

Aujourd’hui rien de neuf.

Les poulains et les chevaux ont été conduits à Avesnes, deux seulement ont été pris. À Rocquigny et à La Rouillies, ils ont ramené 200 personnes d’un village près de Saint-Quentin et les ont installées dans les maisons vides. Il paraît qu’il y avait des cavaliers dispersés à Floyon.

Vendredi 11 décembre 1914

Les émigrés arrivés hier à La Rouillies viennent de la Somme, de Roye. Étant dans leurs caves depuis 20 jours, ils ont été emmenés en autos du train par les Allemands. Il y en a de bien misérables.

Les autos de mercredi emmenaient, dit-on, des blessés à l’hôpital militaire de Maubeuge, les blessés français restants ayant été évacués dans un hospice.

 

Le canon s’entend au loin, toute la journée et même la nuit, dit-on.

Samedi 12 décembre 1914

Belle journée très calme. Aucun bruit.

Hier et aujourd’hui, passent des autos avec un cercueil. À Rocquigny, ils ont encore enlevé une vingtaine d’hommes.

Hier, la coopérative n’a pas pu avoir de passeport pour de la farine. Manquerons-nous de pain ? 16 chariots sont venus encore chercher 5 000 kilos de foin.

Dimanche 13 décembre 1914

Journée calme.

 

Le soir vers 4 heures, une auto vient encore apporter les ordres du Gouverneur : 15 000 kilos de foin, 300 bouteilles de vin et 8 feuillettes (*) en gare d’Avesnes mardi à midi.

Défense de sonner la cloche pour les offices. Elle sera sonnée quand le Gouverneur viendra faire l’appel des inscrits…

Les facteurs venant de Lille disent y avoir vu des collégiens allemands de 15-16 ans, vêtus de leurs uniformes, recouverts d’un manteau et munis d’un casque !, venus, leur a-t-on dit, étudier à Paris.

5 000 de ces pauvres gosses auraient péri à Ypres.

 

(*) : Tonneau de 110 à 140 litres

Lundi 14 décembre 1914

C’est à peine si on entend le canon, tellement c’est loin. Des autos vont et viennent sans arrêt. Une vient à la poste chercher les téléphones des particuliers et tous les appareils de la Poste.

N’ayant pas 8 feuillettes de vin, on vide les bouteilles prises aux maisons d’émigrés qui étaient toujours à la mairie.

Mardi 15 décembre 1914

Le canon tonne très fort au Nord, Sud et Ouest jusque midi.

Tout à coup un très fort éclair, un gros coup de tonnerre. Le vent est grand, l’après-midi on entend moins.

 

Il faut encore à ces messieurs 9 hache-paille et 200 fagots, plus une amende de 800 francs pour un cheval arrivé en retard. On vient chercher le reste du foin plus 1 000 kilos.

Hier, l’adjudant qui fait les courses, a dit qu’ils partaient aujourd’hui, l’état-major étant changé. (Est-ce pour reculer ?). Il paraît qu’à Marbaix une dénonciation ayant été faite de la présence d’un soldat, la commune doit ou le livrer ou donner 100 000 francs.

Mercredi 16 décembre 1914

Le canon s’entend au loin.

 

À midi, arrivent 55 émigrés que les Allemands amènent de Morsain. 800 sont débarqués hier à Avesnes. Une affiche ordonne de déclarer les provisions, viande salée, légumes, cognac, etc. J’ai acheté le journal qui nous conte sans doute tous mensonges.

Les autos vont et viennent sans arrêt.

Jeudi 17 décembre 1914

Les émigrés d’hier sont presque tous de pauvres diables bien malheureux. Ils ont dit qu’il y a 3 mois les Allemands les avaient fait partir de chez eux, aux environs de Soissons et les avaient emmenés à Morsain, les hommes dans ce village, les femmes ailleurs.

 

Lundi à 11 heures du soir, les Allemands reculant, ils ont dû partir en pleine nuit, conduits baïonnette au canon prendre un train qui les conduisait à Maubeuge, leur avait-on dit.

À Avesnes, on les fit descendre (ils étaient 800) et ils furent envoyés 50 environ dans chaque commune. À Floyon, il y a, parait-il, le maire de Soissons. Pareil sort nous est-il destiné ? Avant leur départ, on leur avait pris absolument tout et détruit leur mobilier.

 

Toute la nuit le canon a tonné.

Le matin, 7-8 détonations très fortes sur Maubeuge. Ensuite un roulement continuel de tous les côtés. Des autos ont circulé toute la nuit. Un officier a dit ce matin à la mairie qu’ils avaient perdu jusqu’ici plus d’un million d’hommes et nous 150 000. Il ajoutait : nos renforts sont épuisés.

Hier, on racontait que les gouverneurs s’étaient réunis à Aix-la-Chapelle, comme en congrès. Le Pape demandant la paix, la France et l’Allemagne accepteraient mais la Russie et l’Angleterre refuseraient.

 

L’après-midi, il repasse cinq locomobiles ou moissonneuse remorquant des camions démolis.

Vendredi 18 décembre 1914

 Journée qui comptera sans doute. Le canon n’a cessé une minute, de gros coups qui se rapprochent.

Le matin, il passe encore une locomobile.

 

Le soir, on apprend que 12 cuirassiers français prisonniers ont crié en passant en gare de Sains crié :

 

" Tout va bien ! Lille est repris ! Vive la France ! ".

 

De nombreux blessés sont arrivés à La Capelle avec médecins et infirmiers ; une vingtaine de noirs passent allant vers Avesnes.

Samedi 19 décembre 1914

Malgré un vent contraire soufflant très fort, on entend le canon qui rapproche au nord-ouest. (*)

Toute la journée, cela tremble sûrement plus près qu’hier.

 

Le soir ‘on’ dit que les Français sont à Somain.

Le Gouverneur permet maintenant de circuler dans les communes de la kommandantur avec un passeport de la mairie. Ailleurs, il faut un passeport d’Avesnes. Les hache-paille ont été conduits, quatre seulement ont été pris et il faut maintenant trois concasseurs !

Cette semaine, Floyon a fourni 45 0000 Kg de foin.

 

(*) : Nous sommes au cœur de la bataille des Flandres.  Voir sur mon site   >>>  ici   <<<

Dimanche 20 décembre 1914

La bataille de ces jours derniers continue. Le canon rapproche encore, nous semble-t-il. Le matin, on annonce que les propriétaires de chevaux doivent les déclarer immédiatement à la mairie.

À La Capelle, défense d’allumer le soir ; les routes, le soir, sont barrées avec des cordes tendues. Ils viennent encore à la poste, grimpent aux fils pour y faire je ne sais quoi.

 

Le soir, un moment de calme pour la canonnade.

Lundi 21 décembre 1914

Le Gouverneur prépare à Avesnes un bal pour la Noël. Les jeunes filles sont obligées d’y prendre part sous peine d’amende (après contrordre).

Entre Arras et Denain, ils auraient perdu la semaine dernière 90 000 hommes. La matinée le canon s’entend très loin.

 

À partir d’une heure, il donne très fort, comme les jours et nuits précédentes.

 

Le soir, on dit que Cambrai est repris et Bavay en feu. Lille ne serait pas repris. Des blessés arrivent à Maubeuge. Soissons et Chauny seraient repris.

On cherche 100 serviettes et 30 plats en émail chez les émigrés.

Mardi 22 décembre 1914

Assez éloigné le matin, le canon rapproche vers le soir, tout autour.

À Fourmies, 800 hommes de 18 à 48 ans ont été emmenés en Allemagne. Les ouvriers établis au garage DESHAYES sont partis pour Charleroi, trouvant Avesnes trop petit ! (Ou trop près du feu).

Mercredi 23 décembre 1914

Encore la même bataille.

Voici 8 jours et 8 nuits sans arrêt que cela tonne (et dire que l’on n’a plus le droit de le dire sous peine d’amende !).

Il vient d’Avesnes, allant sur La Capelle, 21 autos camions, omnibus, etc. neuves.

Le soir, il semble que cela donne sur St Quentin. Nous sommes vraiment entourés de feu !

Jeudi 24 décembre 1914

Des gens reviennent de Lille par le train Lille-Valenciennes, Mons, Maubeuge, Lille, Cambrai etc. ne sont pas repris. On n’a même pas essayé de les reprendre, ne voulant pas, paraît-il, les détruire ! Et pourtant le canon tonne bien fort !

 

Les fariniers venant de St-Quentin disent que nous avons délogé à Bapaume les Allemands de leurs tranchées dans lesquelles ils jouaient de la musique ! Il serait encore débarqué 400 000 Anglais.

 

(*) : C'est tout à fait exact, dans certains secteurs les Allemands ont joués de la musique et même défilé avec des lampions (écrits officiels). D'autres manifestations de ce genre ont entrainé les fraternisations de Noël 1914. J'ai rassemblé sur mon site tous les témoignages officiels sur ces fraternisations :  >>>   ici   <<<

Vendredi 25 décembre 1914

Depuis le matin pas de canon, à midi jusqu’au soir on l’entend sur Laon.

Rien de nouveau.

Samedi 26 décembre 1914

La matinée, cela tonne sur Valenciennes ; l’après-midi plus rien. On finit de distribuer 40 000 kilos de charbon vendus à la commune à 43 Frs puis à Avesnes. Chacun peut en avoir 100 kilos.

Dimanche 27 décembre 1914

Rien de nouveau. Il passe très peu d’autos.

Lundi 28 décembre 1914

Le canon redonne.

 

À midi, l’affiche suivante est collée :

 

La circulation pour le colportage, les visites, même aux malades, même pour recueillir un héritage, est interdite. Seule est permise la circulation pour le service médical, le chauffage, l’éclairage et l’alimentation, avec un sauf-conduit. Les sauf-conduits indiqueront le but précis, la durée du voyage et la route à suivre. Ils ne seront donnés que pour un jour et devront être revêtus du cachet et de la signature de l’autorité allemande. Les maires seront responsables de l’usage fait des sauf-conduits.

Il est défendu de circuler la nuit, de circuler en voiture légère, auto, moto, vélo ou à cheval ; Seules les grosses voitures de camionnage peuvent rouler. Toute personne pour avoir un sauf-conduit devra avoir une carte d’identité munie de sa photographie.’’

 

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Carte d’identité de Lucienne COUROUBLE (carte faite en 1918)

 

Ouf ! C’est plus bref de dire qu’on ne peut plus mettre le nez dehors.

Une heure plus tard, une autre affiche répétant la même chose et redemandant encore la déclaration des pigeons, elle ajoute :

 

’’Si une personne est surprise à faire des signaux quelconques aux troupes alliées, le village sera brûlé. Les horloges ne peuvent plus sonner les heures !’’

Mardi 29 décembre 1914

Nuit et journée de tempête, d’averses de grêle et de neige. Une vingtaine de grosses autos descend d’Avesnes. Le canon continue à donner.

On raconte que les Anglais ont coupé la ligne à Erquelines et se sont emparés d’un train de prisonniers civils.

Mercredi 30 décembre 1914

Cela tonne encore. Des affiches rouges répètent ce que les affiches de lundi ont déjà dit. Une autre dit :

 

’’Depuis quelque temps, des soldats français évadés se cachent. Obligation est faite de les dénoncer, sous peine de punition grave. Si les soldats se déclarent, ils ne seront pas fusillés mais prisonniers ; s’ils se cachent, ils seront considérés comme espions et fusillés.’’

Jeudi 31 décembre 1914

Pour fêter la St Sylvestre, le canon n’a pas cessé de la nuit ni de la journée et cela semble se rapprocher.

À Avesnes, le marché est supprimé à partir de la semaine prochaine. Les autos allemandes doivent s’arrêter aux postes et donner un laissez-passer pour pouvoir circuler. On raconte qu’un aéroplane français aurait atterri hier au Flaumont et serait reparti ; une patrouille anglaise serait venue à Maubeuge.

 

Nous n’en croyons rien, étant si trompés depuis six mois, nous avons complètement perdu la foi.

 

Année 1915

Janvier 1915

Vendredi 1er janvier 1915


Cela tonne toujours nord-ouest. Triste jour de l’an ! Il pleut ; la nuit malgré vent et pluie, le canon n’arrête pas. Il passe très peu d’autos.

Samedi 2 janvier 1915

Cela continue sans arrêt plus fort qu’hier. Cela parait venir du Nord. On emmène les jeunes gens de Rocquigny et de La Rouillies sur Laon.

Dimanche 3 janvier 1915

Et cela tonne, tonne sans arrêt au N-Ouest. Il paraît que les Anglais bombardent Namur, refortifié par les Allemands.

Ceux de la laiterie auraient dit :

" C’est fini, nous sommes perdus ".

 

Les Français arrivent, dit-on, par le Luxembourg belge. Une personne dit même entendre de Solre-le-Château les mitrailleuses françaises, ce que nous ne croyons pas. Un officier allemand aurait dit qu’ils se préparaient à battre en retraite.

Que croire ?

Rien.

Attendre et espérer.

 

Les soldats d’Avesnes se préparent à partir ; certains sont partis déjà. Le Gouverneur demande de lui mener ce qu’il reste de vin. Aujourd’hui quelques autos vont et viennent.

Lucien a sa 5ème dent.

Lundi 4 janvier 1915

Encore des gros coups jusque midi, l’après-midi cela semble plus éloigné pour cesser vers 4 heures.

Hier, à La Capelle, un Allemand était en haut du clocher, avec une lunette toute la journée. Au Nouvion, les écuries doivent être libres.

Depuis hier, un nouveau Gouverneur à La Capelle.

Ici aujourd’hui, réunion des maires à Avesnes. Il faut déclarer les poules et les chariots du pays. L’armée française approcherait de Feignies,

Mardi 5 janvier 1915

Journée de silence. Cela semble drôle de ne plus entendre le canon.

Les fariniers venant de Cambrai disent que nos troupes sont reculées de 30 kilomètres ! Les Allemands qui étaient à Avesnes, La Capelle, Glageon, sont partis hier au combat. Cela ne leur plaisait guère. Ils sont remplacés par des gosses de 15 ou 16 ans !

 

L’après-midi, il passe six soldats à cheval et assez d’autos.

 

L’après-midi, O. CARLIER (Le maire) et CHAROLAIS (le buraliste) reviennent d’Avesnes. Ils ont porté à Sa Majesté 6 000 Frs. Cela ne lui suffit pas, il lui en faut encore 12 000 et pour jeudi matin 200 belles vaches à lait et jeunes.

Rien que cela !

À Rocquigny, le pont qui avait été démoli par les Français doit être reconstruit dans 48 heures et de force à supporter un poids de 10 000 kilos.

Pourquoi ? Et pour qui ?

Mercredi 6 janvier 1915

Le canon s’entend au loin au sud-ouest un roulement ininterrompu.

 

Le soir, on annonce que le Gouverneur donne ordre de retarder l’expédition des vaches jusqu’à nouvel avis. On demande des hommes et des femmes pour charger et décharger des wagons. Ils seront bien payés !

À La Capelle, ils annoncent des succès inouïs : l’écrasement des Français partout.

 

Les 18 000 Francs que l’on doit donner doivent être fournis par les contribuables. Ceux qui ne verseront rien, seront signalés et l’autorité allemande se paiera en nature.

Jeudi 7 janvier 1915

Une affiche :

 

“La culture de la betterave est interdite pour 1915."

"L’ensemencement des terres est-il fait dans la commune ?"

"On doit ensemencer blé, orge, avoine et pomme de terre."

"Les maires doivent dire si les graines d’ensemencement sont en quantité suffisante dans la commune."

"Ils doivent aussi déclarer la quantité de sucre nécessaire dans leur commune jusqu’au 1er mai 1915."

"Le sucre leur sera fourni à 80 Francs les 100 kilos par sacs entiers (Les sacs devront être fournis) et payés comptant."

"Ceux qui ne l’achèteront pas maintenant le paieront plus cher par la suite.

"Les queues de betteraves doivent rester sur les terres."

"Les maires doivent aussi donner la superficie des prairies et leur rendement annuel.’’

 

Vilaine journée de pluie et de vent. On n’entend rien.

Une quinzaine d’autobus et d’autos camions viennent d’Avesnes allant, sans doute, se charger de mobilier quelque part ! Depuis hier, je porte mes factures ; c’est bien dur pour recevoir peu de chose !

Lucien fait seul ses premiers pas ; il est très fier.

Vendredi 8 janvier 1915

 Rien de neuf : triste journée de pluie et d’inondation.

Au loin quelques détonations.

Samedi 9 janvier 1915

Comme hier, quelques coups lointains la matinée.

Le soir, on apprend qu’il faut conduire demain à Avesnes, 15 lits garnis pour des blessés prisonniers français, dit-on.

Dimanche 10 janvier 1915

Le canon gronde plus fort. Les lits sont conduits avec chacun deux paires de draps et 30 couvertures et 30 cuvettes.

 

Le soir, aucun blessé n’était à Avesnes.

Lundi 11 janvier 1915

 Hier à 9 heures du soir, l’otage revient demandant le nombre de lanternes, de lampes, verres de lampe (à pétrole) disponibles ; un calorifère (Appareil assurant le chauffage d’un bâtiment par la circulation d’eau ou d’air chaud dans des conduites) leur est conduit aussi.

Dire le nombre de noyers et le nom des propriétaires de ces noyers.

Ils exigent aussi 30 hommes pour aller décharger les wagons, trois s’étant seulement offerts de bonne volonté.

 

Le grand vent empêche d’entendre si on canonne ; à 11 heures, une très forte détonation sur Maubeuge.

Mardi 12 janvier 1915

Les lueurs que l’on voit tous les soirs sur Maubeuge sont plus fortes aujourd’hui. Communiqué du capitaine aviateur Dupuis-Bréguet, à Denain jeudi 31 décembre 1914 :

 

" J’ai pour mission de rassurer nos frères du Nord, il faut qu’ils sachent que le moment de la délivrance est proche. La ligne de défense qui passe par Lille va s’étendre dans la direction de St Amand, Valenciennes, Maubeuge, composée de 150 000 Anglais, 50 000 Canadiens, 12 000 Japonais, 500 000 Français venant du nord et 400 000 venant du sud."

"Des violents combats se livreront autour de Lille, en attendant la jonction des deux armées pour débloquer cette ville ainsi que Douai et Valenciennes."

"Nos alliés, les Russes avancent très lentement mais méthodiquement et c’est pour des questions d’entente que nous progressons si peu. On suppose en haut lieu que les combats se livreront le 22 et 28 janvier. Je conseille aux habitants de s’enfermer dans leurs maisons, avec quelques provisions, des pioches en cas d’éboulement, notre artillerie foudroyante faisant de grands dégâts. La victoire finale est assurée. Des pourparlers diplomatiques interviendront sous peu. Quelques ententes ont lieu à Berlin et à Cologne. Les Allemands refusant de combattre sont évacués immédiatement sur l’Allemagne ".

 

Il passe aujourd’hui beaucoup d’autos dont 8 avec des cercueils ; Le soir seize reviennent d’Avesnes se suivant. Le canon donne toute la nuit.

Des émigrés sont encore arrivés à Avesnes, venant de Margival.

Mercredi 13 janvier 1915


Le canon tonne au loin jusque onze heures. Une très forte détonation suivie comme d’un éboulement, puis plus rien. Il paraît que ceux de la laiterie doivent partir samedi au feu.

À La Capelle, beaucoup de blessés allemands.

À Avesnes, il paraît que ce sont des Sénégalais.

Le Gouverneur permet aux religieuses de les soigner mais elles doivent s’engager à ne pas leur parler de la guerre !!!

 

(Lucien a sa 6ème dent)

Jeudi 14 janvier 1915

Les blessés arrivés hier à 4 heures du matin à Avesnes sont des Français, évacuant l’hôpital de Chauny où ils étaient depuis septembre. Deux cents sont arrivés du train à l’école des filles, à pied, paraissant gais, blessés presque tous aux bras. Une douzaine étaient transportés sur des civières dans des autos, de là à l’école, il y en a parmi eux qui sont de la région, dit-on.

Peut-être, aura-t-on d’autres détails.

 

À quatre heures du soir, grave nouvelle.

Par ordre de Monsieur le Gouverneur, les boulangers ne doivent plus vendre de pain aux personnes étrangères à la commune. De plus, chaque personne n’aura plus droit qu’à 250 grammes de pain par jour ! Assez pour ne pas mourir de faim.

À Avesnes, ils ont enlevé toute la farine de blé se trouvant chez les boulangers et vendent de la farine de seigle à 120 Francs les 100 kilos. Ils commencent à réaliser leur parole :

 

" Nous vaincus, mais vous crever de faim ".

Vendredi 15 janvier 1915

On conduit à Sa Majesté 50 bouteilles de vin blanc, 300 de vin rouge et 400 fromages. Encore !

 

Le matin, l’otage revient demander pour les blessés d’Avesnes, des chemises, chaussettes, taies d’oreiller, torchons, mouchoirs. Les cuivres hors d’usage sont encore réclamés. Un sursis d’un jour est encore accordé pour le pain mais quelle cohue aux boulangeries ! Certains y ont passé la journée pour n’en pas avoir.

 

Le soir, on apprend que demain la farine en dépôt chez les boulangers sera remplacée par de la farine de seigle. Pourvu qu’on ne diminue pas les rations ! Dans certains pays, on n’a dit-on que 115 grammes par jour.

Trop pour ne pas mourir ; pas assez pour vivre !

 

Les blessés avaient les fenêtres de leur hôpital barricadées de planches. Un major français ayant le grade de général venant les inspecter, les a fait enlever de suite.

Samedi 16 janvier 1915

À minuit, l’otage arrive. 30 lits complets, 60 paires de drap, 60 couvertures pour 8 heures du matin à Avesnes !

Des blessés arrivant encore. Tout cela est conduit vers 11 heures (500 Frs d’amende pour le retard). Depuis ce matin, 600 blessés allemands non pansés arrivent directement du champ de bataille, paraît-il. À cause de cela, nous ne sommes pas encore rationnés. Encore un jour de gagné !

 

Hier, le canon a donné ainsi que la nuit, dit-on, mais il fait un tel vent qu’on n’entend rien.

Dimanche 17 janvier 1915

Morne dimanche sans rien de nouveau. Les blessés allemands à Avesnes, les moins atteints se promènent en ville, les vêtements pleins de boue.

Lundi 18 janvier 1915

Depuis 3 heures du matin, cela tonne très fort un peu partout mais surtout sur St Quentin. Les fariniers allant à Mézières-sur-Oise n’ont pu y arriver. Les 30 hommes requis pour travailler doivent aller demain à La Rouillies abattre des noyers, dit-on.

À Fourmies, plus de pain jusque vendredi. Cela ne nous arrivera-t-il pas aussi ? Toute la journée autos et autobus vont sur La Capelle. Cela n’arrête pas.

Chaque famille a encore un pain à chaque boulangerie.

Mardi 19 janvier 1915

La nuit et la journée, tonnerre sans arrêt, sur le sud, l’ouest et le nord. La semaine dernière, nos troupes auraient reculé de 8 Kms sur Soissons à cause de la crue de l’Aisne ! (*)

Ce qui est certain, c’est que cela rapproche depuis hier matin. Les 30 hommes qui devaient aller à La Rouillies travailler, ont été décommandés à 10 heures du soir hier ; 56 hommes de Sains devaient venir ici boucher les trous des routes et ont eu aussi contrordre.

 

Pour le pain, encore rien de nouveau ; à Avesnes le pain de seigle, qui a été fait hier, a été déclaré immangeable par le Gouverneur lui-même qui permet d’y remettre de la farine de blé. Les blessés français ont été envoyés en Allemagne ainsi que des curieux qui les regardaient embarquer.

 

(*) : C'est inexact : Dans le secteur de Soissons (à Crouy, plus exactement), l'armée française a lancé une attaque, qui n'a pas abouti. Les Français ont du retraiter sur l'Aisne, qui était en crue, et la retraite c'est transformée en débâcle. Nombreuses pertes françaises.

Voir la description de cette malheureuse affaire sur mon site   >>>   ici   <<<

Mercredi 20 janvier 1915

Hier à 9 heures du soir, demande pour aujourd’hui à 9 heures à Avesnes, d’une chaudière à feu mixte, de 10 mètres de tuyaux de poêle et de cuillers et fourchettes.

 

À 4 heures du matin, ordre d’aller chercher des émigrés à Avesnes ; ceux-ci arrivent à 20, venant des environs de Soissons, étant prisonniers des Allemands depuis 3 mois dans un château à Crécy-au-Mont ; les hommes seulement, leurs femmes ayant été évacuées ailleurs, ils ne savent où ?

Soissons disent-ils n’a jamais été allemand. Nos troupes seraient à 15 Kms de Laon. Toute la journée cela tonne encore au sud-ouest.

 

Un ordre encore demandant 25 paires de sabots, des poireaux, des pommes de terre, etc. Un autre demandant dans chaque commune les usines, brasseries, etc. Indiquer si elles sont en activité ou non.

(Que va-t-il encore arriver ? Le démontage des cuivres sans doute). (*)

 

Les États-Unis ayant déclaré qu’ils ravitaillaient la Belgique, la frontière belge ici est déclarée au niveau d’Avesnes par conséquent les vivres ne nous manquerons pas.

 

(*) : Rappelons ici que le couple COUROUBLE tenait une brasserie.

Jeudi 21 janvier 1915

Tonnerre toute la nuit et la journée toujours au sud-ouest.

À 9 heures, les 30 hommes demandés partent à La Flamengrie mettre des pierres sur les routes. 25 arrivants de Sains et de Floyon se joignent à eux.

Triste journée de pluie sans arrêt.

Vendredi 22 janvier 1915

Inondations partout. La nuit a été bien mauvaise.

Le canon n’arrête pas mais semble plus loin qu’hier ; cela parait tonner du nord. Les laitiers disent qu’ils recommenceront à faire du beurre à la laiterie dans 3 semaines, qu’ils planteront des pommes de terre et les récolteront avant de repartir !

Puissent-ils mentir !

 

Belle journée. Aujourd’hui le pain contient 1/10 de farine de seigle.

Samedi 23 janvier 1915

Tonnerre sans arrêt nuit et jour pour cesser vers le soir. Un demi-cercle de feu nous entoure. Cela paraît rapprocher.

 

À 8 heures ce matin, ordre de donner 30 couvertures de laine, 5 poêles et 20 mètres de tuyaux, 30 paires de draps.

 

À 4 heures du soir, une auto arrive, descend un officier qui visite la filature et les brasseries et vient m’annoncer le démontage des cuivres pour lundi. Je m’y attendais mais c’est dur tout de même. Malgré mes observations, il faut bien s’incliner.

Si encore ce n’était pas pour faire des balles !

Dimanche 24 janvier 1915

Le calme aujourd’hui.

Depuis ce matin plus de canon. Ils ont perdu, dit-on beaucoup de monde dans leurs tranchées où ils étaient inondés ; les noirs leur ayant sauté dessus.

Lundi 25 janvier 1915

Encore le calme.

Dès le matin, les ordres des vandales sont exécutés par une équipe de 6 ouvriers d’Avesnes surveillés par ceux de la laiterie.

Le chef est bien gêné de surveiller pareille besogne ; il m’en fait ses excuses et s’en va pour ne pas pleurer devant moi. Ordre leur a été donné par le commandant de ne prendre que le strict nécessaire.

On peut sauver quelques robinets ; les tuyaux démontés par nous avant et mis en haut, leur échapperont-ils ?

Toute la journée, ils coupent chaudières et tuyaux. Le tout sera pesé et ils me donneront un bon pour les kilos de cuivre.

Mardi 26 janvier 1915

Le travail de dévastation se continue.

Vivement demain que tout soit enlevé !

Hier, à 9 heures du soir, ordre d’aller encore chercher aujourd’hui 150 émigrés qui arrivent à 11 heures de Savoy, Vregny, Terny, près de Soissons.

Quel tableau ! On en oublie ses propres peines.

Vieillards, femmes, enfants ont été chassés de chez eux hier soir. Pourquoi ? Ils l’ignorent étant cachés depuis le 11 septembre dans leurs caves, ils ne demandaient qu’à y attendre nos troupes !

Plus de canonnade, rien.

 

Le soir, il faut encore 12 réchauds à alcool, des vêtements de toile, les cierges, bougies, chandelles se trouvant dans la commune.

Mercredi 27 janvier 1915

Il paraît qu’il y a aujourd’hui 56 ans que Sa Majesté Guillaume est venu en ce monde pour notre grand malheur. Aussi les soldats et les ouvriers ont congé, grande fête à Avesnes. Et on les laisse fêter sans les accompagner à coup de canon ! Même les autos ont congé, pas une ne passe.

 

Le soir, on raconte qu’un Allemand aurait assassiné un ambassadeur d’Italie (Tant mieux pour nous si c’est vrai !).

Lucien trotte seul partout.

Jeudi 28 janvier 1915

Toujours le calme, ni autos, ni canon, ni ouvriers ; on cuve son vin, sans doute. Cela n’empêche pas les réquisitions.

Aujourd’hui, il leur faut de tout : cuillers, fourchettes, couteaux, pioches, charbonnières, seaux hygiéniques, bassins émail, bains de pieds, bassins de malade, etc.

Je passe ma journée à les attendre pour l’enlèvement de leurs ferrailles mais personne ne vient.

 

À Fourmies, tout le long de la voie ferrée, ils font faire d’immenses tranchées où ils viennent enterrer leurs morts.

Vendredi 29 janvier 1915

Encore même journée qu’hier. Ils ne viennent pas encore !

La matinée deux gros coups sur le nord-est. Il paraît que l’Angleterre bombarde la Hollande pour recel de tous leurs vols, que les États-Unis les menacent s’ils font encore des prisonniers civils et s’ils volent encore.

Les cuivres vont-ils rester là ?

Leurs journaux disent que l’Italie mobilise (contre qui ?) que ce sont les soldats français qui ont pillé et brûlé le nord !

(Visite des 4 Anglais ?... à la brasserie).

Samedi 30 janvier 1915

Toujours le calme ; les cuivres sont encore là.

À l’émaillerie LUC à Fourmies, ils commencent à fabriquer des douilles de balles de mitrailleuses.

 

Un filet de neige depuis hier soir.

 

Hier, il est passé à Sains et Fourmies un aéro anglais qui aurait bombardé un train et jeté des dépêches à Fourmies. Ici, il en passe un sur cette direction au loin la matinée, deux autres l’après-midi ; nous ne sommes tout de même pas entièrement abandonnés.

 

La grande bataille de Soissons de la semaine dernière était dirigée par Guillaume lui-même qui est repassé ici, mercredi dernier en auto, dit-on.

Échec pour lui comme pour ses officiers.

Pour Monsieur MEHRING : 100 kilos belles pommes et 150 livres beurre frais 1ère qualité !

Dimanche 31 janvier 1915

Toujours journée sans canon. Quand l’entendra-t-on ? L’aéro anglais passé vendredi a paraît-il fait de la bonne besogne, incendié le garage de Chauny avec 50 (certains disent 150) autos camions. Ils craignent pour celui d’Avesnes.

 

Les cuivres démontés dans les pays voisins sont toujours en gare d’Avesnes ; les miens toujours à la brasserie.

Il neige de midi à 5 heures.

Février 1915

Lundi 1er février 1915

Rien de nouveau – Aujourd’hui dégel.

On annonce la mort de Madame de THÈBES qui aurait annoncé la mort de Guillaume pour 40 jours après la sienne, c'est-à-dire le 1er mars.

Ainsi soit-il !

Mardi 2 février 1915

Encore le silence. Une nouvelle affiche interdit la circulation sans passeport aux hommes, femmes et enfants.

Défense d’aller à Haumont, Maubeuge, Landrecies, Le Cateau, Hammapes, Tupigny, etc
Pluie.

Mercredi 3 février 1915

Enfin le canon, mais très loin au Nord-Ouest, Est.

Le temps paraît s’éclaircir.

Jeudi 4 février 1915

Comme hier cela tonne au loin. On raconte beaucoup de choses, mensonges encore sans doute. Ils auraient perdu 30 000 hommes à Verdun qu’ils voulaient offrir à Guillaume pour son anniversaire. Le prince de Saxe serait prisonnier à Arras avec 40 000 hommes.

 

À Hirson, beaucoup de troupes venant du Sud allant sur l’Est ; les boucheries sont fermées au civil.

À Avesnes il en arrive aussi ; ils évacuent la Belgique par ordre des États-Unis dit-on. Trois aéros sont passés hier, deux aujourd’hui !

Très beau temps.

Vendredi 5 février 1915

Encore tonnerre le matin à l’Est, l’après-midi sur Arras. Un aéro le matin…

Les émigrés valides ont ordre de retourner à Chauny travailler. Le temps paraît au beau pour une période.

Samedi 6 février 1915

Rien de neuf. Il tonne au loin mais déjà la pluie revient. Il faut 100 livres de beurre et 200 fromages pour demain.

Dimanche 7 février 1915

Tonnerre au loin, roulement sans arrêt.

Hier soir, sont arrivées de Cambrai, les ordonnances du pape demandant la paix ; un journal français du 20 janvier donne de l’espoir, il donne une photo du Kronprinz prise à St Michel, ce qui prouve qu’il n’est pas tué comme on l’avait dit.

Lundi 8 février 1915

Il faut cette semaine 5 vaches grasses, pour aujourd’hui 2 violons (pour les blessés français ?).

 

Le soir, on vient dire que demain matin nos cuivres seront enlevés et surtout ne rien soustraire, sous peine de châtiments graves.

Il paraît qu’en France, les journaux sont interdits pendant 10 jours, que le roi des Belges combat dans notre armée.

Mardi 9 février 1915

À 9 heures du matin, les chariots arrivent et chargent 1 050 kilos de cuivre chez moi et  1 130 kilos chez MATON (brasserie également). Qu’en recevra-t-on ?

Rien de nouveau…

Mercredi 10 février 1915

Toujours le calme ; l’après-midi cela tonne mais si loin !

Pour les brasseries, une restera paraît-il par Commandanture et moyennant finances ! 13 000 Frs pour la coopérative de Wignehies pour 6 mois. Les brasseries en activité pourront finir leur grain, moyennant argent toujours et seront démontées aussi.

 

Pour vendredi, encore 100 kilos de beurre et encore 30 paires de sabots. Il est passé aujourd’hui beaucoup d’autos, entre autres 3 couvertes de croix rouges remorquant chacune trois wagonnets où s’entassaient couvertures et matelas et blessés, dit-on.

Jeudi 11 février 1915

Comme hier il canonne un peu.

Hier soir sont passés des fours et cuisines roulantes, allant sur Avesnes. On annonce des passages de troupes ?

Vendredi 12 février 1915

Il faut encore à ces messieurs des carottes, poireaux, choux, navets et 300 livres de beurre pour mardi. On annonce que les émigrés n’auront plus droit qu’à 250 grs de pain par jour et on invite le public à bien accueillir les réquisitions faites ; quiconque n’y participera pas sera signalé au Gouverneur.

Défense d’aller voler dans les pâtures et les propriétés.

 

Le canon donne un peu jusque midi. Ils viennent chercher 16 voitures de foin.

Samedi 13 février 1915

Pluie à verse.

Cela cesse à midi et on entend le canon sur la Belgique un peu plus fort.

 

Pour mardi, 150 vaches jeunes prêtes à vêler et 300 livres de beurre. Ces messieurs recommandent d’ensemencer le plus de terre possible, ne pouvant plus nous nourrir (!!!) l’année prochaine.

 

Le soir, des lueurs se voient au nord-ouest.

L’Italie mobilise ??

Dimanche 14 février 1915

(Carnaval) – Rien de nouveau. Monsieur le Doyen envoie aux prisonniers de Maubeuge des lettres de leurs parents.

Lundi 15 février 1915

Paul WILLAME est nommé chef de culture. Pour Etrœungt, obligation de planter 15 razières de pommes de terre et 15 d’avoine.

Monsieur NAVARRE doit veiller à ce que tous les jardins soient ensemencés pour le 25 mars. Ils viennent à la filature chercher les fils et les déchets.

Il passe encore une locomobile.

Mardi 16 février 1915

Les 150 vaches sont amenées. Ces Messieurs en choisissent une quarantaine toutes rouges estimées 450 Frs. Les bons (de réquisition) reviennent ne portant plus que 425 Frs pour chaque. Le canon tonne toute l’après-midi, mais si loin !

Les inscrits de 18 et 19 ans doivent aller à Avesnes demain passer une revue ???
Le démontage des cuivres est arrêté à Wignehies. La laiterie va reprendre jeudi. Passe un peu d’autos.

Mercredi 17 février 1915

Des Allemands viennent démonter le téléphone de La Capelle à Avesnes ; il sera rétabli, paraît-il, jusque Chauny. On prétend que 4 000 Anglais débarquent tous les jours à Hambourg mais nous n’osons y croire.

Toute la journée il tonne au loin. 5 Frs d’amende à Avesnes à ceux qui ne suivent pas les cours d’allemand.

Jeudi 18 février 1915

25 chariots à 2 chevaux vont sur La Capelle, à vide... Deux aéros passent sur les Bahardes, Tatimont, Basse-Boulogne allant vers Avesnes ; deux sont passés hier à Rocquigny.

Le maire est appelé à Avesnes ; un habitant d’Etrœungt pris sans passeport sur la route d’Avesnes est arrêté, passe en conseil de guerre et emprisonné pour 26 mois.

Défense d’aller d’un village à l’autre sans passeport. (Ceux-ci coûtent 2 Frs par personne et 10 Frs par cheval).

Ils disent avoir fait 52 000 Russes prisonniers.

 

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Vendredi 19 février 1915

Allons au Grand Bois.
Cela tonne encore au loin ; le 27 janvier, ils auraient perdu 30 000 hommes à Ypres. Le pain devient rare, 1Fr30 les 3 kilos et il faut passer ½ jour pour en avoir 3 livres.

Demain HEUCLIN ne cuit plus. Comment cela tournera-t-il ?

 

À La Rouillies, ils n’ont eu qu’une fois du pain cette semaine et quel pain ! Son, paille, eau, nulle trace de farine. Les troupes remontent sur Hirson, à Solesmes beaucoup d’Allemands. On ne peut plus aller plus loin que Guise.

Les pommes de terre n’arrivent plus. Tout hausse. Les haricots à 1 Fr. 50 le kilo !

Samedi 20 février 1915

Cohue encore pour le pain ; certains s’en passent. Le canon donne au loin. Un aéro est encore passé hier.

Dimanche 21 février 1915

Le bruit court depuis quelques jours que les Anglais ont débarqués à Hambourg. Lens serait repris.

Une femme revient de Lille, se sauvant, dit-elle, des bombes qui tombent dru. Plus de canon mais les trains n’arrêtent guère de marcher. 32 trains de soldats et de canons sont passés hier à La Capelle allant sur Hirson, Mézières.

Pourquoi ?

Lundi 22 février 1915

Toutes les puissances s’en mêlent ; on confirme que l’Italie marche avec nous, la Hollande aussi, dit-on ( ?).

 

Pour eux encore 325 livres de beurre ; 15 émigrés sont repartis travailler à Chauny ? Aux environs, réquisition des tonneaux de brasserie et de sacs vides pour remplir de terre pour faire des courtines. Cela n’arrête pas.

Le Gouverneur fait demander de lui porter vendredi toute la monnaie d’or étant dans le pays contre du papier ! ! (Il peut se fouiller !!)

Aujourd’hui ½ livre de pain par personne, des carnets sont mis en circulation.

Mardi 23 février 1915

Il ne faut pas être gourmand pour être rassasié 250 gr ce n’est pas gros ! La laiterie refonctionne à partir de demain pour ces Messieurs, naturellement.

Plus de canonnade.

Mercredi 24 février 1915

À 1 heure du matin, l’otage vient apporter l’ordre aux émigrés de plus de 60 ans et de moins de 12 ans, aux infirmes ou invalides, de se rendre à Avesnes pour être rapatriés, via Allemagne, Suisse, France !

Pauvres vieux et pauvres enfants ! Auront-ils assez souffert !

Il paraît qu’hier ont été emmenées toutes les grosses autos par chemin de fer. Où ?

Jeudi 25 février 1915

Je vais à Avesnes pour avoir le bon des cuivres. On me le promet pour demain. 23 coups de canon sont tirés à Maubeuge sur un aéroplane qui, dit-on, a jeté des bombes.

Vendredi 26 février 1915

Toujours canon au loin.

Rien de nouveau.

Samedi 27 février 1915

Le matin mon bon de cuivre arrive. J’ai bien fait de me déranger. On demande la quantité de laine brute ou lavée étant dans le pays.

 

Le soir, annonce : Les habitants sont prévenus que l’Allemagne peut leur fournir de la bière de Munich à 35 Frs l’hectolitre ; un échantillon est à Avesnes.

Toutes les brasseries sont prévenues du démontage prochain.

Dimanche 28 février 1915

Les émigrés restants doivent partir demain à midi pour la France, toujours via la Suisse. Quelques-uns restent étant malades ou nouveaux nés.

Mars 1915

Lundi 1er mars 1915

Je risque de donner des lettres à une émigrée. Si elles pouvaient arriver !

Rien de nouveau.

 

L’après-midi, orage de grêle ; passage d’autos de la croix Rouge…

Mardi 2 mars 1915

Le calme, toujours.

1 dindon pour sa Majesté MEHRING !

Mercredi 3 mars 1915

Hier, tout passant au poste à Avesnes était arrêté, même des femmes ont goûté du violon. Tous les marchands ont eu leurs marchandises confisquées. Les routes sont barrées, étant passée dit-on une auto française avec officiers français. Ils sont furieux.

 

La nuit et le matin, roulement violent qui cesse vers 8 heures.

À partir de demain, la commune doit payer un homme et 2 chevaux pour travailler au bois à Felleries. On annonce de faire déclaration des poulains jusque 3 ans.

Jeudi 4 mars 1915

Canon toute la journée. Lille et Douai seraient repris. (Jusque à quand ?)

Pascal serait mort en Allemagne ?

200 gendarmes américains font, paraît-il, la police en Belgique. Deux auraient été trouvés criblés de balles et noyés à Hautmont. Une auto américaine aurait disparu ?

Les brasseries de Cartignies devaient être démontées hier.

Contrordre – (L’heure critique).

Vendredi 5 mars 1915

Cela ne va pas mieux aujourd’hui. 2 heures pour avoir 1 pain de rebulot et demain 1 Fr. 50 les 3 livres. Dans certains endroits taxe 150 gr de pain de son, de paille et de seigle ! Combien de temps cela durera-t-il ?

 

À Landrecies, les prisonniers civils sont nourris de betteraves. Défense maintenant d’écrire aux prisonniers dont on n'a pas l’adresse ; les mandats ne sont plus garantis.

 

À Avesnes, on doit abattre nombre de maisons pour faire une grand-route directe de la gare au haut de la ville. Toutes les routes sont barrées.

Le matin, passent 45 voitures chargées absolument de tout, allant sur La Capelle ; suivent une roulante et un chariot de soldats. Plus de canon.

Samedi 6 mars 1915

Rien de particulier. Affiche interdisant l’exportation de denrées d’un pays à un autre.

Recommandation de faire bouillir l’eau avant de s’en servir.

Affiche :

" Vu la pénurie des vivres, nous invitons les personnes dont la présence n’est pas obligatoire, c'est-à-dire femmes, enfants et vieillards, à retourner en France non envahie. Des trains partiront tous les jours."

"Sont exclus les hommes de 15 à 60 ans ".

 

Dimanche 7 mars 1915

Canon l’après-midi.

Le soir, affiche invitant les familles nécessiteuses à se faire inscrire pour mardi, pour être expédiées en France par la Suisse. Tout le monde peut se faire inscrire. Ne nous y forcera-t-on pas un jour prochain ?

 

Le matin du 16 février, dépêche du Commandement des armées russes : 1 200 officiers allemands, 170 000 soldats, 3 000 officiers autrichiens, 400 000 soldats. Duclaux intendant Général des armées. 3 000 000 soldats à mettre en ligne.

Lundi 8 -mardi 9 mars 1915

2 ou 3 familles sont inscrites.

Rien de neuf. Faut 2 canards.

Mercredi 10 mars 1915

Des gens revenant d’Hirson et Le Nouvion, disent y avoir beaucoup de troupes sales, en loques et beaucoup sans armes.

À midi, les gendarmes viennent arrêter Monsieur le Doyen. (On apprend que les soldats de Cambrai ont dû aller à Évreux au dépôt !)

Jeudi 11 mars 1915

Monsieur le doyen est revenu hier soir, après avoir passé en conseil de guerre pour avoir envoyé des cartes postales aux prisonniers en Allemagne. Il est accusé d’espionnage donc fusillé !

Enfin, cela s’arrange, il revient mais à l’avenir n’en enverra plus.

 

On certifie la reprise de Lille et de Tournai. Un train d’émigrés de Fourmies serait revenu, disant avoir été attaqué en Allemagne par les Français qui auraient passé le Rhin. En tous cas, le départ des nouveaux émigrés est contremandé.

À La Flamengrie et La Capelle, encore des troupes de toutes armes dans le plus triste état.

1 500 chevaux arrivés sans aucun harnais ; 1 cavalier pour 40 chevaux environ. Il arrive aujourd’hui 3 wagons de charbon. Il faut 400 fromages.

Vendredi 12 mars 1915

Les ouvriers partis pour 10 jours travailler aux routes du Nouvion sont revenus le 2ème jour, n’ayant plus d’Allemands cantonniers pour les conduire ; ceux-ci sont partis en Allemagne ne pouvant plus être payés ici.

Un camp de prisonniers français aurait été reculé à cause des progrès de l’armée française. Souhaitons que cela soit vrai !

Samedi 13 mars 1915

L’après-midi, 2 fortes détonations suivies d’une canonnade de 2 heures au loin. Sur 90 autos neuves parties de chez DESHAYES, une seule est rentrée, les autres ayant été prises par des cuirassiers français. 

Dimanche 14 mars 1915

Aujourd’hui faut 2 vaches grasses.

Calme complet. Passent 15 autos en file sur La Capelle.

Lundi 15 mars 1915

À prendre chez les émigrés, 15 marmites émail.

À fournir encore 200 fromages et des choux-navets. On recommande de faire ses couches et de semer. S’il n’y pas de verres, dit le Monsieur le Gouverneur, ajuster des planches et les couvrir avec les fenêtres des émigrés.

Tout voyageur sans passeport est arrêté et emprisonné.

Mardi 16 mars 1915

Rien de nouveau. On commence à abattre des maisons à Avesnes.

Mercredi 17 mars 1915

Canon toute la journée très loin, le soir cela rapproche.

Des gendarmes circulent dans le village.

Jeudi 18 mars 1915

Encore à prendre chez les émigrés 25 chaises de fer. Conduire à Avesnes 8 tombereaux de fumier sur le champ de Mars pour y planter des pommes de terre. On découvre les voleurs qui pillent depuis quelque temps.

 

L’après-midi, le canon s’entend assez fort.

 

Le 18 mars 1915, Adolphe COUROUBLE, mari de Lucienne, (soldat au 126e régiment d'infanterie) écrit recevoir la première carte de sa femme depuis août 1914. Rappelons que sa femme était en zone occupée dans le Nord. Comment le courrier traversait le front ?

 

« Quelle joie débordante en tout mon être. »

« Oh ! Ma chérie, combien je t’aime et je te remercie d’avoir pu arriver à me donner ainsi de tes nouvelles. Que ne puis-je faire de même ? Tu dois être bien anxieuse sur mon sort. Je vais essayer de mon côté de te faire parvenir quelques mots. Puisse la bonne Vierge de Lourdes favoriser mon dessein. »

 

Voir l'extrait du 18 mars 1915 du carnet de guerre d’Adolphe >>> ici  <<<

Vendredi 19 mars 1915

St Joseph.

Un peu de canon encore. Sur Ohis n. maison, tranchées et artillerie.

Samedi 20 mars 1915

Calme malgré le beau temps. Une cinquantaine d’hommes arrivent chercher des fils à la filature et vont démonter (en même temps) la brasserie de Floyon.

Les jardins des émigrés devront être plantés tout en pommes de terre pour les Allemands. 1 800 vaches (100 pour Etrœungt) seront mises en pâture pour eux.

Les haies doivent être arrangées.

Dimanche 21 mars 1915

Au loin canon le matin. Encore 6 haches paille à leur conduire avec la laine brute des moutons.

 

Le soir, 3 aéros français, croit-on, vont direction Arras vers l’Est. Le pain devient ‘extra’ son, paille, rebulet (déchets de mouture), sené, tout y est sauf la farine et encore, combien de fois on est sans levure !

Lundi 22 mars 1915

Annonce :

" Interdiction de vendre ou boire de l’alcool ; déposer tout celui que l’on possède à la mairie pour envoyer à la Commandanture. 40 hommes doivent partir demain à La Capelle au champ de courses pour planter des pommes de terre. "

 

Le canon donne enfin sans arrêt mais loin encore !

Mardi 23 mars 1915

La matinée, passe un état-major qui stationne près du pont et l'examine puis remonte dans 4 autos et file sur Avesnes. Le canon donne encore. 8 Allemands sont arrivés ce matin avec pics, pelles et brouettes pour travailler sur les routes.

Quoi faire ?

Les hommes partis ce matin ont été partagés. Certains sont à Rocquigny cantonniers, d’autres ailleurs. Entre La Capelle et La Flamengrie, on creuse encore des tranchées. Allons-nous avoir du nouveau ? L’état-major de Chauny est venu à Guise depuis samedi.

 

Le journal de Rethel depuis le 7 est imprimé à Charleville. (Recul donc !)

On affirme que le génie a placé hier un pont de bateaux à Ors. Un des aéros de dimanche, un Anglais, a atterri à Felleries, a fait son plein d’essence à la barbe de 40 Allemands qui étaient là sans armes ! Puis filé lestement sur l’Est, en leur faisant un pied de nez.

Mercredi 24 mars 1915

Silence – Très peu d’autos passent.

Les 8 Alboches sont partis déjà ; que sont-ils venus faire ?

Jeudi 25 mars 1915

Les 40 hommes partis mardi arrangent les routes de Rocquigny, Féon, etc. Des tranchées ont été faites à La Flamengrie. L’artillerie allemande serait en batterie à Sains Richemont. Va-t-on enfin entendre le canon pour de bon ?

 

La commune verse demain 5 000 Frs pour être ravitaillée par les États-Unis comme la Belgique. Cela améliorera peut-être le pain qui n’est vraiment plus qu’une galette de glu sans levure et à 17 sous les 3 livres encore ! Les Américains à Bruxelles auraient dit aux maires :

 

" Vous étiez Allemands, vous serez Belges et Français dans 15 jours "

Si c’était vrai !

 

Le pain est complètement noir et sans levure ! Du vrai tourteau.

Vendredi 26 mars 1915

Le canon donne l’après-midi.

À Anor, État-major, génie, troupes, tout est plein.

Pas de pain aujourd’hui – Manque levure.

Samedi 27 mars 1915

Les 100 vaches à nourrir sont arrivées ; Où va-t-on les mettre ?

 

Le soir, affiches rouges obligeant tout le monde à avoir une carte d’identité.

Défense absolue de circuler en voiture – Paiement des sauf-conduits de 1 à 5 marks.

Défense de circuler après 9 heures du soir, heure allemande.

Affiches bleues donnant le ravitaillement suivant par jour et par personne :

 

"150 gr farine de seigle, 250 gr de pomme de terre, 150 gr de viande trois fois par semaine"

"Défense de tuer sans autorisation. Obligation du travail pour tout le monde ".

 

Régime de fer pour tous. Le pain est de plus en plus noir et détestable.

Dimanche 28 mars 1915

Le soir ordre pour demain matin : 10 tombereaux doivent aller chercher du charbon à Avesnes pour la laiterie.

Depuis vendredi, on laboure le champ de manœuvres.

Lundi 29 mars 1915

Il gèle comme en plein hiver, sans doute cela empêche de tirer le canon. Ce que l’on s’ennuie de ne plus l’entendre !

À midi un aéro passe de l’Ouest à l’Est. Les Allemands qui sont à Anor, à La Capelle, etc. seraient revenus d’une déroute dans les Ardennes. La semaine dernière, les trains marchaient deux de front sur Hirson, menant des troupes pour combler les vides.

Mardi et mercredi 30-31 mars 1915

Silence désolant toujours !

Plus de pain depuis ces deux jours.

Avril 1915

Jeudi 1er avril 1915

Aujourd’hui on cuit du vrai tourteau.

Dieu ! Quand mangera-t-on du pain blanc à son appétit ! Encore on ne cuira pas avant lundi. Cela fait de petites rations. L’État-major de St-Quentin serait au Nouvion ! (1er avril sans doute).

Vendredi 2 avril 1915

À force de prêter l’oreille, on entend parfois un coup de canon. Quand l’entendons-nous pour de bon !

Distribution des cartes d’identité à tous les habitants.

Samedi 3 avril 1915

Les vaches amenées ont la cocotte (Fièvre aphteuse). Pourvu qu’elles ne la donnent pas aux autres.

Pour mardi, il faut encore verser 19 000 Frs.

 

L’après-midi, le canon tonne.

À partir d’aujourd’hui, on a 2 livres de pain par personne tous les 8 jours et du vrai tourteau.

Dimanche 4 avril 1915

Pâques.

On entend enfin le canon assez fort. Des troupes seraient à Dompierre et environs, 6 000 soldats ont logé à Vervins avant-hier, repartant à 3 heures du matin vers les Ardennes.

Lundi 5 avril 1915

Toute la nuit et la matinée, cela tonne. Le sermon de la messe est souligné de coups de canon. Les troupes arrivées à Dompierre et environs seraient encore en déroute.

À force d’en avoir, la dernière arrivera-t-elle bientôt ?

Mardi 6 avril 1915

La nuit cela a donné encore. Le jour plus rien.

Des troupes logeraient à La Flamengrie. Depuis quelques jours, il passe bien peu d’autos. Appel aux contribuables pour les 19 000 Frs !

Mercredi 7 avril 1915

Ce matin, bon nombre de lettres arrivent par la Croix-Rouge, en cachette.

Hélas, rien pour moi : un seul petit mot dans une mais si vague que nous sommes inquiets.

Il leur faut des brosses, balais, ramasse poussières, pots, légumes, pris toujours chez les émigrés. Ce qu’ils ont bon dos !

Jeudi 8 avril 1915

Hier et aujourd’hui, averses et inondation. Aussi plus de bruit de canon. Un journal français, rapporté lundi, donne espoir d’une délivrance prochaine.

Mais nous avons perdu la foi.

Vendredi 9 avril 1915

Des lettres arrivées en fraude, arrivent nombreuses, 4 000 paraît-il. Beaucoup donnent de leurs nouvelles.

Rien pour moi.

Samedi 10 avril 1915

Un mot arrive pour FLOYON, donnant de bonnes nouvelles d’Adolphe et les CHANTRAINE. Cela soulage un peu.

Peut-être aurons nous aussi un mot d’ici peu.

Dimanche 11 avril 1915

L’après-midi, passe un aéro allant du Sud au Nord. Rien de nouveau.

À 6 heures, une affiche :

 

" Le Gouverneur rappelle aux hommes, femmes, enfants, qu’ils sont obligés de saluer les officiers allemands, indistinctement ".

Lundi 12 avril 1915

Calme. Passent des autos de la Croix-Rouge.

Logement à Maroilles même Floyon parait-il. L’offensive allemande doit reprendre le 15.

Les hirondelles sont revenues. Nous annoncent-elles le retour des absents ?

 

Ce matin, les télégraphistes sont encore venus toucher aux fils, ils en rajoutent le long de la route nationale. Ils redemandent encore s’il reste des appareils téléphoniques.

Mardi 13 avril 1915

La nuit à 11heures, Boum ! Boum ! La matinée encore quelques coups.

Le mouvement de retraite s’accentue. Rocquigny doit prendre des mesures pour loger un corps d’armée. Les monts de pierres et de terre ont été enlevés des à-côtés de la route pour l’élargir.

 

À Avesnes, en gare un certain nombre de blessés français échangés revenant d’Allemagne.

Défense aux Avesnois de sortir de crainte de leur parler…

 

Monsieur LÉO (celui de la laiterie) aurait dit que dans un mois la guerre serait finie ??

Espérons-le.

Mercredi 14 avril 1915

Huit autos camions passent aujourd’hui à vive allure allant sur La Capelle. Les motos circulent.

Le canon tonne assez fort sud-ouest. Les farines américaines, pour lesquelles on a versé 5 000 Frs, sont à Avesnes mais seront livrées quand toutes les communes auront payé leurs contributions. Elles doivent répondre les unes pour les autres.

On a porté hier à Avesnes une lettre pour Monsieur A. FABRE et Gilbert.

Suivront-elles ?

Jeudi 15 avril 1915

La nuit canon. Je renvoie encore une lettre.

Ernestine vient nous voir. Le canon tonne fort au Sud. Passe très peu d’autos. Le Gouverneur de Chauny serait à La Capelle ?

Vendredi et samedi 16-17 avril 1915

Calme désespérant. Malgré le beau temps depuis mardi, rien ne bouge ni ne tape !

La gare de Busigny serait démolie !

Dimanche 18 avril 1915

Hier, il fallait 200 fromages, 2 vaches grasses, des dindons, etc. Il passe encore une dizaine d’autos en file.

La nuit, il revenait des grosses. On n’y comprend rien. Certains disent entendre le canon mais il faut avoir l’ouïe fine.

Lundi 19 avril 1915

J’envoie encore une lettre par la Hollande. Arrivera-t-elle ?

Il leur faut des hache-viandes !!

Mardi 20 avril 1915

Le dépôt d’essence et de munitions de St-Quentin a été bombardé et a sauté la semaine dernière. Tout est brûlé. On raconte que le Gouverneur de Verdun aurait livré passage aux Allemands mais la chose ayant été découverte à temps, l’officier a été fusillé.

80 000 Allemands auraient été pris ou tués. Est-ce vrai ?

 

Depuis l’après-midi, on entend de gros coups. (Le docteur vient pour Louise).

Mercredi 21 avril 1915

Calme toujours.

Jeudi 22 avril 1915

Idem.

Vendredi 23 avril 1915

Faut couteaux, cuillers, fourchettes. Canon au loin.

Samedi 24 avril 1915

Le Gouverneur demande la quantité de fauteuils d’osier, tables, chaises longues dans le village. Canon au loin.

Dimanche 25 avril 1915

Cela tonne plus fort. Les Russes avancent sur Budapest, dit-on. Les Anglo-français seraient à Ostende.

Hier, à Avesnes, des soldats arrivés le matin sont repartis dans l’après-midi avec quantité d’artillerie démolie, allant sur Namur et l’Allemagne, disent-ils.

Lundi 26 avril 1915

Le canon donne le matin sur l’est. Rien de nouveau. Les trains se succèdent allant vers Aulnoye.

De là, où ? Ils marchent sur Calais, disent-ils.

Mardi 27 avril 1915

Ils affichent aujourd’hui une avance de 10 Kms près d’Ypres. On va chercher pour 1 000 Frs de graines de pommes de terre pour les jardins des émigrés.

Mercredi 28 avril 1915

Calme complet

Les journaux belges disent que nous avons repris nos positions.

Jeudi 29 avril 1915

Calme complet.

Les cantonniers qui élargissent les routes de Rocquigny, Mondrepuis, CLAIREFONTAINE, disent qu’on les presse et que les ponts sont minés.

Vendredi 30 avril 1915

La nuit canon et toute la journée. Il paraît que la gare d’Aulnoye a été détruite cette nuit par un dirigeable anglais. Le Gouverneur est très fort en colère, au marché il fait coffrer le marchand de l’ " L’Écho de Maubeuge " et à Fourmies, plus de poste ; le drapeau américain est arboré et on fait, dit-on, le marché libre demain, dit-on.

 

Demain, on doit aller chercher la farine blanche (28 sacs !!!) qui est à Avesnes depuis 1 mois.

À Clairefontaine, les fils téléphoniques sont enlevés, les poteaux arrachés ou sciés.

Mai 1915

Samedi 1er mai 1915

Il paraît que ce sont les établissements RAMBREUX, face à la gare d’Aulnoye, qui ont sauté. La ligne est quand même détruite ; on n’entend plus les trains circuler. Le canon s’entend très peu.

Le pain est un peu moins mauvais.

Dimanche 2 mai 1915

Ca tonne ! Tonne ! Plus vient le soir, plus cela tonne. (*)

Demain, il faut donner 40 veaux, autant dans 8 jours, autant dans 15 jours.

 

(*) : Il s'agit de l'offensive française en Artois (50 km de Lucienne) qui se prépare.

Lundi 3 mai 1915

On fête les 9 mois de guerre ! Dans la nuit et toute la journée ça tonne et cela claque surtout le soir vers St Quentin
À Cartignies, 200 personnes sont arrivées venant de Noyon et de St-Quentin ; ils disent que ça va bien. Lille est cerné dit-on.

Le gouverneur est mordu à l’oreille et au doigt par son singe !!! (Gare à la rage !)

Mardi 4 mai 1915

Il est encore passé des émigrés à Avesnes, venant de La Bassée.

Ils ont crié que Lille était repris (pour la dernière fois ?). Nos troupes auraient passé le Rhin dit-on, perdant 70 000 hommes et les Allemands 120 000. Les troupes qui repartaient d’ici, allaient là-bas en renfort et seraient arrivées trop tard pour eux
Orage – (Ceci a été affiché 1 heure à Avesnes puis enlevé – Mensonge probable.)

Mercredi 5 mai 1915

Canon un peu l’après-midi.

Orage.

Jeudi 6 mai 1915

Calme, on est désolé. Orage.

Faut 26 quarterons (le quart d’une centaine soit 25) d’œufs à 1 Fr. 25.

Vendredi 7 mai 1915

Orages encore.

L’après-midi de gros coups de canon. Ils annoncent qu’ils ont avancé de 150 Kms en Russie.

Depuis 8 jours, plus de journaux allemands et presque plus d’autos. (On coupe les cheveux de Lucien).

Samedi 8 mai 1915

Orages toujours.

Plus de canon. Ils ont tué un jeune homme à Wignehies.

Dimanche 9 mai 1915

Deux forts de Metz sont tombés, dit-on. Ici rien de nouveau.

Déclarer les étalons et défense de faire saillir les juments.

Lundi 10 mai 1915

Canon au sud.

Un corps d’armée allemand se serait rendu à Verdun. L’Italie aurait déclaré la guerre à l’Autriche. . Hier, un dirigeable a jeté des bombes sur la gare de Jeumont
(On remonte la boutique).

Mardi 11 mai 1915

Depuis hier soir, une patrouille perquisitionne à Tatimont, faisant éteindre les lumières après 9 heures (heure allemande).

Dimanche déjà, ils ont trouvé de la farine dans une maison et l’ont requise. Les trains remarchent beaucoup. Il leur faut une feuillette de vin. 

Mercredi 12 mai 1915

Trains roulent tout le jour venant de l’Est sur Dunkerque. Le canon roulant toujours. Les bombes à Jeumont ont manqué leur but, sont tombées à 300 mètres.

Lucien dit " Lilise " et mange seul ; ses deux grosses dents sont percées.

Les patrouilles font éteindre les lumières après 9 heures du soir. Une affiche défendant de faucher les luzernes, trèfles, herbes, pour les donner vertes – obligation de tout faner.

Jeudi 13 mai 1915

Ce que ça tape ! Tant mieux si c’est du bon ouvrage, cela fait plaisir à entendre le boucan… (*)

J’apprends que Jules est à Merden.

 

(*) : Toujours l'offensive d'Artois

(**) : Camp de prisonnier de Merden, en Allemagne.

Vendredi 14 mai 1915

Cela tonne encore bien fort. Les Allemands auraient reculé à Ypres jusque Courtrai.

J’écris à Jules.

On dit que Metz s’est rendue.

Samedi 15 mai 1915

Toute la nuit et la journée grondement qui s’accentue vers midi pour bien donner à 4 heures.

 

Vers 7 heures, une cinquantaine de détonations violentes, les portes en tremblent !

Cela va-t-il enfin bouger ?

 

Cette semaine, 2 vaches grasses et 92 veaux. Affiche défendant de lire des journaux français ! Et d’avoir des pigeons (Encore !).

Maubeuge est remplie de blessés.

Dimanche 16 mai 1915

B.J. d’Arc chassez les Allemands ! Boum -Boum encore. Tout le jour.

Hier soir, c’était la gare du Cateau qui sautait ainsi que des trains de munitions à St Bénin entre Le Cateau et Wassigny. Les gares de Bohain et de Wassigny ont été manquées. Les Français sont à Douai.

Confirmation de la presse de Metz. (Est-ce vrai ?).

Lundi 17 mai 1915

Canon violent toute la nuit, cela cesse vers 10 heures du matin (Voici 6 jours que cela tapait) – Chauny serait repris. Tant de bonnes nouvelles, nous semble trop beau.

 

D’après un journal français (malgré tout il en passe parfois), il faut espérer être délivrés pour le 15 juin. Leurs journaux et affiches avouent avance des Français de 7 kilomètres sur toute la ligne mais en outre des progrès immenses en Russie. (C’est trop loin pour aller voir !)

Mardi 18 mai 1915

Demain pain blanc, 3 livres par personne et par semaine ; augmentation d’1 livre. Cela ne fera pas de mal.

Repasse des Français en omnibus, venant de l’hôpital de Guise. Très gais, ils crient :

 

" Cela va bien, ça chauffe ! ".

 

Toute l’après-midi, des autos vont et viennent de Guise à Avesnes. Les postes de Cartignies, Fourmies etc. sont supprimés. À Fourmies, 3 canons sont posés au Fief, ils creusent encore des tranchées et font blanchir les plus hautes cheminées des usines.

La matinée on entend encore de gros coups.

Mercredi 19 mai 1915

À 7 heures du matin, les poulains sont appelés. Une fiole de sang est prise à chacun d’eux. (On récoltait le sang afin de fabriquer des sérums anti-diphtériques).

Les autos transportant les blessés de Guise passent encore 2 fois avec des Français. On leur donne tabac, vin, argent, œufs, etc.

Jeudi 20 – vendredi 21 mai 1915

Calme toujours. Ordre pour demain d’évacuer les vaches allemandes.

Samedi 22 mai 1915

Les vaches partent, il leur faut y joindre 25 taureaux.

Lens et Douai sont repris ?

Changement de pays pour les commandantures.

Dimanche de Pentecôte 23 mai 1915

Rien de rien. L’Italie ‘officiellement’ marche avec nous. (*)

 

(*) : C’est exact, l’Italie déclare la guerre à l’Autriche-Hongrie, le 23 mai 1915

Lundi 24 mai 1915

Toujours pas de canon.

Mardi 25 mai 1915

Avis :

" Défense de circuler hors de 5 heures du matin (heure allemande) à 10 heures du soir ".

 

On fait l’appel des hommes à Boulogne. On s’ennuie après le canon.

Mercredi 26 mai 1915

Appel à Floyon. Le canon le matin.

Jeudi 27 mai 1915

Le maire a été appelé hier à Avesnes pour une grosse affaire : on ne salue pas ces Messieurs ! Aussi affiche et sonnette :

 

" Obligation de saluer Messieurs les officiers en se découvrant. Et se levant si on est assis ! ". 

 

Autre chose : les foins devront être fauchés et conduits le long d’une route désignée et tous mis en meules couvertes.

Le canon tonne loin toute la journée. (Le vent est très grand).

Vendredi 28 mai 1915

Rien de nouveau
Arrivent 150 vaches de St Richaumond.

Samedi 29 mai 1915

Canon très loin.

Dimanche 30 mai 1915

Encore des affiches défendant de communiquer et de faire des signaux aux ennemis sous peine d’incendie.

Défense de loger des étrangers, etc. Toujours les mêmes choses.

Le soir cela tonne assez fort.

Lundi 31 mai 1915

Plus de canon. Il fait très froid.

Aujourd’hui pain gris.

Juin 1915

Mardi 1er juin 1915

Canon au loin tout le jour. Une entente est faite pour mettre le foin dans ses granges à condition de déclarer le nombre de quintaux récoltés en foin et en renures.

Monsieur le Gouverneur se plaint que les vaches grasses sont trop maigres.

La cocotte apparaît.

Mercredi 2 juin 1915

On leur conduit des faux, des pelles, des bêches, etc.

Plus de canon hélas !

 

Hier, est arrivé une patrouille de quelques soldats français pris à Sin-le-Noble, amenés à Avesnes. Il paraît que les États-Unis demandent 3 milliards à l’Allemagne pour la perte du Lusitania (*) ou déclarent la guerre (gare au ravitaillement pour nous !).

 

(*) : Un des plus beaux paquebots du monde, faisant la navette Angleterre-États Unis, est coulé par un sous-marin allemand le 7 mai 1915 à l’ouest de l’Irlande. Bilan 1 198 victimes civiles dont 124 Américains parmi des ressortissants de pays neutres.

Jeudi 3 juin 1915

Canon tout le jour surtout le soir. Ils font faucher les blés en certains endroits et rouler les pommes de terre. (*)

 

(*) : Les Allemands avaient peur de l’avancée des troupes françaises pendant l’offensive d’Artois. De ce fait, ils rendent inutilisables les futures récoltes. Politique de la terre brûlé. Ils le feront à grande échelle lors de leur repli stratégique de mars 1918

Vendredi 4 juin 1915

Canon sans arrêt. Cela avance-t-il ?

Cela paraît !

Samedi 5 juin 1915

Canon jour et nuit.

Un général allemand se serait rendu avec 80 000 hommes !

Dimanche 6 juin 1915

Canon toujours.

Demain, conduire les poulains à Avesnes, mardi tous les chevaux sous peine d’amende et prison. À Rocquigny les foins doivent être tous fauchés le 11 juin.

Lundi 7 juin 1915

Nuit tumultueuse, tonnerre sans arrêt, on ne sait dormir.

Cela cesse vers 10 heures le matin. Chaleur étouffante.

Tous les poulains sont pris.

Mardi 8 juin 1915

Les chevaux sont passés en revue et numérotés.

Les Français seraient à Souchez, Ham et Sissonne, Mézières ???

Orage et coups de canon espacés.

Affiche défendant d’abriter des soldats russes. Canon toute la nuit.

Mercredi 9 juin 1915

Rien de précis sur les résultats des grands combats. Réquisition de toiles à matelas.

200 blessés sont arrivés à Avesnes.

 

À 5 heures du soir, le maire et l’adjoint sont appelés à la Commandanture.

Albert HOSSELET (le maire) est cassé. Carlier OMER le remplace, DÉQUESNE adjoint, Léon LEFEBVRE secrétaire. Le comité américain du ravitaillement demande l’âge et le nombre des habitants de chaque maison. Il faut 200 000 Kilos de foin à loger rue du moulin.

Jeudi 10 juin 1915

Affiche défendant circulation des chats et des chiens pour la cocotte, offrant de l’argent à ceux qui porteront du cuivre, des ferrailles ou morceaux de munitions.

Calme hélas ! Orage.

Vendredi 11 juin 1915

Conduire à Avesnes les chevaux ayant appartenu aux armées. Obligation de déclarer les propriétés sises dans les communes voisines.

Samedi 12 juin 1915

Encore une fois, les États-Unis déclarent la guerre à l’Allemagne ?

Il leur faut 44 vaches cette semaine, 44 la semaine suivante, 100 mouchoirs de poche et 2 dindes. Parfois, un coup de canon bien loin.

Tout le monde se désole et se décourage. Le ravitaillement devient difficile.

Dimanche 13 juin 1915

Canon loin hélas !

Les courriers de Maubeuge venant de France ont été arrêtés, 1 fusillé !

Pas de réponse à ma lettre ! Quelle longue et triste journée !

Lundi 14 juin 1915

Des blessés arrivent à Avesnes.

Il faut donc encore 16 matelas, couvertures et traversins.

Mardi 15 juin 1915

Cette fois, c’est à l’Allemagne que la Hollande déclare la guerre. Nous deviendrons bientôt fous !

Si cela était ! Un hangar de munitions et 2 zeppelins ont été détruits à Bruxelles.

Annonce :

 

" Le Gouverneur prévient que demain Son Excellence le Général, chef de culture, viendra visiter le pays. Il invite le plus de monde possible à travailler aux champs. Recommande de saluer Son Excellence ".

 

Que vient-il faire ici ?

À Maubeuge, drapeau en berne car 1 fils de Guillaume est tué.

Mercredi 16 juin 1915

La visite annoncée n’est pas venue.

Des mesures sanitaires sont prises pour la cocotte.

 

À 5 heures du soir, ordonnance à tous les enfants non vaccinés d’aller à Avesnes demain à 9 heures pour être vaccinés.

Jeudi 17 juin 1915

Canon tout le jour.

Conduire 20 vaches à Avesnes.

Vendredi 18 juin 1915

Le canon donne toujours mais parait bien loin.

Samedi 19 juin 1915

Le Gouverneur est reparti en congé il y a 8 jours. Reviendra-t-il ? (Nous ne serons pas mieux avec le ‘Brochet à lunettes’)
Réquisition d’un panier de fraises pour le Gouverneur de la Commandanture.

Une patrouille de 13 noirs aurait été prise à Boussières.

 

Ils viennent à la mairie chercher le cadastre, les archives et les cartes des écoles.

Dimanche 20 juin 1915

Ils ont eu, paraît-il, une raclée à Ypres encore. Quand sera-ce la dernière ?

Cela devient serré pour les lettres. Les courriers pris sont tous fusillés. Il est arrivé hier quelques lettres mais encore rien pour moi !!

Ordre arrive de mettre 25 poteaux indiquant les limites du village et le nom des routes.

Donner l’emplacement de toutes les sources d’eau à boire. Pourquoi ?

 

Le 20 juin, Adolphe COUROUBLE, mari de Lucienne, écrit recevoir une carte de sa femme. Comment le courrier traversait le front ? Par la Hollande ? :

 

« Reçu lettre de Géry avec un mot de Lucienne qui a passé par les Fabre. Chère petite, que ne puis-je en faire autant et t’apporter le mot qui console et qui guérit des inquiétudes. »

 

Voir l'extrait du 20 juin 1915 >>> ici  <<<

Lundi 21 juin 1915

41 poulains cachés n’ont pas été déclarés. Ils doivent être demain matin sur la place.

On dit les Français à Crévecoeur ?

Mardi 22 juin 1915

Il leur faut encore toujours 20 couvertures. Canon nuit.

46 poulains non déclarés l’autre jour. 3 sont appelés sur la place.

Même opération, on leur prend du sang à chaque. On leur conduit encore des taureaux, des veaux gras, 21 vaches.

 

Il est arrivé à La Capelle et à Avesnes des prisonniers civils venant d’Allemagne, de Saxe. Ils ne peuvent plus les nourrir, paraît-il. 800 ont été ramenés de là. Les Russes seraient en Poméranie, auraient brûlé 360 villages. Cela explique les changements de beaucoup de prisonniers.

 

On demande des cuillers et fourchettes pour les prisonniers. Demande combien il y a de moteurs électriques. (Le mien est en réparation)

Affiche :

 

"Les fenaisons n’avancent pas. Il faut se presser, dire si on a besoin de bras, pâturer les pâtures de plus près, empêcher les bêtes de se sauver des pâtures.

 

Hier, 3 aéros français ont jeté des journaux à La Capelle. Quiconque en lit un est fusillé. On fouille les maisons pour les trouver.

Jeudi 24 juin 1915

Dimanche, un aéro français a atterri dans les lignes alboches. Les 3 aviateurs amenés à Avesnes, il y a eu ovation, cris, Marseillaise, " Vive la France ! ", etc
Colère du ‘Brochet à lunettes’.

 

Carillon pour fêter toutes les victoires allemandes. Ordre est donné de leur donner 90% de tous les fruits. Dire combien il y aura de pommes. Envoyer 2 chaudières pour eux faire des confitures ! Aucune marchandise n’arrive.

Affiche :

 

"Femmes et enfants doivent cueillir les fruits : fraises, cerises, groseilles, etc. et leur en porter 90%."

 

Ils montent une distillerie et réquisitionnent tout le sucre. Le pain est toujours atroce sans levain.

Vendredi 25 juin 1915

10 autos camions passent aujourd’hui ; une pleine de vélos démolis. Depuis longtemps on n’en voyait plus. Elles reviennent sur La Capelle le soir.

Ce matin, 18 détonations très fortes sur Sains. Des bombes d’aéros peut-être? Ou des pierres qu’on tire (des carrières) à Ohain. Demain on saura.

 

Canon très loin. Quand l’entendrons-nous pour de bon !

Ce que tout le monde s’ennuie !

Samedi 26 juin 1915

Encore beaucoup de camions, d’autos. Des infirmières, des blessés repassent. Des bruits de paix circulent. Personne n’y croit. Les Russes seraient avancés ? Tous incrédules.

Réquisition de brocs (vase à bec évasé et à anse qui sert à transporter de l’eau), cuvettes, balayettes, etc., etc.

Affiches condamnant à mort ou aux travaux forcés 5 ans et 1 000 marks d’amende à ceux qui écrivent ou transportent des lettres pour la France ou qui communiqueront par signaux (? encore !), qui cacheront appareils téléphoniques ou télégraphiques.

Une autre affiche interdit l’envoi de colis prisonniers. (Pourquoi ?)

Dimanche 27 juin 1915

Le Gouverneur est revenu. Rien de neuf.

Canon toujours fort loin. Annonce :

 

" Porter à la mairie les fleurs de camomille et de tilleul."

 

Lundi 28 juin 1915

Journée monotone. Rien de marquant.

Mardi 29 juin 1915

18 vaches sont demandées pesant au moins 500 Kilos.

Mercredi 30 juin 1915

Canon toujours aussi loin. Tous désespérons.

Il paraît que le couple CAILLEAU est fusillé livrant les plans aux Allemands !

 

Demain, perquisition chez les émigrés pour le cuivre (?)

Samedi, les poulains seront conduits à Avesnes.

Le pain est un peu moins mauvais aujourd’hui.

Juillet 1915

Jeudi 1er juillet 1915

(Encore un mois qui commence. Finira-t-il comme les autres ? Nous le craignons).

Aujourd’hui, commence l’ouverture du magasin d’alimentation. Distribution de haricots, sel et pois à 3 heures. Ration par jour et par personne riz 20 gr, légumes (haricots ou pois) 20 gr, lard ou jambon 30 gr, graisse ou saindoux 30 gr, sel 10 gr, sucre cristallisé 10 gr, chicorée 20 gr, café 20 gr.

 

Canon au loin sans arrêt sur l’Est.

Vendredi 2 juillet 1915

Canon nuit et jour loin partout. Quand sera-ce l’offensive ?

Annonce : porter à la mairie tous les métaux dont on ne se sert pas maintenant.

Demain à 4 heures du matin tous les poulains à Sains.

Lundi 18 vaches de plus de 500 kilos.

Samedi 3 juillet 1915

Hier, deux gendarmes sont venus fureter chez le notaire parquets, murs etc. cherchant télégraphie sans fils ?!! Ordre de démonter les pompes en cuivre des émigrés, d’aller chercher des vaches au moulin St Pierre pour les ramener ici.

Lundi 18 vaches à leur fournir.

 

Canon nuit et jour partout assez fort, surtout à l’Est. Y aurait-il une trouée ? Serait-ce l’offensive pour nous délivrer ? Beaucoup d’autos de la Croix-Rouge et des infirmières vont sur Avesnes.

Dimanche 4 juillet 1915

(Ducasse) – Canon toujours loin.

Arrive nouvelle du décès du Docteur NATIER. (*) Cela fait déjà 3 connus déjà !

Triste journée !

 

(*) : Natier Léon Alphonse, médecin aide-Major du 4e régiment d’infanterie territorial, corps de Maubeuge, est mort pour la France à Langensalza (Allemagne) le 5 avril 1915 par maladie (Typhus contracté en captivité). Il était né le 9 février 1879 à Cambrai (Nord).

Lundi 5 juillet 1915

Encore affiche : déclarer les poulains jusqu’à 3 ans. Déclarer poules, canards, coqs, dindons, etc. Le nombre de vaches pour chacun.

La Commandanture va être supprimée. Nous serions sur Maubeuge ?

Canon tout le jour.

Mardi 6 juillet 1915

Canon nuit et jour partout très fort surtout le soir. Orage en même temps. Les prisonniers civils revenus à Avesnes devaient être renvoyés aujourd’hui. Deux s’étant évadés, prolongation de un mois pour tous.

 

Les peines deviennent de plus en plus sévères. On dit qu’ils vont évacuer de bonne volonté (?) St-Quentin, Chauny. En tout cas, cela tonne bien sur les Ardennes. On fait sûrement de la besogne par-là.

Ils viennent visiter le pont.

Mercredi 7jeudi 8 juillet 1915

Le canon n’arrête plus.

On cueille les cerises pour eux. Ils font annoncer de ramasser les pommes tombées du grand vent et leur porter. Ils viennent visiter les fontaines.

Vendredi 9 juillet 1915

Au Nouvion, préparation de logements pour un État-major.

À Avesnes arrive un général.

Canon toujours.

Samedi 10 juillet 1915

Canon encore.

La semaine prochaine encore 35 vaches plus 29 vaches allemandes. Monsieur LÉO quitte la laiterie et va à Sains. Le lait sera écrémé ici, la crème portée à Sains tous les jours.

Dimanche 11 juillet 1915

Tonne, tonne partout.

 

Annonce le matin :

"Toute manifestation politique ou religieuse est interdite au 14 juillet."

 

Le soir, affiche :

" Défense de fêter le 14 juillet. Tous devront travailler comme les autres jours. Les cabarets seront fermés. Ceux qui y seraient rencontrés seraient punis de 6 semaines de prison ".

Lundi 12 juillet 1915

De grand matin arrive 1 commandant et 14 hommes cherchant logement. Prennent la maison VASSEUR.

Nous voici bien soignés poste à demeure. Le drapeau flottera pour le 14, mais hélas pas le nôtre ! Réquisition de 14 lits et literies. Pour Avesnes, des pots à beurre et à confiture.

Mardi 13 juillet 1915

 Canon très fort jusque vers le soir sud et Ouest.

On conduit les vaches demandées.

Mercredi 14 juillet 1915

De grand matin, les cabarets étant ouverts, annonce de fermer les portes à clef. Malgré eux, personne ne travaille.

L’après midi et soir canon à outrance.

Jeudi 15 juillet 1915

Faut 400 kilos de légumes nouveaux ! Rien que ça !

Un peu de canon très peu. Un alboche s’est suicidé à Avesnes pour ne plus marcher, un autre à Landrecies. Les rues à Avesnes sont rebaptisées.

Vendredi 16 juillet 1915

 Le poste fait son service patrouille nuit et jour.

Canon tapant si bien que cela nous ravigote.

Samedi 17 juillet 1915

Tempête et pluie font rage. Impossible d’entendre si la canonnade continue. Noyon est Français ? Affirme-t-on.

Les personnes amenant du beurre au dépôt sont ramassées.

Affiche :

" Défense de sortir après 9 h du soir (heure allemande)"

 

Dans 15 jours cela ira mieux, parait-il ? Sommes incrédules.

Dimanche 18 juillet 1915

Vent encore.

 

Après-midi, canon. 60 000 Allemands auraient évacué des tranchées sur Lille, seraient arrivés à Valenciennes en triste état. Les Français seraient à Rethel !

On annonce qu’il est défendu de rien sortir (denrées alimentaires, charbon, etc.) de la Commandanture. L’argent ne peut plus sortir de la Commandanture également. On est serré de près pour les cartes d’identité.

10 camions repartent vides.

Lundi 19 juillet 1915


 26 vaches à mener
 Les camions reviennent sur La Capelle pleins de longues planches. Les prisonniers civils d’Avesnes sont partis à Maubeuge faire des tranchées.

Cela tonne encore fort.

Mardi 20 juillet 1915

Branle-bas de grand matin. La cloche sonne lugubrement. Appel des hommes
Pendant l’appel, l’escorte du Gouverneur visite toutes les maisons de la cave au grenier, volant tout ce qu’ils trouvent de métaux. Trois grands chariots sont remplis de cuirs, cuivres, bronzes, étains. Tout le monde y passe, vélos entiers ou en ferrailles, lanternes, instruments de musique, etc. Quel pillage !

Le gouverneur va à l’usine électrique et en prend possession. Défense aux civils et aux Allemands d’y entrer. Il veut faire monter l’électricité à la sous-préfecture.

Des peaux de bêtes sont trouvées chez FROMENT, qui est déjà en prison depuis 8 jours. Le Gouverneur dit que la guerre durera encore des années !

Mercredi 21 juillet 1915

Le matin, les gendarmes viennent chercher le fils FROMENT
Faut 100 bouteilles de vin. On leur conduit 10 vaches allemandes, plus 2 vaches à lait. Si cela dure des années, comme ils disent, nous crèverons de faim et eux avec.

À Avesnes, trains de morts et de blessés, trains de canons. Cela a l’air de chauffer au feu.

 

Après-midi, ordre défendant le commerce d’épicerie demain, toutes les boutiques seront fermées ; sans doute ils vont chiper toutes nos marchandises. Heureusement, nous n’en avons pas trop. Quand cela finira-t-il ?

Les trains passent sans arrêt allant sur Hirson, pleins de soldats.

Jeudi 22 juillet 1915

Canon toujours partout et très fort. On peut écouler ses marchandises au détail. Les Français seraient à Blanc-Misseront.

Vendredi 23 juillet 1915

Peu de canon.

Les trains emmènent toujours les troupes sur l’Est. À Avesnes, ils prétendent avoir pris Varsovie et Riga. On parle encore de la Hollande. On ne sait quoi.

Samedi 24 juillet 1915

Calme complet.

Affiche défendant aux enfants de quitter leur commune seuls. Quand les parents sortiront avec eux, ils devront le déclarer sur leur demande de passeport.

Il faut 8 gardes-champêtres pour Etrœungt.

 Dimanche 25 juillet 1915

Annonce commandant de couper les haies.

Après 7 heures du soir (heure française). Les patrouilles du poste font éteindre les lampes.

 

À midi, 31 autos viennent sur La Capelle. Après dîner, orage suivi du canon assez fort Sud et Ouest…

Lundi 26 juillet 1915

Canon nuit et jour.

Faut 18 vaches, beurre, œufs, etc. plus un kilo de pêches ! Annonce : 6 gardes champêtres

Mardi 27 juillet 1915

Canon toute la nuit et toute la journée. Des canons et 250 hommes sont arrivés à Cartignies, 1 500 hommes seraient au Nouvion. Des chevaux reviennent sur Maubeuge. Cela paraît encore une débandade ; sera-ce la bonne ?

On annonce qu’il faut déclarer à la Commandanture chats, chiens, le vin que l’on a.

On rappelle aux hommes d’enlever leur coiffure devant les chefs allemands.

Mercredi 28 juillet 1915

Depuis lundi ils font marcher le tortillard de Landrecies à Avesnes. Là, ils démontent les rails et les emportent à Landrecies. De temps en temps de gros coups.

Trouvent l’auto Mr Natier.

Jeudi 29 juillet 1915

Calme hélas. De gros coups espacés par-ci par-là. Le tortillard emmène les rails sans arrêt.

 

Après-midi, ils perquisitionnent l’église et au clocher. Pourquoi ? Pourquoi ?

Hier soir les drapeaux du poste ont été enlevés ainsi que la sentinelle. Un aéro a survolé très haut à 5 heures du matin, un autre à midi.

 

Le soir, on entend un moteur encore. Les 18 prisonniers civils restant à Avesnes, sont transférés chez GOSSART et les casernes nettoyées pour loger des troupes.

Hier, visites des fontaines qui ont été nettoyées et couvertes aujourd’hui. Repousserait-il des troupes pour de bon ? Dieu que c’est long d’être toujours au secret.
1 taureau.

Vendredi 30 juillet 1915

Le matin repassent 15 puis 2 par 2 hussards de la mort. On prépare chambres officiers à Avesnes ; canon fort par bourrade.

 

Le soir, apprend que Chauny est repris, les Français à Anizy-le-Château. Est-ce vrai ?

Les chiens déclarés devront payer, 60 Frs dès demain pour 1 chien, 90 Frs pour le 2ème, 3ème et ainsi de suite. Ceux pour qui on aura payé auront une plaque et défense de sortir pour eux. Les autres seront abattus, sous peine d’amende de 150 marks
1 bœuf.

Samedi 31 juillet 1915

C’est fait ‘Follette’ n’est plus. Mieux vaut la tuer plutôt que leur donner 60 Frs. Jusqu’à nouvel ordre, les chiens à atteler sont exemptés de taxes.
Calme.

Août 1915

Dimanche 1er août 1915

Le matin sur l’Est un aéro et un dirigeable. On tire le canon à Fourmies.

À part cela, très calme. Que l’on s’ennuie !

Demain, 34 bêtes à cornes.

Lundi 2 août 1915

Pour le dîner du Gouverneur, 2 canetons, pêches, prunes et des pois.

Plus de canon. 5 ou 6 éboulements le soir.

Mardi 3 août 1915

Toujours calme.

Le chef de poste est changé. La nuit dernière il est repassé 2 canons.

Les Français seraient à 4 kilomètres de Charleville et les Anglais près d’Anvers ??? – (10 heures éteindre et se coucher).

Mercredi 4 août 1915

Voici un an que nous sommes en guerre.

Plaise à Dieu que ce carnet ne soit pas rempli entièrement par les menus événements de chaque jour, car cette année serait encore bien plus longue que l’autre sans nouvelles vraies, sans communication avec les nôtres. Quelle vie !

 

Le tortillard est démonté : rails, billes de bois, tout est enlevé.

Cette semaine le canon est d’un mutisme désespérant.

Il faut pour Avesnes outre les légumes, beurre, œufs habituels, porter des seaux émaillés.

Jeudi 5 août 1915

Demain il faut conduire 4 chevaux à La Fère. Annonce ordonnant de déclarer ses titres de rentes, valeurs, actions, obligations de chemin de fer de banques d’États etc…Des contrats d’assurance sur la vie, toute déclaration fausse ou omise sera passible de 3 mois de prison et d’une somme importante d’amende.
Des armes se trouvant encore dans la Commandanture, 5 jours de délai sont encore donnés pour les porter. On pourra les déposer à la mairie sans se faire connaître, il n’y aura pas d’amende. (Faut-il qu’ils en aient besoin).

 

Le soir, le poste chante Gloria Victoria Haina, les Russes étant chassés entièrement de l’Allemagne, disent-ils. Le canon s’entend un peu l’après-midi sur l’Est.

Le labyrinthe (*) à Arras serait repris ?

 

(*) : Système de tranchées très complexe situé au nord d’Arras

Vendredi 6 août 1915

Hier, fête chez les Allemands. Repos aux démonteurs de rails. Pensez donc !

Varsovie pris avec 200 000 Russes (peut-être faut-il encore ajouter des zéros)

 

L’après-midi, forts coups de canon sur Arras.

Samedi 7 août 1915

(Commencement de la Neuvaine du 15 août)

20 chevaux et 10 hommes partent au train à Avesnes faire la moisson à La Fère.

Canon très fort après-midi sur Arras, Cambrai.

Maman manque d’aller au bloc n’ayant pas sa carte sur elle.

Dimanche 8 août 1915

La gazette de Charleville n’a pas paru cette semaine.

Annonce : Les chiens à atteler paieront 30 f de taxes. Les ratiers seront exempts mais livrés aux Allemands   (jusqu’à quand ?)

À partir de midi, canon très fort vers le soir et N.Est.

Lundi 9 août 1915

Cette nuit mort presque subite d’HUVAGNE.

Pas une minute d’arrêt de canon depuis hier. Partout, surtout sur Cambrai.

Le bruit court avec affirmation que Douai et Anvers sont repris ? Quand le saurons-nous ?

Pas de journal.

Mardi 10 août 1915

Anniversaire Louise. (Elle a trois ans)

La gazette paraît cette semaine. Les chiens ont rapporté plus de 30 000 Frs d’impôts. Le général lui-même avoue que c’est honteux.

Le canon cesse toute la journée, reprend le soir. 3 au poste sont partis au feu cette nuit.

 

Lundi avait augmentation de pain, mais quel pain ! Moisissures, sortes d’araignées, asticots.

Quel régal !

Mercredi 11 août 1915

Calme complet, quelques coups lointains sur l’Est – Beaucoup de va et vient de motos.

En général les Allemands paraissent fatigués et souhaitent la fin prochaine. Si cela pouvait !

 

Un an aujourd’hui qu’Adolphe est parti et 1 an sans nouvelles.

Jeudi 12 août 1915

Canon à l’Est.

Artilleurs armistice de 3 jours dit-on pour les blessés (35 000 et 25 000 morts) sur Arras et St- Mihiel.

Les Français seraient à Gouzeaucourt.

L’Amérique aurait déclaré la guerre à l’Allemagne ?

Vendredi 13 août 1915

Encore changement de chef de poste.

Le soir, ½ heure de canon assez fort puis rien.

Samedi 14 août 1915

Calme complet.

Annonce : défense d’aller pêcher sous peine de 8 jours de prison, 150 marks d’amende.

Quelques lettres sont encore arrivées, pour moi encore rien.

 

À midi, passe nord-sud un aéro très bas, paraît être allemand.

Dimanche 15 août 1915

Il faut au général 4 600 Frs pour frais de Commandanture. 3 000 briques, des fagots etc.

Pas de canon aujourd’hui.

Malgré la pluie on fait la procession et il y a foule.

Ils ont reculé de 30 kms à Ypres affichent-ils et perdu 3 000 morts, 3 000 prisonniers, munitions, ravitaillement, etc.

Lundi 16 août 1915

Pluie et orages toute la journée. J’envoie à Adolphe le portrait des enfants. Le recevra-t-il ? (*)

 

Plus de canon, peu d’autos.

Aujourd’hui le pain est bon enfin.

 

(*) : Oui, il le recevra quelques jours avant sa mort, Lucienne le confirme le 25 octobre

Mardi 17 août 1915

Affiches pour la fièvre aphteuse recommandant des précautions défendant la circulation dans les pâtures. Une autre : peine de mort à ceux qui correspondront avec les armées ennemies (encore), à ceux qui détruiront ponts, chemins de fer, magasin de ravitaillement, usines servant pour l’armée allemande, fusillés sans aucun délai – Les communes responsables – Calme encore –

Le matin on leur a conduit 40 vaches. Jeudi prochain en faut encore deux.

 

Vers le soir, un aéro français, sans doute venant direction Villers-Guislain, survole très haut toute la ligne jusque vers Soissons fait demi-tour et revient à son point de départ. 

Mercredi 18 août 1915

Rien de particulier.

L’après-midi, forts coups de canon sur le N.E, la Belgique.

Le pain est presque blanc ! Cela durera-t-il ? Ordonnance d’enlever les urinoirs !

Jeudi 19 août 1915

Toujours le calme. Cela devient embêtant.

Aujourd’hui des chevaux partent faire la moisson à Dourlers …

Il paraît que les nouveaux canons spéciaux pour les tranchées sont épatants.

Vendredi 20 août 1915

Après-midi, canon lointain.

Samedi 21 août 1915

Le soir, encore canon mais loin !

Dimanche 22 août 1915

Annonce obligeant à mettre une plaque aux voitures de toute espèce, même aux voitures à chiens. Obligation de déclarer les cochons d’Inde !!!

Faut 10 matelas, draps et couvertures pour conduire à Felleries.

Plus de canon hélas.

Lundi 23 août 1915

Je reçois une carte de Jules (*) me donnant de bonnes nouvelles d’Adolphe vieilles de 3 mois, malgré cela, cela fait plaisir.

À midi, est passé un aéro blindé très haut.

 

(*) : Jules (COUROUBLE, frère d’Adolphe) est prisonnier à Minden en Westphalie. Le courrier est donc passé par l’Allemagne et la Croix-Rouge ( ?)

Mardi 24 août 1915

Canon la nuit et au Nord loin. Rien de neuf.

On conduit 35 vaches à Avesnes.

Mercredi 25 août 1915

Canon au loin la nuit et le matin.

Les trains de blessés passent à Avesnes, voici 1 an demain !

Jeudi 26 août 1915

Canon très loin.

On parle d’une réunion pour la paix qui aurait eu lieu hier ?

Vendredi 27 août 1915

Canon assez loin.

Le Gouverneur emballe tous ses vols, bronzes d’arts etc. et se prépare à fiche son camp paraît-il.

Le singe est déjà parti. Les Français devant prendre l’offensive le 1er septembre (dit-on ?).  Les Allemands disent qu’ils la prennent le 2 – Ils avouent renoncer à Souchez. (*)

Que ce soit pour de bon !

On leur a conduit aujourd’hui toutes les récoltes de seigle, grains et paille.

 

(*) : En effet, les français vont reprendre l’offensive le 25 septembre en Artois et en Champagne. Les Allemands étaient donc déjà au courant !

Samedi 28 août 1915

Canon au loin.

Le soir orage terrible pendant 1 heure. La nuit la foudre tombe à Touvent chez Renet et brûle tout, elle tue aussi un cheval près de la rue du moulin, tue 3 veaux aux Bahardes, tombe sur les arbres.

Dimanche 29 août 1915

Réquisition 1 000 boutons de culotte et 1 000 boucles.

Canon loin.

Avis :

Ø  1er : Amener demain à 9 h ½ (heure allemande) sur la place les chevaux et poulains pour le recensement.

Ø  2ème : Défense de glaner.

Ø  3ème : Reporter les bouteilles vides à la limonade.

Lundi 30 août 1915

Conduite de 26 vaches à Avesnes. Du sang est pris aux 160 chevaux amenés à Avesnes. Plus qu’une auto, celle du Gouverneur, les autres emmenées au train.

Metz serait prise par les Français ?

Nouvelles d’Adolphe et de la famille par un prisonnier.

Avis défendant de cueillir dans les bois de Beugnies, Floursies, Dourlers sous peine d’être pris comme espion et fusillé.

Ordre de rechercher les cuivres restant chez les émigrés.

Demain, visite pour les cuivres dit-on. Le Gouverneur va partir mercredi dit-il.

Mardi 31 août 1915

Depuis 5 ou 6 jours, plus une auto ne passe. Aujourd’hui une passe et repasse.

Calme toujours.

Septembre 1915

Mercredi 1er septembre 1915

La soi-disant offensive n’a toujours guère été bruyante aujourd’hui, pas un coup de canon. Nous nous désolons. Si la Ste Vierge ne nous fait pas comme elle a fait l’an dernier aux Parisiens, si elle ne balaie pas tout cela, nous sommes fichus, faudra passer l’hiver avec eux.

Cela ne sera pas gai. Triste.

Qu’est-ce qu’ils fabriquent là-bas ? Si nous étions derrière eux il nous semble que nous les pousserions. À force de nous déplumer, il ne nous restera bientôt plus rien du tout. Ne jamais rien savoir de vrai.

Si les aéros venaient encore nous jeter parfois des nouvelles ! Non plus rien, silence de mort. Plus de canon, plus d’autos ! Dire que le temps est triste et long. Les perquisitions pour le cuivre continuent.

Le Gouverneur est venu en auto. Il n’est toujours pas encore parti. Il lui faut 1 jambon – 14 chevaux sont réquisitionnés pour Sémeries, Dourlers et Dompierre.

 

Annonce : circulation défendue de 9 heures du soir (heure allemande) à 6 heures du matin.- Circulation défendue dans les petits chemins et sentiers sans passeport.

Offre de vendre de l’alcool dénaturé à 70 F et alcool à 95° à 300 F payable en Or. Quand cela bougera-t-il mon Dieu ?

Jeudi 2 septembre 1915

Toujours le calme. Désespérant.

 

À 9 h du matin, le poste est prévenu qu’il doit passer pour midi à Ramousies. Seul le vacher reste. Pas une auto ne passe.

Vendredi 3 septembre 1915

Passe auto médecins et 1 Croix-Rouge. Un camion vient avec des télégraphistes qui examinent les fils et numérotent certains poteaux ou maisons. Pourquoi ?

Les chevaux conduits mercredi sont en partie revenus. Plus d’ouvrage.

Les batteuses qui marchaient sans arrêt se sont vite arrêtées hier par ordre.

Le vacher est parti puis revenu. On n’entend rien et il semble qu’il y a du louche. Serait-ce ?

Samedi 4 septembre 1915

Calme encore !  

Dimanche 5 septembre 1915

Il paraît que le blé battu et enlevé a été ramené ? Calme toujours.

Lundi 6 septembre 1915

Fournir 24 vaches allemandes et 15 autres. Les pains aujourd’hui ont 4 livres ½.

Canon assez fort sur Arras. Il paraît qu’on l’entend sur la Belgique tous les jours mais très loin.

Mardi 7 septembre 1915

Canon très loin sur la Belgique. Avis défendant de tuer des porcs.

Rien de nouveau, blessés passent.

Mercredi 8 septembre 1915

Anniversaire.

Plus un coup de canon. Désolation !

 

Le Gouverneur vient visiter le cimetière, le trouve très bien mais petit. Si le maire veut, il le fera agrandir – Il ordonne de remplacer la croix de bois mise aux soldats allemands enterrés par une croix en fer et un entourage en pierre.

On fait demander l’inventaire de la remise des pompes à incendie.

Jeudi 9 septembre 1915.

Le canon est mort sûrement.

Depuis hier matin les trains vont et viennent sans arrêt.

Affiche :

Ø  Tout soldat ennemi rencontré, vêtu soit en soldat, soit en civil, sera fusillé

 

!!!! (D’où veulent-ils qu’il en sorte ?)

 

Annonce :

Ø  Les pommes de terre des champs sont réquisitionnées par l’armée allemande.

 

Plainte de Spilman pour la qualité du lait. Amende aux fraudeurs.

À Ramousies commune occupée militairement, le chef de culture 1 mois de prison pour avoir fourni du blé germé aux Allemands et avoir gardé et battu du bon.
De la guerre, rien que silence énervant.

Vendredi 10 septembre 1915

 

Rien encore.

Leur faut 500 fromages, des œufs, poules, poulets, pommes, etc. 40 vaches et 15 veaux lundi.
 Un émigré revenu de La Fère, dit que de grands combats ont lieu dans l’Est où les Allemands perdent beaucoup d’hommes. C’est ce qui explique le mouvement des trains depuis mardi huit jours, jour et nuit ils roulent. Hier 52 trains sont passés au Nouvion.
Le Gouverneur aurait dit que le 12 serait une journée mémorable.

Samedi 11 septembre 1915

 

Enfin le canon s’entend assez fort tout au long du jour jusqu’au soir et même la nuit.

Leur Gazette parle beaucoup de leurs succès en Russie mais en France muets.

Dimanche 12 septembre 1915

Annonce : des chiens restent non déclarés. Il faut les déclarer et payer pour le 20. Des infirmiers reviennent allant sur Avesnes. Le canon donne un peu partout.

Lundi 13 septembre 1915

Conduit 55 bêtes à Avesnes. Canon le soir et la nuit.

Mardi 14 septembre 1915

Canon toute la journée. Le maire m’a rapporté hier un mot d’Alphonse me disant qu’Adolphe est au repos dans le Midi – Blessé, malade peut-être ?

 

La Feldposte est partie d’Avesnes, arrête que les camions, autos.

 

À midi repasse, venant du Nouvion, un convoi de 16 fourgons à chevaux paraissant chargés, allant sur zones. Une grande boucherie allemande s’ouvre à Avesnes. Les bouchers ne tuent plus. Ici il leur faut un passeport pour aller chercher une bête à tuer, même dans la commune.
Il faut aussi faire l’inventaire des noyers, largeur, hauteur, etc.

Mercredi 15 septembre 1915

Canon loin la matinée pour recommencer l’après-midi sans arrêt très fort sur Bapaume. Affiche à Avesnes que Chauny a été occupée 6 heures par les Français puis évacuée.

2 chariots passent encore. Ceux d’hier auraient couché à Sivry, Belgique. On dit que les Russes ont enfin pris l’offensive en Silésie.

Pour demain, faut 300 F, monnaie française et pour mardi 52 vaches.

Jeudi 16 septembre 1915

Canon fort l’après-midi.

Vendredi 17 septembre 1915

Canon loin qui rapproche vers 4 h – La nuit encore.

Pour lundi il faut 10 chevaux de selle pour officiers – Ils entrent au feu sous leurs hommes – 40 encore partis d’Avesnes aujourd’hui. Les vieux, tous y vont – Faut-il qu’il y en ait des trous !

Samedi 18 septembre 1915

Toute la nuit canon au N.ouest. Toute la journée idem sans aucun arrêt.

Arras- Lille. On dit qu’Ostende est aux Anglais.

Puisse cette journée avoir été bonne ! Que de coups ! Cela ne cesse pas encore le soir.

Un aéro blindé passe très très haut de l’est à l’ouest. On re/////////  de Boulogne les trois couleurs françaises.

Dimanche 19 septembre 1915

Nuit et jour continuation du canon. Ce n’est qu’un roulement ininterrompu un peu partout. Encore un aéro qui tourne au-delà d’Avesnes et revient sur le Nouvion au moment où il est sur Avesnes (il semble) 3 fortes détonations qui secouent vitres et fenêtres.

Bombes ? – On raconte que Chauny a été évacuée parce qu’il était miné. Cela tape encore le soir plus loin.

Lundi 20 septembre 1915

Les trains ont roulé toute la nuit. On entend encore un peu le canon la matinée puis calme.

Cela reprend le soir et toute la nuit.

52 vaches réquisitionnées pour demain sont décommandées ; les chevaux sont partis.

 

À midi, encore un aéro. Réquisition des graines de sureau pour faire du vin.

Mardi 21 septembre 1915

Beau.

Toute la nuit, tout le jour sans arrêt, le soir, quelques coups très forts. Cela donne également la nuit sans arrêt.

Mercredi 22 septembre 1915

Beau.

Encore canon sans arrêt. Chauny serait à nous. Passe une auto avec officiers allemand, américain, espagnol et 1 paraissant français. Sont en panne un moment.

Annonce : les habitants doivent porter à la mairie toutes leurs pommes de terre, chacun ayant droit à 200 g par jour. Il faut dans chaque commune un stock pour 6 mois.

Obligation de cueillir et porter à la mairie pour la cidrerie d’Avesnes les grattes-culs, sous peine de 25 marks d’amende.

Jeudi 23 septembre 1915

Faut de chez les émigrés 100 pots à beurre, des seaux et 100 fûts à cidre vides.

Canon roule toujours sur St Quentin, Soissons. 180 vaches sont arrivées de Charleville ici. (La Gazette de Charleville s’imprime depuis longtemps à … Avesnes.)

Vendredi 24 septembre 1915

Beau.
 Dieu ! Que de victimes aujourd’hui sans doute !

Hier à 11h ½ du soir violente détonation qui éveille tout le monde. Canon toute la nuit, la matinée idem, vers midi cela redouble sur Hirson Mézières. Encore 6 grosses détonations, puis canon sur St Quentin, Cambrai sans arrêt et fort. Un aéro suit la ligne du chemin de fer.

À Avesnes plus rien d’affiché. Chauny serait bien repris ?

À Avesnes quelques cas de typhoïde, les majors médecins allemands sont partis.

 

Le soir calme enfin.

Samedi 25 septembre 1915

Adolphe meurt ce jour d’une balle dans la tête, ses proches ne l’apprendront que bien plus tard.

 

Anniversaire. (*)

Pluie à verse.

Grondements assez forts une partie de la nuit. Tout le jour roulements et gros coups malgré une pluie qui ne cesse pas. Un aéro suit encore la ligne comme hier mais salué cette fois par des coups de feu et de canon.

Depuis le début cela n’a guère cessé. Nous espérons que cela aura fait bonne besogne. Cela dure jusque minuit puis calme.

 

(*) : Il s’agit de son quatrième anniversaire de mariage, Lucienne épouse Adolphe Courouble le 25 septembre 1911 à Etrœungt.

Dimanche 26 septembre 1915

Beau

Dimanche dernier les gros coups à midi étaient, dit-on, l’explosion de la gare de Douai et d’un dépôt de munitions à Cambrai. Les Anglais ont coupé en Belgique et forcé un train de 600 vaches à revenir, ce qui explique le retour des vaches ici.

Grave nouvelle : hier 90 boulangers sont arrivés à Avesnes avec leurs fours. La boucherie y est depuis 15 jours. Cela paraît bon.

 

Des avis affichés :

Ø  quiconque essaiera de passer les lignes pour rentrer dans une armée ennemie de l’Allemagne aura 10 000 marks d’amende et 3 ans de prison.

Ø  Qui aidera à passer, même peine.

Ø  Quiconque logera un étranger même une nuit doit faire la déclaration à la mairie et à la Commandanture.

 

Ordres relatifs à la typhoïde qui règne à Avesnes. La Commandanture redemande les bons de réquisitions délivrés jusqu’à ce jour.

Le canon s’est tu la matinée mais reprend sur les Ardennes belges l’après-midi. On dit qu’il y a de l’artillerie arrivée à Fourmies et 50 hussards à Avesnes.

Lundi 27 septembre 1915

14 autos camions doubles viennent allant sur La Capelle, les unes vides, d’autres contenant matelas, couvertures, pain etc. Pas de canon du tout. Les haies sont coupées tout le long de la ligne Hirson à Aulnoye et les branches brûlées pour aujourd’hui à midi.

Hirson plein de blessés.

Mardi 28 septembre 1915

Frais, brume. Nuit et jour canon roulement.

Un aéro encore même direction. Laon serait repris ?

Tous les soldats de Felleries et d’Avesnes partis, les ouvriers charretiers revenus. Les trains circulent beaucoup allant sur Hirson.

Réquisition carottes. Froid.

Mercredi 29 septembre 1915

Pluie.

Ici on n’entend rien. Au hameau nuit et jour.

 

À midi, une vingtaine de coups de feu. À Avesnes de l’infanterie est arrivée musique en tête et ils avouent avoir perdu ces jours derniers 80 000 hommes !

Un nouveau règlement pour les passeports de la Commandanture, ils seront délivrés par les maires pour 10 ctmes.

Des gardes- voies soignent les lignes.

Jeudi 30 septembre 1915

Calme complet.

À 9 h du soir, appel à Floyon et perquisitions.

Octobre 1915

Vendredi 1er octobre 1915

Calme toujours. Ils auraient perdu la semaine dernière 80 000 hommes et 20 000 prisonniers et été battus près de Reims et à Berry au Bac.

Samedi 2 octobre 1915

Il a gelé à glace cette nuit. Calme, rien de neuf. Ils viennent à la poste dans les fils.

Un aéro passe à 10 heures allant sur Soissons.

Dimanche 3 octobre 1915

Affiches défendant sous peine de mort d’approcher des voies, gares, ponts etc. détériorer le matériel servant à l’armée, de ramasser ce qui tombe des aéros, d’avoir de la lumière et de circuler après 9 heures du soir (allemande), de faire des signaux avec du feu, de la fumée, d’allumer du feu en plein air etc. etc.

Calme

Lundi 4 octobre 1915

Rien encore. Le matin les petits poulains non sevrés sont amenés, on leur prend du sang. Arrive un poste de 15 hommes ! Nous étions trop bien sans eux !

Mardi 5 octobre 1915

Calme encore. On leur accuse des pertes énormes partout. (Et nous ? Hélas ! ) Des uhlans voyagent 2 à 2 par-ci, par-là. Pourquoi ?. La Gazette ne paraîtra plus à l’avenir.

Mercredi 6 octobre 1915

Encore des patrouilles d’uhlans. On monte le téléphone au poste et on enlève tous les tuyaux de plomb de la poste. Il faut déclarer les bouteilles vides que l’on possède et tous les équipages : voitures à 2 ou 4 roues, chariots, camions, charrettes, tombereaux, etc
Canon très loin.

Jeudi 7 octobre 1915

Trois otages ont été nommés mardi, en cas de toutes actions nuisibles à l’armée allemande, ils seront emmenés. Carlier, M. le Doyen et Hosselet ? On ne dit pas où.
Comme hier canon très loin à l’Est.

Passe une dizaine de motos en tous sens. Uhlans en patrouille. On vient voler le mobilier du bureau de poste et les prises de courant de téléphone et ce qu’il peut rester d’autre chez les abonnés.

Vendredi 8 octobre 1915

Très loin canon dit-on. On ré-annonce d’éteindre à 9 h (allemande).

Samedi 9 octobre 1915

Canon loin

Dimanche 10 octobre 1915

Les Français seraient à Artres près de Valenciennes ?

Il faut jusqu’à nouvel ordre 4 000 kilos de foin par jour, 18 vaches devraient être livrées demain, elles sont décommandées. Maroilles étant à l’amende doit en fournir 300.

Canon toute la nuit.

Lundi 11 octobre 1915

 Canon sans arrêt enfin ! Tout autour.

Réquisition 15 poêles. Leur journal avoue 25 km de recul à Loos. Lille serait repris.

30 000 Allemands se seraient rendus ??

Mardi 12 octobre 1915

Canon un peu.

Annonce : déclarer les appareils photographiques. (J’te crois)

Mercredi 13 octobre 1915

 Canon très loin. Le poste a ordre de partir demain puis contrordre.

Jeudi 14 octobre 1915

Après-midi, un peu canon loin.

Leur gazette à Avesnes donne de grosses pertes pour eux en Champagne.

Vendredi 15 octobre 1915

 Communiqué officiel : français donné dans leur Gazette : 3 corps d’armée allemande anéantis, 17 000 prisonniers, 200 pièces de canon prise en Champagne, progrès en Artois et beaucoup de prisonniers.

Et cela il y a 15 jours. Lens serait repris ?

Canon sur l’Est loin.

Samedi 16 octobre 1915

Canon loin.

Autos passent aujourd’hui.

Dimanche 17 octobre 1915

Calme.

Lundi 18 octobre 1915

On arrête et fouille toutes les femmes qui circulent. Canon le matin pendant 1 heure.

Ai nouvelles d’Adolphe par prisonnier.

Mardi 19 octobre 1915

Six femmes ont été visitées déshabillées. On ne trouve rien.

Mercredi 20 octobre 1915

Rien de neuf.

Jeudi 21 octobre 1915

Suis appelée à la Commandanture pour subir un interrogatoire.

Quoi ?

Vendredi 22 octobre 1915

C’est fait.

Une lettre à mon adresse de qui ? Ce que je dois dire. Explications. Je compte me tirer indemne.

Le soir, bonnes nouvelles d’Adolphe par prisonnier. (*)

Plus de canon, ce que l’on s’ennuie ! Pour dimanche faut dire combien on a de chevaux pour officiers et d’écuries pour chevaux.

 

(*) : Alors qu’il est mort depuis presque 1 mois !

Samedi 23 octobre 1915

Aujourd’hui conduire tous les baudets à Avesnes pour leur prendre du sang.

Canon loin.

Dimanche 24 octobre 1915

Nuit et jour canon sans arrêt.

Louise tousse le soir.

Lundi 25 octobre 1915

Bonnes nouvelles d’Adolphe.

« A passé 6 jours chez Fabre au 15 septembre, a reçu portraits des enfants. » (*)

Louise nous fait peur mais cela va mieux. Le médecin va venir.

 

(*) : Adolphe a été porté disparu le 25 septembre, donc il a dû partir en permission vers mi-septembre.

Ce qu’il n’indique pas sur son carnet (qui se termine le 9 du mois d’août).

Cela pourrait expliquer que ses écrits s’arrêtent ce jour-là…Il aura vu ses enfants sur une photo une dernière fois.

Mardi 26 octobre 1915

Même nouvelles.

Louise bien.

Mercredi 27 octobre 1915

Calme toujours.

Encore nouvelles.

Jeudi 28 octobre 1915

Aujourd’hui pas d’autorisation pour tuer.

Canon très loin toute la journée.

Vendredi 29 octobre 1915

Pour la 7ème fois bonne nouvelles d’Adolphe.

Je ne me plaindrai plus.

Samedi 30 octobre 1915

Calme. Que l’on s’ennuie !

Dimanche 31 octobre 1915

Rien. Faut beurre, fromages, 2 cochons, 6 moutons.

Novembre 1915

Lundi 1er novembre 1915

À l’heure de messe basse arrivent 2 gendarmes. Perquisitions dans la rue nationale, tout fouillé, retourné, tous les cuivres pris et même 190 F or, farine, cuir baignoires, sur pont à chez Allaire 2 charrettes sont pleines.

À quand la suite ? Si l’on ne paie pas les contributions en bon argent ! Le ravitaillement supprimé, les hommes de 18 à 48 enfermés dans des granges et les bestiaux emmenés.

Plus une auto. Plus de journaux. Les prisonniers ne pourront plus écrire en France dit-on !.

Désolation et misère partout jusqu’à quand ?

Mardi 2 novembre 1915

Prennent 100 vaches des leurs.

À 9 h, les 2 gendarmes reviennent, vont à la filature où ils découvrent 8 600 kilos de laine, dit-on ! (Vendu encore sans doute) Il paraît que les perquisitions ne continueront pas ayant trouvé ce qu’ils cherchaient.

Les contributions ont été payées aujourd’hui. Les maisons pouvant loger troupes et officiers sont déclarées ainsi que le nom du propriétaire. Il faut aussi un local pouvant loger 500 hommes.

Plus de canon hélas !

Mercredi 3 novembre 1915

Pas de perquisitions aujourd’hui.

Pas de canon ; Ils disent que cela sera bientôt fini. On leur fait croire cela sans doute.

À Noyon 28 cavaliers sont arrivés.

On monte des fours et aussi le téléphone jusqu’au Cateau. Les inscrits pouvant être soldats doivent déclarer pourquoi ils ne le sont pas, ajournés, renvoyés ou évadés.

Jeudi 4 novembre 1915

 On réclame des pommes.

Il paraît que le ministère chez nous est reconstitué ! Général Gallieni ministre de la guerre, un amiral à la Marine. Que la Grèce laisse libre passage aux Français et Anglais et que cela va être par-là le théâtre de la guerre. Nous en tenons encore pour longtemps hélas !.

3 chariots sont passés pleins de pics, pioches etc.

On ferait des tranchées au Bois du Nouvion ?

Vendredi 5 novembre 1915

Canon au loin nuit et jour dit-on.

Affiche pour les hommes.

Samedi 6 novembre 1915

Rien de nouveau.

Dimanche 7 novembre 1915

La nuit et le jour canon pas très fort. Annonce : déclarer le vin que l’on possède encore !

Lundi 8 novembre 1915

Apprends mort de René Allaire.

Mardi 9 novembre 1915

L’armée allemande de l’Est se retirerait sur le Luxembourg belge.

Visite de M. le Doyen du Quesnoy. Adolphe a dû être malade ou blessé, Alphonse pas inquiétude dans lettres.

Mercredi 10 novembre 1915

Nuit et jour canon loin. Faut 2 brouettes et 1 500 sacs vides. Nisih serait aux Allemands.

Jeudi 11 novembre 1915

Canon fort en fin de nuit et jour. Les Russes seraient en Allemagne.

Passe un aéro.

Vendredi 12 novembre 1915

Pluie à verse. Canon malgré tout vent.

Samedi 13 novembre 1915

Faut 12 haches. Vent et tempête. Nouvelles par Gilbert.

Dimanche 14 novembre 1915

Nouvelles par Delarocque et Thévenin. La commune doit fournir 100 kilos de beurre payé comptant 2 F 80 et 30 000 kilos de pommes conduites à Sains.
Passe un aéro.

Lundi 15 novembre 1915

On enlève les corps de 2 Allemands enterrés pour les conduire à Sémeries. Rien de neuf, canon assez fort. Neige un peu sur forte gelée.

Mardi 16 novembre 1915

Les Allemands auraient évacué la Marne entièrement.

3 000 kilos de rebulet sont vendus par eux. (*)

Pas de canon.

 

(*) : Déchets de mouture pour les lapins)

Mercredi 17 novembre 1915

Calme encore.

Passe une auto ! Défense de passer dans les bois.

Jeudi 18 novembre 1915

Le matin le poste fiche le camp. Bon voyage. Il en reste 2 pour soigner le téléphone.

Du matériel démoli passe encore à Avesnes.

Vendredi 19 novembre 1915

Le prince Léon de Bavière serait pris en Russie avec 114 000 hommes. Même les postes d’Avesnes sont partis hier. (Si cela est vrai, tant mieux !). Ordre aux inscrits de la lettre Q à Z de se présenter à Avesnes demain à 8 heures du matin.

Canon sur la Belgique.

Samedi 20 novembre 1915

Les 24 hommes inscrits sont revenus. L’appel n’a même pas été fait.

Demain matin 80 chevaux (les plus gros) doivent être conduits harnachés. Un poste revient aujourd’hui. Renet se pend.

Dimanche 21 novembre 1915

Le poste revenu est celui qui est parti. Tous ceux d’Avesnes sont revenus. Ils disent n’avoir été que jusqu’au Cateau et retour. Certains disent qu’ils sont prisonniers ici.

Les 80 chevaux menés à Avesnes ce matin sont revenus à part 5 ou 6. Pourquoi ?

Les trains roulent encore sans arrêt.

Lundi 22 novembre 1915

Ste Cécile. (*)

Canon assez fort. L’hospice d’Avesnes serait évacué pour mettre des blessés.

 

(*) : Fête des musiciens, Lucienne était  musicienne.

Mardi 23 novembre 1915

Canon mais brouillard si fort qu’il ne disparaît pas.

Mercredi 24 novembre 1915

Les perquisitions recommencent. La côte de La Rouillie leur fournit deux charrettes pleines : 7 vélos, 2 saloirs pleins, instruments de musique, chaudières, etc.

Le canon donne.

Jeudi 25 novembre 1915

Nuit et jour canon loin. Plus de perquisition. On leur conduit 6 moutons.

Vendredi 26 novembre 1915

15 000 kilos de pommes de terre sont arrivés. À Noyon permis de vendre des vaches 4 jours pour population de St-Quentin qui se serait révoltée de misère ? Canon

Samedi 27 novembre 1915

Canon encore sans arrêt nuit et jour mais loin. De gros coups dans la matinée. On dit que les Russes avancent maintenant ?? Il gèle à fendre les pierres.

Dimanche 28 novembre 1915

Canon loin nuit et jour. Le Gouverneur dit de rentrer les machines agricoles et en bon état, sous peine d’amende et de prison.

Lundi 29 novembre 1915

Déclarer de suite tous les équipages. Indiquer 2 roues ou 4 etc.

Amener demain à 7 h ½ du matin à la gare toutes les bêtes à cornes. Les bêtes trouvées dans les pâtures seront saisies.

De gros coups de canon nuit et jour.

Mardi 30 novembre 1915

Gros coups de canon tout le jour. Des troupes seraient à Hirson.

Toutes les vaches amenées. On renvoie les vieilles et ils choisissent 300 jeunes bêtes comptées à 70 c le kilo, pesées demain et expédiées jeudi avec le reste des leurs.

Décembre 1915

Mercredi 1er décembre 1915

Canon. Pluie. Vent, etc.

Jeudi 2 décembre 1915

Embarquement des bœufs, 72 taureaux et vaches allemandes.

Canon sans arrêt très fort à midi sur St-Quentin.

Nouvelles d’Adolphe par Alfred Fostier du 4 octobre. (*)

 

(*) : Il doit s’agir de nouvelles déjà anciennes puisque Adolphe est déjà mort depuis le 25 septembre 1915, soit depuis 68 jours

Vendredi 3 décembre 1915

Temps affreux. Vent et pluie font rage. Canon malgré tout.

Embarquement de vaches. 20 vaches sont conduites à Beugnies, 2 000 hommes d’infanterie sont arrivés à Fourmies.

Samedi 4 décembre 1915

Encore temps affreux. Tempête. Canon. Partout signale troupes qui passent.

Est-ce la retraite ? 5 000 à Fourmies. Partout il en arrive aux environs. Lunéville serait cernée par les Français. On n’ose rien espérer.

Dimanche 5 décembre 1915

Avant midi canon qui continue sans arrêt très fort sud-ouest.

Des lueurs sur Maubeuge le soir.

Lundi 6 décembre 1915

St Nicolas. (*) Encore grand vent, pluie et canon.

Demain à 9 heures embarquement des 300 vaches choisies, restant à enlever. À Floyon à chaque fenêtre inscription du nombre d’habitants, âges, noms etc
Canon nuit et jour.

 

(*) : Fête importante dans le Nord et l’Est de la France

Mardi 7 décembre 1915

Matin passe un aéro malgré le vent. Canon très fort l’après-midi.

Wignehies, Fourmies etc. fourmillent d’Allemands sales, fourbus, découragés. Ils vont sur la Belgique. S’ils pouvaient retourner chez eux ??. Ils disent venir d’Arras !

Terrible disent-ils.

Mercredi 8 décembre 1915

 Canon très fort mais encore nuit et jour.

Par moments, de gros coups. La nuit cela tape encore bien même très fort.

Jeudi 9 décembre 1915

Matinée canon. Après-midi vent, pluie, tempête presque.

À La Capelle, La Flamengrie, des jeunes manœuvrent, font l’exercice.

L’aéro de mardi a laissé tomber des journaux qui donnent de bonnes nouvelles pour la Russie 1 100 000 prisonniers depuis le 11 novembre. Défense de dire qu’ils reculent. Ils forment un corps d’armée nouveau.

Vendredi 10 décembre 1915

Pluie, vent et canon. Entre Lens et Arras ils ont perdu une division, dit-on. Cela semble enfin reculer un peu. Mais défense de le dire.

Samedi 11 décembre 1915

 Pluie toujours. Affiches : déposer aux mairies toutes les armes à feu ou blanches, souvenirs, armes de collection ou hors d’usage même rouillées sous peine d’amende et de prison. Première affiche pour le rationnement du lait et de la viande.

Canon.

Dimanche 12 décembre 1915

 Gros coups espacés. Les Français seraient à Rethel. On ferait des tranchées à La Capelle ? (Inondation)

Lundi 13 décembre 1915

Nuit un peu de neige.

Plus de canon. Annonce : un départ aura lieu prochainement pour la France. Les personnes sans ressources peuvent se faire inscrire demain pour être rapatriées sauf les hommes.

Nouvelles d’Adolphe par Gérard du 20 octobre. (*) 

 

(*) : Encore une fois il doit s’agir de vieilles nouvelles !

Mardi 14 décembre 1915

Gelée.

Nuit canon, très fort le matin, continue toute la journée sans arrêt. Matin perquisitions côte Froment (*) jusqu’en haut de la plaine. Enlèvent chaudières, baignoires etc
Passons encore à côté pour aujourd’hui. Visite d’Ernestine.

Canon nuit.

 

(*) : Actuelle rue E.Wantin

Mercredi 15 décembre 1915

Canon assez loin.

Recommencement de la séance pour les chaudières. La place et la rue nationale leurs fournissent une vingtaine de chaudières, baignoires, vieux vélos, 15 000 F de laine chez Dervillée et 3 chaudières.

Pas trop bouleversé ici, mais tout visité dans bâtiments. Pris la chaudière, vu la voiture ont dit. Belle voiture. Le matin 3 gros camions autos vont sur Avesnes et reviennent le soir !

Cela semble drôle. Il ne passe plus une auto tous les 8 jours.

Canon nuit.

Jeudi 16 décembre 1915

Dégel. 10 chevaux partis hier pour Maroilles 10 jours.

Pas de canon, pas de perquisition. Le 84e serait en Serbie.

Vendredi 17 décembre 1915

Canon sourdement. Le départ pour la France n’aura pas lieu.

Des trains passent à Avesnes avec des émigrés. D’où ? Où vont-ils ?

Sur Sains etc. Annonce : les cultivateurs qui n’auront pas coupé les haies le long des routes pour lundi seront punis d’amende et de prison.

Samedi 18 décembre 1915

Plus de canon (évacuation) Les émigrés volontaires n’ont plus le droit de partir, seulement 90 pour la commune. Ils viennent enlever les fils télégraphiques jusqu’au clocher.

Dimanche 19 décembre 1915

Pas de canon. Faut pour Noël 3 voitures de branches de sapin et 500 bouteilles de vin. Demain matin conduire encore tous les chevaux harnachés à Avesnes.

Affiche déclarant nulle la loi française d’avant l’invasion défendant de faire du commerce avec les nations ennemies, nulle la loi du moratorium concernant les créances que l’on devrait aux Allemands. (Qu’ont-ils besoin d’argent !)

Lundi 20 décembre 1915

Matin et matinée gros coups comme des éboulements. Les trains roulent nuit et jour.

 //////// (*) personnes seulement ont droit de retour en France. Les chevaux passés en revue tous renvoyés.

Les 500 bouteilles de vin à fournir sont une amende car 95 cochons sont disparus. Où ? (Partis en France sans passeport sans doute). De là amende.

Cette semaine plus que du bœuf aux boucheries.

 

(*) : Illisible

Mardi 21 décembre 1915

Perquisitions encore des rues non visitées. Enlèvement des laines Dervillée.

Gros coup de canon hier soir, la nuit et la matinée sur la Belgique. Les Français seraient à Tournai ????

Les trains montent sur Aulnoye avec matériel plein de boue blanche. (Pluie, neige fondue, froid)

Mercredi 22 décembre 1915

 Cela tape fort toute la journée.

Aujourd’hui distribution de 250 gr de farine par personne. Tout refaire la statistique du bétail pour la troisième fois. Ces messieurs trouvent qu’on ne déclare pas tout (C’est vrai !)

Va chercher 10 000 kilos patates.

Jeudi 23 décembre 1915

 Aujourd’hui 10 000 kilos de charbon.

Canon roulant.

L’Amérique aurait rappelé son ambassadeur d’Autriche. Vrai ou faux ?

Tant pis pour le ravitaillement, tant mieux pour la guerre. Un chef de bétail est nommé. Il devra refaire toutes les statistiques du bétail à ses risques et périls.

Legris nommé n’en rit pas.- Fleu

 

(*) : Fleu : il s’agit de la rivière qui déborde et inonde les prairies et parfois les maisons).

Vendredi 24 décembre 1915

Faut pour le réveillon 18 lapins, 25 poules, 150 bouteilles de vin.

Le matin, une vingtaine de civils viennent pour abattre les noyers. Il arrive beaucoup de ravitaillement.

Le bruit avance beaucoup que l’Amérique aurait déclaré la guerre à l’Autriche. Beaucoup de troupes encore à Anor.

De gros coups de canon le matin et la matinée malgré un temps affreux. Pluie. vent. tempête. fleu.

Samedi 25 décembre 1915

Noël.

Pluie, vent. Canon nuit et jour, nuit gros coups sans arrêt. Lille serait évacué ?

Dimanche 26 décembre 1915

Nuit et jour canon gros coups malgré le grand vent.

Demain à 9 heures à la Rotonde à Avesnes appel des hommes de À à L.

Que l’on s’ennuie, jamais rien de nouveau ! Affiche interdisant les clubs en réunion.

Lundi 27 décembre 1915

Canon nuit et jour, l’après-midi quelques coups sur Arras toujours malgré un vent violent.

Cela doit être terrible là-bas. Les hommes à Avesnes n’ont même pas été appelés. Tous présents ?

Vin. Foins. Quel plaisir de déranger ainsi le monde !

Mardi 28 décembre 1915

Boum ! Boum ! Dieu quel vacarme ! Nuit et jour pas 1 minute de répit et quels coups ! Sur St Quentin, Cambrai, Arras. Dieu veuille que cela ait fait avancer ! Par moment tout tremble.

Mercredi 29 décembre 1915

On fait, dit-on, des tranchées à La Capelle avec fils de fer etc. Des prisonniers civils sont arrivés à La Capelle par camions, gardés baïonnette au canon. Ils viennent de Laon et environs.

Cela tonne nuit et jour mais moins près qu’hier.

 

Mille bruits circulent tous faux peut-être. Nos troupes seraient revenues de Serbie, Lille serait repris (pour la n ième fois), Sin-le-Noble en feu, etc. etc.

Jeudi 30 décembre 1915

Coups encore mais très loin.

Rien de nouveau. Attendons toujours si on saura le résultat de ces combats si violents. (*)

Un ballon libre allemand non monté a éclaté à Sémeries contenant dit-on des feuilles socialistes pour décourager les soldats allemands.

Des perquisitions sérieuses sont faites pour trouver et détruire ces dits journaux.

 

(*) : Pourtant aucune attaque de grande envergure ne s’est produite durant cette période, ni côté allemands, ni côté français.

Vendredi 31 décembre 1915

Encore nuit et jour d’assez gros coups mais vent et pluie empêchant d’entendre. Ils racontent que les formidables coups entendus cette semaine étaient un exercice de leurs recrues au Cateau. On conduit aujourd’hui à Avesnes les noyers abattus.

 

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Triste année ! Avec quelle hâte on désirait voir sa fin et hélas nous sommes toujours au même point, semble-t-il !

 

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Année 1916

 

Description : Description : Description : Description : Description : Description : 1916

 

Dieu veuille que tu marques notre délivrance et notre réunion !

Oserons-nous l’espérer ?

 

Janvier 1916

Samedi 1er janvier 1916

Lourde journée, grise, triste, pluie et vent, on n’entend rien.

 

À minuit à Fourmies cloches et salves pour fêter l’année nouvelle.

Dimanche 2 janvier 1916

Ils enlèvent tous les fils d’Etrœungt à Fourmies. Canon toute la matinée.

Encore pluie, vent.

Lundi 3 janvier 1916

Canon encore. Il n’y aurait aucun grand combat à Aubigny au Bac.

Mardi 4 janvier 1916

Plus de canon.

Le poste est parti, reste deux hommes. Passent 16 chariots à 4 chevaux chaque venant de Fourmies, vont vers la Rouillies. Faut servir à la disposition de ces messieurs quelques 20 cafetières, 100 tasses à café, 3 carafes, draps, couvertures, oreillers, traversins, édredons, 1 sommier métallique, des rideaux petits et grands, descentes de lits, chaises, etc. etc. Floyons est remis dans la Commandanture d’Avesnes.

Mercredi 5 janvier 1916

Canon.

La Commandanture demande combien il y a de brasseries, le nom du propriétaire et le nombre d’hectolitres fabriqués en temps de paix.

Pourquoi ?

J’en déclare 2500. Un poste arrive le soir.

Jeudi 6 janvier 1916

Calme.

Outre le chef de poste, un lieutenant qui loge en ville ainsi que son ordonnance.

Vendredi 7 janvier 1916

Faut 10 vaches, 10 cochons, 10 moutons, pour eux tuer.

Pas de canon.

Samedi 8 janvier 1916

Pas de canon. Distribution de vêtements du comité américain aux indigents. Distribution de charbon, idem.

Dimanche 9 janvier 1916

Rien encore.

Le train d’émigrés partant pour la France s’en va aujourd’hui. Les partantes sont enfermées depuis jeudi et ont passé visite sur visite de crainte de correspondances. Des chariots d’Etrœungt ont été requis pour les conduire en gare à Avesnes.

 

(*) : Partant pour la zone non-occupée par les Allemands

Lundi 10 janvier 1916

La circulation en voiture est défendue. Les inscrits de 18 à 48 ans devront porter un brassard rouge au bras !.

Canon mort.

Mardi 11 janvier 1916

Passent 5 ou 6 autos !!. Pas de canon.

Pluie et vent.

Mercredi 12 janvier 1916

Canon repris depuis hier soir. Enlèvement de beaucoup de fils téléphoniques. Demain à Avesnes conduire tous les chevaux brossés, ferrés, munis d’un licol et 2 longes. (*)

Les hommes devant porter le brassard sont ceux de 17 ans à 44 ans.

À dater d’aujourd’hui n’avons plus droit qu’à 1/8 de litre de lait par jour et par personne. Le reste devra être conduit à la laiterie.

 

(*) : Licol : lien de cuir ou de corde, passé autour du cou des bêtes pour les attacher ou les conduire.

Longe : longue courroie qui sert à attacher ou conduire un cheval.

Jeudi 13 janvier 1916

Prennent 18 chevaux, les plus beaux.

Vent violent, plus de canon.

Vendredi 14 janvier 1916

Calme encore. On dit que l’arsenal de Lille a sauté. Annonce disant de conduire toutes les pommes à la mairie.

Samedi 15 janvier 1916

(Grippe). Rien de neuf.

Dimanche 16 janvier 1916

 Faut :

Ø  que les hommes passent prendre leur brassard à la mairie.

Ø  Encore 85 000 kilos de foin.

Ø  Couper les crins à queues des chevaux, les apporter à la mairie.

 

À Lille des civils auraient, par un souterrain miné, fait sauter un dépôt considérable de munitions. Le héros fusillé ainsi que 10 otages. Leurs journaux disent simplement que l’arsenal a sauté tuant des civils et détruisant le quartier nord.

Lundi 17 janvier 1916

Appel des hommes de 17 ans à Avesnes.

Demain celui des 18-19-20 ans. Le Général trouve qu’il y a trop de cultivateurs.

Les jeunes gens doivent apprendre un métier ! Quand ? Où ? Comment ?

Réquisition du camion devant être en bon état et préparé pour jeudi 20. (Encore une plume de partie !).

 

À Ors, des milliers d’Allemands crevant de faim. Des jeunes logés à La Flamengrie viennent le matin faire l’exercice à blanc.

Mardi 18 janvier 1916

Arrivée d’un chariot, 6 hommes et 8 chevaux. Logent chez G. Petit, viennent de Caudry. Beaucoup de voitures venant de Caudry sont à Avesnelles.

Divers bruits font espérer, la crise monétaire étant à bout pour eux. Un courrier a été brûlé à Avesnes donnant trop de photos de France.

Mercredi 19 janvier 1916

Canon loin sans arrêt.

Une machine à presser le foin arrive et s’installe chez Heuclin. Tout le foin est réquisitionné. On aura le droit d’en garder seulement 1 kilo par vache et par jour !!!

Jeudi 20 janvier 1916

De gros coups de canon. Lille est bombardé, disent-ils.

Lens à demi-occupé par les Français. Le ravitaillement ne peut plus se faire par train jusque St Quentin, c’est pourquoi il faut des chariots
Malgré cela ils seront à Parisse le 25.

Annonce : Saluer demain un général de passage.

Vendredi 21 janvier 1916

Les propriétaires de moutons doivent les tondre et porter la laine à la mairie sous peine de confiscation des moutons et de la laine.

Faut 20 feuillettes vides. Canon loin tout le jour.

 

Demain à 10 heures du matin 26 jeunes gens désignés doivent se rendre au poste. Une salle devra être prête pour leur servir de prison !!

À partir de demain la presse au foin marchera. Par suite d’entente on ne fournira que (nombre non indiqué) kilos par vache que l’on possède.

Passe un camion auto de la Croix-Rouge.

Samedi 22 janvier 1916

Canon.

Les jeunes gens sont parqués chez Delaporte, attendant ?.

 

Midi, appel des hommes qui ont été mobilisés demain à 8 h ½ heure allemande à Avesnes. Mardi dernier carillon à Avesnes, la Monténégro s’étant rendu sans conditions.

Dimanche 23 janvier 1916

Les hommes revenus. Le général leur a simplement demandé s’ils avaient été habillés en soldats français à la mobilisation ! Canon la nuit et le jour sur Laon.

 

À midi, passe sur Avesnes, Sains, un dirigeable français sans doute. Cela fait plaisir vers 1 heure ½ des formidables coups de canon sur les Ardennes. On tire sur les aéros ou sur le ballon qui peut-être est par-là.

Les 26 hommes ont pu sortir aujourd’hui. Demain ils doivent aller travailler à la presse au foin qui va fonctionner.

 

Soir, canon.

Lundi 24 janvier 1916

Canon loin. Le soir cela donne plus fort
Assez bien de cartes et de lettres. Rien pour nous. Que c’est long !
La presse ne marche pas.

Mardi 25 janvier 1916

Canon toute la nuit et par moment le jour.

Hier réquisitions et prises de cuivre, saloirs etc. à Orniaux. Aujourd’hui Warpont, Albroye, etc.


Le matin arrive le maire de Bohain envoyé ici en punition ! Il doit se présenter au poste tous les jours à midi.

Mercredi 26 janvier 1916

Avis :

Ø  Quiconque perdra sa carte d’identité, n’en aura plus d’autre.

 

Canon St-Quentin toute la matinée ; au loin sur Lille toujours.

Depuis 10 jours on bombarde Lille disent-ils. Un homme passé lundi dans le village disait en venir, s’étant sauvé pour ne pas être emmené ; Il disait que les Français et les Anglais bombardaient et que les Allemands brûlaient. (N’est-ce pas encore un Armistice ?) La presse au foin a de l’esprit, elle ne veut pas fonctionner.

Canon soir.

Jeudi 27 janvier 1916

Lointains roulements.

Annonce :

Ø  Défense de tuer les taureaux.

 

À Saméon on enlève les poteaux et fils télégraphiques.

Vendredi 28 janvier 1916

Hier, c’était la fête à Guillaume mais moins que l’an dernier. Banquet et c’est tout. Pas de canon. Spelman dit la guerre durer encore 3 mois (Puisse-t-il dire vrai !)

 

On attend un corps d’armée au repos dans la région, aussi faut-il nettoyer les écoles et les maisons des émigrés.

Samedi 29 janvier 1916

Calme complet. On parle d’un grand combat qui aurait eu lieu et des tas de morts. Faut des tables, des chaises, 1 matelas, 2 dindons. Encore payer 19 000 Frs. de contribution plus 4 000 Frs. de frais divers.

 

Un soldat français resté à Mondrepuis égaré depuis le début de la guerre, enlevé en Allemagne comme prisonnier civil, revenu depuis quelques mois, dénoncé lâchement comme soldat, vient d’être fusillé à Fourmies ; celui qui l’abritait, condamné à 10 ans !!.

 

Annonce :

Ø  À partir d’aujourd’hui une feuille spéciale portant nom, sexe, âge des habitants de chaque maison sera placée aux fenêtres de chaque maison, visible jour et nuit.

 

Le pain est remis à 0,40 Fr. le kilo. Défense d’enterrer les bêtes mortes. Elles devront être conduites à Fesmy (Aisne).

Canon fort sur les Ardennes.

Lundi 31 janvier 1916

Gendarmes viennent chercher des douilles à lampes.

Canon par moment.

 

À Avesnes on dit que les Russes avancent sérieusement et que les Turcs sont en déroute ??? Leurs journaux disent ayant souffert en Serbie, le 84e, le 127e, le 148e . Maintenant pour toutes les choses cachées trouvées, amende ou prison.

Pour la dixième fois au moins, faut déclarer veaux, vaches, chevaux, ânes, mulets, lapins, poules, cochons, cochons d’Inde, etc. etc
Pour 2 puces ??. (Enfin un mois de passé !)

Février 1916

Mardi 1er février 1916

Matin, il arrive 11 cavaliers venant de Mondrepuis puis préparent du logement pour des chevaux et des hommes pour demain et après-demain. Ils disent venir de Serbie !!!

Ce sont des artilleurs.

Aux environs, on en signale également. Est-ce une retraite ? (Gros coups par moments).

 

J’ai 16 chevaux à loger rue du moulin.

Mercredi 2 février 1916

Les arrivés d’hier partent pour Montreau-St-Waast.

 

Vers 11 heures, arrivent des cavaliers, des chariots, fourgons, voitures, caissons de toute espèce qui logent ici. Suivent des fantassins qui sont sur Avesnes eux.

Ils viennent de Mondrepuis et croient aller à Arras. Beaucoup ne savent pas où ils sont et se croient en Belgique.

À Sains et partout il en repasse.

 

Vers le soir, il en repasse une vingtaine à cheval, des voitures.

Le canon roule fort sur Arras.

Jeudi 3 février 1916

Départ de tout à 8 h du matin.

Arrivée et passage de camions encore, voitures, chariots renfermant de tout jusqu’à poêles caissons, quelques canons, autos des hommes de tous âges, des gosses de 15 ans. Infanterie sans arrêt de 8 h à 12.

 

À midi, arrivée de pontonniers de soldats, d’un général et officiers qui logent.

Hier un officier disait nous embarquer à Aulnoye, pour ?. savons pas.

Guerre sur sa fin. Puisse-t-il dire vrai ! (*)

Cela encourage un peu, ce mouvement de troupes étant Anormal. On parle d’un débarquement de troupes anglaises en Hollande ??.

Canon.

 

(*) : La grande offensive allemande sur Verdun doit se déclencher dans quelques jours. Elle devait terminer la guerre sur une victoire éclatante de l’Allemagne.

Vendredi 4 février 1916

Continuation de passage de toute sorte. (Hier un fantassin est tombé mort à Orniaux). Ceux d’hier partent les uns à 3 h, les autres qui croyaient être ici jusqu’à dimanche à 5 h ont ordre de défiler.

En arrive encore après midi 400 chevaux. Repartent au moins 15 bestiaux, des caissons de tout enfin. Est-ce pour de bon ?.

Canon encore sur Arras.

Samedi 5 février 1916

Canon loin partout.

Les 400 annoncés ne sont pas arrivés hier, reste une vingtaine d’officiers avec ordonnance et quelques fourgons ne savent pas quand ils partent. On raconte que l’Angleterre a forcé la Hollande à lui livrer passage et cela par menace d’inondation ; que les troupes franco-anglaises arrivent au nord par la Hollande, ce qui explique le départ du centre ici pour ne pas être prisonniers ???. Il en est passé ces jours-ci  partout aux environs.

 

10 inscrits sont partis travailler à Avesnes. Il paraît que depuis 150 jours, 50 dépôts de munitions ont sauté. Faut 1 500 œufs toutes les semaines à la Commandanture.

Dimanche 6 février 1916

De 1 h du matin à 1h ½, passent encore troupes et voitures. Ceux d’ici partent à 5 h1/2, le reste dans l’après-midi. Rien de neuf. Canon la matinée loin.

Avis :

Ø  Ceux qui vendent les fromages pour les Allemands, ils seront payés 120 Frs. les 100 kilos.

Lundi 7 février 1916

Canon sur Soissons, St-Quentin nuit et jour.

Le Gouverneur vient s’informer si les soldats se sont bien comportés lors de leur passage, s’ils n’ont pas pillé, volé, sali, etc.

Mardi 8 février 1916

Calme. Rien de nouveau.

En repasse sur Landrecies, Solesmes etc. sans arrêt, prennent le train sur la Belgique.

Mercredi 9 février 1916

Allons à Avesnes où on certifie que l’Amérique a déclaré la guerre à l’Allemagne. (*)

Pour la Hollande on l’espère, mais rien de certain.

 

À midi, sept aéros. Allemands passent bas venant du front, allant sur la Belgique. Les hussards sont partis remplacés par 17 motos.

 

(*) Les États-Unis d’Amérique déclareront la guerre à l’Allemagne le 6 avril 1917.

Jeudi 10 février 1916

Pas de canon.

Passe 3 aéros français qu’on entend sans les voir mais le poste est prévenu de leur passage par le téléphone. Passe 2 autos, 3 motos. Pas de ravitaillement cette semaine dit-on.  Allons-nous avoir faim ?. Les Anglais débarqués à Ostende ????

Vendredi 11 février 1916

Faut faire encore le recensement sur 3 feuilles différentes : une pour le service sanitaire, une pour les impôts, une pour les communes. Indiquer nom, âge, sexe, en état de travailler ou infirmité empêchant le travail, réunir les mêmes familles par une accolade.

Mauvais temps, pluie, neige, froid.

Canon très loin. Leurs journaux annoncent beaucoup de dégâts à Paris par leurs zeppelins.

Samedi 12 février 1916

Trains roulent sans arrêt.

Un du poste disait hier que les troupes ayant été logées ici étaient arrivées 48 heures trop tard pour empêcher le débarquement des Anglais à Ostende. Le soir canon au Nord sur la Belgique.

Conduire demain à 7 h1/2 tous les chevaux à Avesnes.

Dimanche 13 février 1916

Annonce : Les colis pour les prisonniers ne seront plus reçus que le lundi de 3 h à 5 h du soir.

Vilaine journée. Pas un cheval n’est pris.

Canon le soir et la nuit.

Lundi 14 février 1916

Journée affreuse, vent, pluie, tempête et canon malgré tout. Tous les chevaux doivent encore être conduits jeudi à Avesnes
Faut pour demain : 10 glaces, 10 chaises, 10 tables, 10 cuvettes et une machine à coudre
Soir canon sur St Quentin.

Mardi 15 février 1916

Canon roulant sans arrêt toute la nuit et jour au sud, au nord-ouest.

Vent, tempête, neige fondue etc.
Interdiction aux communes de délivrer des passeports. Il n’en sera plus délivré que par la Commandanture et seulement en cas d’urgence absolue.

Tous les équipages devront être en état pour la guerre pour le 15 mars
Les haies rebouchées également le 15 mars. Le maire de Bohain et sa femme sont rappelés à Bohain.

Mercredi 16 février 1916

Pluie, vent, tempête, canon.

Jeudi 17 février 1916

Vent froid

Enfin presque plus d’eau. Des officiers en auto viennent pour visiter la brasserie, vont à la filature puis ne reviennent plus. On parle d’installer une nouvelle presse à foin et une batteuse.

La semaine prochaine et suivantes les bouchers devront conduire leur vache à tuer à Avesnes et la faire visiter par le vétérinaire !.

 

Ø  Défense d’avoir des approvisionnements en stock.

Ø  Défense d’avoir plus d’1 livre de beurre, 1/8 de litre de lait etc. etc.

 

À la revue des chevaux à Avesnes, ils ont pris encore 7 chevaux.

À Fourmies arrivent des blessés de ceux qui ont été nos hôtes, il y a 15 jours. Ils n’ont pas perdu de temps.

 

Après-midi, canon sur Arras. Soir canon reprend sans arrêter toute la nuit. Pour éviter le commerce, les routes et pâtures à Beugnies sont barrées de fer à ronces.

Vendredi 18 février 1916

Canon sans arrêt fort sur St-Quentin et Arras.

Envoie des lettres et hélas jamais plus rien pour moi.

 

Après-midi re-pluie et re-vent.

Samedi 19 février 1916

100 000 kilos de foin pressé sont mis chez Y. Rambouts, ils viennent voir pour en mettre à la grange mais n’osent n’étant pas assez solide.

À Sains, 90 civils partent pour ?. avec vêtements et un matelas.

Pluie encore.

Canon, cela résonne dans le lit, boum ! Le soir roulement continu fort sur St Quentin, Péronne. On dit que le poste part demain, l’officier dit pour aller en Allemagne contre les Russes.

On dit tous les gendarmes repartis à Berlin. Pour émeutes ??

À quand la vérité ?

Pour quand des nouvelles vraies ?

Hélas !!!

Dimanche 20 février 1916

31 ans. (*)

La nuit et matin des motocyclistes perquisitionnent dans 3 maisons. Dans une on trouve fusil, vélo et un veau tué : l’homme emmené !.

Annonces :

Ø  Toutes les voitures doivent être réparées, prêtes pour la guerre pour le 10 mars.

Ø  Les habitants doivent déclarer leur provision de beurre sous peine de confiscation et d’appel en justice.

Ø  Le lait est encore fraudé : ne garder qu’1/8 de litre par personne.

Ø  Fournir 1 œuf par semaine et par poule.

Ø  Tailler les arbres fruitiers.

 

Il paraît que des dépêches arrivent maintenant des soldats du front par la Croix-Rouge de Genève. La réponse qui doit se faire immédiatement peut contenir 20 mots.

Trois déjà sont arrivées. En aurais-je une ??.

Canon à midi sur Soissons.

Plus de pluie enfin.

 

(*) : C’est son anniversaire, elle est née le 20 février 1885

Lundi 21 février 1916

Gelée.

Hier soir ordre au maire et au secrétaire d’aller demain matin à Avesnes avec un porte-plume. Ils reviennent le soir, ont travaillé au classement en recensement.

Un peu canon à l’est. Deux bouchers vont conduire 2 vaches, une est saisie trop bonne pour nous.

Lueurs soir partout. Trains roulent beaucoup.

Mardi 22 février 1916

À Rocquigny, nuit de samedi à minuit 30 Allemands appellent tous les hommes, les réunissent sur la place. Pendant ce temps, d’autres pillent puis fuient.

Canon nuit dernière et de gros coups toute la journée.

Il paraît que cela chahute à Berline, que les femmes réclament leurs maris et fils, que 200 gendarmes sont repartis là-bas.

Puissent-ils y rester !. Les motocyclistes sont encore pires dit-on.

 

Perquisition encore à Tatimont chez Malarme qui est au secret. Les Russes leur auraient flanqué une bonne raclée ? Eux ont abandonné Courrières, Lens ???

Mercredi 23 février 1916

Gelée, un filet de neige… Neigette sèche.

De grand matin, motos vont au Grand Bois compter les bêtes dans chaque ferme et sonder le foin. Cinq motos reviennent fouiller divers jardins, trouvent dans une remise vin, champagne etc.

Le poste part demain, d’autres reviendront.

 

Après dîner, violent bombardement sur St-Quentin.

Canon au loin tout le jour. Les 150 000 kilos de foin fournis ne suffisent pas, il faut vider toutes les granges et tout conduire à la presse.

On recevra après chacun sa part (1 kilo ?? Par jour pour chaque vache ! Avec cela beaucoup de lait de beurre ! )

Jeudi 24 février 1916

Gelée forte, froid sur filet de neige.

Pas de teuf-teuf aujourd’hui. Le poste part à 5 heures du matin pour Sains.

 

À midi en arrive un autre, 2 chefs, l’un loge chez Obled, l’autre chez Degois, un cycliste chez Anna Gilbert.

Canon un peu partout toute la journée.

Dès aujourd’hui, mettre en état les pompes à incendie et former une société de pompiers : un chef et deux sous-chefs.

Vendredi 25 février 1916

Froid, gelée, un peu de neige.

Canon.

Un ballon plein de journaux atterrit au Grand Faux. Malheureusement deux Allemands étaient là. Ils ramènent journaux et ballon, on ne peut rien savoir.

Arrangement, on ne fournira plus de foin pour le moment.

Samedi 26 février 1916

Le ballon était allemand diront-ils.

Rien de neuf, canon loin.

Dimanche 27 février 1916

Annonce :

Ø  1/ Prendre ses cartes au pain pour aller aux boucheries.

Ø  2/ Déclarer combien on a de fromages.

Ø  3/ Fumer et tailler les arbres fruitiers.

Ø  4/ Que les horloges marquent bien l’heure allemande.

 

Le canon donne loin. Averse de neige. Leurs journaux disent avoir fait 3 000 prisonniers près de Verdun.

Lucien met sa première culotte sans aide.

Lundi 28 février 1916

Canon roulant.

1 000 bruits circulent : grande victoire des Russes, défaite des Français partout, Verdun pris  ???. 10 000 prisonniers pris à Béthune.

Hélas quoi de vrai ?

Rien du tout peut-être !

Mardi 29 février 1916

Nuit canon. À partir de 10 h, sans arrêt toute la journée sur Soissons.

 

À Verdun, les uns disent le fort tombé, d’autres 10 000 Français prisonniers, 100 000 Allemands tués, rien de pris sinon une veste pour ceux qui voulaient faire un grand coup avant de faire un nouvel emprunt ???.

À quand la vérité ?

Mars 1916

Mercredi 1er mars 1916

Pour Verdun, ils ont avancé de 3 k sur 10 k de large avec 300 000 hommes sous le feu des forts et disent eux-mêmes pas une victoire, une boucherie, 70 000 Allemands tués. 20 Allemands tués pour 1 Français.

Canon.

Jeudi 2 mars 1916

Par moments gros coups. Faut 2500 œufs cette semaine.

Vendredi 3 mars 1916

Pas un coup aujourd’hui. Enfin une carte de Jules du 25 janvier donnant bonnes nouvelles.

Faut à l’Empire allemand : les loques et chiffons.

Samedi 4 mars 1916

Canon : peu très loin sur la Belgique.

Dimanche 5 mars 1916

Défense :

Ø  1/ de stationner aux limites des villages.

Ø  2/ Reboucher les haies et barrières des pâtures, les bêtes en liberté seront saisies sans bon.

Ø  3/ Les pancartes des maisons doivent être mises au rez-de-chaussée et visibles pour la nuit.

 

Pas de canon.

Le journal ne parle plus de la prise du fort de Douaumont. On dit que ce fort miné a sauté après le départ des Français et que ceux-ci en ont repris le terrain aussitôt.

Lundi 6 mars 1916

Pas de canon encore.

Par moments comme des bombes. Depuis 4 jours les trains montent et descendent sans arrêt.

 

Après-midi, le Gouverneur vient visiter une partie de la Route Nationale et demande combien on a logé d’hommes, d’officiers, combien on pourrait en loger, visite les chambres à coucher des grosses maisons.

Mardi 7 mars 1916

Les jeunes gens de 16 ans sont appelés à Avesnes.

Canon par moments.

Il paraît que les capitalistes allemands exigent un grand succès pour le 10 ou qu’ils ne marcheront plus pour l’emprunt. D’où le coup sur Verdun.

 

Il arrive à Avesnes 120 000 Allemands tués ou hors de combat. Un armistice de 5 jours pour les morts. Le général commandant Verdun aurait été renvoyé.

600 000 Français seraient maintenant là-bas et 1 000 000 Allemands !!

Quelle boucherie !!

Mercredi des Cendres 8 mars 1916

Gros coups après-midi.

Faut 1 000 bouteilles de vin,  2 000 fromages pour le 10, les caoutchoucs, les pneus etc. de vélo, moto ou auto vieux ou neufs, les bicyclettes même en ferrailles sous peine d’amende de 15 000 marks et de 3 ans de prison.

 

L’attaque sur Verdun serait-elle une fin, Certains le pensent et l’espèrent. Les trains roulent encore sans arrêt.

Gelée, soir un peu de neige. Brume.

Jeudi 9 mars 1916

Canon sur St-Quentin. Trains encore. 50 Allemands sont venus de St-Quentin à Avesnes pour perquisitionner !.

Il neige.

Vendredi 10 mars 1916

Matin : 30 à 50 cm de neige.

Un peu de canon. Une attaque sur Verdun aurait échoué. Le fort Douaumont repris par les Français et les Allemands reculés de 25 kilomètres ???

Perdant 220 000 hommes hors de combat !!

Quelle boucherie ! Sur Soissons ils auraient eu aussi une raclée. (Ils en reçoivent toujours et cela ne leur suffit jamais)

Samedi 11 mars 1916

Conduire tous les chevaux à Avesnes demain. Vider toutes les granges pour le 15. Amener le reste du foin au magasin Commandanture. Il en sera distribué après 3 kilos par jour et par vache !!.

Faire chez les émigrés inventaire de la vaisselle, chaises, fauteuils, tables, tables de toilette, buffets.

Canon fort l’après-midi. Moins fort matin. Soir encore canon.

Dimanche 12 mars 1916

Grand matin, reçois photo et carte de Jules disant me tranquilliser. Quelle joie !

Le canon donne sans arrêt nuit et jour.

Faut pour mardi encore 550 bouteilles de vin sinon perquisitions. 1200 bouteilles étaient déclarées et on n’en a fourni que 700.

Lundi 13 mars 1916

5 chevaux pris hier. Canon très fort jour et nuit sur Soissons, St Quentin, Arras. Le soir fortes lueurs sur tout le nord-ouest. La presse part à Avesnelles.

Journée de printemps.

Mardi 14 mars 1916

Temps superbe, soleil, chaud. Bucque et rebucque sans arrêt nuit et jour.

Temps superbe.

Matin passe un aéro pendant 2 heures, l’après-midi un dirigeable évolue vers Maubeuge et environs.

Ca tape encore dur au coucher. Quand sera-ce pour de bon ?.

Le reste du vin ayant été conduit hier, défense d’en avoir encore 1 bouteille en cave.

(Et ailleurs ?) Ceux qui en ont encore doivent le porter à la Mairie contre un bon. Pour St Quentin, le Gouverneur lui-même doit en fournir 1 000 bouteilles sur sa réserve (Pour ce que ça lui coûte !)

De même pour le foin, à partir de demain il n’en faut plus un fétu dans les granges. Ils en enlèvent deux gros chariots de comprimé.

L’autre reste pour être réparti entre tous. (Vandales)

Mercredi 15 mars 1916

Beau temps.

Boum et Boum au nord-ouest-sud partout sans arrêt et très fort. Quelle hécatombe !

Il paraît que nos troupes ont avancé de 10 km sur tout le front et sont en Champagne hors des tranchées, en plaine ??? Toujours ?

Eux disent avoir eu hors de combat et tués etc. 280 000 hommes en trois jours sur Verdun les 27.28.29 février.

Pour obtenir ? Rien.

Un gros coup se préparerait sur Ypres ?. Demain pour 4 h à Avesnes 10 hommes d’ici bien chaussés, habillés pour partir travailler. Ils enlèvent le foin pressé.

Jeudi 16 mars 1916

Encore canon moins fort mais il fait moins beau. Tout autour ça tape.

Cesse le soir.

Vendredi 17 mars 1916

Les gens circulant le soir après 9 h (heure allemande) sont avertis que les patrouilles ont ordre de tirer sur eux. Un aéro français aurait survolé La Capelle et la commune cette nuit ?

Nous avancerions sur Ypres ? Toujours ???.

Les 12 hommes partis hier ont été embarqués ce matin pour Bohain. Un peu de canon loin après-midi.

Samedi 18 mars 1916

Encore canon plus ou moins fort et sans arrêt.

Départ de 10 chevaux pour Floursies.

Demain à 9 heures manœuvre des pompes par tous les hommes de 18 à 48 ans. (Pourvu qu’ils n’en profitent pas pour venir perquisitionner ?)

Parmi les hommes partis travailler à St-Quentin, 65 sont évacués n’ayant qu’un repas d’orge par jour et marchant à coup de crosse de fusil. Un émigré d’ici est revenu, se sauve et est poursuivi.

Un d’ici est mort dit-on.

Nuit canon.

Dimanche 19 mars 1916

Beau temps.

Encore canon sans arrêt, très fort le soir.

Pas d’Allemands à la manœuvre des pompes. Quelle bêtise de déranger tant de monde pour rien !

Ces messieurs montent un théâtre à Avesnes aussi faut-il 500 m de fils électriques pour y conduire la lumière. On va démonter les câbles de la brasserie et d’autres !.

On dit les Français à Anzin ?????.

Nuit canon.

Lundi 20 mars 1916

St Joseph.

Nuit dernière canon partout, à 3 h beaucoup sont réveillés par la violence des coups au nord. Toute la journée du sud au nord, coups sans arrêt.

Résultat ?? Quand le saurons-nous ?

Mardi 21 mars 1916

Un coup de canon par-ci, par-là. Rien de nouveau.

Mercredi 22 mars 1916

Bonnes nouvelles si elles sont vraies : Péronne repris et 7 villages voisins. (*)

Les Russes avancés en Allemagne. Léo de la laiterie dit sa laiterie brûlée par les Russes en Prusse occidentale. Vague espoir de délivrance qui passe.

Canon reprend tout autour par à-coups.

Jeudi 23 mars 1916

Tape et retape sans arrêt nord, sud, est, ouest. Prise de Péronne pas officielle mais la rente française en forte hausse.

Défaite complète des Turcs. L’emprunt allemand n’aurait eu que 2 milliards au lieu de 15.

Nuit canon encore très fort.

Vendredi 24 mars 1916

Canon.

Annonce :

Ø  Déclarer tous les chiens de suite, payer pour le 1er avril 10F pour les chiens de garde et 20 F pour les chiens de luxe.

Ø  La liste des bestiaux devra être faite à chaque ferme.

 

Si elle n’est pas conforme à celle de la déclaration faite à la mairie ou pas conforme au nombre réel que l’on possède : confiscation des bêtes non déclarées, amende et travail des hommes aux lignes de feu.

P. Malarme, chef de bétail pour son quartier, a 1 000 marks d’amende, 7 vaches, 20 poules, 2 veaux confisqués (non déclarés)

Samedi 25 mars 1916

Pas un coup de canon.

On parle que l’Allemagne demande un armistice ??.

Annonces :

Ø  pour le 30 mars placer à chaque pâture un écriteau en bois avec nom du propriétaire ou fermier.

Ø  Mettre tout le lait à la laiterie (n’ayant pas assez fourni, la commune amende de 1 200 marks et 1 prisonnier).

Ø  Donner l’adresse des prisonniers militaires, des soldats de qui leurs familles n’ont jamais eu de nouvelles depuis l’invasion, de ceux qui sont morts (date et lieu).

 

Pourquoi ?

Dimanche 26 mars 1916

Faut maintenant 2 œufs par poule par semaine.

Canon reprend matinée gros roulement jusqu’au soir.

Lundi 27 mars 1916

Gros coups après-midi.
Les cartes aux prisonniers seront portées par les maires tous les mois à l’hôtel de ville à Avesnes. La liste des prisonniers de chaque commune y sera déposée. (Pourvu qu’on ne nous empêche pas d’écrire aux parents non-habitants d’Etrœungt)

Mardi 28 mars 1916

Canon par moments.

Rien de nouveau.

Ah si, l’aumônier catholique allemand d’Avesnes vient et dit que leur emprunt est couvert et que la guerre durera encore 5 ans !!! (Qu’il aille à Binche, il aura vu la Belgique !)

Mercredi 29 mars 1916

Canon mais loin.

Hier le bruit courait qu’il fallait tous les couvercles de casseroles réquisitionnés pour couvrir leur emprunt mais il paraît qu’il est plus que couvert. Tant mieux pour eux si c’est vrai.

Quelques dépêches arrivent toutes les semaines mais disent si peu de chose ! (Vu une hirondelle)

Jeudi 30 mars 1916

De temps en temps canon loin ! Hélas !

Verdun brûle disent-ils. Il s’y livre de grands combats ?

Le Gouverneur vient visiter les maisons du notaire et de Verhaeghe. Dit de ne toucher à rien. 1 800 œufs sont fournis payés 0F10.

Vendredi 31 mars 1916

Très peu de canon.
Ils disent que 30 000 familles turques émigrent en Autriche pour apprendre l’agriculture ??? (Ou fuir les Russes)

Les gendarmes circulent les soirs, gare aux retardataires !

À Floyon, un homme blessé le soir.

À l’avenir les cartes envoyées ou reçues ne pourront plus donner aucune nouvelle de France ni nous d’ici.

Parler de choses banales et c’est tout. (Les ours !)

Avril 1916

Samedi 1er avril 1916

Temps superbe.

Canon au sud : forte détonation après-midi.

Journaux désolants : Verdun en feu eux avançant jetant liquide enflammé sur les Français.

Leur emprunt leur a donné 600 millions de trop ?

À partir du 15 défense de vendre du tabac. Il sera vendu par eux au prix indiqué.

Maubeuge et environs remis dans notre Commandanture séparés de la Belgique qui reprend ses frontières nord.

 

Les commerçants brasseurs entre autres faisant des affaires avec l’Allemagne et devant des traites aux commerçants allemands ont été appelés aux Commandantures et invités à payer leurs dettes.

(Heureusement que je ne leur dois rien !) (S’il y a encore un brasseur pour leur acheter du houblon !)

Dimanche 2 avril 1916

Journée superbe, très chaud. Malgré cela pas de coup de canon. On dit que la Hollande laisse passage aux Anglais à Flessingue, cela paraît certain.

 

Annonces :

Ø  Défense d’acheter ou de vendre une voiture sans autorisation.

Ø  Déclarer tous les sacs neufs ou vieux, même les débris et les conduire à Avesnes.

Ø  Les inscrits de 18 à 48 qui avaient des cartes spéciales doivent les reporter, la carte d’identité suffit (ordre du comité américain).

 

À Rocquigny, il faut 25 cercueils toutes les semaines !.

Un ouvrier de St-Quentin passe encore se sauvant pour ne pas mourir de faim. Une portion de riz par jour pour déterrer des morts du matin au soir et les ré-enterrer les Français d’un côté, les Allemands de l’autre !

Lundi 3 avril 1916

Très beau temps.

Calme énervant. Rien de nouveau. Quelques dépêches.

Un nouveau chef de poste officier arrive.

Mardi 4 avril 1916

Pluie.

Canon au sud. Toute la journée dit-on. Nous n’entendons rien.

De nouvelles cartes d’identité vont être distribuées à partir de 12 ans. Amende de 4 marks à qui la perdra.

Mercredi 5 avril 1916

Froid.

Rien de neuf. 5 grosses détonations au nord le soir. (Les Anglais qui arrivent ? Hélas quand les verrons-nous ??? )

Jeudi 6 avril 1916

Canon à l’est.

On ramène un jeune homme aujourd’hui coupé en deux par un train à St-Quentin où il travaillait pour les Allemands.

Demain présenter les chevaux à Avesnes et fournir 10 veaux gras.

Vendredi 7 avril 1916

Pluie, vent du nord.

Rien d’intéressant ; On enterre civilement Clément Lauloir vu qu’il restait en concubinage.

Malgré cela beaucoup de monde, la municipalité, les Allemands du poste et le prêtre catholique allemand qui suivent le convoi au cimetière, celui-ci dit quelques mots et récite 3 Ave pour le défunt.

Samedi 8 avril 1916

3 chevaux ont été pris hier.

Rien de neuf.

Dimanche 9 avril 1916

Affiches :

Ø  Des maisons de change sont installées par l’autorité allemande. Contre la monnaie allemande on recevra des bons de ville avec 4% de boni.

Ø  Les billets de banque français seront échangés au cours indiqué.

Ø  Les achats faits par les Allemands seront payés en bons de ville ou en monnaie belge nickel, argent ou bronze ou en monnaie allemande (pièce de fer. et leur emprunt a été couvert 2 fois ???).

 

Canon loin au sud.

Réquisition des bidons à alcool vides au Comptoir et au Familistère.

Lundi 10 avril 1916

Canon fort nuit et jour.

Hier passe 2 aéros le matin, un très haut et vole du nord au sud. Il paraît être français.

Mardi 11 avril 1916

5 aéros du nord. 9 depuis dimanche qui passent ou repassent venant du nord.

Canon. Pluie.

Mercredi 12 avril 1916

Canon pluie et vent sans arrêt.

On leur accuse encore un échec sur Verdun ???. Un à cheval fait l’inspection des pancartes. Pour la place fait mettre l’âge à ceux qui ne l’ont pas mis.

Jeudi 13 avril 1916

Vent, pluie.

Annonce :

Ø  Pour le 16 porter à la Mairie tous les objets de ménage en métal : cuivre, bronze, zinc, étain, fer etc.
Paiement en monnaie d’état
(de fer ?) Sinon les objets saisis ne seront pas payés !.

Ø  Tous les bidons à essence et alcool sont menés à Avesnes.

Ø  Demain, les sacs vides. (Et ils sont riches !!!!)

 

Vendredi 14 avril 1916

Averses, giboulées. Vent.

Canon mort. Hélas ! Hélas !

Samedi 15 avril 1916

2 gros coups de tonnerre. Giboulées.

Affiches réclamant encore les soldats des alliés ayant porté les armes. Délai 30 avril, après fusillé et la commune 12 000 marks d’amende.

Dimanche des Rameaux 16 avril 1916

Le matin A. Labranier est appelé à la Commandanture et a le grand honneur d’être nommé maire.

 

Annonce :

Ø  Ceux qui veulent du charbon peuvent en commander 45 F les 1 000 k. Payer d’avance en monnaie d’état. (et après ?).

Ø  Toute lettre ou carte demandant des nouvelles de France sera supprimée.

Ø  Les clefs des maisons des émigrés doivent être déposées à la mairie.

 

Un peu de canon loin. 800 émigrés sont attendus à La Capelle venant des environs de St-Quentin ou Roubaix-Tourcoing.

Lundi 17 avril 1916

Pluie, vent, rien de neuf.

Mardi 18 avril 1916

Refaire encore la statistique du bétail, âge, poids, des porcs. Temps affreux.

N’entend rien.

Mercredi 19 avril 1916

Temps affreux. Averses sans arrêt.

Arrive une trentaine de cartes. Rien pour moi.

Ne rien entendre ! Ne rien savoir ! Quelle vie !.

Hier rafle d’une quantité de poules non déclarées.

Jeudi Saint 20 avril 1916

Averses, vent. Rien de nouveau.

Le soir et la nuit on entend enfin le canon fort sur Arras, Cambrai.

Va falloir déclarer ses ?  Lapins !

Vendredi Saint 21 avril 1916

Toute la nuit et la journée canon, après-midi encore, toujours pluie sans arrêt !

Pour les lapins déclarer l’âge, le sexe, la race, les Russes surtout (Ils les prendront et mettront sur leur journal : Encore 100 000 prisonniers russes !)

Samedi 22 avril 1916

Un peu de canon par jour. Rien de neuf. Quel ennui tout le monde éprouve !.

Défense aux chiens et aux chats de circuler sous peine de fusillade pour eux, de 150 marks d’amende et de prison pour les propriétaires.

Dimanche de Pâques 23 avril 1916

Quand chanterons-nous Alléluia ?
 Fait assez beau. Calme absolu.

Annonce donnant jusqu’au 30 pour déclarer les chevaux non déclarés sans amende, ni punition.

Vers le soir, un aéro passe de l’est à l’ouest.

Lundi de Pâques 24 avril 1916

Le matin passe 2 aéros très haut. Affiches ordonnant de porter immédiatement aux postes des Commandantures tout ballon message renfermant les journaux ou tout écrit lancé par les aéroplanes ou des ballons.

Ordonnant de porter tous les comptes-rendus, manifestes ou écrits que l’on pourrait posséder.

 

Toutes les 5 minutes un gros coup mais loin.

ls disent que les Russes ont pris aux Turcs le port de Trébizonde. L’Amérique se mettrait contre eux.

On dit que les soldats russes débarquent en France ??? Toujours est-ce faux ou vrai ? À quand la vérité ?

Mardi 25 avril 1916

Beau temps.

Canon irrégulièrement.

Il paraît que l’heure va encore être avancée d’une heure sur Paris (l’heure d’où alors ?) et que la circulation et la lumière finiront encore à 9 h cela fera 7 heures réellement, et cela pour que les aéros ne puissent voir les lumières des villes !

Mercredi 26 avril 1916

Temps superbe, très chaud. Malgré cela rien, pas de canon.

L’Amérique leur fait un ultimatum. Déclaration de guerre si un Américain est encore torpillé sur un navire quel qu’il soit.

Jeudi 27 avril 1916

Chaleur intense.

Pas un coup de canon.

Arrive un peu de charbon. Cette semaine 2 000 œufs sont fournis et 1 poule couveuse !!!

Vendredi 28 avril 1916

Encore journée superbe et encore silence complet.

 

À 9 h du matin, passent au-dessus de nous du sud au nord 2 aéros blindés, très haut. L’aumônier catholique vient confesser les soldats catholiques du poste, il dit l’Amérique leur déclarer la guerre mais iront jusqu’au bout 5 ans encore. (Minteux !) (*)

 

(*) : Menteur en « chti »

Samedi 29 avril 1916

Arrivent beaucoup de cartes. Rien pour moi hélas !.

Beau temps. Pas un coup de canon encore.

 

Matin, encore du sud au nord 4 aéros.

 

L’après-midi, 1 de l’ouest à l’est. Les gendarmes visitent bon nombre de fermes, saisissent peaux, beurre, œufs, crème, cherchent jusque dans les pâtures, prennent même les prises sans jus.

Dimanche 30 avril 1916

Beau.

Demain il arrive 9 hussards qui logeront chez Léon Allaire. Le poste va partir. Encore des perquisitions !.

À partir de demain, l’heure sera encore avancée d’une heure et le soir rentrer se coucher et éteindre à 9 h encore ce qui fera réellement 7 heures !!!

Mai 1916

Lundi 1er mai 1916

Un aéro matin.

Perquisitions par les gendarmes à Tatimont, prise de beurre, crème, peaux etc. prison pour chaque délinquant ou autres.

Canon mort hélas !
 Les hussards sont arrivés, paraissent bien aimables.

Mardi 2 mai 1916

Orage. Encore un aéro matin (tous anglais disent-ils)
Pas de canon que fait-on par du temps si chaud et si beau ?

Demain démonter les turbines et les amener à la mairie.

Mercredi 3 mai 1916

Enfin le canon reprend sur le sud très fort.

Les trains passent sur l’Est pleins de soldats. On dit qu’ils envoient 1 million d’hommes sur Verdun. Le poste devait partir aujourd’hui et a contrordre. Ils se plaignent beaucoup de la nourriture.

Monsieur le Vicaire est nommé sur Boulogne.

Jeudi 4 mai 1916

Toute la nuit et le jour canon très fort. 2 aéros matin, 1 après-midi sur ouest.

 

Annonce :

Ø  Défense de sortir après 9 heures du soir, ce qui fait 7 heures ! Et plus de lumière après 10 h (8h).

Ø  Rappelle de saluer tous les officiers non pas militairement mais en se découvrant.

 

Les hussards partent.

Vendredi 5 mai 1916

Chaud, lourd, orageux. Baromètre au-delà de tempête. Soir vent violent et froid. Canon sur l’est. Trains passent toujours pleins de troupes allant sur Verdun dit-on.

Samedi 6 mai 1916

Orage.

5 jeunes gens sont tirés au sort pour aller travailler à St-Quentin.

Canon loin.

Dimanche 7 mai 1916

Revue des chevaux à Avesnes. En prennent 1 seulement. Canon encore.

 

Annonce :

Ø  Aller chercher des médailles pour les chiens moyennant 0 f 50 en bon argent.

Ø  Défense de faire paître des taureaux avec des génisses de moins de 14 mois, de les mettre dans des pâtures voisines.

Ø  Permission de sortir jusque 10 h allemandes (8h).

 

Il pleut toute l’après-midi.

Malgré cela le canon donne. Ils disent qu’ils ont reculé de 25 Kms sur Verdun ???. Toujours ?. Les amendes, appels, jours de prison ne cessent pas. Le général est parti en congé ? Ou pour de bon ? Emportant tous ses bagages.

Lundi 8 mai 1916

Pluie, vent.

6 heures du soir, une moto vient, ordonne d’amener demain matin à 7h (5h françaises) tous les tombereaux sur la place !.

Le pain est atroce. Les œufs sont encore payés 20 centimes pièce par les Allemands qui les revendent à St-Quentin 0 F 70 pièce !

Mardi 9 mai 1916

Ondées.

Au grand matin inspection des tombereaux. 61 sont pris et conduits à Avesnes. (Celui de la brasserie à 2 chevaux est réquisitionné lui aussi).Toutes les communes en conduisent. Pourquoi ?

Pas de canon.

Arrive des cartes. Encore rien pour moi. Quelle vie !

 

Des godets des fils télégraphiques ayant été cassés par des gamins sur la grand-route, si les coupables ne se font pas connaître, autant d’hommes que de godets cassés seront envoyés en Allemagne.

Mercredi 10 mai 1916

Canon loin.

Une turbine est réquisitionnée pour la laiterie.

Les gamins qui ont cassé 27 godets se font connaître. Ils sont une dizaine.

Quelles représailles vont nous être faites ? Surtout en l’absence du Gouverneur qui ne doit rentrer que le 17.

 

Le 5 et 6 à Verdun, ils arboraient une défaite : 3 tranchées de 4 kilomètres de profondeur ont été repris par les Français qui marchèrent sur des tas de cadavres allemands.

La Marne de l’an dernier n’est rien disent-ils comparativement à Verdun. Est-ce possible pareilles tueries ?

Jeudi 11 mai 1916

Temps couvert.

Distribution de graines. Paiement de la taxe sur les chiens.

Les gamins ayant jeté les cailloux aux fils télégraphes sont appelés demain à la Commandanture. Le Gouverneur Mehring est parti pour de bon dit-on, emportant pas mal d’argent et le mobilier de la sous-préfecture.

Un de St -Quentin le remplace. Que sera-t-il ?

Il fait revenir chez eux les 5 garnisons parties la semaine dernière pour St-Quentin.

 

La Roumanie nous aurait déclaré la guerre.

Le canon donne fort l’après-midi, le soir plus loin.

Vendredi 12 mai 1916

Nuit et matin canon. Grand-matin 2 aéros ouest. Beaucoup de nouvelles vraies ??? Des émigrés arrivent de Liessie et environs à La Capelle etc
Des troupes à Etreau au Pont-Luzoir etc.
Délabrées. 2500 moutons arrivés à Féron.

2 fermiers venant de Thenailles ont dit Roye repris, le maire fusillé par les Français. La citadelle de Laon démolie et la cathédrale brûlée.

Quoi de vrai ?

Samedi 13 mai 1916

Pluie à verse toute la journée.

Les gamins ayant 14-15 ans : 4 jours de prison. La commune 300 F d’amende. Les plus jeunes 10-11 ans renvoyés.

Trois mois de prison à un habitant pour avoir caché une bicyclette. Trois mois un autre pour peaux et viande.

Dimanche 14 mai 1916

Des femmes venant de Vervins disent que les Allemands repassent et repartent sur Chimay. Canon nuit et jour partout.

Visite du Quesnoy, pas de nouvelles.

 

Les Allemands qui devaient partir aujourd’hui en permission ne peuvent partir. Passent 2 aéros matin.

Mercredi 17 mai 1916

Beau temps.

Matin aéro. Canon. Soir aéro.

 

Annonce :

Ø  Dresser les vaches et les bœufs à être attelés.

 

Les gamins emprisonnés pour les godets reviennent aujourd’hui. Arrivent encore 16 dépêches. Quand en aurai-je une ?

Jeudi 18 mai 1916

Dimanche à Rocquigny les femmes obligées d’aller ramasser les limaces et les vers dans les champs ; celles qui n’y vont pas défense absolue de sortir.

Canon matinée.

Vente de 1 kilo de graines de pois de serre à 0 F 20 le kilo.

Pour le 29, faut dans la commandanture 3000 vaches et tous les chevaux. Les soldats des postes ont passé une visite et vont repartir au feu.

Vendredi 19 mai 1916

Matin par 2 fois 8 gros coups au nord.

Canon loin.

Des jeunes gens qui travaillent à St-Quentin sont revenus pour 24 heures. Ils chargent là-bas des bateaux de planches et de gravier pour faire des tranchées pour l’hiver prochain.

Hélas ! Serons-nous encore pareils ?

Samedi 20 mai 1916

Pas de canon.

Déclaration des draps de tailleurs. Tondre les moutons. Charrette pleine de laine ici conduite à Avesnes.

Dimanche 21 mai 1916

Canon loin. Des troupes délabrées passent et repassent à Avesnes, s’arrêtent sans séjourner. Lille est détruit par les aéros, les civils n’ayant pas voulu tous évacuer, beaucoup sont tués.

Lundi 22 mai 1916

Chaud.

20 émigrés des environs de Lille sont arrivés hier à La Rouillies.

Canon loin.

Les hommes de 17 à 44 ans doivent dire ce qu’ils font, où ils travaillent.

Mardi 23 mai 1916

À vélo arrive annonce pour demain arrivée de 3 écumeurs pendant 10 jours. Visiter les maisons des émigrés d’abord, les autres ensuite pour les métaux. Il vient visiter la brasserie, ne dit rien.

Canon soir.

À La Rouillies arrive 12 émigrés de Fives-Lille (de la Pairée)

Mercredi 24 mai 1916

Grand-matin recevons 2 dépêches de la Croix-Rouge venant de Fabre. Santé besoin nouvelles. Un mot d’Adolphe m’aurait bien fait plus de plaisir. Enfin ! Cartes et lettre arrivent, rien encore.

Les écumeurs sont arrivés, commencent leurs visites pas trop difficiles, inscrivent les métaux qu’ils voient ; 1 pompe sur 2 en cuivre, 1 tuyau de plomb, le zinc etc. 
Canon toute la journée.

Le Gouverneur nouveau dit que cela sera sûrement fini avant l’hiver. Puisse-t-il dire vrai !

Jeudi 25 mai 1916

Passons visite ici. Pas de tracasseries. Prennent le réchaud à pétrole et une seringue en étain
Canon fort toute la nuit.

 

L’après-midi, arrive des vaches et veaux pour la Commandanture. Pour ici arrivent demain.

Vendredi 26 mai 1916

Un peu de canon. Continuation du recensement des cuivres. À Avesnes on dit que les Russes et les Anglais ont fait jonction en Autriche. Tous disent impossible un 3e hiver.

Samedi 27 mai 1916

Canon fort toute la journée. Perquisitions.

Dimanche 28 mai 1916

Matin, 6 aéros à la file du nord au sud. 4 autres au sud, allemands disent-ils.

Lundi 29 mai 1916

Passe 17 aéros, 6 par 6 toutes ouest-nord- est
Canon loin.

Ils disaient avoir reculés sur Verdun, ils disent avoir repris leurs positions.

Les pillards ramassent leurs métaux. M’enlèvent le plomb de la brasserie, sans bon, sans peser. Quiconque a 2 pompes en voit une partir. Baignoires, cuves en zinc, chaudières, chaudrons, baguettes d’escaliers.

Tout leur convient.

Mardi 30 mai 1916

Pluie.

Allons à Floyon (faner) avec passeport.

Dimanche et lundi ils ont vu 25 et 27 aéros chaque jour = 52 en 2 jours allant tous sur l’Est. La revue de tous les chevaux a eu lieu hier sauf pour Etrœungt qui charrie le lait. Presque tous les chevaux sont inscrits pour partir sur appel.

Mercredi 31 mai 1916

Les pillards repartent avec un gros chariot de ferrailles. D’autres viendront faire les hameaux.

Pas de canon. On dit qu’il va à Sains et Damquignis des troupes, canons, autos.

Arrivée de 5 voitures à 2 chevaux au château J. Peti, pour faucher dit-on.

Juin 1916

Jeudi 1er juin 1916

Ascension. Nouvelles cartes d’identité depuis âge de 12 ans. Faut demain à Avesnes toutes les voitures ou chariots à 4 roues et les bagageries. Matin carte au courrier de Gilbert donnant bonnes nouvelles. Cela nous fait plaisir, le temps commençait à être long. Gros coups de canon toute la journée.

Vendredi 2 juin 1916

10 voitures sont prises.

Un officier nouveau vient après-midi à la mairie puis visite certaines voitures de chasse. À 4 heures, téléphone, le poste part immédiatement, 2 restent. Canon. ON dit à Avesnes que 45 000 Bavarois se sont rendus à Verdun, qu’il y a 40 000 hommes à Maubeuge dans le bois. Est-ce qu’on y fait des tranchées ???
 200 jeunes bêtes arrivent en pâture.

Samedi 3 juin 1916

Tous les postes sont partis hier pour Cartignies. Le lait n’ayant pas été payé par les Allemands depuis 2 mois, les Cartigniesiens ont refusé d’en mettre à la laitière. Internement du maire et 3 notables. Paiement du lait non fourni par les fermiers à 26 cent le litre. Réquisitions, amende de 5 F par livre de beurre trouvée. En cas de récidive expulsion des habitants. Canon nuit et jour. On parle d’une réunion pour la paix ?????

Dimanche 4 juin 1916

Pluie. Revue des chevaux ici mardi. À la messe, M le doyen dit que cela touche à sa fin. ???????. son canon

Lundi 5 juin 1916

Pluie averses. Il faut que les fenaisons soient terminées dans 3 semaines. On commandera au soleil de luire par ORDRE DE LA  KOMMANDANTUR. Canon par moments.

Mardi 6 juin 1916

Une équipe de télégraphistes d’une douzaine vient enlever tous les plombs des fils télégraphes, téléphoniques.

Demain à 6 h ½ (heure allemande) revue de tous les chevaux et poulains ici sur la place par le Brochet à lunettes.

Samedi à 5 h (3 heures) du matin revue à Avesnes. Réquisitions de 6 faucheuses à 2 chevaux pour les Allemands faucher demain.

Pas canon.

Mercredi 7 juin 1916

À 7 h ¼ (5 h ¼) le Brochet s’amène.

Arrive les noms des retardataires. Hurle, gueule et est très bien disposé paraît-il, (faut pas demander quand il ne l’est pas), tous les chevaux (156) restant ici défilent ; il regarde leur numéro et c’est tout.

Malgré la pluie les Allemands fauchent où bon leur semble. Foin ou fumier égal disent-ils.

On voit des troupes au Nouvion.

Canon très fort.

Jeudi 8 juin 1916

Ils fauchent nos pâtures.

Hier sont arrivés à La Flamengrie 200 chevaux du ravitaillement et des blessés, des troupes Fourmies, Wignehies, Rocquigny, ils disent venir de Verdun. Beaucoup de morts.

Canon très fort sans arrêt ouest-sud et sud-est
Depuis 15 jours passent 2 ou 3 autos. Le poste revient de Cartignies.

Vendredi 9 juin 1916

Pluie.

On a raconté qu’à Sains des fils télégraphiques ayant été coupés (par qui ? Eux peut-être !) : Amende de 1 million, ordre d’hypothéquer les biens pour payer.

Refus des habitants et du maire. Menace d’enlever en Allemagne 10 hommes et 10 femmes.

Enfin pas de pluie par jour.

Canon moins fort qu’hier. Passe de l’est au nord-ouest 7 puis 4 aéroplanes allant sur Arras.

Samedi 10 juin 1916

Pluie à verse.

Sur 156 chevaux d’ici 75 sont marqués au feu. Les conduire sur appel.

Ils affichent à Avesnes la reddition de 25 000 Autrichiens. On leur donne encore une raclée sur Arras et sur Verdun ?

Ils avaient essayé de forcer le blocus des mers. L’Angleterre aurait perdu 20 navires, eux beaucoup aussi et pas passé. Les Russes avancent en Autriche, dit-on.

Canon loin.

Dimanche 11 juin 1916

Pentecôte. Pluie, tonnerre, grêle, soleil, averses, froid.

 

Annonce :

Ø  Fournir 4 œufs par poule pour mairie.

 

Canon très loin.

Commandanture La Capelle arrivent encore 1 800 soldats couverts de boue. Lord Kitchener serait noyé par une armée.

Lundi 12 juin 1916

Averses, froid.

N’entend loin canon.

 

Annonce :

Ø  Déclarer pour le 14 juin à midi les valeurs que l’on possède, même celles qui sont déposées en banque ou mises en sûreté chez des amis.

 

On demande combien il y a de brûloirs à café. Conduire demain à Avesnes 22 poulains marqués samedi dernier.

Mardi 13 juin 1916

Froid.

Canon loin.

Ce serait 65 000 Autrichiens qui seraient hors de combat ???  À Verdun le Kronprinz veut passer. Carnage. Ruisseaux de sang disent-ils, 2 500 coups de canon par minutes tirés par les Français.

 

Ils choisissent 17 des plus beaux poulains et on les conduit à Sivry.

Affiches défendant d’avoir sur soi plus de 25 marks.

Mercredi 14 juin 1916

Pluie, vent, très froid.

Amende de 4 500 Frs. à la commune parce-qu’on fournit moins de lait.

Ils renforcent encore sur Verdun !

Jeudi 15 juin 1916

Enfin la pluie cesse dans la matinée mais quel froid ! Brr ! Temps couvert et vent.

Canon malgré cela.

Ils disent avoir pris à Verdun le fort de Vaux.. Cela fait 2. (*) Mais beaucoup de pertes.

À Salonique 65 000 à 100 000 Autrichiens dont 200 officiers prisonniers des Russes. Ceux qui sont à Rocquigny depuis 15 jours manœuvrent, font des tranchées pour s’exercer aux grenades à mains.

Disent être seulement partis pour la deuxième fois au repos depuis la guerre, espèrent y rester 2 mois 1/2, seront remplacés par d’autres, disent-ils.

 

(*) : Après une héroïque résistance, le fort de Vaux capitule le 7 juin, après celui de Douaumont.

Vendredi 16 juin 1916

Fanons.

Il nous faut le croire, nous l’avons vu ! Ils ne seront plus appelés " casques à pointes ".

200 des logés à Rocquigny sont venus promener en marche chantant. Plus de pique sur casque, plus de plaque au ceinturon, plus de boutons aux tuniques. Tout est fondu pour faire des munitions.

Quelle richesse !!!

 

Affiché à Avesnes : les Russes ont repris toute la Gahire et font 116 000 prisonniers autrichiens. Ils sont furieux après les Autrichiens. On parle aussi que François Joseph aurait été assassiné mais rien de confirmé.

Enfin il fait beau mais assez froidement.

Samedi 17 juin 1916

Beau.

Fanons. Une personne de Jeumont vient.

Depuis 3 semaines les troupes, canons, pontes, Croix-Rouge vont, repassent, retournent en Autriche aider les Russes disent-ils. Tant mieux, autant de moins à chasser !

Pas de canon sinon le soir.

Dimanche 18 juin 1916

Couvert.

 

Annonce :

Ø  défense de changer les vaches de pâture tant qu’il reste de l’herbe.

 

Canon loin. 10 000 hommes arrivent à La Capelle. Le doyen de La Capelle est en prison pour aider des amis émigrés venant de Lille  qu’ils ont été chassés impitoyablement de chez eux.

Lundi 19 juin 1916

Canon Est.

Guillaume passerait aujourd’hui revue de troupes à La Capelle.

Temps froid sans presque de soleil, le soir vent glacial, on se croirait en octobre.

Mardi 20 juin 1916

Canon fort partout.

La nuit dernière, gelée !.

Matin soleil, après-midi froid.

En Autriche avance des Russes de 40 Kms. sur tout le front ! Général autrichien prisonnier avec hommes et matériel.

Mercredi 21 juin 1916

Beau soleil.

Matin : 4 aéros du sud au nord. Canon nuit et jour, matin partout, après-midi sur Est.

Jeudi 22 juin 1916

Beau. Chaud
Hier tondage de jardin à la Chéroque.
Canon fort, nuit et jour.

Recensement chez les émigrés des lits, tables et vases de nuit, plats, cuillères, fourchettes etc.…

Vendredi 23 juin 1916

Canon. Orage léger, pluie.

Nuit, pluie.

Les troupes de La Rouillies et Rocquigny sont parties subitement hier à minuit malgré //////////////// le repas du kaiser //////// fatigués de ce me/////

Samedi 24 juin 1916

Nuageux. Averses.

Canon soir sur Arras.

Dimanche 25 juin 1916

Beau.

Canon par séries partout.

Soir, apprend l’arrivée de 2 500 émigrés par la Commandanture. 260 pour Etrœungt.
  20 charrettes doivent aller les chercher demain à 4 h du matin, gare d’Avesnes.

Lundi 26 juin 1916

Couvert, averses.

Les émigrés arrivent de Bucquoy. (*)

Prévenus hier à minuit de partir ce matin à 2 h. Les Anglais obligent les Allemands à évacuer, les aéros français les ont suivis sitôt leur départ ont tout incendié. Ils disent une offensive générale pour pas longtemps et espèrent beaucoup que c’est la fin. (**)
Ils disent les Allemands prêts à se rendre. On les a logés (265) chez les émigrés.

Demain l’inspecteur des bestiaux vient voir les bêtes allemandes.
Canon sans arrêt.

 

(*) : C’est un village de la Somme.

(**) : En effet la grande offensive franco-anglaise débutera le 1e juillet. Les Allemands semblent déjà au courant. Ils font évacuer tous les villages susceptibles d’être sur la ligne de front et les pillent ensuite…

Mardi 27 juin 1916

Rien de neuf. Les émigrés s’installent à 4 h du matin. 9 autobus viennent d’Avesnes-sur-La Capelle chargés de bombes disent-ils.

Mercredi 28 juin 1916

Averses. Passent 9 autos avec des caisses de dynamite (?).

Le soir à Avesnes, on annonce Bapaume et Bucquoy repris.

Arrive à Fourmies 2 000 émigrés des environs de Crécy-sur-Serre et de la troupe.

Canon.

Jeudi 29 juin 1916

17 chevaux marqués désignés partent ce matin. Canon.

10 000 émigrés arriveraient encore. Toutes les motos sont parties au feu ; les permissionnaires, rappelés.

On les dit coupés en 10 points ???

Vendredi 30 juin 1916

Canon très fort roulant sans cesse.

À midi, la colonne qui travaille au foin a ordre d’être partie à 4 heures.

À Avesnelles etc. idem.

Péronne serait repris. On espère cette fois que cela va être pour de bon. La nuit dernière canon et fortes projections dans l’ouest.

Juillet 1916

Samedi 1er juillet 1916

Début de l’offensive franco anglaise sur la Somme

 

Beau.

Quel carnage ! Boum ! Boum ! Sans arrêt sur tout le front. Péronne serait repris. St-Quentin évacué ???.

Soir passe un aéro anglais. Faut 6 chaudières en fonte.

Dimanche 2 juillet 1916

Encore sans arrêt.

Hier un train de munitions a sauté à St-Quentin. Beaucoup de civils tués. Ces coups sans arrêts sont pour démolir les tranchées et sont surtout l///////
Annonce demandant les peaux de lapins, lièvres etc. sous peine d’amende et de prison.

Soir, apprend arrive encore 3 000 émigrés, 150 pour ici.

Lundi 3 juillet 1916

Nuit et jour le roulement continu jusque dans l’après-midi. Le soir un gros coup par-ci par-là. Les jeunes gens travaillant au foin, internés chez Delaporte retournent chez eux. Aucun passeport ne sera plus délivré. Les émigrés annoncés ne sont pas encore arrivés. Il leur faut les fleurs de sureau, tilleul, camomille etc. comme l’an dernier.

Mardi 4 juillet 1916

Pluie.

Silence. La 1ère tranchée serait prise par nous sur 40 kilomètres de long, les gares de St Quentin, Le Cateau, Busigny démolies. Aussi depuis trois jours passent des autobus chargés de munitions.

Demain faut 6 chevaux, 3 tombereaux et 9 hommes pour 15 jours.

Une affiche annonce qu’il va falloir payer des impôts pour frais de guerre.

Mercredi 5 juillet 1916

Pas de canon.

Rien de neuf. Une affiche défend les attroupements, les réunions sur la rue ou dans les maisons.

 

En cas de passage de blessés ou de prisonniers, défense de circuler, d’ouvrir les fenêtres, de chercher à leur parler ou de leur donner quoi que se soit, de se livrer à la joie en les voyant. Les soldats de l’escorte ou les gendarmes doivent se servir de leurs armes en ces cas sans prévenir.

Jeudi 6 juillet 1916

Beau ½ jour.

Passe encore des autos remorquées. Plus de nouvelles des prisonniers depuis un mois.

Canon gros coups par-ci par-là.

Vendredi 7 juillet 1916

Pluie.

Roulements reprennent. Leur journal avoue un recul, on leur aurait fait 21 000 prisonniers sur Péronne, Lille. 500 blessés sont arrivés à Avesnes.

À Lille, l’église St Sauveur serait brûlée avec beaucoup de civils.

À Boulogne ayant refusé 2 jeunes gens pour partir. 2 gendarmes en permanence pour perquisitionner et 17 hommes partis.

Hier inventaire de l’usine électrique et des moteurs. Les impôts nouveaux sont arrivés. Ici 196 000 Francs ! Rien que cela ! Le plus tôt possible (Pas difficiles !) Soir 21 autos allant sur La Capelle.

Samedi 8 juillet 1916

Pluie

Encore gros roulements très forts le soir sur St-Quentin et sur Lille. Arrive un chef de poste. Canon et autos toute la nuit.

Dimanche 9 juillet 1916

Assez beau.

Canon encore. Le sous-officier arrivé hier dit  Bucquois repris et St-Quentin sans doute demain ?

 Soir arrive 28 jeunes bêtes et 48 moutons du Bas Lieu. 500 bêtes arrivées à Avesnes.

Lundi 10 juillet 1916

Pluie. Nuit couvert.

La boucherie militaire de St-Quentin est à Avesnes depuis samedi soir 600 bêtes à cornes. Les autos-camions qui passent et repassent, conduisent la viande au front de St-Quentin.

Canon.

Mardi 11 juillet 1916

Couvert. Un peu de canon.

Reçois au soir une triste carte de Jules sans nouvelles d’Adolphe depuis mars. Hélas que penser !

Mercredi 12 juillet 1916

À moitié beau.

Matin passe un aéro.

Triste journée, heureusement que l’on travaille, le temps est moins long.

 

Soir, canon reprend enfin sur Péronne. Il leur faut couvertures, cuillers, fourchettes, etc.

Jeudi 13 juillet 1916

Froid. Pas de canon.

Faut des haches. Défense de se promener. Tout promeneur sera réquisitionné pour aller travailler.

Vendredi 14 juillet 1916

Froid.

Midi, gros coup de tonnerre.

Soir, canon sur Bapaume puis calme. Désolation.

Samedi 15 juillet 1916

Pluie.

Matin gros coups d’aéros.

Calme.

Dimanche 16 juillet 1916

Couvert. Froid. Soir pluie.

Canon fort loin. Demain vente de 90 paires de chaussures. 1er choix !

Lundi 17 juillet 1916

Avant midi, pluie.

Gros coups par-ci, par-là, surtout sur l’Est.

Passe toujours des autos brisées, brûlées même.

Arrive à Avesnes 25 officiers d’intendance avec 150 hommes. Le grand état-major est au Cateau. On m’assure et les journaux en parlent aussi que le 1er corps est en Bulgarie. Rien d’étonnant alors d’être sans nouvelles d’Adolphe. Peut-être est-il là-bas ! Quand saurons-nous ?

 

Nuit canon violent sur Albert. Chaussures en papier au ravitaillement 8 F pour une paire.

Mardi 18 juillet 1916

Pas de soleil, froid et couvert.

Matin canon très fort comme la nuit sur Albert. Arrête à 8 heures puis gros coup et roulements partout mais loin. Passe des autos de blessés. La Croix-Rouge de Lille, 40 infirmières, 40 médecins sont arrivés aujourd’hui à Avesnes.

Un hôpital y va être installé. Faut 3 lits garnis, des draps etc. des marmites etc.

Mercredi 19 juillet 1916

Après-midi soleil, nuageux, couvert.

Autos et camions passent et repassent.

Canon nuit et jour.

200 émigrés arrivent encore à Fourmies aujourd’hui. Passe un aéro très haut après-midi, livre la Voix du Pays.

Jeudi 20 juillet 1916

Gris, couvert, soleil à 5 h du soir.

400 infirmières sont à Avesnes. 2 000 blessés attendus. (*)

Les religieuses doivent quitter le couvent, l’hospice évacué pour les mettre.

Canon partout sans suite. Troupes à Avesnelles, Wignehies, Féron pour trois jours.

 

(*) : Blessés allemands venant certainement de la bataille de la Somme

Vendredi 21 juillet 1916

Beau soleil enfin.

6 heures du matin, le Brochet vient à cheval. Plus de bureaux. Tout étendre le foin et le rentrer. Plus de chevaux. Tant pis ! Faites travailler toutes les femmes ! Répète-t-il.

 

À midi, 1 aéro très haut.

Pas un coup de canon pourtant beau temps.

Samedi 22 juillet 1916

À moitié beau, froid. Pas de canon.

Soir, patrouille nous attrape pour la lumière.

 

Midi, passe 2 aéros.

Dimanche 23 juillet 1916

Couvert, brouillard.

Canon loin.

 

Soir arrive le maire de Bucquois.

Bucquois n’est pas encore repris. Hélas ! Hélas ! Quand ?

Lundi 24 juillet 1916

L’impôt de 196 000 F qui devaient être versés pour septembre, doivent être versés de suite sinon 20 otages seront emmenés.

 

Après-midi, 15 chasseurs à cheval viennent loger avec un commandant venant de Steney. Ne savent pas pour combien de temps.

Mardi 25 juillet 1916

Couvert, pas de soleil.

En arrive encore 20 qui font des patrouilles jour et nuit. Ils viennent disent-ils pour hâter la fenaison.? (Qu’ils fassent luire le soleil alors de temps en temps!)

Après le canon.

Mercredi 26 juillet 1916

Gris, couvert.

Le Conseil vote 6 / 3 l’autorisation aux Allemands de faire 196 000 Frs. de bons de guerre d’Allemagne.

Toutes les communes de la Commandanture n’ayant pas signé, 1 otage est pris dans toutes les communes. Ici Albert Hosselet part demain pour Avesnes.

On doit prendre aussi 600 vaches ici dit-on ?

Canon loin.

Jeudi 27 juillet 1916

Soleil.

Pas de canon.

Beaucoup d’autos. Les Allemands fauchent. 15 sont déjà partis hier soir.

Des émigrés de Bapaume sont arrivés à la Rouillie. On dit qu’une nouvelle offensive aura lieu le 5 août, que toute la ligne de feu doit être évacuée pour ce jour. Les communes ne voulant pas payer l’impôt de guerre sont Floyon, Boulogne, Haut Lieu, Sains.

Vendredi 28 juillet 1916

A. Hosselet est déjà revenu.

Déclarer les lessiveuses. Si on continue à ne pas mettre tout le lait : enlèvement d’hommes de 16 à 60 ans. Logement de troupes dans les maisons. Distributions de vêtement d’Amérique aux émigrés à Bucquigny.

On va chercher des moutons à Avesnes mais on revient sans. Pas arrivés.

Samedi 29 juillet 1916

Chaud, soleil. On dit que la Roumanie laisse passer les Russes ?

Mercredi foire aux vaches. Les amener toutes et les attacher. À 3 000 !!

Dimanche 30 juillet 1916

Beau, chaud.

Canon reprend la nuit jusqu’à midi.

 

Soir plane un aéro très bas.

Lundi 31 juillet 1916

Chaud, beau

Canon toute la nuit.

Réquisition de 2 couvertures, 40 mètres de toile à matelas, 1 pic, pioche, pelle, sceau, rabot, scie, truelle, tenaille etc.

 

Après-midi arrive 462 moutons de Moislains avec 9 bergers. Disent que les Allemands se découragent là-bas.

Août 1916

Mardi 1er août 1916

Chaud.

Canon nuit et jour.

Mercredi 2 août 1916

Les vaches sont amenées, les bonnes en viande sont prises.

Arrive à Avesnes des wagons de lits de fer, matelas etc.

Réquisition 15 paires de draps. Canon très fort jour et nuit.

Jeudi 3 août 1916

Chaud.

Canon encore très gros coups la nuit.

Passe encore beaucoup d’autos.

Vendredi 4 août 1916

Soleil, vent.

Canon jusqu’à midi fort gros coups sur Lille-Arras.

15 autobus viennent sur St Quentin.

Samedi 5 août 1916

Froid, couvert, nuages.

Faut 10 chaises, des plats, des hachoirs, des seaux etc.
Des femmes sont demandées de 18 à 45 ans pour aller à St-Quentin laver le linge des blessés, 2 Frs. 50 par jour nourries. Des évacués doivent y aller.

Pas de canon.

La Roumanie marcherait avec nous.

Dimanche 6 août 1916

Beau, vent frais. Il a gelé la nuit dernière.

Passe 3 aéros puis 2 matin.

 

Annonce :

Ø  Cultivateurs doivent avoir fini leurs fenaisons cette semaine, tous les chevaux doivent y être employés

Ø  défense de circuler en voiture légère. Les voitures seraient saisies.

 

Le poste va partir dit-on. Il paraît que le traité liant la Bavière en Allemagne finit le 17 août. Que vont-ils faire ?

 

Affiche :

Ø  Tous les métaux sont déclarés saisis par l’autorité allemande.

Ø  Ils seront pris et payés de 2 Frs.50 à 5 Frs. le kilo suivant le métal, payés en bons de ville.

Ø  Quiconque cachera ou ne livrera pas des métaux, prison et amende.

 

Lundi 7 août 1916

Beau.

25 camions autos vont sur Avesnes.

 

Après-midi, 32 gros coups sur St-Quentin. Après canon fort sur Combles où il paraît que cela marche.

Sur Verdun cela irait mieux aussi.

À Avesnes des blessés arrivent toutes les nuits. C’est officiel que la Roumanie livre passage aux Russes sur 100 kilomètres de front.

Mardi 8 août 1916

Beau.

Pas de canon.

Au  Nouvion 10 000 hommes (45 000 pour la Commandanture)

Mercredi 9 août 1916

Beau.

Canon jusqu’à midi.

Rien de neuf.

Jeudi 10 août 1916

Couvert, calme.

Vendredi 11 août 1916

Beau, chaud.

Poste part pour le Quesnoy.

Canon reprend.

Samedi 12 août 1916

Beau.

1 aéro le matin, 1 le soir. Les Italiens auraient franchi l’Honjo. Canon.

Soir le poste du Quesnoy arrive.

Dimanche 13 août 1916

Beau et chaud.

Canon.

Arrivés hier soir à Avesnes 700 évacués de Ham.

Demain à 6 h allemandes, conduire tous les poulains à Dompierre.

Lundi 14 août 1916

Couvert.

Après-midi averse et pluie. De gros coups se suivant toute la journée du sud à l’ouest ; Manœuvres ? Bombes. Canon français ?

Espérons-le.

On attend encore 1 200 évacués pour la Commandanture.

Mardi 15 août 1916

Couvert avant midi, pluie après-midi.

Dimanche 10 aéros auraient bombardé Maubeuge.

Aujourd’hui il arrive 10 Allemands et 20 prisonniers civils pour presser le foin.

Les télégraphistes montent 2 fils d’Etrœungt à Avesnes. Le téléphone à la poste dit-on ?.

Canon roulant à peu près toute la journée.

Mercredi 16 août 1916

Canon sans arrêt, forts roulements sur Noyon.

 

Soir passe autos de munitions.

Jeudi 17 août 1916

Orage, averses.

Canon plus loin qu’hier.

La presse au foin est arrivée, va presser tout le foin dans chaque hameau.

Vendredi 18 août 1916

Nuageux, chaud.

Calme.

 

Vers le soir violente canonnade pendant 1 heure sur Péronne encore puis silence. Rien de nouveau.

Samedi 19 août 1916

Orages légers, pluie, ondées.

 

Affiche :

Ø  MORT à ceux qui iront voir atterrir les aéros ou dirigeables ou ramasseront des objets jetés de ces aéros.

Ø  Amende et 15 ans de prison à ceux qui détruisent la voie ferrée, les otages répondent de leur vie en cas d’accident, les otages fusillés, les hommes en Allemagne, les femmes évacuées ailleurs.

 

Pas de canon, rien.

Dimanche 20 août 1916

Nuageux. Quelques averses.

Pas de canon encore.

Cette fois nous y voilà encore hélas pour l’hiver ! Hélas, hélas ! Misère !

 

Annonce :

Ø  Le foin va être pressé, sera pesé et payé par un bon de réquisition.

Lundi 21 août 1916

Beau, nuageux.

Pas de canon encore.

Faut 1 homme dans chaque commune pour ce matin à midi pour travailler. Où ?

Ceux qui sont arrivés tard ou qui ont refusé, 2 pour 1. S’ils ne sont pas rendus demain matin, 4. Après demain 8 etc. jusqu’à ce que tous les inscrits soient appelés.

En cas de refus de tous, évacuation du pays. Ordre de rigueur.

Ils sont d’une humeur atroce.

Mardi 22 août 1916

Couvert
Matin 1 aéro vers 5 h.

Canon repart fort sur St Quentin, Péronne. Un Allemand vient de Bucquoy voir ces dames, dit le pays à moitié démoli mais pas de changement.

Mercredi 23 août 1916

Couvert.

Depuis hier soir canon sans arrêt.

Des blessés arrivent à Avesnes. Le génie arrive à Trieux. L’hôpital de Sains s’arrange. Une nouvelle dit-on statistique des salles de bains et chaudières.

Le foin sitôt pressé est enlevé en autobus. Tout est pris. On vide tout complètement.

Jeudi 24 août 1916

Beau, nuageux, orageux.

Canon la nuit. Moins fort le jour.

Vendredi 25 août 1916

Chaud, soir orage, pluie.

Canon très fort sans arrêt.

18 aéros seraient passés hier ? Statistiques des brouettes.

Anniversaire des 2 ans de la fameuse nuit du départ. On a toujours bien bistoqué  St Louis cette année, on y est assourdi.

Samedi 26 août 1916

Hier soir toutes sortes de lueurs, de boules de feu etc.

Matinée orages.

À partir de midi, canon sans arrêt.

Des aéros ont bombardé Maubeuge, aviateur français pris. Les Russes auraient repris Kornel.

Cette semaine pas de viande (permise). Défense de tuer. Pourquoi ?

Dimanche 27 août 1916

Matin orages légers, averse.

 

À partir de midi, comme hier roulements sans arrêt.

 

Le soir cela résonne dans le lit et des lueurs encore sur St Quentin, Péronne. Voilà 6 jours que cela roule sans cesse.

Qu’en adviendra-t-il ? Encore pas de nouvelles.

Lundi 28 août 1916

Orages, averses.

Canon sans arrêt jour et nuit.

L’Italie a déclaré la guerre à l’Allemagne.

Mardi 29 août 1916

Chaud, orages, pluie.

Encore sans arrêt nuit et jour au sud à l’ouest 5 aéros 1 tournant cherchant longtemps.

Affiches disant de hâter les moissons.

Mercredi 30 août 1916

Pluie et vent sans arrêt.

Canon cesse ce matin.

Journée affreuse, pluie toujours.

La Roumanie déclare la guerre à l’Autriche. (*)

 On attend des troupes à la Rouillie, à La Capelle etc., des affiches ordonnent de leur donner lits, literie, chauffage.

Quel résultat ce bombardement de 7 jours et 8 nuits sans arrêt d’une heure ?

Faut livrer 5 baignoires et 3 brouettes.

 

(*) : Déclarée à l’Autriche-Hongrie le 27 août.

Jeudi 31 août 1916

Beau.

De ci, de là, un coup de canon loin. Rien de neuf.

Septembre 1914

Vendredi 1er septembre 1916

Il repasse à Avesnes des wagons de morts nus liés deux à deux.

Mille bruits (faux hélas probablement) circulent. L’Autriche abandonnerait, capitulerait etc. (Vain mirage !).

Leur journal dit la Roumanie en guerre à l’Autriche, l’Italie à l’Allemagne.

Canon depuis hier soir jusque 10 heures du matin sur l’Est aussi de temps en temps.

Arrivée des blessés à Avesnes et aussi des cochons.

Samedi 2 septembre 1916

Canon hier soir, nuit, matin arrêt à 11 heures.

Reprend après-midi très fort sur St Quentin, Péronne.

Dimanche 3 septembre 1916

Beau matin, pluie et orages le soir.

Canon encore la nuit et toute la journée jusque vers 4 h sans arrêt.

 

Annonce :

Ø  Défense de passer dans les pâtures en dehors des travaux.

Ø  Défense aux chiens et chats de circuler sous peine à eux d’être fusillés.

Ø  Faut tous les pots à beurre, les engins de pêche (ils ont peur d’un régiment de lignes), une chambre à coucher entièrement garnie.

Lundi 4 septembre 1916

Pluie, froid.

Calme absolu.

Le bruit court que 2 divisions allemandes seraient prisonnières à Péronne. ???(Incrédules).

Un régiment de cuirassiers réformés en repos à La Capelle depuis le 9 mars part demain pour l’Autriche.

À Wignehies 150 hommes fournis et ramassés pour aller travailler à construire une ligne de chemin de fer d’Anor à Chimay.

Mardi 5 septembre 1916

Encore une longue journée de pluie.

1 000 vaches grasses, des moutons, des porcs arrivent à Avesnes. 300 vaches amenées ici. Quoi ?

La Croix-Rouge de Fourmies est partie à Namur emportant tout. Pas de canon. Pas de ravitaillement arrivé.

Mercredi 6 septembre 1916

À 4 heures du matin, otage arrive.

Partir avec 9 charrettes chercher 131 évacués qui arrivent de Griencourt, 8 Allemands de Péronne. Ils disent que cela marche, plus de tranchées là non plus.

Les Autrichiens tourneraient le dos à l’Allemagne ?

Plus de canon.

Jeudi 7 septembre 1916

Beau, frais.

Pas de canon.

On aménage les évacués.

Vendredi 8 septembre 1916

Beau.

Fortes détonations sur Aulnoye et Hirson. La gare d’Aulnoye serait sautée ?On le saura lundi par les ouvriers de la presse qui retournent voir le dimanche.

Calme.

Samedi 9 septembre 1916

Beau.

Conduire demain à Avesnes les 4 roues.

Encore des détonations le matin.

Le lieutenant d’ici est très mal tourné. Tous les oisifs sont réquisitionnés pour travailler aux champs. Aussi demain pas de vêpres à la chapelle de Lourdes. Toute personne en toilette étant oisive.

On annonce 25 000 évacués encore pour la Commandanture.

Toute la Commandanture doit être changée ; tous les officiers remplacés par des invalides.

Vendredi 15, foire aux cochons. Tous ceux de Sains, Floyon etc. doivent être amenés ici sur la place.

Dimanche 10 septembre 1916

Les ouvriers travaillent à rentrer des gerbes. Tous nous allons à la chapelle.

Hier soir on entendait le canon loin, aujourd’hui un peu.

Lundi 11 septembre 1916

Froid, gris
Canon sur Péronne et Valenciennes.

À Aulnoye l’aéro a détruit la conduite d’eau alimentant les machines et la plaque tournante, réduit en miette un wagon plein de soldats et poursuivi les soldats qui se sauvaient. On dit des dégâts à la gare d’Hirson.

Mardi 12 septembre 1916

Couvert, pluie.

Canon au loin.

Les gens de Duencourt tous clients à Joseph, ai leur visite.

Mercredi 13 septembre 1916

Pluie.

Annoncent grand succès autrichiens en Roumanie.

Canon un peu plus fort.

Ils viennent à la filature, trouvent du vin, vont encore demander des cuivres, forcent le coffre-fort, volent pour 45 000 F de titres cachés et prennent au moins pour 20 000 F dans la filature. Et ils disent :

« Pourquoi cacher ? Nous pas des voleurs ! »

Jeudi 14 septembre 1916

Froid glacial.

Canon toute la nuit jusqu’à 10 h du matin. Explosions au nord le matin.

Affichent à Avesnes une avance des Français sur la Somme.

Vendredi 15 septembre 1916

Beau froid.

Ils choisissent quelques cochons pour le 1er octobre.

Pas de canon.

Après un combat de quelques heures, Bouchavesnes est repris avec beaucoup d’officiers prisonniers. Les prisonniers civils d’ici partis travailler à Bouchavesnes il y a 5-6 mois, arrivent aujourd’hui, reviennent pour de bon. Disent Péronne entouré de canons.

Samedi 16 septembre 1916

Canon après-midi sur Roye.

Soir plus fort. Matin gros coups à 10 heures.

 

On vient chercher 300 vaches allemandes. Depuis 2 jours, on en embarque beaucoup à Avesnes.

Téléphone le poste partir de suite.

Dimanche 17 septembre 1916 

Beau.

Canon toute la journée et soirée.

 

Affiche à Avesnes :

Ø  Prises de Ginchy, Flers et Courcelette par les Anglais.

Ø  Avance de 20 kilomètres.

 

Pas de poste arrivé. Nuit dernière, à minuit, gros coups.

Lundi 18 septembre 1916

Pluie sans arrêt.

Canon toute la journée, soir fort.

Les soldats perquisitionnant la filature changent d’itinéraire, perquisitionnent presque partout, réquisitionnent les marchandises de toutes espèces : couleurs, vernis, pinceaux, huiles, cuirs, registres, paniers même. Tous y passent.

Les journaux annoncent une avancée des Français dans la Somme.

Mardi 19 septembre 1916

Couvert midi, tonnerre, averses, éclaircies.

Canon loin.

Perquisitions continuent : faut des porte-manteaux à la Commandanture. Tous les postes (700 hommes) sont partis au feu. Jusqu’ici pas de remplaçants.

Le journal donne la prise de Courcelette, Flers et Martinpuich par les Français.

Mercredi 20 septembre 1916

Couvert, ondées.

Pillage : 6 vélos. vin. cuir. etc.

Pas de canon.

Jeudi 21 septembre 1916

Beau, frais.

Continuation : vélos, sacs vides courroies, couleurs, de tout,
 Vont à la brasserie prennent l’appareil à blanchir les caves, de l’étoupe, des toiles suiffées au grenier, des tubes en verre, retournent, culbutent tout, partout, montent jusque sur les toits :

« Pourquoi cachez-vous ? Nous pas voleurs !!! »

 

Demain amener encore toutes les bêtes à cornes. Pas de canon hélas.

Vendredi 22 septembre 1916

400 vaches prises.

Soir canon et toute la nuit.

Samedi 23 septembre 1916

Canon sans arrêt matinée.

Une escadrille aéros bombarde direction Aulnoye. 20 gros coups.

Chargement du reste des dépouilles. Ils me prennent : Tuyaux d’entonnement, étoupes, bouchons, etc.

Soir lueurs.

Dimanche 24 septembre 1916

Beau soleil.

Canon sans arrêt nuit et jour sur Roye très gros canon.

Les propriétaires des vélos pris la semaine dernière sont appelés demain à la Commandanture. Les 400 vaches partent aussi.

Lundi 25 septembre 1916

Triste anniversaire. (Il y a 5 ans aujourd’hui. Hélas.) (*)
Beau chaud. (Il s’agit encore une fois de son anniversaire de mariage.. ). Plus de perquisitions. Chaque propriétaire de vélos confisqué a un mois de prison par vélo ou 150 Marks d’amende. Canon sans arrêt très fort jusque midi, reprend le soir. Samedi l’escouade est passé à Aulnoye ou le canon a tiré 40 coups après sans résultat. De là, les aéros sont partis bombarder le hangar de dirigeable à Maubeuge, le dirigeable a été brûlé. Plus de postes nulle part.

Soir lueurs.

 

(*) : Anniversaire de mariage. Réellement, il s’agit de deux anniversaires car voilà aussi un an aujourd’hui qu’Adolphe est mort et Lucienne attend toujours de ses nouvelles.

Mardi 26 septembre 1916

Temps superbe.

Canon toute la nuit et matinée, cesse ensuite.

Les pillards font La Pairée.

Nouvelles : Évacués arrivent à Avesnes aujourd’hui.

Bapaume, Denrecourt, Vermandovillers, Berny, repris ???

Soir embrasement de l’ouest.

Mercredi 27 septembre 1916

Beau.

Canon la nuit jusque vers le soir, plus au sud
Des déserteurs allemands se rencontrent partout dit-on, les gendarmes les chercheraient, 600 auraient été trouvés déjà.

À Fourmies 1 homme fusillé pour avoir refusé de partir pour travailler.

Arrive des cartes, hélas pas encore de nouvelles.

Jeudi 28 septembre 1916

Beau.

Canon grosses pièces sur Noyon.

 

Annonce :

Ø  Départ pour la France pour femmes et enfants moyennant 50 F en monnaie d’état.

Ø  Demain conduire à Avesnes 60 vaches allemandes.

Ø  Conduire à Sémeries le grain à la batteuse.

Vendredi 29 septembre 1916

Mercredi les Anglais et Français ont fait jonction à Combles et y ont fait beaucoup de prisonniers et de munitions.

Morval, Gondecourt sont repris. Pas de canon sinon parfois un gros coup.

Beaucoup d’autos
Défense de tuer cette semaine.

Samedi 30 septembre 1916

Beau.

Canon.

À partir de demain reculer l’horloge d’une heure et permission de sortir de 6 h du matin à 8 heures du soir.

Octobre 1916

Dimanche 1er octobre 1916

Annonce :

Ø  Les pommes et les poires sont réquisitionnées pour l’armée. Tout doit être déclaré sous peine d’amende et de prison.

Ø  Il est permis de faire des silos avec l’herbe restant à couper.

Ø  Défense de lancer des cerfs-volants dans les rues.

 

Canon nuit et jour.

Les bœufs repris.

Lundi 2 octobre 1916

Pluie. Canon fort.

La Commandanture demande 40 à 50 volontaires pour travailler à la forêt de Mormale, payés, s’engage à ne pas les envoyer à Péronne et St-Quentin. Il paraît qu’ils abattent les arbres pour faire une grande route depuis Lille, Valenciennes, Avesnes. pour ???

Fiche le camp ?. Quand ??.

Évacués arrivent à Floyon ce soir.

Mardi 3 octobre 1916

Pluie fine.

Allons à Floyon.

Arrive 236 évacués de Thiescourt au-delà de Noyon. Comme les autres, leurs bagages sont restés en route.

Canon.

Affiche :

Ø  Si la population a besoin de vêtements, les maires peuvent perquisitionner chez les émigrés et prendre et estimer devant témoins les vêtements qui s’y trouvent.

Ø  Estimation sera faite par ennemi après la guerre.

 

Le lieutenant part.

Mercredi 4 octobre 1916

Pluie fine.

Canon nuit et jour. (*)

Soir quelques coups de tonnerre. On prépare 60 paillasses de foin en cas d’arrivée d’évacués.

(*) : Il s’agit de la poursuite de la bataille de la Somme

Jeudi 5 octobre 1916

Vent, averses.

Arrive un poste de 9 hommes.

Canon après-midi et la nuit.

Demain partent 70 vaches allemandes.

Vendredi 6 octobre 1916

Canon sans arrêt.

Les fenêtres bougent. Matin un officier prépare logement pour 6 officiers et 21 hommes à La Rouillies 1500. Ils viennent de Péronne, vont sur Maubeuge disent-ils.

Samedi 7 octobre 1916

Canon sans arrêt, fort nuit et jour malgré la pluie et le vent violent, cesse le soir.

Nos hôtes sont partis. C’est la Commandanture de Dallon au-delà de St-Quentin qui s’en va à Beaufort s’installer.

Demain pour 8 h du matin, conduire à Avesnes les 400 vaches marquées il y a 15 jours. Arrive cartes et dépêches (Hélas jamais rien pour moi)

Dimanche 8 octobre 1916

Pluie fine.

Pas de canon.

Passe quelques voitures de bohémiens sur Avesnes. Faut fournir demain 120 moutons du pays.

Lundi 9 octobre 1916

Couvert.

Canon par moment.

Passe beaucoup d’autos. Le garage de St-Quentin arriverait à Avesnes. Une partie du poste part déjà. Un gendarme vient encore visiter la brasserie, demande où reste le propriétaire et ne vient pas. Pourquoi ?

Mardi 10 octobre 1916

Beau soleil.

Canon la nuit dernière et toute la journée très fort après-midi. Silence complet le soir.

Faut encore 5 couvertures de lit. Beaucoup de blessés à Fourmies, Sains, Avesnes.

Sur Combles nous aurions reculé ?

Mercredi 11 octobre 1916

Vent, pluie, canon.

Après-midi, violent bombardement direction St-Quentin à deux reprises. Des masses de troupes passent de Cambrai allant sur la Belgique.

Faut 2 lauriers et des faveurs ?

Jeudi 12 octobre 1916

Froid, couvert.

De gros coups de-ci, de-là.

Beaucoup d’autos.

Vendredi 13 octobre 1916

Demain à 8 heures (Allemandes) à la Rotonde, appel de tous les hommes de la Commandanture de 16 à 55 ans, sauf ceux qui travaillent pour l’autorité allemande : travaux agricoles, etc.

Canon toute l’après-midi. Beaucoup d’arrêts.

Le nouveau garage à Avesnes doit se faire dans la filature Herbecq que l’on arrange pour ça.

Samedi 14 octobre 1916

Couvert, froid
Une soixantaine d’hommes de métiers et les inoccupés sont inscrits, numérotés, partiront. On les appellera pour ?.

Les jeunes gens d’Avesnes vont tous les jours en auto à Mons avec des wagons de charbon !. Des troupes sont aux environs.

De gros gros coups espacés avant et après midi. Manœuvres ???

 

Soir passe venant de Noyon 69 chariots à 2 chevaux allant sur Sémeries, Solre-le-Château. St-Quentin déménage !

Dimanche 15 octobre 1916

Pluie. 1ère communion.

Évacués Bucquoy et Duencourt.

Canon toute la journée.

Lundi 16 octobre 1916

Averses.

Canon.

Faut 3 chevaux demain. Une patrouille française aurait passé à Aulnoye, fait prisonniers à Crévecoeur, disant espérer bientôt la délivrance ???

 

Soir, lueurs à l’ouest. Beaucoup d’autos.

Mardi 17 octobre 1916

Gelée 1 heure hier soir. Pluie. Couvert.

Canon tout le jour.

Faut demain 3 chevaux et 2 hommes célibataires de 18 à 28 ans dans les inscrits pour ??

Mercredi 18 octobre 1916

St Luc. Pluie jusque midi.

Canon.

Pour demain faut que tout le garage de St-Quentin soit à Avesnes.

Jeudi 19 octobre 1916

Temps atroce. Pluie sans arrêt.

St-Quentin déménage. Pour ??? Les blessés arrivent nombreux à Avesnes, Sains, repartent sans être guéris.

Soir, Fleu (*), pas de lumière.

 

(*) : Fleu : il s’agit de la rivière qui déborde et inonde les prairies et parfois les maisons. Lorsque le niveau de l’eau était trop haut cela devait occasionner de nombreuses pannes électriques car l’électricité était produite par le moulin d’Etrœungt sur la rivière, face à la brasserie Courouble.

Vendredi 20 octobre 1916

Gelée,beau, froid.


 Avant midi, allant à Avesnes, 37 charrettes à 4 chevaux.

Pas de canon.

Très froid.

Samedi 21 octobre 1916

Dépêche Fabre : ne dit rien. Encore besoins, santé, nouvelles. Que penser ?.

Pas de canon.

Auto va et vient sans arrêt. Grosse détonations après-midi.

Hier bombes à Aulnoye, civils blessés. Canon reprend le soir.

Dimanche 22 octobre 1916

Gelée, froid.

Canon sans arrêt nuit et jour.

Les moutons et les bergers partent demain pour Beugnies.

Mercredi, à 10 h, appel des inscrits de l’autre soir.

Lundi 23 octobre 1916

Gris.

Canon fort sur Chaulnes. À Aulnoye vendredi pas de bombes, des aéros passent.

Un enfant est tué par les canons anti-aériens. Voyant les aéros passer, des hommes de Lille qui étaient en gare d’Aulnoye dans un train descendent et chantent la Marseillaise et crient ‘ Vive la France ! Vive la Hollande ! ‘

Fureur des Allemands. La Hollande s’y mettrait-elle enfin ?

Mardi 24 octobre 1916

Brouillard fin.

Calme. Beaucoup d’autos toujours.

 

Affichent :

Ø  Réquisitionnant tout : vélos, autos, motos, caoutchouc, métaux, cuir, truelle, étoffes de fil, laine et déchets, brosses, crins, peaux, fil électrique, etc. etc.

Ø  Pas de punition pour qui aurait encore vélos, autos etc.

Ø  Punition de 5 ans de prison, 10 000 marks après le 15 novembre, quiconque aurait encore.

 

Mercredi 25 octobre 1916

Gris. Pluie fine.

1 aéro passe à Avesnes pendant l’appel. 42 hommes sont pris, seront appelés pour travailler dans quelques jours.

Appel fait par 1 officier de St-Quentin pas commode. Les hommes d’Hautmont et environs ayant refusé de se présenter et de travailler, 2 000 sont partis en Pologne.

Un d’ici, revenu de St-Quentin où il travaillait depuis 9 mois, dit que les prisonniers russes sont obligés de faire des tranchées là-bas. Quatre sont morts de coups reçus. Canon nuit et avant midi. Gros coups de bombes la matinée et encore l’après-midi. Ils affichent à Avesnes la reprise de Péronne, Maing.

Jeudi 26 octobre 1916

Faut 20 poêles à pot. 500 pour la Commandanture.

Pluie fine.

Matin, carte de Jules. Hélas ! Pas de nouvelles encore ; je crains bien !.

Pas de canon, autos démolies repassent.

Vendredi 27 octobre 1916

Pluie, vent.

Il paraît qu’à Verdun cela marche, que le terrain perdu en février est repris, qu’en Lorraine également on avance. À quel prix hélas ?. Détonations fortes.

Samedi 28 octobre 1916

Vent. Averses.

Canon.

Pour 4 heures, les 14 chevaux marqués restants doivent être conduits chez Degois avec 7 hommes attendant des ordres. Les bestiaux doivent être prêts à partir, 10 pour chaque homme, au 1er appel. Est-ce bon signe ?

Grosses détonations encore. Manœuvres dit-on.

Autos beaucoup toujours, sur l’une un pont métallique allant sur Avesnes.

Dimanche 29 octobre 1916

Canon. Confirmation des succès de Verdun
La presse part à Floyon. Nuit Lucien a faux croup. (Laryngite à fausses membranes, presque toujours d’origine diphtérique)

Lundi 30 octobre 1916

Pluie à verse.

À Verdun 275 officiers prisonniers avec 3 000 hommes et la pluie à seaux.

Lucien va un peu mieux.

Mardi 31 octobre 1916

Fleu. Canon sans arrêt tout autour.

Il faut 14 charrettes prêtes avec 14 chevaux et les 7 hommes, les faut réunies chaque nuit prêtes à partir en cas de besoin. Pour ?


À partir de midi, Lucien est plus gai.

Novembre 1916

Mercredi 1er novembre 1916

Toussaint. Beau.

 

Soir, on erre. Défense de vendre le beurre plus de 2 Frs. 50 la livre.

Deux autos passent à midi, remplies de civils qui agitent leurs casquettes aux portières et crient " St-Quentin ", jettent des billets où ils ont écrit :

" Courage, confiance, venons de St Quentin. Les Français approchent "

 

Fumisterie ou réalité ?

Le canon sans arrêt donne par-là. Quand, mon Dieu ?

Jeudi 2 novembre 1916

Pluie matinée.

Canon nuit et jour, arrêt le soir.

Beaucoup d’autos, camions surtout le soir. Refaire la liste de tous les hommes de 17 à 50 ans fonctionnaires compris.

Vendredi 3 novembre 1916

Beau.

Canon roulant.

Les succès sur Verdun continuent, le fort de Vaux est repris (*) et au Douaumont 12 000 hommes auraient été faits prisonniers.

 

(*) : Les nouvelles vont vite puisque le fort a été repris dans la nuit du 1er au 2 novembre par les Français de Mangin

Samedi 4 novembre 1916

Beau.

Pas de viande cette semaine et plus à l’avenir. Au ravitaillement, lait condensé et biscuits pour les enfants.

Canon plus fort qu’hier toute la journée.

Passe beaucoup d’autos emmenant toute sorte de mobiliers, chaises, tables, poêles etc. On vient démonter et enlever la dynamo dans la filature et les accumulateurs électriques.

Dimanche 5 novembre 1916

Beau, vent.

Canon.

Demain à 8 heures ½ à Avesnes, 20 hommes désignés de 30 à 55 ans, emporter vivres pour 2 jours et vêtements. (*)

Autos toujours avec mobiliers.

 

(*) : Un des hommes partis le 5 novembre revient le 13 décembre, réformé de près de Sedan, « fourbu, esquinté. »

Lundi 6 novembre 1916

Beau, averses légères.

Canon de gros coups vers 4 heures. Les hommes sont partis à 300 arracher les betteraves à Bohain (??) À Wignehies, ils ont pris de 14 à 60 ans.

À la Commandanture de La Capelle, on parle d’enlever les cloches, annoncé à Wignehies.

Fourmies : 700 évacués de St Quentin.

Mardi 7 novembre 1916

Pluie. Tempête.

Canon même la nuit.

Mercredi 8 novembre 1916
 Fleu, pluie, vent.

Canon. Électricité à la graisse.

 

Annonces :

Refaire recensement de tous les bestiaux, poules, etc.

Ø  Défense de vendre aux soldats allemands beurre, œufs, fromage ou lait. Cela fera peut-être baisser le beurre.

Jeudi 9 novembre 1916

Canon.

Beau temps.

Autos toujours. Une auto verse au tournant de la Rouillies, deux tués, quatre blessés. 300 litres de cognac dans l’auto.

Vendredi 10 novembre 1916

Gros coups par moments, après-midi 1 aéro. Déclaration de la Pologne autonome ??.

Beau temps, soleil chaud.

Samedi 11 novembre 1916

Beau, couvert.

Quelques coups.

Faut 5 chevaux, 5 hommes pour Avesnes.

À partir de demain 2 chasseurs ici pour faire la police pour le lait, le beurre et la viande que l’on tue en fraude.

Dimanche 12 novembre 1916

Calme complet.

Lundi 13 novembre 1916

Encore le calme.

Mardi 14 novembre 1916

Toujours le calme désespérant.

Les Allemands racontent qu’on est en pourparlers de paix ! Mensonge !

Mercredi 15 novembre 1916

Gelée.

Pas un coup de canon.

Jeudi 16 novembre 1916

Gelée.

Rien encore. Désolant !

Vendredi 17 novembre 1916

Forte gelée, froid.

Canon reprend le soir.

Samedi 18 novembre 1916

Filet de neige.

Pluie, canon roulant et grosses détonations le matin.

Arrive à Larouillies, 50 émigrés de St-Quentin obligés de partir, dit-on, pour faire place aux troupes. Les cloches sont démontées à Larouillies, Rocquigny, etc.

Dégel.

Dimanche 19 novembre 1916

Canon est toujours loin. Le soir, plus fort.

180 vaches maigres arrivent.

Lundi 20 novembre 1916

Beau. Gros coups tout le jour, manœuvres sans doute ; des troupes partout aux environs.

Les tailleurs partent tous travailler chez Deshayes.

Brouillard.

Manœuvres encore.

Mardi 21 novembre 1916

Brouillard. Canon. Logement prêt à La Rouillies. En Serbie et Roumanie, succès dit-on ?. Plus de poste.

Mercredi 22 novembre 1916

Froid. Canon fort.

Beaucoup de troupes à Rocquigny, etc.
Réquisition 450 boutons de chemises et 30 couvertures. Arrive équipe pour abattre les noyers.

Jeudi 23 novembre 1916

Beau.

Encore manœuvres ??.

On dit François Joseph d’Autriche mort.

Vendredi 24 novembre 1916

Pluie fine. Confirmation mort de François Joseph.

Coups monstrueux faisant tout trembler. À ne pas croire qu’ils font tant de manœuvres.

Samedi 25 novembre 1916

Pluie sans arrêt.

Rien de neuf. À Felleries, évacués de Inchy, Berelles, Marquion.

Dimanche 26 novembre 1916

Brouillard.

Rien de neuf. Plus de canon.

Lundi 27 novembre 1916

Brouillard.

Rien de neuf. Plus de canon

Mardi 28 novembre 1916

Brouillard.

Rien de neuf. Plus de canon

Mercredi 29 novembre 1916

Brouillard.

Rien de neuf. Plus de canon

Jeudi 30 novembre 1916

Brouillard.

Rien encore. 60 télégraphistes arrivent samedi pour un mois, préparation de logements. Nouvelles cartes d’identité.

Toujours plus de bidoche. (*)

 

(*) : De la viande, bidoche vient de bidet (du cheval)

Décembre 1916

Vendredi 1er décembre 1916

Brouillard. Calme.

Soir canon une heure. Contrordre pour les télégraphistes.

Samedi 2 décembre 1916

Brouillard.

Gendarmes réquisitionnent tous les poêles des quincailliers.

 

Soir canon quelques heures.

Dimanche 3 décembre 1916

Brouillard. Rien.

Journal annonce départ de 20 000 émigrés en France ?

Lundi 4 décembre 1916

Froid. Rien.

Mardi 5 décembre 1916

Idem. Canon après-midi.

Biscuits au ravitaillement, 7 par personne, lait condensé.

Demain amener les vaches allemandes, jeudi tous les veaux rouges.

Passe autos sur La Capelle.

Mercredi 6 décembre 1916

Saint Nicolas. Beaucoup ont froid.

Aussi plus aucune nouvelle.

Jeudi 7 décembre 1916

Filet de neige. Pluie.

Carillon à Avesnes pour prise de Bucarest.

Vendredi 8 décembre 1916

Pluie, froid.

Quelques coups de canons.

Samedi 9 décembre 1916

Brouillard.

On conduit 80 veaux rouges à Avesnes. Arrive des dépêches, rien encore.

Dimanche 10 décembre 1916

Humide.

Canon enfin.

Arrive cartes, une de Craonne ne disant pas grand-chose.

Faut faire la statistique des bâches à eau.

Lundi 11 décembre 1916

Pluie.

Canon.

Mardi 12 décembre 1916

On dit le général Joffre démissionnaire !!!

Filet de neige. Neige fondue, pluie.

Mercredi 13 décembre 1916

Couvert, plus doux.

Canon loin.

L’Allemagne demande la paix dit-on. Bucarest aurait été repris 24 heures après sa chute ?

Un des hommes partis le 5 novembre revient réformé de près de Sedan, fourbu, esquinté.

Jeudi 14 décembre 1916

Froid.

Canon soir.

Manœuvres à Rainsars. L’Allemagne demande la paix. Les soldats dansent partout.

Vendredi 15 décembre 1916

Canon et manœuvres encore aux environs.

Officiel : demande de la paix par l’Allemagne. Quelles conditions ?

Samedi 16 décembre 1916

Canon.

Arrive des moutons (200).

Dimanche 17 décembre 1916

Canon. Rien de neuf.

Bruit de victoire sur Verdun.

Lundi 18 décembre 1916

Nuit dernière canon fort

Mardi 19 décembre 1916

Gelée. Le nouveau généralissime est le général Nivelle.

Canon.

Mercredi 20 décembre 1916

Gelée, filet de neige. Réquisition de poêles. Canon.

À Verdun, nous aurions fait prisonniers 9 000 hommes, 250 officiers et pris 84 canons. Canon sur la Somme.

Jeudi 21 décembre 1916

Pluie sans arrêt.

Manœuvres et canon.

Le journal dit communiqué allemand du 15. Allemands repliés en 2ème ligne sur Verdun, Talou (*) etc., les Français près de Bézonvaux.

 

(*) : Il s’agit de la côte du Talou, au nord de Verdun

(**) : Ce village n’existe plus, c’est uns des nombreux villages détruits et non-reconstruits de 14/18

Vendredi 22 décembre 1916

Pluie, fleu. Lampes de guerre. Faire la statistique des puits, citernes, pompes, lieux où elles se trouvent, eau potable, bonne ou non

Pour ?. Canon nuit et jour.

Samedi 23 décembre 1916

Tempête, pluie, fleu.

Les 69 chariots passés il y a 2 mois reviennent sur le Nouvion. Des presses au foin partent au train. Une déroute des Allemands à Ypres et encore 3 000 prisonniers à Verdun.

Dimanche 24 décembre 1916

Fleu. Canon nuit et jour.

Lundi 25 décembre 1916

Noël. Re-pluie.

Canon sans arrêt. Vent violent. Les troupes de La Rouillies sont parties la nuit dernière.

Mardi 26 décembre 1916

Canon fort nuit et jour.

Soir pluie.

Mercredi 27 décembre 1916

Beau. Canon nuit et jour. Pain noir.

Jeudi 28 décembre 1916

Froid. Plus de canon.

Vendredi 29 décembre 1916

Vent pluie.

Beaucoup d’enfants malades, beaucoup de maux de gorge.

Manœuvres. Le pain noir continue. Pain d’épice au choix.

Samedi 30 décembre 1916

Pluie, vent, 6ème fleu

Les puissances refusent la paix.

Dimanche 31 décembre 1916

Pluie fine par moment. On annonce 7 000 évacués pour la Commandanture (Est-ce Villers-Guislain ?) et des troupes !!. Péronne, Bussu, Driescourt auraient été repris mardi ???

Sommes sceptiques.

Quoi pour l’année prochaine ?

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Suite : Vers les années 1917 et 1918

 

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Vers d’autres témoignages de guerre 14/18

 

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