Carnet de guerre de LAUNAY Georges,

du 35ème territorial, puis au 31ème d’infanterie

 

 

Mise à jour avril 2014

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Il s'agit de la retranscription intégrale des pages du carnet (format 9cm sur 13, 37 feuillets) de Launay Georges dans lesquelles nous retrouvons toute l’horreur de la guerre et de ses à côtés.

Dommage que le journal du 31e régiment d'infanterie n'existe plus, car nous aurions pu y lire les détails de la journée du 11 décembre 1914, date de la capture de Georges LAUNEY

Pour une meilleure lecture, nous avons amélioré les ponctuations et l’orthographe. 

Il était à la mobilisation affecté au 33ème territorial, puis versé au 31ème d’infanterie, enfin prisonnier de guerre dans les camps de Meschede (baraque 28) et Hameln.

Merci à Franck.

 

Description : feather

 

Août-octobre 1914

Mobilisé le 5 août 1914 à Melun, Seine et Marne au 35ème territorial, renvoyé dans ses foyers jusqu’au 15 août 1914.

Envoyé le 17 août 1914 à Grand Puits (S et M)  pour le service de garde des voies de communication.

Évacué de Grand Puits dans la nuit du 4 au 5 septembre 1914. Arrivé à Verneuil-l’Étang occupé par les Anglais le 5 sept 1914 à 1 heure du matin pour en repartir à 6 heures pour Melun.

Arrivée à Melun à 10 heures, embarquement à 2 heures de l’après-midi pour Albi (Tarn).

 

Arrivée à Albi le 8 Sept à 7 heures du matin, versé à la 13ème compagnie de Dépôt, reversé au 31ème infanterie, 6ème compagnie le 27 octobre.

Embarqué le 27 octobre 1914 à 6 heures du soir pour la ligne de combat. Arrivée à Clermont-en-Argonne le 29 octobre à 7 heures du matin. Pays complètement anéanti par le feu et le bombardement, gare de ravitaillement du 5ème corps. Passé à Aubréville dans l’après-midi, arrivée dans les bois de l’Argonne à 4 heures du soir en pleine bataille.

 

Attaque de Vauquois par le 131ème, lequel subit un échec et de grosses pertes.

Bivouaquer du 29 au 30 dans les bois en ligne de réserve.

Le 30

Départ au petit jour pour les tranchées de 1ère ligne sur la crête en face de Vauquoy.

Le 31

Relève du 131 dans les tranchées en lisière du bois en face de Vauquois, ferme de la Cigalerie dans le marais bordant la route.

Ce marais est encore couvert de morts du 131è et du 113è. Entre les tranchées françaises et boches impossible de relever ces morts car aussitôt la sortie du bois on est accueilli par le feu de l’ennemi. 1 blessé depuis 4 jours dans le marais est sauvé par un nommé Achard cantonné dans la Cigalerie.

Ce blessé était complètement à bout de forces, il est incroyable qu’il ait pu survivre si longtemps.

1er novembre Toussaint.

A huit heures du soir, baptême du feu par une fusillade d’enfer durant environ 1 quart d’heure provoquée par l’attaque d’une patrouille allemande.

8 nov.

Relève des tranchées de Vauquoy par le 76ème, partons au repos à Aubreville, petit village dont une partie est détruite par les obus français lors du recul des Allemands.

Repos jusqu’au samedi 14, rencontré des jeunes gens Fleury, apprend avec Jules Manger la mort du frère à Jules coupé en deux par un obus le 21 ou 22 sept.

Le chef de gare est fusillé comme espion.

14 nov.

Départ d’Aubreville pour les tranchées au-dessous de la Pierre Croisée y restons jusqu’au lundi 23 nov – les cuisines se trouvent à 3 km – ne touchons qu’un repas par jour et n’avons même pas d’eau pour boire.

Rien de particulier ne se passe pendant ce temps. Quoique la fusillade n’arrête pas nuit et jour mais on y est tellement habitués que l’on y fait pas attention.

22 nov.

Départ pour le repos à la Contrôlerie, hameau de la commune de Futeaux à 3km des Islettes où nous restons jusqu’au samedi 28.

Pendant ce repos nous trouvons du vin à acheter à 0,90 frs le litre c’est un vrai bonheur car à part le malheureux ½ quart que l’on touche dans les tranchées nous n’avons encore pas pu nous en procurer.

28 nov.

Départ de la Contrôlerie à 7 heures du matin pour le Claon sur la route de la Chalade à 2 km de cette dernière.

À 8 heures du soir à peine endormi, réveil pour le départ de la compagnie.

Arrivée à la Pierre Croisée à 3 h du matin où nous restons en réserve jusqu’au lundi 30.

30 nov.

Départ de la compagnie à 2 heures après-midi pour renforcer le 89ème dans une attaque  la Bollande sur la gauche de la Grande Chevauchée sur la droite du Four-de-Paris par suite de notre arrivée nous prenons des tranchées boches, mais nous avons des pertes assez sérieuses.

Nous faisons une tranchée toute la nuit pendant que la neige tombe.

2 déc.

4 heures du matin, relève par le 36è, nous rentrons en réserve à la Pierre-Croisée

4 déc.

Départ à 2 heures après-midi en soutien du 36ème à la Grande Chevauchée.

Relevés le 5 à 4 heures après-midi départ pour le repos au Neufour. Je suis complètement à bout de forces n’ayant plus de jambes et la diarrhée depuis 15 jours je n’ai plus d’appétit je peux à peine me traîner et pas moyen de se faire évacuer.

Les majors ne veulent rien savoir.

Enfin au petit bonheur je suis résigné à rester sur le bord de la route.

10 déc.

Départ à 3 heures du matin pour relever le 29ème à la Haute Chevauchée.

J’ai fait la route sans trop de peine.

Nous arrivons dans les boyaux communiquant aux tranchées qui se trouvent à certains endroits à 5 mètres des tranchées boches. Les boyaux sont remplis d’eau et de boue jusqu’à la cheville. Il n’y a pas moyen d’avoir de repos.

Il fait un temps affreux nous avons l’impression et le pressentiment que nous ne quitterons pas ces tranchées sans évènement grave.

11 déc.

Nos pressentiments étaient justifiés.

Le matin vers 9 heures, il se produit une violente explosion sur ma droite. Ce sont les boches qui ont pratiqué un trou de mine souterrain sous notre tranchée qui saute avec les hommes qui se trouvent à cet endroit.

Ces hommes sont tous tués et quelques-uns sont en morceaux. à 16 hommes dont je fais partie nous nous trouvons à côté de l’explosion nous avons à peine le temps de nous mettre sur la défensive que les Allemands nous entourent et nous font prisonniers.

Les 5ème et 6ème compagnies ont le temps de se ressaisir et combattent pendant environ 4 heures mais sont obligés de reculer après avoir  perdu environ 200 morts et blessés et exactement 196 prisonniers dont 2 officiers.

 

Il est vraiment extraordinaire que je n’ai reçu aucune blessure.

Les Allemands nous font évacuer leurs tranchées et nous conduisent à travers bois à leur premier poste de réserve à l’abri des balles.

Je me trouve en compagnie de mon copain Lentz le bistro de la gare de Melun où nous descendons à chaque fois que nous allons à Fleury, nous nous sommes faits bons amis.

 

Nous sommes ensemble en captivité à Meschede.

Une grande surprise nous attend quand nous sommes aux mains des Allemands. Ceux-ci sont pleins d’égards pour nous, nous disant à chaque instant que nous étions camarades. ils nous donnent à boire du café, nous donnent des cigares, du tabac, les officiers sont très gentils, nous sommes tous épatés d’un tel accueil, nous sommes obligés de nous débarrasser de notre correspondance, journaux, livret militaire et couteau.

Nous restons une partie de la journée sous bois et vers 4h après-midi, nous sommes les 16 emmenés à pied au quartier général qui se trouve à environ 15km de là.

Il fait un temps affreux le vent souffle en tempête et il pleut.

Après avoir traversé Apremont en partie démoli par nos obus nous arrivons à Cornet où nous nous trouvons avec 180 prisonniers de notre compagnie ce sont eux qui nous apprennent qu’ils ont combattus pendant 4 heures et qu’il y a au moins 200 morts et blessés, dont le capitaine faisant fonction de commandant de bataillon. Celui là n’est pas plaint car c’était une véritable rosse et brute.

À Cornet nous touchons un quart de café et un morceau de pain, nous couchons sur le parquet d’une fabrique de cidre. Je suis complètement à bout de forces et toujours la courante.

Je ne mange pas et malgré cela ne me démoralise pas.

15 déc.

Départ de Cornet pour Bayonville soit 15 km à faire.

Au jour je me retrouve avec mon copain Collot que j’avais perdu de vue au moment de l’attaque des tranchées nous ne savons pas ce qu’est devenu notre ami Darquet nous ne savons pas s’il est mort ou blessé ou bien s’il a pu se sauver.

Je fais l’étape avec beaucoup de peine, enfin j’y arrive tout de même nous sommes cantonnés dans l’église et je couche au pied de l’autel impossible de me reposer, je suis obligé d’aller aux cabinets 7 ou 8 fois dans la nuit.

Je souffre beaucoup.

13 déc.

Départ de Bayonville pour Stenay étape de 17km je réussis à faire l’étape en voiture heureusement car je ne tiens plus debout.

Arrivée à Stenay nous sommes logés dans la caserne des Chasseurs à pied. Je suis à l’infirmerie et l’on me donne un remède pour la diarrhée, je me repose sur un matelas, il y a longtemps que je n’avais eu ce bonheur.

Dans la traversée de Stenay les habitants sont pleins d’égard pour nous ils m’apportent un bon bouillon bien gras et du café, me donne du chocolat, des cigares, du sucre cela me réconforte.

14 déc.

Départ de Stenay à 10 heures du matin pour Montmédy à 18km.

Après avoir mangé de l’orge cuite (c’est le commencement de la nouvelle nourriture), il nous est permis d’écrire une carte pour aviser nos familles que nous sommes prisonniers nous faisons tous nous vœux que ces cartes arrivent à destination.

 

Je suis séparé de mon copain Collot car nous sommes partager en 2 groupes, le 2ème ne devant partir que le lendemain je ne dois plus revoir mon ami car le 2ème groupe ne séjournera pas à Montmédy il est dirigé immédiatement sur l’Allemagne, impossible de pouvoir faire l’étape en voiture.

Nous partons escortés par des hussards de la mort.

Sur la route nous croisons le Konprinz en auto il nous donne des cigarettes.

 

Au bout de 4 ou 5km, je ne peux plus marcher et m’arrête sur le bord de la route avec un nommé Lévy. le chef du détachement fait arrêter et demande à une voiture de bien vouloir nous emmener Lévy et moi jusqu’à Montmédy.

Ce sont des infirmiers ils sont très affables. Nous donne un quart d’eau de vie et nous dépose à Montmédy-Bas.

De là nous montons à la citadelle et aussitôt le détachement arrive nous passons tous le visite. Lévy et moi entrons à l’hôpital et ma foi bien content car je suis à bout. Lentz me quitte et me souhaite bonne santé et bon courage.

Quel bonheur de pouvoir se déshabiller et de coucher dans un lit. Nous sommes bien soignés.

Je reste à l’hôpital du 14 décembre au 10 janvier.

 

Au bout de 2 ou 3 jours de repos je ne pense plus à  mes fatigues et commence à avoir bon appétit. Je suis au régime N° 1 dont voici le menu :

Ø  7h00 du matin – cacao environ ½ litre,

Ø  10h00 – thé même quantité,

Ø  12h00 soupe à l’orge et à l’avoine,

Ø  3h00 du soir – cacao,

Ø  5h00 soupe comme à midi,

Ø  7h00 – thé comme le matin.

Ø   

Le cacao est très bon, la soupe potable.

 

Après 10 jours, je passe au 2ème régime, même chose qu’au 1er, en plus nous touchons des biscuits de réserve avec le cacao et une petite tartine de pain avec le thé.

 

Après 5 jours, régime 3 :

Ø  7h00 du matin cacao, pain blanc comme un pain de 2 sous à Paris

Ø  10h00 ½ litre de thé et pain gris une bonne tartine, midi légumes et viande

Ø  3h du soir cacao comme le matin

Ø  5h soupe aux légumes pain et viande

Ø  7h thé sans pain.

 

Ce régime est excellent mais on n'y reste pas longtemps.

 

Au bout de 6 jours, je suis ramené au régime commun des prisonniers, soit ½ boule de pain par jour environ 1 livre1/2, café matin et midi et soupe le soir.

Cette soupe est un vrai manger à cochons, la moitié du temps c’est soit de l’orge perlée et du blé ou bien bouillon d’haricots ou de pois. Il y a juste pour ne pas crever de faim, heureusement que nous ne travaillons pas.

Le pain est fabriqué avec du seigle farine d’orge et d’avoine et fécule de pomme de terre, dès le début on le trouve aigre mais l’on s’y habitue il ne faut pas être difficile.

Il nous est permis d’écrire 2 fois par semaine j’espère que mes lettres arrivent à destination. Il nous est interdit de donner notre adresse je commence à trouver le temps long d’être privé de nouvelles.

Enfin il faut s’armer de patience et attendre d’être emmener dans un camp en Allemagne pour pouvoir donner son adresse et recevoir par la suite des nouvelles.

Noël 1914

Les fêtes de Noël et du 1er janvier sont tristement passées en pensant aux siens et surtout à se demander si nos lettres sont parvenues à destination afin qu’ils soient prévenus que nous sommes prisonniers et rassurés sur notre sort car je me représente dans quelles transes doivent être nos familles qui sont sans nouvelles quel triste et douloureux passage.

1915

10 janvier

Départ de Montmédy pour l’Allemagne j’y laisse Lévy qui est encore tout fiévreux.

 

Après 1 jour et 2 nuits de chemin de fer nous arrivons à Meschede en Wesphalie ou se trouve le camp ou nous devons être en captivité.

C’est une petite ville bâtie dans une vallée et entourée de montagnes couvertes de sapin. Le sol est couvert de neige et il fait froid le camp se trouve tout près de la ville derrière la gare.

Se sont de grands baraquements en bois contenant chacun 200 hommes. Il y en a 50 pour 10000 hommes.

À notre arrivée nous sommes 6800.

Aussitôt arrivés, nous passons la visite et conduit dans nos baraques je suis affecté à la baraque 48 avec le n° Mle 6588.

Ces baraques sont bien closes et bien chauffées il y a 5 grands poêles brûlant huit et jour nous touchons une paillasse remplie de fibres de bois, une bonne et chaude couverture, un escabeau à 4 pieds, une grande écuelle à 2 anses en métal étamé, couverts, cuillère fourchette et couteau.

Le tout complètement tout neuf nous sommes abrités un gardien boche est affecté à chaque baraque le nôtre est un gros pensu pas trop mauvais garçon. un sergent de la baraque fait l’interprète.

 

La vie au camp est assez monotone sur tout à cette époque de l’année où l’hiver sévit dans toute sa vigueur malgré ça nous ne souffrons pas du froid.

Le réveil est à six heures du matin et l’extinction des feux à 8 heures du soir.

Matin à 7 heures qui est fait avec tout ce que l’on veut sauf avec du café, véritable eau chaude colorée

11 heures ½ soupe, repas varié : soit orge perlée, soit choux rave à vache et pomme de terre ; soit : pois à vache et pomme de terre ; soit féveroles et pois à vache ; soit : pommes de terre cuites à l’eau et poisson ; dans chaque repas de midi chaque homme touche à peu près 20 grammes de viande pour ne pas dire rien du tout.

5h 1/2 du soir soupe : soit café, fromage ou hareng ou bien soupe à la farine d’orge véritable eau chaude blanchie à la farine – pain : 500 gram par jour, nous touchons le pain tout les 5 jours soit un pain de 5 livres.

 

Nous mourons de faim et le manque de pain est notre plus grande privation, aussi tout le monde tire aux flancs pour éviter le travail, pour mon compte je suis arrivé à me faire reconnaître exempt de service pour tout le temps de la captivité. Je suis tranquille de ce côté-là.

Il y a travail un jour sur deux pour la baraque de 9h à 11h du matin et de 2h à 4h1/2 le soir.

Ce  travail consiste à faire des chemins dans le camp qui est tout neuf et construit en plein champ ainsi que les diverses corvées de propreté et les autres. Ce travail n’est pas bien fatiguant mais c’est égal il n’est guère plaisant de travailler pour le roi de Prusse surtout qu’il ne rapporte rien pas même un excédent de nourriture.

15 janvier

Distribution de cartes postales, 1 par homme pour écrire à nos familles nous n’avons le droit d’écrire que 2 fois par mois – une carte de 10 lignes défense expresse d’écrire entre les lignes ni même au crayon encre.

Défense de se faire envoyer des colis autre que du linge. L’argent qui nous a été confisqué ne peut servir qu’à l’achat de linge on ne peut se procurer aucune nourriture supplémentaire.

Défense expresse d’aller à la cantine réservée aux boches.

Défense de fumer ce qui n’empêche pas la baraque d’être quelquefois noire de fumée. Il est assez facile de se procurer du tabac en fraude par les sentinelles boches qui sont assez serviables il est plus difficile de se procurer du pain qui vaut de 20 à 30 sous le pain de 5 livres car à la rafle d’argent tout le monde n’a versé qu’un peu ou pas du tout, tel que moi.

1er février

Distribution de carte de correspondance il nous est permis de se faire envoyer des colis de 5 kilos de vivres, chocolat, sucre, etc.

Il nous est également permis de fumer mais dehors – c'est-à-dire un peu d’amélioration – température : il neige et gèle presque chaque jour – mais nous n’en souffrons pas. Attendons des nouvelles avec impatience.

14 février

Arrivée d’environ 600 prisonniers, se sont les premiers depuis notre arrivée.

Ils proviennent en grande parte du 271° RI (70° division de réserve) et du 209° du 17° corps environ 20 Russes sont blessés quelques uns tout amputés.

C’est un évènement dans la vie monotone du camp et l’on courre aux nouvelles fraiches car il n’y a que par les nouveaux prisonniers que l’on peut avoir quelques renseignements sur ce qui se passe en France. Il n’y a pour ainsi dire aucun changement depuis que je suis prisonnier.

15 février

Nouvelle arrivée d’environ 600 prisonniers venant de l’Argonne. Il y en a d’une douzaine de régiments. Ils nous donnent les mêmes renseignements que les précédents.

Notre adjudant a pu se procurer un matin du 11 février, quel bonheur de pouvoir lire un journal français, cela n’a pas de prix

17 février

Distribution de cartes pur correspondance. Nous sommes obligés d’écrire sans avoir reçu des nouvelles de chez soi, le temps commence à devenir bien long.

Enfin espérons que cela ne tardera plus maintenant.

18 février

Arrivée d’environ 150 prisonniers provenant de la région de Pont-à-Mousson, ils appartiennent au 314° et 325° de réserve – ils nous disent que ça va bien pour le moment.

7 heures du soir arrivée de 450 prisonniers pris dans la Marne.

 

On nous annonce qu’à partir de ce jour nous aurons le droit d’écrire 1 carte par semaine et 2 lettres de 4 pages par mois, cela nous fait bien plaisir c’est sans doute la réponse à la décision prise par M. Millerand au sujet des prisonniers allemands en représailles pour le manque de nourriture pain principalement et la correspondance 2 cartes par mois seulement.

19 février

Arrivée d’environ 400 prisonniers provenant de divers endroits, d’anciens sont des évacués d’autres camps ou lieux de captivité.

20 février

Arrivée d’environ 70 prisonniers des 431°, 84°, 110°,  1er génie. Ils nous disent que ça va très bien ces prisonniers ont été pris dans la Marne.

21 février

Arrivée de 217 prisonniers venant de l’Argonne et de Montmédy, il y en a de plusieurs régiments, j’ai le plaisir d’y trouver un sergent du 31° qui se trouve être sergent de ma section il m’apprend qu’à la suite du combat où j’ai été fait prisonnier il n’est resté de la compagnie que 40 hommes, le restant tués ou prisonniers.

Darquet est tué, le capitaine Laborde tué, dit-on par ses hommes, il m’apprend également qu’au combat où il a été fait prisonnier que le lieutenant Péraldi a été tué, ainsi que Abadie, Gonnet, Lucien, Delaveau, Varenne, etc. il ne reste plus personne de la compagnie elle est complètement anéantit.

Cette attaque s’est faite à Vauquoy, il me dit aussi que l’offensive générale va commencer et que cela va bien pour l’instant

24 février

Arrivée de 2500 prisonniers Russes, ils viennent du camp de Guelbitz qui est évacué par suite de l’approche de l’armée russe.

Ils sont répartis dans nos baraques il y en a 6 dans notre escouade ce sont presque tous des jeunes gens; ils sont prisonniers depuis le mois d’août, ils nous disent qu’ils ont subis des mauvais traitements.

25 février

Reçois la 1ère carte, cela fait exactement 78 jours que j’étais sans nouvelles cela commençait à être vraiment long, aussi y-a-t-il des moments où j’avais le cafard.

26 février

Je reçois mon 1er colis de linge aussi qu’elle ne fut pas ma surprise quand à la visite, je m’aperçois que ma chère femme y a joint tout un assortiment de provision, je ne me connais plus de joie.

Je mange tout un paquet de petits beurres et presqu’un quart du chocolat.

Il est vraiment bon d’avoir dans ces moments de captivité une petite femme qui ne pense qu’à vous, cela vous redonne du courage et le temps parait moins long car on a le cœur plus gai et fait penser à l’avenir qui s’ouvre devant vous.

28 février

Nous écrivons la 1ère lettre aussi sommes nous contents de pouvoir s’expliquer un peu plus longuement avec les siens : encore un mois d’écouler.

1er mars

Je reçois enfin la 1ère carte qui a mis exactement 19 jours à me parvenir, je reçois également une lettre de maman datée du 19, elle a mis que 11 jours.

Il fait un temps affreux la neige n’arrête pas depuis 2 jours.

4 mars.

Ordre de la commandature : il nous est défendu de recevoir teinture d’iode, papier à lettre, enveloppes, papier à cigarettes pour nous empêcher toute correspondance, jusqu’aux boites de conserve qui seront l’objet d’une surveillance très sévère, pouvant même être dessoudées.

Je reçois une carte de Georges Puyl ainsi que d’Alice.

7 mars

Je reçois mon 2ème colis que je n’attendais pas.

Comme le 1er, il est le bienvenu car la ration ne s’améliore pas, il y a juste de quoi ne pas mourir de faim. Le colis était bien intact, en coupant une tranche de pain d’épice quelle ne fut pas ma surprise en y trouvant une fiole d’essence de café et 3 francs de cacher à l’intérieur du pain.

Cette bonne surprise me rend le caractère gai pour un dimanche, espérant toujours que cela durera plus longtemps maintenant

15 mars

On sent que l’Allemagne est à l’agonie car depuis plusieurs jours on demande des volontaires de tous les métiers pour aller travailler, il ne s’en présente pour ainsi dire pas et les quelques uns qui marchaient sont engueulés et appelés traitres car c’est autant de bras qu’ils remplacent qui s’en vont combattre les nôtres et même divers sont employés à la fabrication d’armes et de projectiles ou des voies ferrées.

Divers bruits courent dans les camps au sujet de la fin de la guerre qui serait proche je le souhaite de tout cœur mais rien n’est officiel, nous sommes complètement séparés du monde et les nouvelles qui transpirent sont plus ou moins fantaisistes.

Enfin espérons qu’i n’y en a plus pour longtemps maintenant.

J’ai payé un souvenir à ma tante Marie c’est un livre de messe spécialement imprimé pour le soldat français prisonnier.

17 mars

Sixième et dernière séance de vaccination, soit : 1 fois contre la variole, 3 fois contre la fièvre typhoïde et 2 fois contre le choléra : nouveau régime alimentaire, nous ne touchons plus que 250 grs de pain par jour, juste de quoi ne pas crever de faim, c’est dur.

Le soir nous avons soupe, café ou thé, hareng ou fromage.

Je reçois une carte d’Émile Bouron j’en suis très touché.

A quand la fin. ?

19 mars

Je reçois un petit colis d’Émile Bouron. J’en suis très surpris car je ne m’y attendais guère. Aussi je m’envoie un morceau de pain d’épices comme dessert.

Visite du camp par un général, c’est absolument la même comédie qu’en France.

Quel triste pays il tombe de la neige en plein hiver.

21 mars

Printemps. Ici il fait un vrai temps d’hiver, il tombe toujours de la neige quel triste pays.

Je reçois mon 3ème colis.

24 mars

Je reçois un petit colis d’Émile Bouron, c’est le 2ème (12 sardines, 16 pâtés) ainsi qu’une lettre de Chaignon.

25 mars

Je reçois une lettre de Marthe et je suis heureux d’apprendre que tout le monde est en bonne santé et que même la tante …… est bientôt sur pied et qu’elle est complètement hors de danger.

Aujourd’hui je suis employé à la buanderie, j’espère y rester c’est un poste tranquille.

27 mars

Départ de 500 prisonniers civils, c’est le 2ème en 8 jours. Ils s’en iraient dans un autre camp.

il nous arriverait 5000 soldats prisonniers dans un autre camp cela porterait les baraques à 250 hommes.

28 mars

Je suis à la buanderie en permanence. Il parait que nous allons toucher une ration supplémentaire. Ce serait la bonne vie.

Il fait toujours un temps de chien, du froid et de la neige.

30 mars

Je reçois mon 4ème colis qui arrive en bon état.

Il a gelé comme en plein hiver

1er avril

9ème mois de la mobilisation, le beau temps est enfin venu, quoiqu’il gèle encore.

Je reçois une carte de mon garçon qui m’a fait énormément plaisir, une carte de Marthe qui me donne des nouvelles de tante Silviane et de tante Sahbarde, ces nouvelles sont excellentes cela redonne du courage et de la patience Je reçois également une lettre du 28 janvier adressée à Montmédy. Je n’y comptais guère d’autant plus que je n’attendais pas de correspondance à Montmédy.

Le soir, je reçois une carte de Maurice R….. Je vois que tout le monde s’occupe de moi c’est vraiment réconfortant.

4 avril

Pâques.

Il fait un sale temps gris pour un jour de fête cela n’est pas gai.

Quel triste Pâques, c’est à avoir le cafard.

12 avril

Je reçois une carte de Marthe et de Jeanne Marthe m’annonce l’envoi d’un colis en date du 18 mars et un du 27. Jeanne m’envoie un colis en date du 1er avril.

Je reçois également une carte d’une dame Guillemain de Beaumont-sur-Véron dans l’Indre et Loir m’annonçant l’envoi d’un colis. Je ne connais pas du tout cette dame et je me demande où elle a pu se procurer mon adresse je vais lui répondre par politesse car elle me demande la manière de pouvoir correspondre.

15 avril

Départ de 1500 prisonniers pour le camp de Mertbourg en Saxe.

D’autres départs doivent suivre.

6 avril

Je reçois le 6ème colis ainsi que le 1er de Marthe tout est en bon état.

17 avril

Je reçois le 2ème colis de Marthe tout est en bon état. Nouveau départ de 500 hommes pour le camp de Merseburg.

18 avril

Je reçois le colis N°5 deux jours après le N°6.

Il y a tellement de colis que c’est un encombrement sans nom ce qui fait subir un retard de plusieurs jours à certains colis quelques uns sont dans un triste état. Le mien n’est pas abimé.

Il fait un temps superbe.

19 avril

Nouveau départ de 1000 hommes pour Merseburg, dont 119 de la compagnie. Je reçois un colis de Mauvan Launay. Il est en bon état le pain bien conservé et le bienvenu- ainsi qu’une lettre.

20 avril

Je reçois un colis de l’œuvre du pain des prisonniers composé de biscuits et une boite de lait concentré.

Je ne sais pas qui a pu leur procurer mon adresse, je reçois également une carte de Marthe me donnant de bonnes nouvelles de la santé j’en suis très heureux.

21 avril

Nouveau départ de 1000 prisonniers pour Merseburg dont 200 de la 7ème compagnie. il ne reste plus dans le camp que 2200 hommes répartis en 2 compagnies la 1ère et la 6ème : déménagement pour passer dans la 6ème compagnie affecté à la baraque 22 .

22 avril

Je reçois une lettre de maman du 1er, elle arrive après celle du 10, le service des lettres est fait d’une façon défectueuse.

23 avril

Je reçois mon 7ème colis la boite de petits pois arrive juste pour la date, aussi je vais me l’envoyer. Le pigeon était excellent.

J’ai fait un bon 4 heures, malgré cela il avait un goût de trop peu et ça manquait de vin : mais pour la situation c’était un repas de gala ; qui a mis un peu de baume à l’entrée de ma quarantième année.

24 avril

13ème anniversaire de mon cher garçon – c’est vraiment dur de ne pas être avec ceux que l’on aime en ces occasions – enfin vivons dans l’espérance de jours meilleurs.

Je reçois un 2ème colis de maman pain conserves et linge. Mon appétit peut au moins se satisfaire car on est vraiment malheureux quand on n'a presque pas de pain.

25 avril

Je reçois un colis de Marthe c’est le 5ème pain et conserves, jeu d’oie et de dames.

Je reçois également une carte de mon cher garçon du 11 et me souhaitant mon anniversaire. J’envoie une carte à belle maman j’espère qu’elle sera contente de son gendre.

Arrivée de 1660 prisonniers venant d’Ypres ils sont composés en majeure partie de territoriaux des 73ème et 74ème, de bataillons d’Afrique, de Marocains quelques artilleurs et des Anglais dont quelques Écossais.

Tous ces hommes ont été fait prisonniers au moyen des gaz asphyxiants qui les ont empêché de se mouvoir. Ils nous disent que la situation est bonne.

27 avril                                   

Je reçois une carte de Georges Puyl.

Je fais la connaissance de deux jeunes provinois soldats au 46e, le caporal Callot, fils d’un locataire de ma tante Barbelle, le sergent Bailly, fils d’un marchand de poissons rue de la Triperie.

Ce dernier grand camarade de pierre Bordelet me dit que sa femme lui a annoncé sa mort j’en suis très affecté mais je n’y crois pas encore complètement car maman dans ses lettres du 1er et 11 courant ne m’en parle pas il y a peut être erreur.

Je le souhaite de tout cœur.

Une sentinelle boche qui a frappé plusieurs de nos camarades sans motif est punie de 14 jours de prison et désigné pour partir immédiatement au feu.

30 avril

Je reçois mon 8ème colis tout est en bon état le pain très bien conservé : encore un mois de passé.

1er mai

10ème mois de mobilisation – nous n’avons même pas une petite branche de muguet à mettre à sa boutonnière. Arrivée d’environ 1000 prisonniers venant du camp de Feissen, ce sont presque tous des blessés ou anciens blessés et malades.

3 mai

Arrivée de 100 prisonniers venant du camp de Limburg une grande parte sont blessés.

4 mai

Arrivée de 1000 prisonniers venant du camp de Darmstadt ce sont tous d’anciens prisonniers une grande partie ont été blessés et beaucoup sont estropiés. Le camp est transformé en dépôt de blessés ou de prisonniers gradés ou incapable de travailler

5 mai

Je reçois une carte de maman, de Fernande et de Georges. Ce dernier m’annonce l’envoi d’un colis.

Arrivée de 1000 prisonniers venant du camp de Verdun comme les précédents ce sont d’anciens prisonniers beaucoup sont blessés et estropiés.

Je reçois une lettre de Mme Poulain.

9 mai

Je reçois le colis de Georges tout est en bon état. Je reçois également une carte de ma chérie de Marthe et une lettre de maman.

Le soir, diner de gala avec Lentz (Massy), Blanchard, renault, Vaillant et l’adjudant chef de la baraque 14

Menu : Potage chantilly et printannier, maquereaux et sardines à l’huile, jambon (Félix Potin, Georges Puyl), jambon en gelée (Danoy-Lentz), pâté de lièvre (Danoy-Lentz), galantine de lapin (Félix Potin-Georges Puyl), petits pois ( Lentz-Renault), Fromage (Pont l’Évêque-Lentz), abricots et amandes (adjudant), petits beurres ( Launay-Renault). Boisson thé – café.

Bon petit diner en compagnie de bons amis. Cela semble bon et fait oublier un peu nos misères.

11 mai

Voilà 5 mois que je suis prisonnier.

Je reçois mon 9ème colis tout est en bon état, le pain est bien conservé.

12 mai

Je reçois une carte de la ville de Paris ainsi que de Mme Guillemin m’annonçant l’envoi de chacun un colis. Ouverture de la cantine.

14 mai

Je reçois une lettre de M. Widemer m’annonçant l’envoi d’un colis.

17 mai

Je reçois le colis de maman du 27 avril, les œufs étaient abîmés deux seulement étaient mangeables – arrivée de 3 prisonniers blessés qui ont été fait le 8 courant.

Ils nous disent que Lille est repris avec 7000 prisonniers boches. La rumeur que de grands évènements se produisent parcourt le camp avec persistance. Je fais la connaissance d’un homme de mon escouade, un nommé Lebel de Provins c’est le garçon du père Bellot et il est de l’âge de Charles.

19 mai

Départ pour Hameln. Nous avons reçu l’ordre de partir à 10h du soir.

Départ de Meschede à 10h du matin.

 

Arrivée à Hameln à 5h1/2 du soir cette ville se trouve dans le Hanovre au nord-est de Meschede à environ 200 km. Le pays de Hanovre à l’air plus riche que la Wesphalie, la ville de Hameln 23000 hab. a l’air très propre et dans une assez belle contrée.

Les baraquements sont mieux qu’à Meschede. Chaque paillasse a son encadrement nous avons une cuvette par homme on touche le bain tous les jours et la nourriture est moins substantielle qu’à Meschede.

23 mai

Jour de la Pentecôte, temps superbe, nous devrions être en fête à Fleury enfin espérons en des jours meilleurs.

24 mai

Je reçois la 15ème carte de ma chérie ainsi qu’une lettre de Mme Guillemain surveillante de l’Hôtel Dieu.

25 mai

Je reçois un colis de M. Widmer le pain est presque en entier avarié le restant est bon, potage, saucisson et chocolat.

26 mai

Arrivée de 2500 prisonniers 1000 venant de Quedlinburg et 1500 de Merseburg, dans ces derniers beaucoup viennent de Meschede n’ayant resté à Mersheburg que 5 semaines aussi revoit-on pas mal de connaissances dans ceux venant de Quedlinburg.

J’ai rencontré un territorial venant d’Albi et qui avait été fait prisonnier en même temps que moi ayant été séparés à Stenay lui avait été dirigé sur le camp de Giessen.

29 mai

Je reçois un colis de Marthe ils sont vraiment gentils pour moi.

31 mai

Je reçois le 10ème colis de ma chérie, le pain est immangeable je suis obligé de tout jeter. C’est vraiment malheureux.

4 juin.

Je reçois un colis de Mme Guillemain, surveillante à l’Hôtel Dieu.

7 juin,

Je reçois le 11ème colis de ma chérie, le pain est complètement perdu je reçois également une lettre de maman et deux de ma chérie toutes deux me confirme la mort de Pierre Bordelet (*) c’est un grand malheur.

 

(*) : Pierre BORDELET, soldat au 246e régiment d'infanterie, mort pour la France à Crouy (Aisne), le 12 janvier 1915, tué sur le champ de bataille. Il était né à Provins (77) le 29 septembre 1891.

9 juin

Je reçois un colis de M. Pache et une lettre de ma chérie venue directement à Hameln.

10 juin

Départ de Hameln pour le camp d’Hesepe nouveau camp situé au nord de la Wesphalie à une cinquantaine de k° de la Hollande.

Nous sommes là 1000 hommes pour le travail de la culture de la contrée en peine brousse.

La nourriture est encore plus mauvaise qu’à Hameln où elle n’était cependant pas fameuse, encore un nouveau retard pour les lettres et colis.

Aussi dans la crainte de voyager encore en d’autres camps je prends la décision de ne plus m’envoyer de colis qui arrivent avec le pain tout gâché ce n’est pas la peine de gâcher de l’argent inutilement.

20 juin

Voilà une semaine de passer dans notre nouveau camp d’Hesepe.

Toute la semaine nous avons travaillé à la construction d’une route forestière nous en faisons le moins possible surtout pour ce que l’on gagne et la sale nourriture que les boches nous donne. J’ai reçu hier le colis N°13 de ma chérie. je n’ai pas encore le 12ème inutile de dire que le pain est complètement perdu.

27 juin

Toujours même travail nous avons passé à la paye nous touchons la somme énorme de 20 pfennig par jour c'est-à-dire 0,25 français nous serons bientôt riches.

J’ai touché mes mandats de 18 et 20 mars il ne faut pas être pressé quand tout cela finira-t-il il y a des moments où l’on désespère de tout.

28 juin

Je reçois le 14° colis de ma chérie ainsi que le 7° de Marthe le pain est complètement perdu le chocolat que Marthe m’a envoyé a été volé.

29 juin

Je reçois le 15° colis de ma chérie – pain perdu.

1er juillet

12ème mois de la mobilisation.

14 juillet

Jour de la fête nationale. quel triste jour, nous avons travaillé toute la journée à la construction de notre route – rien à signaler dans notre triste vie de prisonnier.

31 juillet

Rien de particulier à signaler toujours même travail – la nourriture est de plus en plus mauvaise heureusement que j’ai des colis.

2 août

Anniversaire de la mobilisation voici un an de passé et séparer des siens c’est à se demander si ça finira un jour.

Enfin ayons du courage et de la patience en pensant en un avenir meilleur. Quelle joie éprouverons-nous au retour dans nos foyers avec les êtres qui nous sont chers.

31 août

Toujours même travail temps affreux il pleut presque tous les jours.

Il y a eu 5 évasions, 1 seule a réussi, les 4 autres ont été repris et ont subi des mauvais traitements. toujours même nourriture.

30 Sep.

Toujours même travail.il a fait un mois superbe c’est le plus beau depuis que je suis dans ce maudit pays. Je suis allé 2 jours chez les paysans pour arraché les pommes de terre. J’étais éreinté. Quelle vie !

2 octobre

Les bruits courts d’une offensive générale française qui aurait réussi ce n’est pas un malheur si l’on pouvait réussir à sortir ces sales boches de notre territoire, puisse la fin de cette maudite guerre arrive bientôt.

Courage et patience.

1 au 31

Toujours même travail, il commence à faire froid - j’ai reçu les petits articles de Marthe ils m’ont fait bien plaisir. Car il circule tellement de fausses nouvelles que l’on arrive à ne plus rien croire.

1er novembre

La Toussaint. Anniversaire de mon baptême du feu devant Vauquoy.

Il y a eu plusieurs évasions qui ont en partie réussi.

Du reste le matin du 23 oct. a pu parvenir au camp et les renseignements qu’il a en sont exacts. A voir la libération. Nous avons reçu ce mois ci, jusqu’au 17, chacun 2 boites de lait condensé 18 biscuits, ¼ chocolat ¼ boite bœuf conservée.

Cela fait plaisir de constater que l’on ne nous oubli pas en France.

1 au 30

Toujours même travail même par la gelée et la neige.

1er déc.

Dernier mois de l’année complètement passée en captivité.

11 déc.

Anniversaire de ma capture 1 an de passer dans ce pays de malheur. à quand la fin on a déjà la perspective d’y passer encore toute l’année 1916 quelle épreuve!

Noël 4 jours de repos réveillon permission de 10h concert.

Secours venant de France distribués à ceux qui ne reçoivent pas ou peu de colis

1 au 31

Toujours même travail température douce pour la saison.

31 déc.

Enterrement de l’année en concert. Permission 1 heure du matin.

1916

Verra-t-elle la fin de nos tourments nous l’espérons tous, mais beaucoup en doute. Pour notre fin d’année les boches nous reculent la distribution de nos lettres 10 jours plus tard, par suite de représailles disent-ils.

Pour le 1er janvier, nous avons eu du Comdt du camp les mêmes permissions que pour Noël.

La chose la plus intéressante du mois c’est la dégringolade du mark il faut exactement 1 franc – 1/3, toujours même travail.

1er février

Nous constatons avec plaisir que les boches commencent à avoir assez de la guerre, civils comme soldat, ils la crève aussi, certains soldats vont-ils jusqu’à ramasser nos croûtes de pain ils crient famine aussi cela nous réjouit les nouvelles qui transpercent au camp sont bonnes surtout côté Russie nous ne voyons plus flotter leur loque ….. de victoire.

8 et 9

Départ des sergents et caporaux pour d’autres camps, ils ne doivent plus travailler – les veinards.

Du 1er février au 14 juillet

Toujours même travail et même vie.

Les bonnes nouvelles du front russe nous parviennent et relèvent notre courage – car nous trouvons vraiment le temps long.

Il y a des moments où l’on se demande si la guerre finira cette année on commence à désespérer.

14 juillet

Le deuxième en Allemagne travail comme d’habitude personne n’est gai.

20 juillet

Je pars seul à Hameln une sentinelle est venue me chercher pas de motifs je ne sais quoi penser. Je suis très embêter de quitte mes camarades.

Arrivé à Hameln je n’en sais pas d’avantage aussi je suis très ennuyer.

26 juillet

Départ à Völksen, gare Eldagsen nous arrivons à 19 pour faire la moisson cela ne me sourit guère – je reste à travailler jusqu’au lundi 31.

Le mardi malade, et le mercredi le fermier trouve que je ne fais pas son affaire me renvoye à Hameln avec 3 autres prisonniers.

5 août

Je suis appelé à la Kommandantur ou j’apprends que c’est rapport à la photo des chérubins à Ternaude et la lettre de M. Hartman que j’ai été rappelé à Hameln où je dois rester jusqu’à nouvel ordre.

Je ne sais ce que les boches se figurent aussi je n’en fait pas cas car je n’ai rien à me reprocher. Je tire la flemme du matin au soir.

15 août

Voilà 2 ans que j’ai quitté mes chers aimés et l’on ne voit toujours pas quand ça finira cette maudite guerre je suis toujours à Hameln en attendant ce que ces messieurs décideront à mon sujet.

 25 août

L’enquête étant terminée et n’ayant donné aucun résultat comme je m’y attendais. Je retourne seul à Hesepe ou j’ai demandé à retourner, ce qui m’a été accordé.

Quel réception à mon arrivée tous les camarades sont contents de me revoir. Moi aussi j’en suis bien content. Je reprends mon emploi par ordre de l’officier et je recommence mon petit train-train de vie.

Jusqu’au 1er janvier toujours même travail, j'ai passé les fêtes de Noël et le 1er de l’an bien tristement.

1917

3 janvier

Départ de tout le camp pour Hameln, le camp est supprimé nous sommes remplacés par des civils belges.

4 janvier

Désinfection et dépoilage.

Je suis employé au service de la croix rouge et je ne m’en fait pas.

20 janvier

En allant avec 2 camarades voir un de leurs amis je me rencontre avec Félix Aubin, qui a faillit se marier avec Fernande, quelle heureuse rencontre. C’est la 1ère fois que je vois quelqu’un que je connaissais avant la guerre, à part mon ami Lentz de Melun.

26 janvier

Départ d’Hameln pour les représailles – me voila parti pour l’inconnu.

27 janvier

Arrivée à Darmstadt dans le duché de Hesse – c’est le commencement de la misère.

8 fév.

Départ de Darmstadt pour le front français ; ce sont les représailles qui commencent. Nous passons à Worms, Mannheim, Kaiser Lanfen, Sarrebruck, Diedenhafen, Jench, gare frontière allemande, Andin-le-Roman, gare frontière française.

Le 10 à 4h du matin

Arrivée à Romagne dans la Meuse.

Nous faisons 12 km. Nous traversons Montfaucon d’où nous bivouaquons à 500 m en avant face au front – nous couchons sur la terre gelée – le travail consiste à nettoyer les routes, faire des tranchées nous allons jusqu’aux lignes de combat où nous risquons d’être tués ou blessé.

17 décembre

Un de nos camarades Richard est tué dans les tranchées de Malancourt.

24

Un aspirant est blessé mortellement.

1918

7 mars

Un nouveau prisonnier du 252e est blessé grièvement à l’œil.

17

Un nommé Favreau est blessé au bras par un éclat d’obus ;

27 mars

Une corvée de 80 hommes revenant de Malancourt est atteinte par un obus français 4 hommes sont tués et 15 blessés dont 7 grièvement, 1 grand blessé meurt en arrivant à l’hôpital de Cierges.

2 mars

1 autre grand blessé meurt. Les 4 tués sont enterrés au cimetière de Mautilloy.

2 avril

Un nouveau prisonnier est blessé grièvement à Malancourt

4 avril

2 nouveaux prisonniers sont blessés en revenant de Malancourt, 4 prisonniers de Septsarges sont tués en face de la cote 304

5 avril

4 cas de croup se sont déclarés dans le camp 1 est mortel.

1er mai

Fin des représailles départ de Montfaucon à 5h du matin nous passons à Septsarges et Nantilloy, Cunel (désinfection et douches) nous embarquons pour Estenay. C’est tout de même la fin du cauchemar.

2 mai

6h du matin arrivée à Stenay – nous voila à l’arrière du front et tous bien contents – nous restons jusqu‘au 14 d’où nous partons pour Darmstadt.

15 mai

Arrivée à Darmstadt où nous sommes reçus par nos camarades de camp d’une façon qui nous va au cœur.

 

FIN DU CARNET

Description : feather

 

Sur la page de couverture Georges Launay mentionne qu’il est resté à Darmstadt jusqu’au 11 juin 1918, puis est retourné à Hameln du 12 au 15/6, a été interné du 16/6 au 1/8  à Wiesmoor-Nord puis à Soltau du 2/8 au 6/8 et enfin du 6/8/18 au /../18 à Oerel.

 

Dans ce carnet suivent quelques pages contenant des noms et des adresses, ainsi que la traduction en allemand  de la nourriture, de biens d’équipement de la maison, des jours de la semaine, des mois, des termes militaires, de la valeur du change.

 

Description : feather

 

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