Cahier de poèmes-chansons du caporal Lucien PRADEL

des 27e, 10e, 359e, 164e et 124e régiments d'infanterie

d’octobre 1914 à juillet 1918

Mise à jour : Mars 2020

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Toute recopie de ces poèmes, même partielle, doit être soumis à autorisation de Jean-Claude >>> ici <<<

Prélude

 

Jean-Claude nous dit :

« C'était mon grand-père maternel, mais ce vocable ne fut pas, pour moi, ni pour mes frères Bernard et Michel, empreint de l'affection habituelle dans la mesure où il décéda en mai 1937, à l'âge de 52 ans, bien avant notre naissance !  Très affectées par cette disparition, suivie en 1940 par celle de son fils Georges né en 1911, notre grand-mère Gabrielle, épousée en 1910, et notre mère Jeanine, née en 1920, n'évoquèrent que très peu ce passé douloureux, en dehors des commentaires factuels des photos de famille. Ces images attestaient cependant de sa pratique musicale en amateur (violon et flûte).

Par ailleurs, et en même temps que sa profession de comptable, Lucien et Gabrielle tenaient, à Montmorency, un commerce voué au plaisir des sens : la «Marquisette» était d'un côté une confiserie fine, et de l'autre une enseigne de musique (instruments de lutherie, phonos et disques, méthodes et partitions, recueils de chansons et monologues), témoignant ainsi de personnalités plutôt artistiques et hédonistes. »

 

« Le talent créatif de Lucien ne nous fut révélé que très récemment à l'occasion de la succession de nos parents, par la découverte d'une pochette cartonnée contenant un ensemble de manuscrits datés et signés de sa belle plume, à savoir :

-- 20 poèmes et 6 chansons composés essentiellement en 1908 et 1909, période de son service militaire dans la musique du 141ème RI et de sa rencontre avec Gabrielle ROY (qui deviendra son épouse).

-- Un cahier parfaitement calligraphié à la plume, comportant 20 autres poèmes et chansons, composés au front, entre octobre 1914 et juillet 1918, en tant que combattant des 10e, 359e, 164e et 124e régiments d'infanterie. »

« Ce fut pour moi une émotion intense de cerner, à travers ces écrits, toute la personnalité créative, romantique, hédoniste et enthousiaste de ce grand-père jusqu'alors méconnue.

 

« Durant toute cette campagne, Lucien PRADEL semble avoir entretenu sa passion musicale avec son violon, en animant notamment la structure culturelle l'«Arche des Poilus» (Les programmes visibles ici) qui, lors des séjours en arrière du front, organisait, avec une dizaine de conscrits de la même compagnie, des spectacles de théâtre et chansons accompagnés par lui au violon , au moins lorsqu’il était au 10e régiment d’infanterie de fin 1915 au 20 juillet 1916.

Les programmes ronéotés et illustrés de dessins, se trouvaient également dans la pochette pour des représentations données à Taillancourt-sur-Meuse les : 12 décembre 1915, 1er et 23 janvier 1916, et 6 février 1916 jour de la visite rendue à «l'Arche des Poilus» par le président POINCARÉ accompagné des généraux JOFFRE et ROQUES ! »

 

« Un grand merci à mon fils Denis et à ses amis d'avoir transcrit les partitions des chansons originales, d'avoir orchestré certaines d'entre elles et d'avoir redonné vie à tous ces émouvants textes et musiques de ce livret, qui n'avaient pas été dits ni chantés depuis un siècle. Ils me semblent très représentatifs de l'état d'esprit romantique et léger de l'avant-guerre puis grave et engagé pendant la guerre des tranchées.

Ce grand-père est ainsi devenu très présent à mon esprit, et rejoint l'épopée de notre grand-père paternel, Edmond, Gaston MOCQUOT, également bourguignon, engagé et blessé, comme brancardier de 1914 à 1918 dans nombre de batailles de la Somme et de la Meuse...après un service militaire de 3 ans (1910-1913) comme tubiste dans la musique du 31ème RI. »

 

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Lucien PRADEL est né en mars 1885 à Nolay (Côte d’Or). Comptable à 20 ans, il s’engage volontairement pour trois ans, en juin 1906, au 141e régiment d’infanterie de Marseille. Il devient musicien en septembre 1907. En août 1914, il rejoint le 27e régiment d’infanterie de Dijon. Soigné pour maladie de mars à septembre 1915, il passe au 10e régiment d’infanterie fin 1915 avant de faire plusieurs régiments jusqu’à la fin de la guerre, les 359e (21/07/1916), 164e (21/04/1917), 124e (19/12/1917), 359e RI (27/03/1918). Il ne sera ni blessé, ni décoré.

 

 

Titre : 10e régiment d’infanterie - Description : L’Arche des Poilus du 10e régiment d’infanterie          Titre : 10e régiment d’infanterie - Description : L’Arche des Poilus du 10e régiment d’infanterie

L’Arche des Poilus du 10e régiment d’infanterie

 

 

Information

 

Un de ces poèmes « Bébé à Noël. A petit Georges » a été présenté par Yanis K., élève en troisième dans le cadre d’un devoir de français. Merci à lui de l’avoir choisi.

 

 

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Sommaire :

 

Les gars de Bourgogne

En sentinelle

Réponse à la lettre des enfants de France aux soldats français pour noël 1914

Renouveau

Noël aux tranchées !

Lettre d’un poilu

Ceux de la classe 16.

Sur l’air du « Petit Grégoire » de Botrel

Fleur fanée…fleur aimée

On ne s’en fait pas

Pour Eux

Cocorico..(ou son rêve)

Épître qu’un poux envoie à une élégante dame

Fleur des tranchées

Le poste d’écoute

Jour des Morts

Bébé à Noël. A petit Georges

Pour vous

Sonnet à ma pipe

La fin du tank

 

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Les gars de Bourgogne

Fait au bois le 1er octobre 1914 (*)

 

Quels sont là-bas, ces gars qui vont à la bataille

En chantant des joyeux refrains

Couvrant de leurs chansons le bruit de la mitraille

Sont-ce des lions ou des humains ?

Ce sont de gais lurons et leur joviale trogne

Semble encore rougie de raisin

Je les connais, ce sont les enfants de Bourgogne

Fils de Bacchus, dieu du bon vin !

Ne reculant jamais pour la bonne besogne

Ils ont quitté leurs verts coteaux

Pour être ici, être prêts où ça cogne

Contre les maudits hobereaux !!!

Tel un chien auquel on dispute l’os qu’il rogne

Les Boches fuient, ils sont perdus

Hardi les gars, sus aux brutes qui sans vergogne

De notre vin se sont repus !

Bientôt pour vous, viendra l’heure de la victoire

Alors, reprenant un refrain

Gais Bourguignons, vous vous retrouverez pour boire

Un bon verre de vin du Rhin !

 

 

(*) : A cette date, Lucien était au 27e régiment d’infanterie.

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En sentinelle

Fait le 19 octobre, en sentinelle au bois

Chanson sur l’air des mamans de Botrel

 

Dans l’immensité de la plaine

Témoin d’un furieux combat

A l’orée d’un bois, sous un chêne

Seul, dans la nuit, tu restes là

Petit pioupiou, prête l’oreille

Ouvre bien l’œil, ne t’endors pas

Songe que pour l’instant tu veilles

Sur tes frères qui dorment là !!

Sans doute plus d’un sous la lune

Rêve au pays qu’il a quitté

A sa mère, ou bien à sa brune

Qui l’attend, le cœur attristé !

Tandis que toi, songe à la France

Le beau pays ensoleillé

Eternel berceau de vaillance

Patrie de la vraie liberté

 

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Réponse à la lettre des enfants de France aux soldats français pour noël 1914

St Agnant, le 25 décembre 1914 (*)

 

Jusque dans notre exil, la voie mélodieuse

Des cloches, cette nuit, nous a chanté Noël

Noël! Noël ! Noël ! Et la voix monstrueuse

Du canon s’est tue à ce beau chant éternel !…

A tous mes chers enfants, merci du fond du cœur

Pour le gracieux envoi de tant de bonnes choses

Que vous nous avez fait. Sur vos frimousses roses

Nous voudrions bien mettre en de fervents baisers

Tout notre amour et toute notre reconnaissance.

Hélas, bien chers petits, nous sommes exilés

Loin de vous pour défendre notre chère France !

Mais bientôt sonnera l’heure de la victoire

Et nous reviendrons alors couverts de gloire

Le jour est proche où les ennemis exécrés

De notre beau pays se verront tous chassés.

Bravant le froid, le feu, et toute la mitraille

Nous marcherons encore, s’il le faut, au combat.

Pour nous qu’importe les dangers de la bataille

Puisque c’est pour vous tous, chers enfants qu’on se bat.

 

 

(*) : Il s’agit de Saint-Agnant-sous-les-Côtes (Meuse), zone de stationnement du 27e régiment d’infanterie.

En mars 1915, Lucien PRADEL tombe malade. Il part à Marseille. Hôpital N° 1 du 19 mars au 1e juin, puis hôpital n° 42. Jusqu’au 7 juin. Puis à l’hôpital de Santenay-les-Bains (Côte-d’Or) jusqu’au 12 septembre 1915.

 

 

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Renouveau

Ste Marthe (*), le 4 avril 1915

 

Au fond de mon exil, vous m’êtes revenu

Un seul de vos regards a ravivé mon cœur

Comme le premier jour où je vous ai connue,

Mes yeux en vous voyant, ont revu le bonheur

C’est que, comme autrefois, vous êtes si jolie

Que mes yeux, à vous voir ne peuvent se lasser

Et mon âme ressent une joie infinie

A relire tout bas, les pages du passé !!!

Le soleil, en passant, met dans vos boucles blondes

Un lumineux ruban fait d’étincelles d’or.

Vos prunelles sont plus bleues même que les ondes

Et leur reflet d’azur me fascine et m’endort.

Dans vos beaux yeux rieurs, je lis une promesse

Et vos lèvres s’ouvrant, appellent un baiser

Votre voix est pour moi une longue caresse

Une douce chanson que j’adore écouter !

Vois, le joyeux printemps, pour te fêter ma mie

Tout le long du chemin met des bouquets de fleurs

Et de chaque bosquet monte une mélodie

Eternelle chanson de l’amour et des cœurs !

 

 

(*) : L’hôpital Sainte Marthe de Marseille existe toujours.

 

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Noël aux tranchées !

(Sur l’air de minuit chrétiens)

Fort de Beauregard, 10 novembre 1915 (*)

 

Minuit soldat, c’est l’heure ténébreuse

Où le prussien, sortant de son trou noir

Profitant de l’ombre mystérieuse

Cherche à te porter le coup sans espoir

Mais vigilant, à l’affût de la bête

Tu l’aperçois et froidement l’abats.

Pendant qu’au loin une cloche répète

Noël, Noël, de nos petits soldats.(bis)

 

2ème

A ce doux chant, une ancienne prière

Monte en nos cœurs, vers le ciel étoilé

Notre pensée s’en va vers notre mère

Vers le pays, vers le petit clocher !

C’est que là-bas, en la chambrette close

Dort en son lit, bercé par sa maman

Un petit gars, joli chérubin rose

Noël, Noël, sur toi je veille enfant ! (bis)

 

3éme

Tout à coup, au milieu des ténèbres

Une clameur s’élève dans les rangs

Et la Marseillaise, aux accents célèbres

Retentit pendant qu’on crie « en avant » !

Partout bientôt, la mitraille fait

De longs éclairs luisent de tous côtés

Hardi les gars, allez plein de courage

Noël, Noël, c’est pour la Liberté !

Noël, Noël, c’est pour la Liberté !

 

 

(*) : Le fort de Beauregard de Fénay (Côte d’Or) fait partie de la défense de Dijon.

C’est logique que Lucien reparte après sa guérison dans ce fort de la ville de garnison des 10e et 27e régiments d’infanterie avant d’être affecté dans l’un de ces 2 régiments.

Ce sera le 10e régiment d’infanterie au 9e bataillon.

Le 9e bataillon est un bataillon nouvellement créé :

« Par ordre du ministre, il doit être créé dans chaque région (18 bataillons au total), sous le titre de dépôt de passage, un bataillon (circulaire ministérielle du 13 avril 1915). L'instruction des hommes qui le compose devra être perfectionnée en vue des opérations futures.Le bataillon devra être rapproché du front.

 

 

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Lettre d’un poilu

Taillancourt. 14 décembre 1915 (*)

 

Mes chers parents je vous écris

Pour vous parler du beau pays

Que nous avons depuis jeudi

Choisi pour not’ villégiature ;

C’est un chouet pat’lin, croyez moi

Qui vous plairait sur’ment, je crois

Car, sans même sortir d’chez soi

On peut admirer la nature.

 

D’abord, c’est presque une ville d’Eaux

Grâce à la crue du p’tit ruisseau

Qui découch’ de son lit, l’salaud

Et vient inonder le village ;

Aussi hier, en raison de ça

Pour que l’on puisse se tirer d’là

On a remplacé not’ barda

Par une bouée de sauvetage.

 

Mais j’oubliais, mes chers parents

De vous parler des habitants

Qui, pour nous se montrent charmants

Et nous lancent maintes œillades

Comm’ sans l’amour, y’a rien qui vaille

Ce matin, le cœur en bataille

J’ai pris une bell’ fille par la taille

Au cours d’une de mes promenades.

 

La belle avait de jolis yeux

Où se mirait l’azur des cieux

Et cachait quelque chose de mieux

Qui pointait dans sa chemisette,

Etant donné que j’suis pas d’ bois

Ces trésors me mirent aux abois

Et je lui jurai, sur ma foi

Un amour qui n’a pas de bornes.

 

Son mollet m’a paru bien fait

Et sa petit’ bouch’ qui riait

Avait un parfum qui m’grisait

Jusqu’à m’en faire perdre la tête

Mais la mâtine me rit au nez

Et m’dit « monsieur, vous plaisantez

Nous r’causerons d’ , quand vous aurez

Au menton, quelques brins qui l’ornent ».

 

Bah ! Que j’lui dis, si ce n’est qu’çà

Qui vous chagrine, mon petit rat

Je connais quelqu’un pas loin d’là

Qui fera sûr’ment votre affaire

Car lui, malgré qu’il n’ait qu’ vingt ans

Port’ tout’sa barbe crânement

C’est un gaillard, assurément

J’vous l’enverrai, c’est mon p’tit frère !

 

(*) : Ni le 10e RI, ni le 27e RI ne se trouvent à Taillancourt, mais cela s’explique car il est au 9e bataillon du 10e RI qui se trouve en arrière du front.

 

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Ceux de la Classe 16.

(Sur l’air de la marche Lorraine). Décembre 1915

 

Nez au vent, l’air déluré, l’ casque en bataille

Quand nous défilons en chantant un refrain canaille

Dans tous les patelins, chacun se dit Cristi

Les jolis conscrits

Depuis quatorze mois on ne s’amuse guère

En marchant on a fait six fois le tour de la terre

Et en manœuvrant, on a, j’ crois même aussi

Hissé nos fusils

 

Refrain

C’est nous les gars de la classe seize

Les cadets d’ l’armée Française

Au cri de « Vive la France ! »

Quand on nous invit’ra pour la danse

La baïonnette au derrière

Les sortant de leurs tanières

Nous pouss’rons à la frontière

Tous ces sales croquants d’allemands

Tambour battant

 

2nd

Quand sac au dos, fourbus, sur la route on s’ traîne

Pour chasser l’ennui, l’cafard, et nous remettre en veine

Tout à coup on entend la voix d’un copain

Qui pousse un refrain

C’est presque toujours le même que l’ vent nous apporte

Mais du moment que ça fait marcher, peu nous importe

Et puis dame ! Ici tout le monde ne peut pas

Chanter d’ l’Opéra.

 

Au refrain

3ème

Bientôt là-bas, nous irons voir où ça cogne

Et l’on y fera mordious, de la belle besogne

Faudra bien un jour, qu’ les sujets du Kaiser

Nous en jouent un air !

Pour couvrir le bruit du canon et d’ tout’ la mitraille

Au plus fort de la mêlée et pendant la bataille

Pour qu’aucun de nous autres, jamais n’ait peur

On chant’ra en chœur.

 

Au refrain

Sur l’air du « Petit Grégoire » de Botrel

Bois des J. le 18 mai 1916

 

Après trois jours de voyage

Nous voici rev’nus

Dans un délicieux cottage

Plus près des obus

Armés de pioch’ et de pelles

Dans notre maquis

D’une ardeur toute nouvelle

Nous creusons, hardi ! Hardi !

Hardi ! Les amis

 

2nd C.

Sous nos coups furieux, la terre

S’ouvre en trous profonds

Nous couvrons l’ bruit du tonnerre

Et d’ tous les canons.

Parfois même, pour nous distraire

Et faire plus de chambard

Comme à la fête, naguère

Nous allumons un pétard

Pour faire du chambard

 

3ème C.

Ici, près de l’observatoire

On fait d’ temps en temps

Comme jadis à la foire

Un tour d’ toboggan

Puis pour terminer la fête

Et nous r’mettre en train

On se tape un peu la tête

D’une croûte avec les copains

Avec les copains

 

4ème C

Une fois dans la semaine

Pour nous dérouiller

Les jambes, l’on nous emmène

Un peu patauger

Pour qu’il y ait plus de charme

On prend des chemins

Où sans doute même un gendarme

Y laisserait ses brodequins

Tout comme les copains !

 

5ème C.

L’commandant est un chic type

Qui n’est pas gênant

Aussi, fumant notre pipe

On s’installe souvent

Tout autour de lui, on s’ range

Pour mieux l’écouter

Il nous dit, chose étrange

Que la guerre peut pas durer

Tout’ l’éternité.

Fleur fanée…fleur aimée

Bois de P. le 17 juin 1916

 

Mieux que tous les bouquets, votre petite rose

M’a ravi et grisé, j’ai bu tout son parfum

Lentement, lentement, il avait quelque chose

De tous et cependant n’en ressemblait aucun

Chérie je sais pourquoi ou du moins, je devine

C’est qu’amoureusement, vos lèvres ont touché

Cette petite fleur ; votre bouche câline

Dessous chaque pétale a mis un long baiser !

Je veux la conserver, jalousement cachée

Comme si je gardais un précieux bijou

La respirant plus tard, bien que toute fanée

J’y trouverai toujours quelque chose de vous !

Lorsque je souffrirai, pour apaiser ma fièvre

Alors je la prendrai et je serai guéri

Ma bouche en s’y posant, cherchera votre lèvre

Et le divin parfum que vous y avez mis.

On ne s’en fait pas

Bois de P. le 20 juin 1916

 

Comme vous j’ai maudit la guerre

Je me trouvais très bien chez moi

Je payais mon propriétaire

J’étais heureux autant qu’un roi !

J’ai changé d’avis à présent

Et pour moi ce serait dommage

De faire la paix maintenant !

Autrefois, j’avais fait le rêve

De vivre un jour, en vrai bourgeois

Mais hélas, je peinais sans trêve

Sans m’enrichir beaucoup, je crois !

Mais à présent, c’est autre chose

Sans travailler, je vis très bien

C’est l’existence tout en rose

La bonne vie : on ne fait rien !

J’ai tous les bois comme domaine

Et comme château ma cagna

Matin et soir, je me promène

Des soucis ! Je ne m’en fais pas !

Une seule chose m’ennuie

C’est que j’ai de mauvais voisins

Qui ont la coupable manie

De détériorer mes jardins !

A chaque instant de la journée

Ils m’envoient quelques gros obus

Qui, non loin de ma cheminée

Passent, en faisant du chahut !

Ils ne m’ont pas fait grand dommage

Jusqu’à ce jour, mais les bandits

Pour taper avec tant de rage

Ne méritent pas mes « mercis » !

Il est vrai, ça je le confesse

Que souvent nous faisons comme eux

Pour leur rendre leurs politesses

Nous leur en f …. plein les yeux !

On leur envoie à domicile

Gratis, quelques colis postaux

Mais nos envois sont si fragiles

Qu’ils les reçoivent en morceaux !

Les amis que j’invite à table

Me quittent tout à fait ravis

Car le menu est confortable

Et le couvert est bientôt mis !

Ayant reçu force marmites

Je suis on ne peut mieux monté

Aussi, le service va vite

Potage, rôti et café !

Mais hélas, la chose est bien connue

Mon cellier n’est pas très bien garni

Aussi chers amis que d’eau bue (d’obus)

Faute d’avoir du bon Chablis !

Une ta..be, à l’instant passe en trombe

Et l’animal, pour s’amuser

Sur ma cagna, lâche une bombe

Glacée, c’est mon dessert, pardié !

A cause de cet imbécile

Forcément je suis obligé

De transporter mon domicile

En quelque coin mieux abrité !

Je vous jure qu’avant une heure

J’aurai trouvé ce qu’il me faut

Et de ma nouvelle demeure

Je saurai me faire un château !

Comme la guerre se prolonge

Dame !il me faut bien tout prévoir

Pour cet hiver prochain, je songe

A m’installer même un fumoir !

Sitôt mon installation faite

J’enverrai des invitations

Jamais chez moi on ne s’embête

On goûte de vrais émotions !

Oh ! Vous, embusqués que j’admire

Exprès pour vous, j’ai réservé

Un petit coin, où l’on peut lire

En fumant, le communiqué !!!

Pour Eux

Bois de P. le 21 juin 1916

 

C’est donc pour vous, les rois, pour vous ô pales princes

Que des hommes vont s’entretuer

C’est donc pour la conquête de quelques provinces

Que nos enfants sont égorgés !

C’est donc pour vous aussi, les rois de la Finance

Que depuis deux ans, l’Univers

Accepte les dangers, la mort et la souffrance

Et fait de la terre un enfer

C’est donc pour vous aussi, brutes galonnées

Pour vous gagner d’autres galons

Que nos petits soldats sortent de leurs tranchées

Et bouchent la gueule aux canons

C’est donc pour toi aussi, religion sacro-sainte

Que tous nos bras se sont armés

C’est au nom de l’amour qu’on entend une plainte

Monter à chaque instant des sillons dévastés,

C’est donc pour tous ceux-là, que chaque jour on forge

Encore et toujours des canons

Liberté, tu permets ainsi que l’on s’égorge

C’est sans doute aussi, en ton nom !

Cocorico..(ou son rêve)

Bois de P. le 23 juin 1916

 

Dans ton rêve insensé, tu croyais ô Guillaume

De la France vaincue agrandir ton royaume,

Faisant taper ta botte aux brillants éperons

Tu partis à la tête de tes bataillons.

Mais la France veillait, et tes hordes sauvages

Mettant partout le feu, et vivant de pillages

Ont su à qui parler dès les premiers combats

Elles ont rencontré tous nos braves soldats

Mais rien que des soldats, et non pas des brigands

La France n’a jamais rougi de ses enfants !

Tandis que ton Kronprinz, lui, s’est fait dans l’histoire

Le bien triste renom de monte-en-l’air notoire !

En vain tes bataillons, en un suprême effort

Voudraient reprendre pied, mais reculent encore

Tu te voyais déjà, et tout ton équipage

Parader dans Paris, pour t’y faire acclamer

Mais tu rêvais encore ! Ce n’était qu’un mirage

Paris ne pouvait pas par toi être souillé

Joffre t’attendait là, montant la bonne garde

Pour te bien recevoir ! Ça n’a pas été long

Nos poilus t’on fait voir en fumant leur bouffarde

Qu’ils ne te craignaient pas ! Notre petit canon

Que tu prenais pourtant pour un fume cigare

A eu, ma foi, tôt fait d’arrêter tes élans

Il chantait clair, et ses obus, sans crier gare

Tombaient drus comme grêle. Et tes fameux uhlans

Qui pensaient galoper ainsi qu’à la parade

Ont mordu la poussière et rebroussé chemin

Non ! Tu ne devais pas faire la cavalcade

Longtemps ainsi ; à ta course il fallait une fin

O moderne Attila ! Tes généraux, sans doute

N’avaient pas tout prévu. Dame ! On peut se tromper

Jamais ils n’auraient cru connaître la déroute

Eux qui avaient si bien savamment préparé.

Depuis, tes fiers soldats, ainsi que la vipère

Qui se cache en un trou, se sont vite creusé

Des abris, et alors, du fond de leur repaire

Ils attendent que nous allions les débusquer

Vrai, il n’est pas besoin de beaucoup courage

Pour se terrer ! C’est face à face qu’on se bat

Mais tes bandits ont peur, ils n’ont que de la rage

La bravoure chez vous, on ne connaît pas ça !

Alors pour vous venger, vos instincts de Vandales

De vous tous ont fait de cyniques bandits

Prenant pour cible les flèches des cathédrales

Vos canons en ont fait d’innombrables débris.

Vos bestiales passions, encore inassouvies

Vous ont poussé à pire, au crime et au forfait

Nos femmes ont subi de vos lèvres impies

L’immonde attouchement et le baiser abject !…

Méprisant à l’envie les traités en usage

Vous avez même osé noyer des innocents

Vos marins ont écrit, la plus honteuse page

Qu’on lira dans l’histoire, ô sinistres forbans !

Après ça vous avez encore l’impudence

De feindre la pitié, et prenez à témoin

Le ciel, votre vieux dieu, vous parlez d’innocence

Quand vous êtes maudits ! Vous n’y songez dons point !

Guillaume l’assassin, le monde entier se lève

Le poing dressé vers toi, et ton règne s’achève

Dans un vol éperdu, les ailes fracassées

Tes noires aigles fuient au loin effarouchées !…

Entends là-bas ce chant que t’apporte l’écho

Du coq gaulois ! C’est le joyeux Cocorico.

Epître qu’un poux envoie à une élégante dame

Tranchées de N. le 29 juillet 1916 (*)

 

Depuis longtemps déjà, Madame

A vous écrire j’ai pensé…

Hélas, à mon nom, toute femme

Frémit d’horreur ! Ô préjugé !

Pourtant vous supportez, ma belle

Vous ne pouvez pas dire non !

Que dans vos rubans de dentelle

La puce établit position

 

Nous sommes de même famille

Ne vous déplaise ! C’est ma sœur

Mais parce que c’est une fille

Elle a su toucher votre cœur !

Vous permettez à la coquine

De se cacher dans vos jupons

Et qu’en s’amusant, la mâtine

Jette des regards polissons

 

Même (la faveur n’est pas mince)

Sans trop récrier, bien des fois

Vous acceptez qu’elle vous pince

Tout à elle est permis ! Pourquoi ?

Eh bien, je crie à l’injustice

Que diable ! Je le crie bien fort

Oui, vous encouragez le vice

Ma belle et ça vous avez tort.

 

Rappelez-vous belle marraine

Quand arriva votre poilu

Qui venait passer sa semaine

Auprès de vous ! Vous avez su

Le rendre heureux, le brave gosse

Arrivant tout droit de Verdun

Oubliant la guerre féroce

Il fut content comme pas un !

 

Quand vous vîtes sur sa poitrine

Briller la croix de nos héros

Votre voix se fit plus câline

Un baiser lui cria « bravo ! »

Puis alors dans votre chambrette

Le conduisant comme un gamin

Vous lui fîtes faire toilette

Il s’habilla de linge fin.

 

Devant cette métamorphose

Le pauvre resta confondu

Il sembla regretter la chose

Qui faisait de lui un poilu !

C’était sa chemise plus sale

Que le plus vieux de vos torchons

Son caleçon de teinte pâle

Sa défroque, ses pantalons !…

 

Dans ce tas de vielles guenilles

Il laissait tant d’heureux instants

De regrets ! Oui tout ça fourmille

Dans ces chiffons si répugnants

C’est aussi sous cette défroque

Madame, que je partageai

Son sort !et c’est pourquoi j’invoque

Le droit de me faire admirer !

 

Vieux briscards, à la barbe grise

Tout comme le petit conscrit

Vous diront, ma belle Marquise

Que je suis leur meilleur ami !

 

 

(*) : Depuis le 21 juillet 1916 Lucien est au 359e régiment d’infanterie, qui est secteur Verdun.

Fleur des tranchées

En ligne, le 27 août 1916

 

Parmi l’herbe à demi hachée

Par la mitraille et les obus

Une fleur se tenait cachée

Vers elle, mon bras s’est tendu

Pour vous, j’ai violé sa cachette

Alors j’ai vu qu’elle pleurait

Sur mes doigts, une gouttelette

De rosée humide, coulait !

C’était un bluet, son bleu tendre

Est pareil à celui des cieux

C’est l’azur à s’y méprendre

Celui que j’ai vu dans vos yeux !

Il est parti à votre adresse

Ce sera mon doux messager

Vous y trouverez la caresse

Dont mes lèvres l’ont effleuré !

Témoin de nos heures moroses

Petit bluet !tu diras tout

Va ! Tu peux raconter les choses

Que tu as vues ici, vers nous !

Montre l’horreur de la mêlée

Lorsque dans la nuit, on se bat

Sans voir, sous la lune voilée,

Dans la neige, sous le frimas !

Redit la chanson qu’on fredonne

Parfois pour dissiper l’ennui !

Dis que lorsque le canon tonne

On sait chanter plus fort que lui !

Ah ! Dis surtout que l’espérance

Reste malgré tout en nos cœurs

Que bientôt de la chère France

Les drapeaux flotteront vainqueurs !

Le poste d’écoute

Poste d’écoute n°8, le 14 septembre 1916

 

C’est un trou devant la tranchée

Un peu de terre remuée

Par la chute d’un gros obus

Tout juste grand pour qu’un poilu

S’y tienne !

Sitôt que du soir tombe l’ombre

On peut voir une forme sombre

Doucement, sans bruit, s’y glisser

Gare au boche mal avisé

Qu’il vienne !

Le guetteur donnera l’alarme

Il a déjà pointé son arme

Tout à coup, un éclair a lui

Son œil alors, fouillant la nuit

Regarde

Tout à ses pieds le plomb ricoche

Tandis qu’un léger bruit s’approche

D’un bond il est sur l’ennemi

Comme à la parade, il s’est mis

En garde !

Jour des morts

M… Le 2 novembre 1916

 

L’automne a déjà jeté sur la terre

Son sombre manteau d’ombre et de mystère

Sur tous les chemins le vent qui gémit

Jette sous nos pas un épais tapis

De feuilles.

Après les buissons, plus de vert feuillage

Les oiseaux ont tu leur gai babillage

Les jardins n’ont plus leurs vives couleurs

Car sous l’aquilon, le reste des fleurs

S’effeuillent.

Au petit clocher, une cloche tinte

Et son carillon semble être une plainte

C’est le jour des Morts, jour du souvenir

Au champ du repos, on voit accourir

La foule.

La plus humble pierre est encore fleurie

Car pour remplacer la gerbe flétrie

Une main a mis un nouveau bouquet

Une larme vient sous le voile épais

Et coule !

Bébé à Noël. À petit Georges

Conty le 24 décembre 1916

 

 

Ce poème « Bébé à Noël. À petit Georges » a été présenté par Yanis K., élève en troisième dans le cadre d’un devoir de français. Merci à lui de l’avoir choisi.

 

Tout comme autrefois, dans la cheminée

Bonhomme Noël, viendra cette nuit

Et, lorsque la cloche à toute volée

Chantera Noël, petit Géo dis-lui :

Bon petit Jésus, je veux comme étrenne

Non plus des jouets, non plus des bonbons,

Mais ce que je veux, c’est que tu comprennes

Sans qu’on te l’ait dit, ce que nous voulons !

Depuis trop longtemps je vois pleurer mère

Car petit papa n’est point revenu !

Pourtant chaque soir, dans une prière

Je te réclame, ô gentil Jésus !

Ah si tu savais, comme la tranchée

Est triste le soir par ce vent glacé !!!

Papa nous l’écrit, sa lettre est mouillée

Parfois, on dirait qu’il a bien pleuré ?…

Bon Noël, fais que le canon

Se taise bientôt, tu n’es pas méchant ?

Reprends tes jouets, tes bonbons, mais donnes

Mon petit papa, je serai content !!

Pour vous

Laval (*). Le 28 septembre 1917 (**)

 

J’irai pour vous, au bout du monde

Si vous me dites d’espérer

Je remuerai le ciel et l’onde

Si de vous, je sais être aimé !

Car je veux pour vous, mes mains pleines

D’or, et des bijoux les plus beaux

Je veux vous voir comme les reines

Le front constellé de joyaux !

 

De vos mille feux qui scintillent

Jolies étoiles du ciel bleu

Je ferai des colliers qui brillent

Et des diadèmes de feu,

Puis, au temps où le soleil dore

Des blés les épis frémissants

J’en prendrai les rayons encore

Pour en tresser de longs rubans.

 

Parmi les fleurs à peine écloses

Au souffle embaumé du printemps

Je cueillerai toutes les roses

J’en prendrai le parfum troublant

Puis, les papillons qui lutinent

En voltigeant de fleurs en fleurs

Me prêteront leurs ailes fines

Chamarrées de vives couleurs !!!

 

(*) : Laval-sur-Tourbe (51).

(**) : Depuis le 21 avril 1917 Lucien est au 164e régiment d’infanterie, qui est dans la Marne.

 

Sonnet à ma pipe

Laval, le 16 octobre 1917

 

Tu sais, d’une bouffée, rendre l’âme gaillarde

Et c’est en te serrant entre mes doigts transis

Que je ris du froid, tout au fond des gourbis !

Aussi je t’aime bien, ô ma bonne bouffarde !

Lorsqu’en volutes bleues s’envole ta fumée

Une douce gaîté revient prendre mon cœur

Je songe au beau passé, aux longs jours de bonheur

Que j’ai vécu jadis près de ma bien aimée.

Dans mon cruel exil, tu es ma douce amie

C’est à toi que j’ai dû, même aux plus tristes soirs

De conserver toujours mes suprêmes espoirs.

Sois donc, petite pipe, à tout jamais bénie.

Car si j’ai le cafard, ainsi que tous les hommes

Grâce à toi, oh jamais ! Je crois, cafard n’a homme !

La fin du tank

Courcelles, le 4 juillet 1918

 

Sous l’ouragan de fer qui s’abat sur la plaine

Le tank bondit plus fort, fantastique bélier.

Il va droit devant lui, roule sans prendre haleine,

Crachant de tous côtés des rafales d’acier.

De trou en trou, de tranchée en tranchée

Il va, semant la mort dans les rangs ennemis.

Tour s’écroule sous lui ; dans l’horrible mêlée

Sa masse confond tout dans les mêmes débris !

Puis le voilà, soudain, Qui se cabre et s’arrête

Un obus, dix obus l’on frappé droit au cœur…

Dans ses flancs entr’ouverts, son gros moteur halète

Mais avant de mourir, il lance un feu vengeur !

 

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