Mise à jour : Février 2019
Joseph
RAIDL et sa famille. On distingue un chevron de blessure sur sa manche
Merci à Marie-Thérèse pour le carnet de son
grand-père.
Joseph RAIDL, employé de commerce, est né à Paris en mars 1881. Il effectue son service militaire au 102e régiment d’infanterie.
En 1914, Joseph Raidl,
Marguerite Gosset et leur fille
Madeleine habitaient à Paris. Dès le tout début de la guerre, Joseph est
rappelé, il a 33 ans. Il doit intégrer logiquement un régiment territorial ou
un régiment de réserve. Il est « affecté au régiment d’infanterie de
Chartres-Paris »
Le 11 août, il s’embarquait à Paris à destination de Sens. Il intègrera officiellement le 168e RI mi-septembre 1914.
Son carnet couvre les mois d’août à décembre 1914.
Joseph RAIDL au
102e régiment d’infanterie 1902-1904
Tout
ce qui suit est textuellement écrit par Joseph. Les noms de villages ont été
corrigés et l’ajout de texte en bleu est fait pour la compréhension de certains termes et
pour aller « plus loin » dans l’analyse du récit.
Une trentaine de photos ont été trouvées dans son carnet. Aucune indication, ni de date, ni de lieu.
Voir sa fiche matriculaire ici.
Grace à la « magie »
d’internet
En mars 2018 un internaute, Bertrand, a retrouvé la même photo laissé par son grand-oncle, Edmond WEINBRENNER, sur laquelle figure Joseph RAIDL et Edmond en janvier 1915 lors de leur convalescence à Lyon…
Extraordinaire ! Précisions dans le récit.
Commence le 11 août 1914
Wagon bestiaux. Retrouvé deux copains : Prost, le dessinateur du Mans, Bigard et quelques autres du 102.
Arrivés à 5h10 à Sens. Sur le parcours,
rafraîchissements.
Dames de la croix (..?…)
(Mot
illisible), particulier.
Arrivés à la caserne, reconnus et emmenés à notre cantonnement.
Fait connaissance d’un jeune homme idées correspondantes. Faisons route ensemble. Cantonnement rêvé, sites merveilleux…
Dîner champêtre au bord de l’eau. Couchage passable, peu de paille.
12-0814 - Réveil de bonne heure après avoir été
réveillés toute la nuit par de nouvelles arrivées.
Puis
après-midi, habillage sommaire avec vieux effets.
Sieste toute la journée sous les arbres. Déjeuner
et dîner toujours champêtre, sortie en ville pour emporter les effets civils,
rentrés vers 6 heures…
Couchés vers 8h30, meilleure nuit.
À 1h ½, arrivée d’une trentaine de nouveaux.
Réveil et lever 5 heures.
Bon café. Toujours sans nouvelles de Paris.
Sortie à 10 heures pour déjeuner en ville. Grande rue, petit restaurant. Rentré vers 12h.
Après-midi,
petit exercice de 3 à 4h. Baignade dans la Vanne, eau fraîche excellente
courant fort.
5h sortie, dîné en ville, enfin retrouvé Guillemard qui m’annonce la mauvaise
nouvelle du décès de son bébé. N’ai pas
encore vu M Marin.
Difficulté à trouver à manger, tous les restaurants bouclés.
Enfin, Place Victor-Hugo, petit restaurant, patron genre Bruant. Rentrés vers 8h ¼.
Pas de lettres toujours de Paris. Jusqu’à présent
écrit 3 lettres.
Bonne nuit, bien dormi.
Réveil 5h. Organisé la compagnie. Le premier peloton reste au moulin.
Je suis de la 2eme section, 6eme escouade, reste voisin de lit de Lecanu. Nous nous entendons toujours bien, partageons nos provisions en copains.
Partons à l’exercice vers 9h 1/4.
Revenons vers 10h. Déjeunerons au cantonnement.
Après le repas, à 2h, exercice près de l’Yonne.
Le soir,
repas et promenade en ville. Concert vocal près du cantonnement.
Demain, revue par un général. Après-midi,
cherchons fusils, Archenichi (*).
(*) : Illisible
Réveil 5h.
Ce matin à 9h, revue par un général. Troupes bizarres, accoutrements grotesques, chapeaux de paille, etc. Pluie diluvienne.
Le général arrive à 11h. Cause avec Marquès en attendant.
Après le déjeuner, rapport toujours sans lettres.
Un premier détachement est organisé pour aller à Pont-sur-Yonne
pour garder les voies probablement.
(*)
Puis exercice et rentré vers 4h. Souper et sortie en ville.
(*) :
S’il va garder les voies de communications, c’est qu’il est dans un régiment
d’infanterie territoriale
Lever 5h, exercice agréable.
Soupe, rapport, enfin ma première lettre.
Après-midi,
repos, le roi soupe en ville…
Lundi matin, exercice tirailleurs, après-midi exercice campagne, pause jusqu’à 4h.
Le soir,
commandé de corvée à la manutention. Très intéressant : fabrication du pain
pour les troupes, brûlage du café, wagons etc. etc. Passé la nuit sans pluie
heureusement.
Rentré au cantonnement vers 7 heures, exempté d’exercice le matin et l’après-midi, je n’y suis pas allé.
Le soir,
dîné en ville.
Rencontré Guillemard
et donné rendez-vous pour jeudi dîner ensemble si possible.
Réveil 5h, passé la revue des chaussures, ai eu 12 f pour les miennes, beaucoup les ayant payées 25 f et plus ont eu de 10-13.
Rien d’important
Reçu télégramme pour chercher Marg. (*)
Le soir,
dîné en ville avec Marg. et
Nelly. (**)
(*) : Marguerite GOSSET, son épouse. (**) : Nelly
est la sœur de Marguerite. La belle-sœur de Joseph.
Rien d’important.
Le soir,
dîner en compagnie de Dufour et
Jules crus.. (*)
2 ponts.
Bonne soirée avec Marg. et Nelly.
(*) : Illisible
Le matin, marché vers la chapelle, passé devant Marg.
Rencontré Marg. et Nelly au retour allant prendre leur train. Bonne surprise.
Grande marche de bataillon 29 km, véritable promenade sous la direction du commandant.
Retour vers 17h30.
Après-midi,
repos.
Le matin, corvée à la manutention. Wagons de pain 4 fois 5000.
Après-midi,
petit exercice à plat ventre.
Le matin, repos mais défense de sortir avant 5 heures.
Le soir, emmené Martin dîner en ville et visité la cathédrale, monté au clocher sous les cloches. Point de vue superbe.
Vu également le trésor.
Dès le réveil, nommé fonctionnaire cap. de jour (*) par Servais et rempli ces fonctions toute la journée. Corvées de quartier de lavage, etc…
Ai un fonctionner le moulin, très intéressant comme mécanique.
(*) : Caporal de jour
Le matin, petit exercice marche rentré vers 9h.
Promenade St-Clément. (*)
Après-midi,
corvée de lavage des effets No 3 pour les rendre pour habiller les bleus qui
vont arriver.
Le soir,
marche de nuit ; départ à 9 heures vers la Chapelle St Bon.
Manœuvre intéressante.
Retour à 24h environ.
(*) : Village de la banlieue de Sens (Yonne) et
cantonnement d’une partie du 33e régiment d’infanterie territoriale. Peut-être que
Joseph faisait partie de ce régiment. Tout son récit jusque mi-septembre le
laisse à le croire : lui et son escouade font des travaux qui correspond
aux territoriaux : Gardes de voies, creusement de tranchée, travaux en
garde, corvées diverses…Dommage que le JMO (Journal des Marches et Opérations)
du 33e RIT n’existe plus !
Lever 8 heures.
Déménagement du Moulin Domange à l’usine Bazin.
Le soir,
dinant en ville, nous apprenons que nous allons probablement partir
incessamment.
Rentrons vers 8 heures. En effet, on nous équipe,
donne 120 cartouches à chacun.
Nous partons à
2h1/2 du matin, à moitié équipés, sans gamelles ni bidons etc.
Nous marchons toute la nuit puis le jour en plein
soleil. Journée très fatigante vers Plessis-du-Mée.
Notre cantonnement est 2,8 km plus loin à Courceaux.
Départ vers 5 heures, à moitié reposés.
Traversons quelques villages à particules. Fontaine-Fourche. Les habitants (S et M) nous attendent avec des seaux de lait, des œufs, des pommes, du vin ! Etc. etc. très accueillants.
Puis arrivons à Traînel où nous devons cantonner le soir. Nous sortons de Traînel pour aller faire des tranchées. À 1km 1/2 dans des champs face à la vallée de la Lève, direction de Paris.
Nous sommes restés jusqu’à 5 heures du soir, puis
rentrés à Traînel pour coucher. Grange d’arr(ièrre) épicerie.
Ce matin en passant à Fontaine-Fourche, on
nous a fait défaire un paquet de cartouches.
Réveil à 4 heures, départ à 5 heures avec outils ; faisons tranchée dirigée vers est-nord-est. Depuis ce matin, entendons le canon sans discontinuer et fusillade ?
La veille, des évacués racontent que vers Montmirail la fusillade ne discontinue pas ?
2 cyclistes du 5ème de Verdun égarés sont échoués
à Traînel la nuit. Des espions ont été arrêtés vers les tranchées. De
loin, nous apercevons des quantités d’émigrants avec des voitures chargées de
meubles, des brouettes, etc. C’est lamentable !
Nous travaillons à établir un formidable camp
retranché sur un front d’une vingtaine de km. Le temps, un peu brumeux le
matin, s’est levé cet après-midi et il fait un soleil croissant.
À peine avons-nous terminé la 1ère tranchée qu’un
capitaine nous dit de terminer vivement et de percer porte sur la droite pour
en faire une sécurité. Nous y allons et à peine arrivés, on nous signale
l’armée allemande en déroute de notre côté. Nous nous mettons aussitôt en
position pour bien les recevoir, mais quelle déception ! Une erreur du
capitaine lui avait fait prendre un bataillon à nous pour l’ennemi !
Les coups de canon ne discontinuent pas et nous
rentrons au cantonnement à Traînel où sont arrivés des régiments de
toute provenance.
Nous partons le matin faire une tranchée dans la direction de Fontaine-Fourche. Joli coin. Corvée d’eau, déjeuner champêtre puis … dans un petit bois au frais ombragés.
Restons au même cantonnement à Traînel mais S dans une autre grange.
Arrivée et départ du 57ème de Narbonne tous joyeux avec leur gourde de peau. Un des leurs endormis sur la route ne veut rien savoir pour partir.
Départ de Traînel à 5 heures du matin vers Sergines où nous devons faire une autre tranchée…
Rencontré des émigrés se dirigeant vers le retour au foyer du côté de Montmirail, Provins, Coulommiers, etc. Chaleur excessive.
Le matin au rassemblement, lever de soleil merveilleux.
Arrivés à la grand-halte,
2 soldats anglais, égarés probablement, marchent avec une autre compagnie du
bataillon. Tous déshabillés pour se sécher. Départ à midi pour faire une
tranchée.
Arrivés à Sergines pour cantonner. Joli
pays.
Sommes cantonnés chez M Denisiet, maréchal-ferrant, 84 rue des Treilles. (*)
Deux gentilles petites filles, Renée et Germaine,
me prennent pour leur papa parti à Gien.
Pour dîner, préparé par Martin : 2 lapins avec un flan très réussi.
(*) : La maison existe
toujours. Vous pouvez la visualiser sur google maps.
Départ à 5 heures à 2 kilomètres pour faire la dernière tranchée avant le retour à Sens qui est décidé pour le lendemain. La tranchée est terminée de bonne heure, on a fait la grand-halte avec café, etc…
Menu : thon, sardines viande, primeurs, etc…etc…
Rentrés à Sergines vers 1h, astiquage des
armes. Orage, trombes d’eau, nous sommes à couvert sous la grange.
Martin
nous confectionne un menu soigné : poulet, salade… hors d’œuvres etc. etc.
Fromage, café, pousse-café. Le sergent Suey
assiste à la soirée.
Puis préparation de départ pour le lendemain.
Dans la
nuit nous entendons un bataillon du 89ème qui part à 2 heures. (*)
(*) : Une partie du 89e régiment d’infanterie d’active
est cantonné à Sens.
Lever à 4h au clair de la lune puis départ. Rassemblement dans un champ à 1 km. Temps frais, agréable à la marche.
Nous croisons des quantités d’émigrés qui retournent chez eux. Pauvres gens, ils disent aller voir les pots cassés.
La marche ne sera pas pénible car la route est plate et nous apercevons la cathédrale de Sens à 18 km.
Nous rejoignons la route de Lyon et faisons une halte de ¾ d’heure pour casser la croûte à Saint-Denis. (*)
Rentrés à Sens, nous retournons à Domange, les bleus sont arrivés et sont curieux de
nos équipements et de leur poids ! Nous passons l’après-midi à flâner,
nous reposer.
Martin
lave notre linge car il est grande question de repartir de nouveau vers une autre
direction. On parle de Sézanne sur la ligne de feu, d’Anvers etc. etc. On parle
aussi d’aller enterrer des morts sur le champ de bataille, enfin, somme toute,
personne ne sait rien.
En attendant, nous mangeons la soupe et vers 6 heures, nous retournons coucher à Bazin.
(*) : Saint Denis-lès-Sens
Réveil à 5 heures.
Il est question de faire une marche militaire, toujours des rapports fantaisistes, mais des ordres sont arrivés et nous devons constituer une compagnie de 250 hommes sur pied de guerre…
Cela devient sérieux… Les caporaux s’occupent de ce qu’il manque aux hommes. La journée se passe dans l’attente. Il faut que nous nous tenions prêts à partir d’une minute à l’autre.
Vers le
soir, on se décide à nous former par escouades et, sans lumière, on
distribue le campement. On finit par aller se coucher à Bazin vers 8
heures. Nous devons nous trouver à Domange le
lendemain à 6 heures.
Le soir,
préparatifs de départ définitif éventuel.
L’attente continue, nous errons dans la cour de Domange. Il pleut, brouillasse, le temps a l’air de se gâter.
Au rapport, on nous annonce une revue du Général Nouy (*) pour 8 heures.
On continue à nous équiper. La veille, nous devions toucher 6 jours de vivres.
Ce matin tous ces vivres sont retournés au magasin à 4 heures. Nous flânons toujours à droite et à gauche en attendant…à 12h30, nous nous apprêtons pour la revue annoncée.
Le temps est menaçant. Nous nous installons sur la promenade comme à la précédente…
Une fois terminé, vers 2h ½, nous rentrons déposer nos armes et bagages à Bazin
puis allons à Domange sous la pluie qui
commence à tomber sévèrement et la température rafraîchit.
On nous distribue les lettres. Je reçois la No 13,
la 11 est restée en route !... Mes cartes n’arrivent
toujours pas, c’est désolant. Je vais en réécrire une de suite.
Il est 4h., la pluie
continue toujours. Nous mangeons le souper et retournons à Bazin. Nuit
froide, pieds froids mal couverts.
Pour demain, marche militaire à 6h30 à Domange 12 km, pourquoi faire ?
(*) : Illisible
Réveil 5 heures. Tenue de campagne. Arrivés à Domange, nous prenons le café.
Précipitamment rassemblement. On demande 36 volontaires pour convoyer un train régimentaire vers l’est. (*)
Aussitôt nous nous présentons, toute l’escouade, tous les amis et nous sommes trop mais nous partons tous tout de même ensemble. Quelle heure de départ, nous ne le savons pas. Les autres partent en marche.
LECREUX et Péres, les courageux, sont fourrés (**) dans la cuisine à Mme Révolat.
À 10h ½,
la soupe, puis ordre d’être prêts à 12h ¼.
Distribution des vivres pour 4 jours. Nous sommes
chargés comme des mulets. Je pèse 90 kg tout équipé.
Nous partons à 1 heure vers la gare de Sens-Lyon,
nous sommes embarqués et le train se dirige vers Dijon pour de là,
remonter vers Lys-sur-Tille probablement.
Nous rencontrons des quantités de trains de toute
composition de l’artillerie, des fantassins tout sales revenant du feu, etc.
etc. des zouaves, des hommes du midi etc. etc.
Passons à Joigny, Tonnerre arrivons à Dijon à 10h ½ du soir. Nous avons réussi à nous réunir dans un compartiment. Envoyé une carte laconique de Tonnerre. Nous faisons une grande pause à Dijon
Après avoir passé la nuit dans le train, nous arrivons à Nancy à 9 heures du matin.
(*) : Curieuse cette demande, car à cet instant
Joseph ne sait pas qu’il va intégrer le 168e régiment d’infanterie…et partir en
première ligne. À son âge, 33 ans, il doit théoriquement rester dans un
régiment territorial ou un régiment de réserve, au moins au début de la guerre.
(**) : Sont présents
Par un beau soleil après un temps épouvantable de la nuit pluie diluvienne, vent très fort et température fraîche, il pleut dans le wagon.
Nous formons les faisceaux (*) dans la cour en attendant des ordres de la place.
Les Nancéens viennent nous voir à travers les grilles et nous racontent leurs transes. Les prussiens sont venus les bombarder durant la nuit du 9 au 10. Il faisait de l’orage, du vent bref, un sale temps. Les Allemands ont amené un autre blindé avec de grosses pièces de siège et ont bombardé la ville pendant ¾ d’heures juste le temps pour les repérer et les faire déguerpir. Ils sont maintenant repoussés assez loin. Il paraît qu’ils ont évacué Lunéville.
En attendant, nous ne savons pas ce que l’on va
faire de nous. Les tramways marchent ici et les gens paraissent calmes
Puis nous sommes conduits à une caserne à Essey-lès-Nancy,
faubourg de Nancy. Nous passons
devant l’usine Fruhinsholz.
À notre arrivée, nous voyons le reste du 168e qui a soutenu un rude combat vers le bois de Champenoux et qui a été fortement éprouvé. (**)
Tous les revenants sont couverts de boue des pieds
à la tête et racontent les péripéties du combat, mais sans tristesse avec
l’idée d’y retourner.
Tranchées eau boue jusqu’à la tête
Fausses tranchées, fils de fer. Tranchées prises en enfilade, blessés et morts. Plaintes blessés abandonnés, etc.
Le soir,
nous sommes affectés à la
3e compagnie et nous à la 14e escouade.
Le capitaine Bégoud
nous commande, paraît sévère mais juste et calé en matière militaire. Je suis
bien tombé car un bon chef, c’est tout.
Pour le souper, nous nous installons dans la cour.
Le soir, revue en tenue de départ puis coucher dans des lits avec matelas, c’est la 1e fois que nous avons des lits ! Lumière électrique, installation moderne.
(*) : Former les faisceaux des fusils : Les
regrouper en un seul paquet de 6 ou 8, la crosse sur la terre, le canon en
haut.
(**) : Le 168e RI a perdu 464 hommes tués, blessés
et disparus durant les 10, 11, et 12 septembre au combat de Champenoux. Le 13,
il arrive à la caserne d’Essey-lès-Nancy pour y cantonné. Le JMO du 168e RI
constate l’arrivée de 301 hommes provenant du dépôt du régiment de Sens :
Réveil 4h30. Travaux de propreté jusqu’à 6h30. Puis astiquage et préparation au départ – La matinée se passe en attente, par un temps brouillasseux et froid.
Continuation des récits de ceux qui sont revenus. Nous nous préparons à en faire autant, peut-être ce soir.
Les lettres n’arrivent toujours pas. C’est long de ne pas avoir de nouvelles de Paris.
À 10h ½,
la soupe puis rapport, bon capitaine qui a obligé le commandant à marcher
devant ses troupes après un mauvais commandement. Les camarades sont enchantés de partir. Tratrat
préfère aller au feu que de manger du fromage.
Après-midi,
le temps se lève un peu.
Le commandant ayant été tué (*),
notre capitaine (**) est nommé commandant du bataillon
provisoirement.
Quel dommage, mais il compte bientôt revenir parmi nous.-
Hier soir vers 0h, un aéroplane a survolé notre caserne puis Nancy. Nous avons nettement entendu une vigoureuse fusillade destinée à le descendre et ce matin, nous avons appris que c’était un aéroplane français. Nous apprenons également le succès de nos armées et cela nous réconforte et nous excite à partir à leurs trousses.
Dans l’engagement supporté par le 168e, il est souvent arrivé que nous tirions sur les nôtres.
L’après-midi
continuation du nettoyage des effets et des fusils. Revue de casernement et de
sacs en prévision d’un départ le lendemain pour où nous ne savons rien.
En attendant les blessés arrivent et les officiers
morts sont ramenés à la caserne : ils sont 9 dont le commandant, 2 capitaines
et des lieutenants. Un capitaine tient encore un chapelet dans sa main crispée.
Le soir,
enterrement accompagné par des soldats en armes.
Le soir, coucher de soleil magnifique, le bruit
circule que nous repartons pour Toul le lendemain matin, donc encore une
nuit tranquille, mais quelle déception de tourner le dos à l’ennemi, mais notre
tour viendra certainement.
(*) : Commandant BESSON
(**) : Capitaine BÉGOU
Lever à
4h30.
En tenue (…) pour partir pour Toul. La cour est pleine d’artillerie.
La pluie tombe à verse… nous sommes au garde à vous. On amène le drapeau du 168e, nous mettons la baïonnette au canon, il pleut toujours.
Nous
partons à 7 heures, traversons Nancy, on nous regarde avec intérêt
car nous revenons du feu !
La marche a été assez pénible, nous faisons la grand-halte à 2km de Toul à (…) dans un champ…
Nous repartons vers 2 heures, traversons Toul au pas cadencé pour aller
gagner la caserne Marceau au pied du fort d’Écrouves.
Les forts sont prêts et bien défendus, allons-nous
rester ici ? Je n’en sais rien.
Tout le long de notre route, nous avons rencontré
des quantités d’artilleurs se dirigeant vers la frontière.
À notre départ dans le faubourg St Georges, nous avons fait une pause devant la maison Fruhinholz. Il est tard, je vais me coucher car je suis éreinté.
Ce soir,
nous n’avons presque rien mangé tellement la fatigue prime tout.
J’ouvre une parenthèse : le 168e était occupé à faire
des tranchées à la Neuville lorsque le 5 sept au soir, rassemblement en vitesse
en direction des Rosières, les Allemands étant signalés. Mais mal appuyés par
l’artillerie, ils ont été forcés de battre en retraite vers Saizerais, Rosières
étant bombardé mais il n’a subi aucune perte importante leur tir étant mal
réglé.
Le lendemain, recul des Allemands et embarquement du
168e à Liverdun à 11 heures du soir pour Jarville-sous-Nancy et arrivée
à la caserne Essey à 3h ½ du matin. 4h ½ départ, pour les bois de
Champenoux où a eu lieu le grand combat où le 168e a subi tant de perte.
Réveil à 6 heures, cela nous semble vraiment bon car nous sommes éreintés et j’ai des douleurs de tous les côtés, les talons particulièrement. Nous nous occupons du déjeuner de 10 heures car nous devons partir de bonne heure pour Saizerais dit-on ? Nous ne savons rien au juste !
Le matin, temps brumeux, le fort d’Écrouves est caché par un nuage.
Le temps se lève un peu puis déjeuner, nettoyage etc., mise en tenue pour 11 heures.
Départ vers
12 heures par une pluie pénétrante avec vent de gauche. Marche pénible,
sacs lourds, pluie fouettante puis vers 3 heures un
peu de soleil, nous arrivons au cantonnement qui est Rosières-en-Haye,
assez fatigués vers 5h ¾.
Nous attendons dans un champ à l’entrée du village
la distribution du cantonnement, qui est particulièrement restreint vu le
nombre d’hommes à loger.
Nous avons l’explication de notre but. Nous
formons une armée de liaison entre deux corps d’armée dont l’un forme l’armée
de Lorraine et l’autre du côté de Verdun de façon à nous porter d’un côté ou de
l’autre suivant le besoin.
Puis nous prenons possession de notre cantonnement qui n’est pas grand naturellement. Nous explorons une grange à l’aide d’une échelle et un jeune descend par une trappe plus vite qu’il n’aurait voulu, incident risible parce que pas de mal.
Nous nous installons dans un coin et après un dîner sommaire, nous nous endormons avec l’idée d’un réveil à 3 heures à moins d’une alerte.
La nuit s’est passée sans incident, revue à 5 heures, bien reposé.
Nous entendons dire que pour l’instant nous ne partons pas, nous sommes probablement en réserve. Nous entendons le canon dans la direction de Verdun mais c’est loin.
Nous allons voir les dégâts du bombardement. Le toit d’une grange en face de la nôtre est troué en deux endroits, dans un champ, nous voyons de grands trous d’obus percutants. Un obus s’est enfoncé en terre sans éclater.
Le terrain est tout détrempé mais ce matin, le temps est couvert mais le soleil veut percer et nous réchauffer.
Pendant la soupe, à 9 heures, un aéroplane allemand (…) passe et on nous fait rentrer en vitesse dans la grange afin d’être invisibles.
10h ½,
toujours tranquille rien de nouveau.
Il paraît qu’à Toul, un avion allemand a
été descendu, on a trouvé une note du Konprinz
demandant 100 000 hommes à l’armée de Metz comme renfort. Nous sommes là pour empêcher la jonction des
renforts éventuels.
Nous passons le temps le mieux possible sous une pluie continuelle.
Vers 1h ½,
arrive un nouveau détachement de Sens.
Lecreux
et Perès ne sont toujours pas là.
Le temps est frais nous attendons les événements.
Je vais voir les dégâts d’un obus tombé près de l’église. Un fossoyeur creuse une fosse pour un habitant décédé. Il déterre des ossements. Vitraux cassés, croix marbre brisée.
À 4h30
rapport.
Récit de la résistance héroïque du fort de
Troyon, dont la garnison réduite ignorait l’importance de sa mission. Grêle
d’obus allemands. Assauts répétés. Et malgré tout, le nombre de morts se borne
à 5 et des blessés à 40.
Deux visites de parlementaires allemands sans succès. Lecture du code militaire.
Puis soupe et coucher à 7h ½ en prévision d’un réveil à 3h ½ pour partir à 4h ½.
Réveil vers 5h1/2, après une nuit de pluie et vent violent sans discontinuer, coups de tonnerre froid vif, somme toute, nuit lugubre.
Le matin, la pluie a cessé, le soleil luit par instants mais le vent n’arrête pas.
10h ½,
soupe lard haricots, exquis, légumes variés.
Après déjeuner, revue en tenue de départ, dans le
champ derrière l’église.
Le soir, dîner dans la chambre du 1er, coucher sans ordres. Le temps est sombre, il va sans doute
pleuvoir.
Réveil 4h30, nous devons partir à 6 h pour Manonville à 9k d’ici. Il a plu toute la nuit et il pleut encore et fait du vent froid. Nous nous mettons en route et traversons des bois où le 168e a eu le baptême du feu. (*)
Arrivée à Manonville vers 9 heures, bon cantonnement ; le lieutenant nous présente
notre situation. Nous sommes toujours troupe de liaison entre le corps d’armée
de Nancy et celui de Vesoul.
Soupe riz café.
Nous voyons revenir sur la route un dragon du 12e accompagnant un blessé qui a reçu une balle dans le dos et est sortie par le ventre. Il est pitoyable. Le major le (…) soigne… et il reprend sa route vers Domèvre-en-Haye où se trouvent les ambulances.
Nous apprenons que les Prussiens sont à Viéville-en-Haye. Plusieurs compagnies allemandes harcèlent 2 pelotons de dragons du 12e complètement isolés. Peut-être allons-nous bientôt les voir, nous sommes tous impatients de leur en mettre une sérieuse.
En attendant, le temps est très froid et la pluie tombe toujours. Heureusement, le cantonnement est bon et nous pouvons faire la soupe à l’abri.
Le soir,
soupe, ragoût de mouton, bon vin, etc. etc.
Coucher vers 9 heures.
(*) : Il s’agit du bois de Champenoux
Réveil à 3h ½. Départ à 4h ½.
Cette fois c’est sérieux, nous nous dirigeons vers Martincourt et à travers champs, vers Mamey, nous voyons toutes sortes de débris prussiens, quelques tombes et une tente qu’ils n’ont probablement pas eu le temps d’emporter.
Vers 8h ½,
baptême du feu, les boulets croisent au-dessus de nos têtes, d’autres éclatent
à droite et à gauche, l’ennemi est bien plus fort que nous. La canonnade ne
cesse pas un instant et depuis 8h ½ jusqu’à 7h ½ du soir, cela n’a pas arrêté.
Il y a eu de nombreux blessés et heureusement nous
n’avons rien eu à notre compagnie. Les balles sifflaient au-dessus de nos
têtes, les obus éclataient. Nous avons assisté à l’incendie de plusieurs
villages autour de nous.
Le soir,
nous avons quitté notre abri que nous avions pendant la fusillade et nous
allons terminer les tranchées que nous avions commencées dans la journée sous
le feu de l’ennemi.
Nuit très froide, jamais je n’ai eu aussi froid,
les pieds étaient comme des glaçons.
Toutes les 2 heures, nous nous relayons pour travailler.
À 7h ½ du
matin, je suis sentinelle avancée pour protéger les travailleurs.
Réveil (nous ne dormions pas) par des obus allemands, des marmites qui viennent éclater sur la route à une petite distance de nos tranchées.
Mais le feu devient violent et nous commençons un mouvement de retraite.
Martin était parti faire du café. Bernardel part le prévenir.
Après bien des hésitations nous retournons à
travers bois, réoccuper nos abris d’hier soir.
Et nous nous installons tranquillement, le feu
paraît s’éloigner et changer de direction. Nous apprenons que 2 divisions
d’infanterie vont les occuper et probablement nous délivrer. Nous l’échappons
belle !
Il est 8h ½, et j’écris ; toutes ces lignes sont écrites au son du canon.
----------
7h, je reprends
ces lignes ; nous l’avons échappé belle.
La canonnade augmentait, la 4ème section envoyée
derrière pour organiser les abris.
Puis, commandés de ravitaillement pour la compagnie, nous partons pour Mamey en laissant notre sac à l’abri. Aussitôt en route, les marmites arrivent et nous suivent ; nous traversons le bois par un beau soleil ; arrivons devant Mamey, nous rencontrons le lieutenant chargé du ravitaillement qui nous fait passer sur une crête en pleine vue de l’ennemi ; puis pour éviter une autre crête nous faisons un grand détour, nous passons par Saint-Jean et arrivons enfin à Martincourt où s’était réfugié le ravitaillement.
Le lieutenant de ravitaillement nous a donné le
pain et nous allions nous remettre en route lorsque la canonnade reprit de plus
belle et nous ne savons pas quoi faire, le ravitaillement étant parti.
Nous décidons d’aller vers Manonville nous
réfugier. Nous montons la côte de Pierrefort ; là nous rencontrons
le lieutenant de ravitaillement qui nous fait laisser le pain et nous dit de
rejoindre la compagnie. Nous y allons à regret lorsqu’à Martincourt, on
nous donne l’ordre de l’attendre car elle se replie. Enfin nous nous
retrouvons. Ils sont passés par St-Jean et avaient emporté nos sacs
jusque-là.
Nous sommes navrés car il y a beaucoup de blessés, mais tous les amis sont réunis heureusement. (*)
Nous partons dans la nuit vers Gézoncourt
où nous allons passer la nuit.
La route un véritable déluge nous lave
littéralement et au cantonnement nous attendons avec impatience le moment
d’aller nous reposer.
À notre arrivée, on nous annonce que nous avons 25’ pour nous reposer puis que nous allons prendre les avant-postes.
Mais finalement, ce n’est pas nous et passons une bonne nuit dans le foin. Mais avons la menace d’une alerte.
(*) : Le régiment a perdu 373 hommes durant les
journées des 20 et 21 septembre.
Réveil à 4h30, les 3 premières sections partent, la 4ème attend avec l’adjudant.
Enfin vers
7h ½, nous partons et l’adjudant nous mène à travers bois chercher nos sacs
à St-Jean. C’est une expédition dangereuse car nous ne savons pas si les
Prussiens n’y sont pas ?
Promenade superbe à travers bois, montées à pic,
descentes. Points de vue magnifiques.
Nous arrivons à Martincourt puis à St-Jean. Nous retrouvons une partie des sacs, mais désillusion, ils sont complètement vides. Quel dommage : avons fait 12km pour rapporter des sacs vides mais j’ai encore mon livret heureusement, beaucoup ne l’ont plus et c’est une faible consolation. Nous retournons retrouver le reste de la compagnie par un autre chemin.
L’adjudant, qui avait trouvé un fusil allemand, l’enterre sous bois près de Martincourt pour le retrouver. En chemin, nous rencontrons des tranchées établies par des Allemands, beau travail et le reste de la compagnie en établit d’autres dans les environs.
Nous déjeunons car la soupe a été apportée sur le
terrain par les cuisiniers restés au village. On reçoit l’ordre d’être prêts à
12h ; il est 11h35. Nous nous dépêchons et nous ne partons que vers 2h.
Nous traversons une grande forêt accompagnés par
les mitrailleuses et après 2 heures de marche pénible, à part la boue de terre
glaise, des montées à pic etc. etc. le lieutenant s’aperçoit qu’il s’est
trompé, nous revenons sur nos pas et surpris par la nuit, nous sommes allés
cantonner à Gézoncourt, enfin dans la même grange qu’hier. Là nous
retrouvons Tratat qui était
malade.
(…) Fusillé sans (…) (*) nuit du Major.
Bombardement du village. Fuite des habitants apeurés, retenus par gendarmes etc. etc.
Le soir,
éreintés, nous nous réinstallons dans notre grange et passons une bonne nuit à
couvert.
Le 168ème, décimé, nous avons eu la chance de nous
égarer !
(*) : Illisible
Réveil à 4h30.
La nuit a été froide, que sera-ce cet hiver. C’est surtout des pieds que je souffre du froid.
Avant de partir, il est procédé aux distributions de légumes, viande, pain, café, alcool, sucre etc.
Puis nous partons en laissant les cuisiniers au village pour nous préparer la soupe pour l’apporter sur le terrain. Nous traversons les plaines pour regagner la forêt d’hier et (…) revenir de flanc garde à une attaque de Mamey que nous voulons avoir à tout prix.
L’opération est très intéressante et nous sommes curieux de connaître le résultat de la journée.
Nous traversons la forêt par des layons et arrivons
à une clairière que nous occupons pour recueillir les fuyards et renforcer
l’attaque en cas de besoin.
Au moment où j’écris ces lignes, les obus français
passent sur nos têtes sans discontinuer ; c’est une musique à laquelle
nous sommes habitués maintenant et lorsque nous ne les entendons pas cela nous
manque.
Mais ce qui nous manque à l’heure habituelle, c’est le déjeuner. Les cuisiniers ont perdu notre trace et nous n’avons que du pain à manger.
Que doivent penser les Parisiens ?
Aucun moyen d’écrire ni de mettre à la poste. Je
n’ai toujours rien reçu depuis la carte no 12 du 9 septembre. (*)
J’attends encore toutes les lettres que je sais
être envoyées à Sens ! C’est désolant mais
enfin la santé est le principal pour l’instant. Et tout va pour le mieux pour
l’instant.
Les cuisiniers arrivent très tard, vers 3 heures. Folanlong lâche Martin qui laisse la bonne soupe en route faute de pouvoir la
porter ! Quel dommage. Le menu se réduit à un morceau de bœuf
bouilli !
Puis nous préparons des tranchées et nous devons y
passer la nuit.
Les voilà ! (**)
Nous commençons à dormir, rassemblement sac au dos et nous partons remplacer une autre compagnie.
Extrait du JMO du régiment
Farandole infernale dans la nuit, arrivée dans
l’inconnu, nous nous couchons dans tous les sens, nuit froide, pieds gelés,
nous grelottons.
Réveil le lendemain.
(*) :
Apparemment l’expéditeur (ou expéditrice) numérotait ses envois.
(**) : Les cuisiniers ? Les Allemands ?
Nous nous installons, faisons des tranchées, abri de feuillages très confortables.
Distribution des lettres, toujours rien.
Corvée de ravitaillement et d’eau au village très pénible.
Beau temps. Frais à l’ombre et chaud au soleil.
Menu : un petit bifsteak, c’est tout.
Le soir,
répétition de la veille.
À peine installés, déménagement, changement de
poste, c’est ridicule ! Enfin nouvelle cavalcade, nouveau couchage au
hasard, nuit froide.
Réveil au jour, nous repartons pour un autre poste, toujours dans la même forêt. Cette fois, c’est bien situé et nous n’avons pas besoin de nous en aller car la position est forte.
Au même endroit la veille, la 2ème compagnie a fait un prisonnier, c’est un égaré.
3 heures
après-midi. Je suis seul isolé en sentinelle avancée dans un layon par où
l’ennemi pourrait arriver.2 heures seul, enfin je prie un peu, pense à tous
ceux qui me sont chers et dont je n’ai aucune nouvelle.
Les lettres paraissent enfin arriver un peu et
peut-être aurai-je la surprise d’en avoir une. Mais le plus terrible est de
penser que je ne puis donner de mes nouvelles, isolés que nous sommes au milieu
de cette immense forêt de Puvenelle.
Quand en sortirons-nous ?
Je ne sais. On parle toujours de nous relever et cela ne vient pas vite.
Vers le soir, départ dans la direction de la lisière. Nous prenons nos dispositions pour dormir.
Je pars avec le caporal Mulot et 3 hommes pour prêter main forte à une sentinelle.
Puis vers
minuit, réveil encore pour aller à la distribution vers Mamey, que
nous croyions occupé par les Prussiens.
Nous y arrivons, c’est une désolation, ruines
fumantes dans la nuit. Spectacle lugubre.
Dans les champs par-ci, par-là, cadavres prussiens non enterrés.
Nous ramenons les vivres, distribution dans la nuit sans lumière naturellement.
Puis départ en avant, direction de l’ennemi. Je suis patrouilleur sous
la direction du caporal Mulot et
de l’adjudant.
Suivons lisière bois, puis arrivons à 1 maison.
Fouillons la maison, rien. Puis dans une 2ème maison, rien. Nous allons
fouiller une baraque lorsqu’au moment où un homme allait y entrer, un coup de
feu éclate, pensons que c’est un ennemi. Entourons la maison, siège, sommation,
silence complet. Finalement l’adjudant arrive et cerne la maison. On y entre et
nous n’y trouvons personne !
Fait bizarre.
Puis allons enfin nous reposer un peu sous un toit d’une auberge où les mitrailleurs commencent à s’installer.
Il est 6 heures, nous sortons de l’abri, il a gelé blanc.
Nous nous installons à la lisière d’un bois pour en garder les issues. Nous y trouvons les installations prussiennes que nous réoccupons. Puis nous traversons un bois dans la direction de l’ennemi et nous aménageons cette lisière pour nous abriter des balles et pour la nuit. Peut-être y resterons-nous cette fois ! Nous y passons la journée sans incident.
Nous pensons que les Prussiens ont reculé assez loin mais le soir une fusillade assez vive éclate devant nous, les balles sifflent au-dessus de nous et les abris nous sont utiles.
Puis on nous confirme que nous allons passer la nuit ici. Heureusement, nous avons de la paille et ce sera la 1ère bonne nuit depuis longtemps.
La nuit a été bonne, pas trop fraîche.
Le matin, nous apprenons que la fusillade d’hier soir, c’est une erreur malheureuse et c’était le 167ème qui se fusillait lui-même et le canon s’était mis de la partie. Il y a eu des morts et des blessés !
Dès le jour,
le canon tonne et les shrapnells rappliquent sans discontinuer. Nous nous
fortifions davantage en attendant de nouveaux ordres.
Il est 9 heures et le temps se couvre un peu,
pourvu qu’il ne pleuve pas !
Aussitôt après la soupe, on nous emmène à une
autre lisière du bois où des abattis ont été faits et nous creusons une
tranchée pour tirer debout pour faire face à une irruption probable de
l’ennemi. Une tranchée avec abri de feuillage.
La canonnade ne cesse pas du déjeuner et les obus
fusants rappliquent sans discontinuer.
Vers 2h
½-3h, je suis commandé de patrouille sur la route de (…).
Nous partons à 4 dans l’inconnu et ne savons pas
ce que nous allons trouver. Arbre abattu, inspection de la côte de gauche etc.
etc.
Essuyons des coups de fusils venus du Bois-le-Prêtre.
Quoique cela ayant reçu l’ordre d’aller le plus loin possible, nous décidons d’aller jusque Montauville, le premier village sur la route.
Toujours à cette côte à gauche, 2 chevaux tués dont un agonisant, pauvre bête, regard humain.
Arrivons en vue du village.
Sentinelle dans le fossé, qu’est-ce ?... c’est un Français, le village est occupé par une compagnie la 167ème. Le capitaine s’étonne que nous ayons passé cette route sans accroc et nous conseille de revenir en prenant un chemin détourné.
Le caporal comprend mal et nous prenons une route trop découverte et à peine sommes-nous à 200m du village que nous sommes pointés et nous essuyons à nous quatre 20 coups de canon. La mitraille nous atteint un peu mais sans nous blesser heureusement.
Enfin, après des péripéties, nous rentrons rendre compte de notre mission.
Félicitations du lieutenant et nous allons au capitaine en rendre compte. Présence du colonel que le renseignement intéresse et le transmet immédiatement au général.
Le soir,
souper et coucher dans la tranchée assez incommodément mais sans froid aux
pieds cette fois.
Nous continuons à faire et perfectionner notre tranchée plus profonde et bien couverte.
Le soir les obus sont revenus et ne nous ont pas laissé travailler pendant un bon moment.
Dans la
nuit, un village était incendié et le ciel était tout rouge. C’était Fey-en-Haye
je crois.
Nous ne savons toujours pas le temps que nous allons
rester ici et nous commençons à en avoir assez de coucher à la belle étoile.
Cette fois, la tranchée est plus habitable et nous allons passer une bonne
nuit. (Forte pluie la nuit)
Réveil vers 5 h par une fusillade de l’ennemi qui n’est pas loin de nous. Puis le canon de campagne se met de la partie et les shrapnells nous tombent sur le dos, sans nous blesser heureusement, puis arrêt et nous profitons de l’accalmie pour nettoyer nos armes car la nuit, l’eau est tombée en quantité et nous tombait goutte à goutte sur nous en dormant.
J’ai écrit une carte hier 28. Je n’ai encore rien
reçu depuis le 10 septembre. Que c’est long.
Que deviens-tu Margot
et Mad ? Comme tu dois te faire du mauvais sang.
Comme je voudrais être près de toi et te rassurer ! Enfin, ce bon moment
viendra sans doute, je l’espère toujours…
Déjeuner et la journée se passe à couper les branches en taillis et terminer notre tranchée combien de temps y passerons-nous ? Je l’ignore je trouve le temps long!...
Le soir,
bon souper en abondance : bifsteaks, pommes,
haricots.
Puis la 14ème escouade va prendre la garde au petit
poste au coin de la route de Pont-à-Mousson. Je monte la garde de 2h, 1h
avec Piedferré et nous
n’entendons que le bruit lointain de la canonnade du côté de l’Aisne sans
discontinuer. Peut-être la partie se joue-t-elle en ce moment ?
Le temps est superbe, un beau soleil nous fait oublier la fraîcheur de la nuit. J’ai toujours les pieds gelés mais je n’y fais plus attention, cela devient une habitude.
Nous n’entendons plus de canon de près… l’ennemi s’éloigne-t-il ou prépare-t-il une attaque désespérée ? L’avenir nous l’apprendra…
J’écris encore une carte ce matin, espérant toujours recevoir quelque chose d’ici peu.
La journée se passe sans incident et le soir à 6 heures nous sommes relevés et nous retournons coucher dans notre tranchée couverte.
La nuit se passe bien, fusillade au milieu de la
nuit, mais je ne l’entends pas.
Ayant un peu de diarrhée, je me lève dans la nuit,
puis le jour vient et après une distribution de vivres on nous emmène…
(...) au milieu d’un champ en arrière de la ligne, terminer une tranchée pour tenir debout où nous travaillons avec courage étant tous très fatigués…
Puis vers
midi, la soupe arrive et nous sommes dérangés par une arrivée d’obus
percutants qui éclatent à quelques centaines de mètres et paraissent se
rapprocher de nous.
Tout d’un coup, nous entendons un sifflement.
Instinctivement, je me baisse dans la tranchée et l’explosion m’abasourdit et
me recouvre de terre. Les oreilles me bourdonnent, je crois ma dernière heure
arrivée, je me lève et constate que l’obus est tombé à 2 mètres de moi. Je l’ai
échappé belle.
Et malgré tout ce vacarme la journée se continue splendide, le ciel bleu, le soleil chaud.
Le soir,
nous retournons nous coucher dans notre tranchée couverte.
(Fermes St Pierre et du Puits)
Mauvaise nuit, sommes trop serrés, couchés les uns sur les autres, crampes, douleurs, coliques, etc. etc. Fusillade, obus dans la nuit, enfin réveil.
Le matin, on nous annonce repos pour la ½ de la section et quelques instants après, munis de haches, nous allons déboiser une corne de bois qui gêne le tir des tranchées et cache à la vue la route de Mousson.
Temps moyen, soleil terne, pourvu qu’il ne pleuve pas.
On nous annonce que nous allons toucher des couvertures ? Allons-nous hiverner ici ?
Triste perspective !
Et je n’ai toujours pas de lettres ! Que je
serais heureux de lire enfin quelques nouvelles de ma chère petite
famille !
Et rien, toujours rien.
Enfin, le soir, j’ai reçu la carte no 14 du 10 sept, quelle bonne surprise mais que c’est loin comme nouvelles.
Le soir,
rien de nouveau, corvée de distribution dans la forêt de Puvenelle.
Clair de lune puis bonne nuit assez fraîche.
Lever, le matin abatis sous la lisière, puis déjeuner en vitesse, cochon de lait excellent, pommes succulentes, toujours assaisonné de coups de canon.
Ce matin,
encore reçu une carte, le no 29, ce qui fait qu’il m’en manque 14 environ elles
viendront peut-être.
On s’est enfin décidé à faire le contrôle des
réservistes arrivés de Sens pour le vaguemestre. Il est question d’aller
relever la 6ème compagnie qui occupe les avant-postes un peu à droite.
Nous attendons les événements, il est midi ¼ nous nous chauffons au soleil.
Puis vers 1
heure, nous partons dans la direction de l’ennemi et à la lisière d’un
bois, nous commençons une nouvelle tranchée.
Le soir, nous nous couchons à la belle étoile et
la nuit ne paraît pas trop froide.
À 7 heures,
on vient nous annoncer que le 2ème bataillon doit attaquer l’ennemi vers 10h ½
et fort probablement il se rejettera sur nous. Mais la nuit se passe et nous
n’entendons pas un coup de fusil.
Réveil par quelques coups de canon, puis travail des tranchées en attendant les événements.
La journée se passe, brumeuse mais sans pluie.
Les tranchées commencent à se couvrir et la moitié de l’effectif sera à l’abri cette nuit.
Le soir,
nous touchons des couvertures et la nuit nous avons moins froid que la
précédente.
Je monte la garde de 8h – 10h en sentinelle devant
les armes au clair de lune.
Le soir, on nous annonce de nouveau l’attaque du 2ème bataillon mais aussitôt c’est contredit et la nuit se passe sans incident. On entend de la fusillade et du canon à notre gauche mais assez éloigné.
Dans la journée une patrouille a été surprise dans le bois et le sergent qui la commandait a été tué !
Réveil à 5h ½, montage des couvertures sur les sacs et reprise du travail de la tranchée. Décidément, nous devenons des terrassiers mais cela nous paraît dur, je suis harassé.
Le temps nous favorise heureusement et depuis que nous sommes dans les bois nous avons été à peine mouillés.
Je ne reçois encore plus de nouvelles. Je vais réécrire une carte en demandant un peu de linge et d’effets.
Ce matin, j’ai enfin pu défaire mes chaussures et vérifier mes pieds. Je ne les avais pas vus depuis le 17 septembre, c’est-à-dire depuis 18 jours. Un cor me fait particulièrement souffrir. J’arrive à le gratter un peu !
Continuation de la tranchée.
Le soir
pluie, la nuit sentinelle avancée sous l’eau. Mauvaise nuit, accroupi sans
place !
Enfin j’ai reçu aujourd’hui vers 4h une série de
cartes nos 12-15-16-19-20-26. Monilut (*). Sardine. Vallée. Quel bonheur de lire tout cela.
Enfin la journée s’écoule et nous sommes nommés de garde au coin du bois.
La pluie se met à tomber et mon tour est de 8h-10h et de 3h à 4 heures, tout seul sous la pluie et le vent froid. Comme je voudrais avoir de bonnes chaussettes et un bon caleçon chaud !
(*) : Illisible
Réveil vers 6h ¼, mauvaise nuit, sans place, accroupi, impossible de dormir, crampes etc.
Reprise du travail fin de la tranchée et vers 3 heures canonnade allemande qui a repéré des travailleurs au coin du bois à 50 m de notre sentinelle de cette nuit.
Le temps se maintient et j’espère que cette fois la nuit se passera sans pluie, ni garde.
Je vais écrire qq mots
sur ½ carte à Marg.
Puis soupe et avant de nous coucher on nous annonce
que l’ennemi doit nous attaquer probablement cette nuit et nous devons nous
tenir sur nos gardes ! Donc bonsoir, à demain
La nuit s’est encore passée sans alerte, beau clair de lune, température très fraîche. Je n’ai encore pas bien dormi à demi replié sans pouvoir s’allonger et à 3 heures forcé de me lever pour coliques et diarrhée !
Quel malheur d’être mal portant dans des occasions pareilles. Il est vrai que je ne suis pas seul.
Après-midi,
bonne surprise, je reçois un colis, quel événement ! Et juste tout ce dont
j’ai besoin ! Quel bonheur ! Sûrement, c’est de la transmission de
pensées ! Merci Margot !
Je suis nommé de garde dans une autre tranchée, à
demi terminée, avec le cap. Grandclair.
Nous travaillons à la couvrir, le temps est beau mais frais.
La nuit,
encore obligé de me lever pour diarrhée et vomissements. C’est horrible ce que
je souffre ; enfin cela me soulage et je me décide à ne rien manger le
lendemain !
Je monte la garde de 10h à 11h au clair de lune,
puis après une nouvelle selle abondante, je me recouche et termine la nuit un
peu mieux.
Réveil vers 6h ½.
Les prés sont glacés. Que sera-ce cet hiver ? Le temps est magnifique mais le vent frais, même glacial !
Je ne mangerai pas aujourd’hui, je ne bois qu’un peu d’alcool ! Et de l’alcool de menthe du Dr …. (*) qui va bien … à sa fin.
Quel bonheur que Marguerite ait pensé aux pastilles de Menthol, c’est un moindre confort, mais en ce moment j’ai une envie folle de chocolat et je n’en ai pas. Je vais réécrire un mot pour cela !
Il est 10h
½ et je suis sentinelle de poste mais tranquille et j’en profite.
Après-midi,
nous nous occupons de finir de couvrir notre tranchée et de fabriquer un abri
indien pour coucher le complément de l’escouade.
Je ne mange rien de la journée, mais le soir, je
ne puis résister à la tentation et je goûte qq
haricots. Hélas, 3 fois hélas, je passe une nuit abominable, non par la
fraîcheur car nous sommes bien dans notre abri, mais l’estomac, les hoquets
douloureux, et malgré tout, je ne me dérange pas de la nuit et le camarade Lorinzol veut bien me remplacer le
matin de 5h à 6h.
C’est gentil à lui et je m’en souviendrai !
Mais je me suis décidé et le lendemain matin.
(*) : Illisible – Docteur
Pierre ?
Je me fais porter malade et passe la visite du major à la ferme qui me donne du sulfate de soude et un comprimé d’opium en disant que ce n’était rien. Naturellement, il n’a guère le temps de s’occuper de telles vétilles !
Je passe la journée, temps splendide, à la ferme
et vais y passer la nuit, je crois que cela me remettra complètement !-
Un soldat du génie va partir à Pont et me
promet de me rapporter un tas de provisions. Pourvu qu’il revienne, je lui ai
donné de l’argent et commence à être inquiet.
Aujourd’hui bonne journée pour la correspondance. Reçu les nos 21-24-25-32 et 39. La 1ère lettre arrivant par Toul et datée du 5-10, quel progrès, et m’annonçait le départ de mon colis arrivé à bon port hier !
On entend la fusillade sur notre droite, serait-ce à la 3ème ? Je ne le pense pas et le saurai demain !
La journée se passe au repos et le soir vers 4h ½ une alerte se produit, la fusillade ayant rapproché,
beaucoup s’en vont et je voyais le moment où j’allais m’en aller également mais
réflexion faite, nous restons et passons une bonne nuit dans la paille, bien au
chaud.
Réveil vers 6 heures.
Brouillard, temps froid et gris.
Je repasse la visite et le major m’accorde une journée de plus à la ferme. Je vais en profiter pour bien me reposer et reprendre des forces dont j’ai bien besoin. Hier, j’ai déjà fait prendre des provisions à Pont-à-Mousson et je vais tâcher aujourd’hui d’en faire prendre d’autres pour les camarades qui vont être heureux de cette aubaine ! Quel luxe !
J’ai reçu aujourd’hui le no 30. J’en ai renvoyé
une comme chaque jour.
Le temps est sombre toute la journée mais sans
pleuvoir. Peut-être se maintiendra-t-il ?
Cuisine : riz à l’eau chocolaté à la forge. Visite du matin humoristique. Toujours sulfate de soude, comprimé d’opium.
Toujours temps frais, change caleçon et me prépare à subir froid de l’hiver.
Les provisions sont revenues de Pont-à-Mousson, confiture, pain d’épice, chocolat. Mais quel malheur, avec ma diarrhée, je ne peux rien manger ! Je me suis confectionné un grog au rhum et de l’eau de riz. C’est peu ! Je passe encore la journée ici et la nuit.
Rien de nouveau dans la journée.
Le soir,
on nous annonce que nous avons fait 1600 prisonniers du côté de Royes,
c’est déjà quelque chose !
La nuit a été glaciale, un vent fort, le ciel couvert.
Me suis levé vers 11 heures pour aller aux feuillées, toujours la diarrhée quel malheur. Le matin je repasse encore la visite et reste encore à la ferme, le major dit que c’est mieux ainsi.
Le temps se lève et malgré un vent très froid, le soleil radieux nous réchauffe et nous égaie.
Je ne vais encore rien manger aujourd’hui, peut-être arriverai-je à arrêter cette diarrhée… Et j’ai faim et j’ai des provisions. Quelle ironie ! Je prends du bismuth et de la teinture d’opium. Cette fois, la diarrhée est arrêtée et la constipation suit, je tombe d’un mal dans un autre !
Le soir,
je mange un peu de riz dans le …(*) je mets un
peu de gruyère, cela change.
Le soir, le génie nous vole du vin…
Je passe une bonne nuit et avec ma couverture, j’ai bien chaud.
J’ai reçu ce matin, un petit paquet : plastron et cartes à demain !
(*) : Illisible
Réveil, jus chaud, vin chaud, pain, saucisson, confiture et le major renvoyant tout le monde aux compagnies, je monte mon sac et rejoins les copains. Je suis bien reçu, apportant des provisions de luxe ! Quel luxe.
Nous sommes toujours à la petite tranchée face au soleil toute la journée et étant exempt de service, pas de garde, bonne nuit en perspective.
Le soir
arrive et après une bonne soupe, nous allons nous coucher dans la hutte
indienne (à midi, pois cassés, épatant !)
Réveil, bonne nuit, matin glacial, gelée blanche, givre, glace, bidons gelés, fusils gelés, prémices de l’hiver !
J’ai chaud, je commence à manger un peu. Le soleil nous réchauffe, je reçois les cartes no 36-42-43.
On m’a apporté également des provisions de Pont-à-Mousson, confiture, saucisson, etc.
Le soleil se cache un peu mais la pluie ne paraît plus imminente.
La canonnade n’a pas arrêté de la nuit à notre
gauche, peut-être Lironville et elle reprend au-dessus de nous dès le
matin.
Monte garde de 12h-1h.
Hier, nous étions relevés à midi et nous avons couché dans la grande tranchée ; l’après-midi nous avions continué le boyau de défense contre l’artillerie. Ce matin, reprise des travaux du boyau et l’adjudant active, voulant construire également une maison pour l’hivernage ! On se croirait au Pôle.
Nous y travaillons toute la journée et ne descendons à la petite tranchée que le soir pour ne pas changer d’équipe.
À midi (2h
½), nous mangeons des nouilles épatantes, c’est mon plat favori et j’en ai
à profusion ; en y ajoutant un peu de fromage, c’est succulent.
Le soir,
visite et compliment de l’état-major. Nous voyons notre commandant et apprenons
avec plaisir le retour probable du capitaine Bégou
à notre compagnie. Plusieurs camarades vont également revenir nous voir.
Le soir, nous retournons à la petite tranchée et le
temps de souper et nous nous couchons. Je monte la garde de 12h à 1h.
Réveil par temps gris mais doux.
Le capitaine ayant désiré que nous nous nettoyions,
nous allons à la Fontaine-aux-Cerfs par escouade. (*)
Quel délire de se nettoyer dans cette eau pure ! Mais je songe à l’hiver proche, brrr !
En passant aux cuisines, thé, quel luxe !
Je reçois ce matin un petit paquet ; chauss. choc, papier cigarette ! Quel bonheur ! Cela sent Paris et ma chère petite femme !
Puis nettoyage des armes et vers 2h, corvée de fouille à la ferme du Puits ! C’est vraiment pénible mais il le faut ! Au retour, nous remontons et presqu’aussitôt, je suis nommé de garde au petit poste avancé. Je prends de 7h ½ à 9h ½ et de 2h ½ à 3h ½.
Odeur cadavérique !
(*) : La
fontaine des cerfs se trouve à la source du « Grand Rupt » entre Fey et Montauville à 200m au nord de la D958
Réveil…brouillard, temps frais. Repas frugal, puis attente des événements au petit poste.
À midi,
confitures, ordinaire amélioré depuis l’arrivée du capitaine à la compagnie.
Promesse de 2 quarts de vin etc.
Après-midi,
nous commençons une petite maison pour abriter les 4 hommes du petit poste, ce
sera très bien. Odeur insupportable, on doit enlever 2 morts cette nuit.
Le soir,
nous sommes relevés et redescendons à la petite tranchée. Je vais passer une
bonne nuit n’étant pas de garde. À demain.
2 paquets (lafec zone)
Réveil à 6h. Quelques coups de fusil ont été tirés cette nuit mais nous n’avons pas bronché.
Le matin,
transfert de cantonnement de 2 camarades du 167ème à côté de nous. Puis nous
travaillons à une maison pour la petite tranchée.-
Temps couvert et frais, agréable pour travailler.
Reçu ce matin petit paquet no 3 chaussettes, chocolat, papier cigarette, Amadou.
Viande à jus, riz, jus, saucisson, l’ordinaire est amélioré depuis le retour du capitaine Bégou.
Après-midi,
travail à la maisonnette.
Soir,
remontons à la tranchée. Garde de 8 à 9 sous la pluie.
Reçu ce matin 2 lettres 46-47.
Le matin, chocolat au lait, quel luxe depuis le retour de notre capitaine, nous nous apercevons de l’amélioration.
Retour du lieutenant Domange, très aimé de tous les soldats. Le matin, visite de l’état-major, nouveau commandant, ancien cap du 167.
Dans la
journée, travail aux piquets à planter en réseau devant nos tranchées et
garnis de fils de fer.
Adj bourguignon jovial.
Le soir, nous redescendons à l’autre tranchée. Je vais prendre le 4 à 5h matin.
Reçu ce matin carte 48-49.
Le soir, on a entendu une fusillade allemande et ce matin, nous avons appris que c’était notre nouveau commandant qui s’était aventuré sur une crête et il a reçu des coups de fusils au dos et au ventre, quel imprudent !
J’ai été envoyé en corvée de piquets à la carrière, boue, madriers etc.
Retour pour la soupe et le soir pour la relève.
Nous remontons à la grande tranchée et nous étrennons la petite maison. On y
est bien au chaud et nous avons un repas complet, les camarades de la 13ème
prenant 2h de faction.
Reçu ce matin une lettre no 18, réponse à mes
cartes de Sergines
!… du 14 sept.
Nous travaillons à combler le fossé devant notre tranchée jusqu’au soir.
Vers 4
heures, l’artillerie ennemie se réveille et nous fait savoir qu’elle est
toujours là. Nous redescendons à l’autre tranchée. Je suis sentinelle de 3h à
4h. Nous trouvons notre maisonnette du bas presque terminée.
Nous y passons une bonne nuit.
Toute la nuit, la canonnade n’a pas cessé du côté de Thiaucourt. L’attaque doit être décidée, les coups se succèdent sans interruption. La fusillade paraît vive et nous nous apprêtons à y participer.-
La toiture de la tranchée s’étant affaissée, nous la relevons le matin. La pluie tombe. Nous sommes à l’abri sous la cabane.
On entend dire que nous allons aller à l’attaque de Thiaucourt, est-ce vrai ? Nous verrons bien !
Je n’ai rien reçu aujourd’hui.
Après la
soupe, viande bifsteak et macaroni. Terminons la
cabane et remontons à la tranchée à 4h ½.
Service sentinelle de 11h ½ à 1h. Distribution
chocolat.
Bonne soupe chaude le soir. Aujourd’hui, double ration vin gris.
Le soir vers 8h½-9h, la canonnade a commencé du côté de Thiaucourt et a continué d’une manière ininterrompue jusque vers 3 heures du matin.
Spectacle grandiose et triste oh combien ! Combien de vies disparues. C’est terrible…
Le tout accompagné de fusillades très vives et de mitrailleuses. Espérons que nous avançons de ce côté.
Ciel merveilleux, clair, le matin brouillard intense et rosée.
Nous continuons à combler le fossé, avons froid aux doigts.
On nous annonce qu’il n’y aura pas de courrier aujourd’hui, l’auto ayant eu une panne. Quel malheur !
Après-midi,
nous tiraillons sur un aéroplane allemand (premières cartouches) réponse boche,
continuation du travail au soleil toute la journée.
Le soir,
coucher maison adjudant. Dorénavant,
nous resterons en haut et l’autre ½ section en bas. Nous passons une bonne nuit
sans alerte et sans garde.
Réveil 5h30, puis travaux du fossé d’avant.
Reçu mon paquet no 5 : serviette main, choc tabac à pipe, moutarde, saucisson, fromage.
Rien de particulier.
Après la soupe, allons à la source nous nettoyer. Déshabillé ceinture température idéale.
Continuation du fossé après-midi.
Le soir de garde au petit poste… Belle nuit douce. Sentinelle de 7h1/2 à 8h ½ - 11 ½ à 12 ½ - 3 ½ à 4 ½. Nous n’avons pas froid.
La nuit combat très vif, fusillade, mitrailleuse, canonnade, spectacle grandiose puis silence complet.
Ai vu la comète vers le matin. (*)
(*) : La comète Delavan avait été découverte le 17 décembre 1913. Avec sa queue qui
offrait un beau développement, elle brilla en septembre et octobre 1914. On l'a
associée aux affrontements européens et elle restera la " comète de la
guerre "
Réveil au jour, d’ailleurs nous n’avons pas dormi beaucoup. Puis garde du petit poste toute la journée sans événement important.
Retour à la compagnie du sergent évacué Preteau qui sera notre chef de ½ section.
L’après-midi,
reçu 2 lettres et colis no 6, no 52, 53. C’est une véritable diversion que
l’arrivée de ce petit colis, un événement dans l’escouade.
Le temps est beau et dans le soir, retour à la
tranchée, couchons sans garde dans la maison de l’adjudant.
Les nuits paraissent longues.
Réveil 5h30, puis désigné pour partir en avant avec un caporal et 2 camarades faire une tranchée à 200 mètres d’eux environ. Suis sentinelle en avant pour protéger les travailleurs de 7h à 9h.
Brouillard, rosée.
Écrit une longue lettre. Marg.
Travail petite tranchée, soupe.
Reçu longue lettre no 54.
Puis 7h, sentinelle avancée, 40 mètres de boche…Protégeons travailleurs tranchée avancée 15ème escouade. Perly qui reste la nuit petite tranchée.
Retour chez nous, couché cabane, garde 8-10.
Réveil 6h. La nuit vent violent, pluie torrentielle, eau dans tranchée, travaillons combler fossé.
Soupe puis travail boyau.
Soir poste, soupe, tranchée avancée perdu dans bois, nuit noire, retour à la tranchée, repas complet.
Cabane adjudant sans garde, mauvaise nuit, estomac, diarrhée.
Rev. 6h.
Travail boyau. Reçu paquet no 6, écrit carte.
Après soupe,
travail boyau, mauvaise journée, vent froid, ciel couvert.
Soir,
restons coucher cabane adjudant. Monte garde de 10-12.
Joseph
RAIDL, brancardier, à droite, avec 3 chevrons de présence au front.
On
peut donc dater cette photo vers fin 1916-début 1917. Il a obtenu sa décoration
(visible) en juillet 1916.
La nuit a été calme, quelques coups de fusil tirés par des patrouilles, sans doute.
Le matin,
pluie et repos pour la 14ème escouade, devons partir pour passer 24h à la tranchée
avant – soupe – départ pour la tranchée à quelques mètres de l’ennemi. Travail
de la tranchée, temps menaçant, pluie à la soupe et presque toute la nuit.
Passé nuit blanche à veiller avec le sergent Borelot.
Sommes relevés le matin par la 13ème es. (*) et repartons grande tranchée.
Reçu 2 cartes 55-56 et 57.
Nettoyage des fusils, soupe, et reprise et travail de la tranchée boyau à 12h ½.
Apprenons que nous allons fournir ½ section par jour pour les nouvelles tranchées et nos munitions renforcées pour résister à une attaque possible, espérons que cela se terminera bien !
Dans la soirée de la veille, le 167ème et la 7ème compagnie avaient enlevé un petit poste ennemi ! Succès encourageant.
(*) : Escouade
De garde de 4 à 6.
À 4 heures,
on nous avertit de nous tenir prêts à partir pour attaquer l’ennemi. Pas de
ravitaillement, cela devient sérieux.
Nous partons occuper notre tranchée d’avant et nous
en faisons une autre 50 mètres en avant et le soir nous nous préparons à y
passer la nuit.-
Nuit blanche et le matin, après avoir travaillé, nous marchons en avant et nous sommes attaqués, vive fusillade et vers 17 heures nous mangeons tranquillement dans notre tranchée. (Conversation humoristique). Quelle fête de la Toussaint se prépare ?
Après-midi,
nouvelle fusillade, nous brûlons une quantité de cartouches.
Le soir
nous sommes tranquilles et nous apprêtons à passer la nuit.
Dans la nuit ravitaillement, manquons d’eau,
Nous apprenons que nous allons être relevés à 4 heures du matin.
6 heures ½, nous sommes relevés par la 1ère compagnie et nous retournons à notre vill. Des troupes, la 14-15-16 (*) sont logées en bas.
Le soir la 14 a l’ordre d’aller tranchée de la 4ème.
Puis après 1 heure nous allons occuper une tranchée à la crête et la corne du bois. Nous essuyons quelques obus sans dégâts, pluie persistante toute la nuit après une journée idéale.
Nous redescendons au petit jour et je passe la journée allongé dans la cabane.
(*) : 14, 15 et 16e compagnie
J’ai une fluxion depuis la fusillade et un violent mal de tête. Le soir cela va mieux.
Je passe également une bonne nuit. J’ai reçu la carte no 60.
Il pleut continuellement, quel vilain temps.
De garde de 11-12.
Il pleut toujours. Le repos continue.
Vers 16
heures, recevons l’ordre de relever la 1ère compagnie ; nous y allons et
continuons les travaux d’aménagement de la tranchée. La pluie cesse
heureusement.
Le soir, service
de sentinelle guetteur au milieu de la tranchée de 3 ½ à 6 heures matin.
Les hommes du génie ont installé un crapouillot et on leur lance des boulets.
Le commandant nous rend visite et après l’adjudant fait une excursion au chêne pour y trouver des objets Prussiens capote, cartouches, cigares, tabac etc.
Puis ½ section, la nôtre naturellement, marche de l’avant et ébauche une tranchée à 10 mètres du fossé des Boches. Nous essuyons qq coups de fusil mais malgré tout, nous commençons la tranchée et après quelques heures, nous sommes relevés par la 2ème ½ section.
À peine rentrés, une attaque Boche se produit et la ½ section doit tenir toute l’après-midi.
Le soir
vers 8 heures, nous allons les relever et continuons à creuser.
Nous étions bien retranchés lorsque, vers 10h, un
ordre vient de nous replier, la position étant trop dangereuse. D’ailleurs
notre droite étant dégarnie et un mouvement tournant eut été possible.
Nous nous replions donc dans notre bonne tranchée, emportant tous nos outils et accessoires.
Nous rentrons en bon ordre, le lendemain matin
Le matin à 5h ½, nous avons l’ordre d’enlever coûte que coûte, le fossé des Boches à la baïonnette.
Nous partons avec confiance et à l’approche de notre petite tranchée, nous sommes accueillis par une fusillade tellement vive que l’adjudant nous donne l’ordre de nous retrancher dedans.
Nous avons tenu aussi longtemps que possible puis l’ordre nous est venu de nous replier en ordre dans notre tranchée.
Nous partions par petits groupes protégé par les feux de salve que nous exécutions et comme je me trouvais à l’extrémité gauche de notre tranchée et que nous partions par la droite, j’ai fait le chemin à genoux en tirant tous les 4 mètres et puis je suis parti en courant par le petit sentier.
C’est alors que j’ai été blessé à la main gauche par une balle qui m’a traversé la main, mais heureusement n’a pas touché les os, ce qui fait que je pourrai me resservir de ma main et bientôt retourner rejoindre mes camarades.
Ce qui m’a fait le plus de peine au moment où je
me suis vu blessé, c’est de quitter mes camarades et de penser que leur nombre
se trouve réduit. Pourvu qu’ils ne soient pas blessés comme moi, c’est ce que
je leur souhaite ! Puis j’ai rencontré mon adjudant qui m’a indiqué…
En cherchant notre tranchée, je me suis perdu à
gauche et suis arrivé à temps dans celle du 153 où un camarade a eu la
gentillesse de me panser sommairement. Après une accalmie de la fusillade, j’ai
pris la direction de la carrière où l’on m’a immédiatement indiqué d’aller à
l’auberge Saint-Pierre. En route, j’ai rencontré les infirmiers de la 3ème
compagnie qui transportaient un malheureux camarade qui avait une balle dans le
côté. L’infirmier a désapprovisionné mon fusil et je suis parti vers l’auberge
à la première accalmie.
Rencontré l’ami Dufour
qui m’a donné mon pain et mon vin qu’il avait touché pour moi au
ravitaillement, m’ayant vu passer. À l’auberge, mon pansement a été changé et
j’y ai laissé mon pauvre fusil qui ne m’avait jamais quitté depuis Sens !
Puis on nous a mené en voiture à Martincourt
où j’ai été pansé par un Major très doux et méticuleux, j’espère bientôt guérir
et me resservir de ma main, heureusement que c’est la main gauche, elle est
toujours moins utile que la droite !
Une balle a également traversé ma musette, je viens de m’en apercevoir et comme je la porte à gauche, c’est peut-être la même balle que celle qui a traversé ma main !
Enfin, je l’ai échappé belle ! Beaucoup de mes camarades ont dû tomber, mais j’en ignore le nombre pour l’instant ! (*)
(*) : Pertes : 25 hommes.
La nuit a été mauvaise, je n’ai pour ainsi dire pas dormi, ma main m’ayant fait souffrir.
À la visite, le Major Jacqueau m’a vu la main et a trouvé la blessure intéressante car il suppose qu’elle dut provenir d’une balle explosible et parle de m’évacuer, mais réflexion faite, il me garde.
L’ordinaire est bon, jeune fille dévouée, peu d’habitants, difficulté de s’approvisionner.
La journée paraît longue.
La nuit a été bonne, la main me faisait moins souffrir.
À la visite du major Jacqueau parle de me faire photographier la main, mais il a dû oublier car la journée se passe sans incident nouveau.
Récit de l’occupation allemande par un vieil habitant.
Blessé prussien, arrivée de nouveaux blessés de la compagnie : Diomède, Parly. J’apprends la mort de HugueNin (*) jeune petit camarade, de Riéflé, réserviste venu de Sens avec nous ; tout cela m’attriste car je vois les camarades partir autour de moi !
(*) : HUGUENIN Gustave,
soldat au 168e RI, mort pour la France le 5 novembre 1914 au Bois-le-Prêtre
(Meurthe-et-Moselle). Il était né à Paris, le 9 mars 1893.
Bonne nuit.
À la visite, le major m’a encore parlé de photographier ma main et je crois que cette fois, c’est sérieux car j’ai rendez-vous à 12h ½. En attendant, j’écris ces quelques lignes.
À 12h ½,
le major, ayant changé d’avis, a pensé au mauvais résultat de la photo et y a
renoncé.
La journée se passe sans incident.
Bonne nuit.
À la visite le major m’a dit de garder mon pansement et la journée se passe sans incident.
J’écris à Marg. en indiquant mon adresse de Martincourt.
La nuit a été bonne, troublée seulement par les parasites ! Quand vais-je en être débarrassé et toujours pas de linge !
Le temps est frais, rien de nouveau n’arrive !
J’envoie une carte à Marg.
Le matin, mon pansement est changé, le major trouve ma blessure en bonne voie.
La journée se passe sans incidents.
Le soir, le vent s’élève et la nuit se passe en rafales et pluie sans discontinuer.
Le 167ème arrive pour cantonner dans Martincourt.
Le temps est clair, peut-être aurons-nous un peu de soleil ? Il fait froid, c’est l’hiver qui s’approche.
J’écris une carte à Marg.
Le 167 s’en va à 1 heure.
Le soir,
le 169, classe 14 arrive, capots gris.
La journée se passe sans incidents… pas de visite
Le matin, carte.
Major à 11h, j’apprends que je suis évacué, je vais partir à 12h.
Départ à pied vers Domèvre, passons à Manonville.
Attendons en gare de Domèvre jusque vers 4h ½. Arrivée à Toul vers 6h.
En route manœuvre du train trop lourd. Vilain temps.
À Toul envoyé à l’hôpital temporaire Thonnemet - pansage. Bien reçus, nous sommes 3.
Affectés salle 4.
Bon major, très doux, aimable. Infirmiers
complaisants, bonne nourriture, bien chauffés, électricité.
Après bonne nuit, visite du major puis pansement, causé au major.
Écrit à Marg. Cartes, lecture etc.
La journée se passe sans incidents, trois malades de notre salle sont évacués plus loin. Ils sont heureux !
Rien de nouveau de la journée.
Pansement.
Le matin, le major m’annonce que je serai évacué le lendemain vers… l’inconnu.
(Beau temps).
Le soir, omelette à la cantine, vin chaud etc.
Arrivée d’une fournée de blessés nouveaux qui remplissent notre chambre.
Le matin, préparatifs de départ pour l’évacuation.
(Beau temps).
Pensions partir à 12h et ne partons qu’à 4h.
Voiture à côté cochon.
Gare sous la tente, attente, embarquement vers 6h.
D’abord wagon 2ème, il fait froid. Puis bien installés en 3ème (*) et chauffés. Brancards.
Nancy. Épinal. Gray.
(*) :
Wagons de troisième classe, qui existaient à l’époque
Arrivons Gray vers 9 heures et restons là jusque 1h ½ après-midi.
Visite, pansements, ravitaillement Pain, beurre, cacao, thé, lait etc. etc. vin…
Puis Bourg St Jean de Losne, Ambérieux et enfin Lyon vers 10 heures du soir.
Salle attente, soupe, jambon, pain, vin, café chaud, cigarettes etc.
Répartition dans hôpitaux divers. Affecté École
Normale. Très bien installé.
Bien reçu, tisane, salle. Feuillet no 74.
La « magie » d’internet !!
En
avril 1915, Josy BOISSON, infirmière, écrit une lettre à Edmond dans laquelle
elle parle de Joseph…
Réveillé par chocolat et pain au lit, infirmières très aimables, toilette des mains…
Vêtements civils, linge + rouge etc. etc.
Déjeuner à
10h, soupe, bœuf, haricots, très bien cuisinés, fromage, vin.
Le soir,
soupe semoule, viande excellente, purée pommes, et compote. Exquis.
Le matin visite par le Dr Sanglophe, très doux ; pansé par infirmière très douce
Mme Crinche.
Le soir à 3
heures, matinée musicale donnée par ces demoiselles de l’École Normale, très
réussie… La Marseillaise en chœur. Une jolie poésie sur un Alsacien, une
piécette de Molière très amusante. Le soir lecture et coucher.
Lever 6h ½. Déjeuner 7h café au lait.
Puis assiste à la messe ; belle causerie d’un prêtre âgé ayant fait la campagne de 1870.
Toilette, écrit des lettres, lecture.
Déjeuner café au lait.
Coiffeur.
Reçu 1ère lettre Marg.
Reçu télégramme annonçant arrivée de Marg.
Pansement.
Visite Marg. et Mad.
(*) : « Mad » est
Madeleine sa fillette de 5 ans.
Matinée Bell.
Sortie. Déjeuner.
Promenade Kohn.
Décembre
Sortie La Mulatière. Vue du confluent.
Après-midi,
Fourrière, la basilique et la tour métallique, vue superbe.
Pluie
Marg. va à la ½ lune.
Fort brouillard le matin.
Fin du carnet
Il passe au 405e régiment d’infanterie le 15 mars 1915, puis au 239e régiment d’infanterie le 11 juillet 1916, puis finira la guerre au 140e régiment d’infanterie à partir du 21 novembre 1917. Il sera cité à l’ordre du 405e RI et décoré de la croix de guerre, étoile de bronze, en juillet 1916.
Notes inscrites à
la fin du carnet.
Bernardel.
Brulé Raymond à Villesiclair par Marchenoire, L. et Cher.
Mme Tiradon Adrien, 117 R Charenton, Paris.
Mr Dufour, 1 Rond-Point Clâtr… (Château).
Eugène Louis Val Roger Plessis Trénise, S.O.
Charles
Mr Jacqueau, 14 rue D’Alleray XV.
Mr Boust Lucien, 47 rue St Blaise Paris XX.
Mr Herent Gaston, 22 rue du Bois, Levallois Perret (S).
Mr Lethieis Pierre, St Arnoult par Montoire (L et Cher).
J Lecanu, chez Mr Gabiot.
Jules, 4 rue Melingue XIX Paris.
Henri Caplan.
Madame Caplan Dupin, Saint Viâtre (L et Cher), Château de Larssendrie.
Célestin Martin, 87 rue Pasteur, Villejuif Seine.
Eugène Dour, 16 R Falempin, Paris XV.
Claude Bertrand, Passage Crouin 10, Paris XIII.
René Bernardel.
Mr Pérousset, 35 rue République, St Mandé Seine.
Frédérique Tratrat
Mme de Larochelambert, 26-28 rue Norvins Paris XVIII
Raidl |
1 |
FG 53999 |
Bertrand C |
9 |
FG 50519 |
Dour E |
2 |
FG 52008 |
Jacqueau Ch |
10 |
FH 73874 |
Brulé R |
3 |
PG 47582 |
Boust l |
11 |
FG 33557 |
Lecanu J |
4 |
FG 54794 |
Dufour E |
12 |
FG 52068 |
Tratrat |
5 |
FG 55368 |
Tiradon A |
13 |
FG 52456 |
Bernardel |
6 |
RS 27494 |
|
14 |
|
Caplain H |
7 |
FG 49265 |
Martin C |
15 |
FG 496831 |
Lethieis |
8 |
|
|
5 |
|
Tiradon corvée.
Tratrat corvée.
Juyard malade.
Crétei, Viande.
Trache.
Jarriès.
Oury.
Roger.
Brault.
Villepon.
Chevacher.
Tratrat.
Delesse.
Outil 113.984
Oued Soul
El Goléa
Denizot Marechal, Sergines.
Rolain,
98 rue Dareau.
Piedferré, 83, rue du Bac.
Lozingot, rue de l’épée de bois 13, V.
Joffin, boucher, charcutier à Isdes (Loiret), andouilles.
Hugenin, 53 rue Jules Ferry, Vitry Port (Seine).
Brenot, 97 rue Victor Guichard, Sens, Yonne.
M Sardoillet, médecin-major Chirurgien-dentiste à Nancy.
Chocolat 2.30 Chau… 2.50
Sucre 0.30 Crayon 0.05
Rhum 2.- Enube… 0.30
Tabac 1.- Chocolat 1.15
Chau… 2.50 Rhum 1.-
Crayon 0.15
Porfr… 1.20
9.45 5.00
Je
désire contacter le propriétaire
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