Journal du Maréchal des Logis ALBERT Eugène

Du 29e régiment d’artillerie, 8ème batterie

 

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   « Comme je viens de découvrir le journal de marche de mon arrière grand-père Maréchal des Logis au 29ème régiment d'artillerie du 1er août au 29 octobre 1914, pour enrichir votre base, je vous propose l'intégralité des photos numériques que j'ai faites de ce carnet ainsi que la photo de mon AGP afin que vous puissiez le publier si vous voulez. Il est mort à Verdun.

Je le trouve superbe et touchant. Il dormait au fond d'un tiroir, chez une tante, qui s'est réveillée en sachant que je faisais de la généalogie. Pratiquement personne ne l'avait lu... C'est bien, la Famille !!!

Vous pouvez le publier. Il n'y a rien à cacher. Je vous remercie même de vous intéresser à ceux qui ont sombrés dans l'oubli ... puisqu'il est mort à la guerre. Je souhaite que ce carnet venu enrichir vos témoignages devienne immortel grâce à notre haute technologie...

Quel merveilleux travail vous avez fait. Nous ne devons pas oublier tout cela. Votre travail est très émouvant. Merci de le publier.
Bien amicalement. »
Chantal
(sept. 2005)

Merci Marie JO, Patricia, Ambroise et Charlie pour la recopie

 

                  

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Samedi 1er Août 1914

Lolotte ainsi que mon petit berger arrivent à Laon à 1 heure et me surprennent en plein travail.

Je suis dégoûtant et non rasé, pendant qu’ils ont déjeuné chez Leulier, en un tour de main je me rase et je m’habille pour les rejoindre. Nous sommes plutôt songeurs car nous sentons que l’heure de la séparation approche. Malgré tout nous essayons de sourire.

Vers 4 h 30 alors que je reconduisais mes êtres chers à la gare, un employé de chemin de fer nous annonce que la mobilisation est décrétée. Le moment de la séparation est pénible, je ne puis refouler mes larmes en voyant le visage bouleversé de ma pauvre Lolotte. Les reverrai-je nul de le sait. En tous cas cela ne  m’empêchera de faire mon devoir.

Quand je rentre au quartier je n’entends que cris de joie et chants. Tout le monde est heureux de faire enfin connaissance avec les boches et suivant l’élan je me mêle aux chants des camarades.

 

Dimanche 2 Août

Dès le jour branle bas général chacun court au poste assigné pour ma part je part avec le brigadier de tir Lhuillier pour reconnaître le cantonnement de la Batterie à la ferme d’Ogin. Le patron n’est pas très accueillant mais on verra bien d’autres, mon travail terminé je remonte à Laon rechercher la Bie à 3 heures nous quittons le quartier pour rejoindre le cantonnement.

Nous passons la 1ère nuit sur la paille pas trop mauvaise ce serait a souhaiter qu’il en fut toujours ainsi ? Je ne suis plus au bal chez Berthaux ?. Ma femme  Lolotte avait eu le pressentiment que je ne serai pas revenu.

 

Lundi 3 Août

Maintenant ce sont les corvées qui fonctionnent, armes, harnachement etc. pour ma part j’en suis exempté car il faut que je nourrisse les s/officiers et pour cela je suis obligé d’aller aux provisions à Laon et à Mons en Laonnais car ce vieil ours de patron ne veut rien nous vendre et pourtant il a de quoi. Les 1ers réservistes arrivent vers 3 heures.

Section ----- les avions de 23 heures à 1 heure. Nombreux trains.

 

Mardi 4, Mercredi 5 Août

La Batterie continue à mobiliser. Je donne le menu au cuisinier car je pars à la réquisition des chevaux.

Le 5 au soir je rencontre ce vieux Lucien quelle joie de nous revoir, mais cette joie est de courte durée car il faut que je regagne mon cantonnement. Après la soupe je suis heureux de pouvoir envoyer un mot à ma petite Lolotte.

 

Jeudi 6 Août et Vendredi 7 Août

Derniers préparatifs car nous embarquons ce soir. Le patron se déride un peu --l’omme ? C’est notre dernier repas ici nous avons fait un beau petit menu voici : Apéritif. Potage vermicelle. Bœuf garni. Poulet. Haricots verts. Café.

Aussi nous invitons nos officiers à dîner avec nous pour la circonstance le patron nous offre le vin, un omelette au rhum et 2 bouteilles de cognac que nous avons du reste oublier d’emporter. Le capitaine lui nous a payer le champagne et le lieutenant les cigares.

Mais tout à une fin à 22 heures départ – quel délire les jeunes filles de La Neuville (?) nous donne des bouquets pour ma part j’en ai reçu un superbe ainsi que l’adjudant. C’est en arrivant au quai d’embarquement que Caillard s’aperçut que l’on avait oublier le ricq ( ?) (cognac)

L’embarquement se fait très rapidement.

Jamais je ne l’ai vu aussi bien fait.

A 12h 30 nous quittons Laon presque tous les hommes du wagon dorment Catroux sommeille appuyer sur moi. Moi je ne dors pas je songe à Ma petite Lolotte et à mon grand diable de Georges que je laisse là-bas à Oestres. Ou allons-nous nous n’en savons rien ? Je vois que le train s’engage sur la ligne de Liort (?), laissant celle de Reims à droite et celle d’Hirson à gauche, vers 4 heures les hommes se réveillent comme si la trompette de garde avait sonné habitude certainement.

Ils s’étirent en peu et aussitôt se mettent à chanter nous nous arrivons à Liarz, Charleville (Mohon) Stenay et nous arrivons à Dun-sur-Meuse le vendredi 7 à 10 h 30.

On nous commande de descendre et nous débarquons sous une plue torrentielle une fois le travail terminé nous nous acheminons vers le village de Wiseppe ou nous devons coucher. Aussitôt arrivé je me mets a la recherche d’un lieu pour faire notre cuisine, ce n’est pas facile a trouver car nous sommes 14 et pourtant nous ne sommes pas difficiles, enfin je trouve quelque chose chez de très braves gens.

Ce soir je couche avec Catroux chez M. Dupuis. Personnes très aimables.

 

Samedi 8 Août

Quelle bonne nuit j’ai passée, j’ai fais le paresseux car je me suis levé à 7 heures après avoir fait ma toilette je me mets en quête de fourchette. Je réussis à trouver 3 beaux lapins mais il a fallu se remuer, pour le dîner j’ai une oie superbe. Le soir je recouche chez Monsieur Dupuis.

 

Dimanche 9 Août

Dès 4 heures je me lève avec Dupuis jeter l’épervier nous rapportons 10 livres de fritures et un beau brocheton, quel régal nous allons faire, mais va te faire fiche à 9 heures 30 le capitaine nous préviens qu’il faut être prêt à partir a 10 heures.

Nous sommes obligés de laisser tout en plan et de serrer le ceinturon d’un cran.

Effectivement à 10 heures nous partons, nous retrouverons Dun-sur-Meuse et à 16 heures nous arrivons à Haraumont. Nous faisons la cuisine en plein air, mais nous ne sommes plus que 6 à manger ensemble et en même temps Caillard et Dailly me désigne comme chef cuisinier.

Nous avons pu trouver des œufs, alors je fais une omelette et des frites, mais nous n’avons pas de pain, le train régimentaire n’étant pas arrivé Nous sommes à 25 km de Verdun. Le soir nous couchons derrière une porte de grande ayant comme matelas, une botte de paille chacun, c’est maigre.

 

Lundi 10 Août

A 5 heures départ de cantonnement, nous allons occuper une position de batterie, reconnue la veille par les officiers à 9 heures nous rentrons. Le Capitaine nous explique la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Nous sommes ici pour permettre le passage de la Meuse à l’armée du Gal Langle de Lary et en cas de nécessité nous devons tenir jusqu’au bout à la tombée de la nuit nous entendons quelques coups de canons mais très loin. Nous avons fait la cuisine et nous couchons dans une maison abandonnée.

 

Mardi 11 Août

Toujours le même cantonnement Le propriétaire de la boite est très grincheux on ne trouve plus rien dans le pays. Aussi avec l’autorisation du Capitaine je prends un train et je descends à Sivry pour nous ravitailler ainsi que les officiers. Le tabac manque de plus en plus.

 Le soir je suis de garde aux issues. Vers 21 h 30 est passer une batterie d’artillerie allemande en partie détruite.

C’est le 421 troupe de Stenay qui a fait ce beau travail

 

Mercredi 12 Août

Rien de particulier. Les habitants sont de plus en plus grincheux et ne veulent rien nous vendre. Alors nous nous servons nous mêmes ce n’est pas très bien mais tant pis, ils sont vraiment trop ours.

 

Jeudi 13. Vendredi 14, Samedi 15, Dimanche 16, Lundi 17

Rien de particulier

 

Mardi 18 Août

Enfin ce matin à 7 h 15 nous quittons le cantonnement ce n’est pas dommage car on commençait à trouver le temps long et ce sale patelin il fait une chaleur épouvantable vers 10 heures nous arrivons à Brandeville La comme à Haraumont on ne trouve plus rien, après avoir furté partout je réussis à trouver 3 bouteilles de vin. Nous sommes chez deux bons gaillards sont très gentils et aimables.

Nous mangeons un chevreau que nous avons acheté Je rencontre looche ? il est sergent major artificier au 128è.

Nous couchons dans la grange sur du bon foin.

 

Mercredi 19 Août

Nous restons au cantonnement quel beau temps mais il fait chaud. Les gens chez lesquels nous longeons sont inquiets car ils n’ont pas de nouvelles de leur fils qui est aux chasseurs a pied. Le vieux père me parle de 70. Rien de particulier

 

Jeudi 20 Août

Restons à Brandeville. Rien de particulier.

 

Vendredi 21 Août

A minuit nous sommes alertés, le départ est fixé à 1 heure. Pendant  que nous allons nous occuper de nos ---- les bonnes gens se sont levés pour nous faire le café, quel brave cœur ils ont. Quand nous partons nous les embrassons et cela vous fait quelque chose de voir pleurer ces bons vieux car alors on pense aux êtres chers que nous laissons derrière nous.

Après une marche sous un soleil brûlant nous arrivons à Vigneul-sous-Montmédy à 12 h 30. Cette fois ci nous tombons sur des grincheux les gens nous ferment la porte au nez. Un habitant veut nous faire payer des méchants fagots 11 sous alors qu’ils n’en valent pas.

 Enfin nous trouvons des personnes un peu plus charitables et avec Caillard, Dailly et Catroux nous couchons tout habillé sur des matelas placée à terre. Tout l’après-midi nous avons entendu une violente canonnade vers la Belgique.

 

Samedi 22 Août

Départ du cantonnement à 2 h 15 et nous passons la frontière Belge à 12 heures et aussitôt nous arrivons sous le feu de l’ennemi ça chauffe dur nous restons en position d’attente à Somthonne. Là nous voyons passer de nombreux blessés du 120è d’inf. et des chasseurs à pied. Nous apprenons que ça tombe dru sur le 17è.  De mes anciens camarades sont tués ce  sont Belly, d’Enfert de la 8è, Clément de la 7è, Boileau est blessé nous allons couché près d’une ferme a proximité d’une position que l’on doit occuper le lendemain matin. C’est notre 1ère nuit à la belle étoile.

Défense de faire du feu, nous sommes obligés de manger du singe sans assaisonnement. Au loin nous apercevons six grandes lueurs, ce sont des villages qui brûlent, des gens s’enfuient de ces pillages se sont les premiers émigrés, il y en a de tout age.

Pauvres gens. Enfin, je réussis a m’endormir ayant mon cher revolver comme oreiller.

Dimanche 23 Août

Dés la pointe du jour nous nous levons et nous allons mettre en batterie et à 6 heures nous ouvrons le feu et nous sommes heureux de taper dans le tas.

A 11 h 30 nous entendons un sifflement instinctivement nous faisons le gros dos et aussitôt nous entendons une formidable détonation, c’est un de leur 25 qui vient d’éclater, il est immédiatement suivi d’un autre et comme cela jusqu’à 13 h aussi nous nous sommes mis dans les tranchées dès les 1ère salves a un moment donné je reçus un petit morceau sur l’épaule droite cela produit une certaine sensation, mais rien de cassé tout va bien.

Le brigadier de tir Lhuillier a été légèrement blessé à la cuisse gauche, une indisposition de 8 à 15 jours et tout sera dit. Pas d’autre dégât.

Là ne font rien ils ne s’y entendent pas pour régler un tir et quels gâcheurs. Un s/officier d’artie française ferait bien mieux qu’eux. A midi on serre le ceinturon d’un cran car nous n’avons rien à marger. Le soir nous gagnons un bois situé dans une vallée au moins nous pouvons manger quelque chose de chaud, c’est la 1ère fois depuis 48 heures. Nous couchons sur le terrain. C’est la 2ème nuit à la belle étoile, mais de ce temps il fait bon coucher dehors.

Lundi 24 Août

Nous reprenons notre position de la veille et la danse recommence de plus belle des 6h 50.

Mais nos batteries des les 1ères salves font taire l’artie allemande. Des avions nous survolent et lancent des fusées au dessus de nous pour repérer notre position. Dans l’après midi le 4è groupe vient pour nous appuyer mais il  n’entre pas en action. A midi nous avons a mangé du singe et quelques biscuits. Je reçois une lettre de Lolotte et je suis on ne peut plus heureux. A la tombée de la nuit nous quittons notre position et nous allons bivouaquer dans une prairie près de Thonne la Long. Il est 21 heures lorsque nous arrivons, le temps de faire la soupe et de manger nous nous couchons a 23 heures.

Mardi 25 Aout

A 2 heures départ. Nous sommeillons sur nos chevaux. Nous traversons Montmédy au grand trot et nous nous dirigeons sur Marville. Nous apprenons que les Boches ont mis le feu à l’hôtel de ville de ce pays dans lequel étaient des blessés français et ils ont refermé les portes sur les femmes qui cherchaient à s’enfuir.

 Nous sommes tellement fatigués et accablés par la chaleur que des que nous faisons une halte seulement de 5 minutes nous nous endormons sur le bord de la route. Enfin nous prenons position au Téton de Quincy. 2 km Sud de Montmédy. Nous sommes batterie d’avant-garde.

A la tombée du jour le Commandant fait prévenir que nous devons rester sur la position. Mais nous n’entrons pas en action.

A 19 heures nous laissons un servant par pièce pour garder le matériel et nous allons faire notre cuisine 1 km plus loin pour que les Boches ne voient pas nos feux. Nous nous mettons dans un fond. Nous mangeons de bon cœur car nous n’avions rien pris d’autre, depuis la veille, qu’un petit morcerné du  pain. Tout d’un coup nous aperçons (sic) de grands éclairs et nous entendons de fortes détonations c’est le fort de Montmédy qui tire.

Enfin a 22 heures nous regagnons nos pièces pour faire un somme et j’e n’ai pas été long à m’endormir derrière le caisson

Mercredi 26 Août

Nous dormions a poings fermés quand tout a coup le cri de « Halte là » poussé par les sentinelles nous réveille en sursaut. C’est l’agent de liaison qui vient prévenir le Capitaine qu’il faut partir immédiatement pour rejoindre les autres Bies nous avions seulement dormi 2h ½ c’est peu, nous allons a marche forcée, nous traversons Stenay, les ponts sont minés et prêts a sauter, nous passons à 2 km de Wiseppe notre 1er cantonnement.

Tout le long de la route on ne voit que des émigrés des hommes,  beaucoup de femmes, de enfants et de vieillards, pauvres gens c’est ce qui nous fait le plus mal au cœur de voir toute cette misère car si l’on savait les siens comme cela quelle tristesse.

Que deviens-tu ma petite Lolotte et toi pauvres Georges. C’est a vous que je pense en voyant ces pauvres gens.

A 15 heures nous arrivons à Barricourt (Ardennes). Nous mangeons avec les s/officiers de la 22è cie  du 238è. A 19 heures nous allons nous coucher dans une grange car nous voulons profiter que nous sommes arriver de bonne heure pour nous reposer.

Jeudi 27 Août

Mais va te faire fiche à minuit nous sommes alertés et nous repartons pas avant 1 h 30 La pluie se met à tomber en cascade, quel fichu temps, nous préférons encore la chaleur.

Au départ l’allure est pire puis nous stationnons un moment, le 82è nous passe au grand trot, puis ce n’est que défilé d’inf. malgré la pluie et l’herbe humide nous profitons de l’arrêt pour faire un somme car nous sommes rudement en moins perçu sur le sommeil.

Au bout d’un moment de pose nous nous remettons en route, nous marchons dans la direction de Sedan, on entend une violente canonnade vers 11 heures.

Nous apprenons que nous allons prendre part à la bataille de Beaumont. Le personnel de reconnaissance part pour reconnaître une position de Bie.

Pendant ce temps nous faisons une nouvelle halte pendant cette halte nous voyons passer de nombreux blessés de l’inf. coloniale, les pauvres diables sont pleins de boue, mais pas un ne se plaint.

Le corps colonial ayant réussi a arrêter leur marche nous ne rentrons pas en action, en arrivant a la maison blanche nous croisons une vingtaine de prisonniers, ils regardent notre matériel d’un air ahuri.

Nous passons devant le monument de 70 et nous arrivons à la ferme de Thibaudine. Nous bivouaquons près de cette ferme et nous sommes a peine installés qu’un avion nous survole mais les mitrailleuses des coloniaux ont en vite fait de le descendre et par hasard il vient atterrir juste a proximité des avions français. Nous sommes tellement fatigués, que nous ne pensons pas à manger, nous cherchons une place sèche pour nous coucher mais pas moyen d’en trouver avec Caillard, Dailly et Catroux, nous décidons de dormir sur les avants-trains.

 

Vendredi 28 Août

J’ai passé une très mauvaise nuit sur mon avant train, j’en ai mal aux reins, mais on n’a pas le temps de se retourner, vite a cheval et rapidement, nous allons mettre en batterie d’aussitôt nous ouvrons le feu sur les Boches qui essaient une contre attaque, car la nuit ils ont repassé la Meuse.

Il est 5 heures nous avons comme objectif le bois d’Yoncq, nous tirons à 2000m, 3400 puis 4000 nous avons fait paraît-il du fort beau travail avec l’aide du 52è et du 3è artie coloniale et du 2è artie lourde (155).

Jamais je n’ai vu tant d’artillerie en action sur un front de 900 m on compte 108 pièces qui crachent en veux-tu en voilà. Les marmites font leur apparition, c’est ainsi que nous avons baptisé leurs gros obus.

Vers 9 heures leur tir paraît mieux réglé quelques projectiles tombent sur la 7è sans occasionner de dégât.

Le Lt Renardier agent de liaison du colonel est tué d’un éclat d’obus au moment ou il montait à cheval pour transmettre un ordre. Au haut d’un instant nous avons l’explication de la justesse de leur tir c’était grâce a un espion qui était placé dans la ferme de la Thibaudine et lequel lui faisant des signes avec un fanion rouge. Immédiatement les servants d’une batterie du 62è se précipite et passe le bonhomme par les armes. Nous nous retirons de la position à 19 heures sans aucune perte et nous allons bivouaquer a proximité de Sommanthe, des l’arrivées les servants mettent en demeure de faire la rata.

 

Pendant que les conducteurs installent leurs chevaux. Nous avons la dent mais en attendant que ce soit prêt je m’allonge dans l’avoine pour faire un somme. A minuit Leclerq vient m’apporter ma ration, le brave garçon a eu bien du mal à me réveiller car je dormais comme une souche. A ce moment nous apprenons que  le 2e corps a été cité à l’ordre du jour pour sa belle conduite et en particulier le 29e nous en sommes très heureux. Là dessus on se recouche le ventre plein.

Samedi 29 Aout

Nous partons à 3 heures, en route nous apprenons que le 2e corps s’en va en repos. Quelle joie.

Nous arrivons à Termes à 13 heures, aussitôt je cherche une maison pour faire la popotte, je trouve très facilement ce qu’il me faut chez Mr Hauchart, les gens son très aimable  et se mettent entièrement à ma disposition. Nous mangeons une  bonne soupe et deux lapins. Le soir nous couchons au grenier sur un bon  tas de foin.

Dimanche 30 Aout

Nous étions tellement fatigués que nous avons dormi jusqu’à 8 heures, c’est ce vieux Leclercq qui nous a réveillé en venant chercher mon linge  pour le laver, il pense à tout ce garçon là. Comme Mme Hauchart veut à tout prix faire notre popote, j’en profite pour descendre à la rivière faire ma toilette à fond car j’en ai rudement besoin.

Après je me sens beaucoup mieux et bien délassé. à midi nous faisons honneur au repas que Mme Hauchart  a bien voulu nous préparer, bous mangeons en famille, quel bon cœur ont ces personnes-là, nous sommes comme les enfants de la maison, l’après-midi nous allons faire un tour dans le village et nous revenons à 17h ½ pour la soupe.

Nous sommes bien en route à dîner lorsque un agent de liaison vient nous prévenir que nous devons partir à 19 h. on met les bouchées doubles Locquegnies n’a pas le temps de terminer car il faut qu’il parte de suite au campement. Nous allons bivouaquer à la ferme Belle Joyeuse, situé à 1 Km. N.E de Grandpré. La patronne une vieille rouspéteuse, nous envoie promener lorsque nous nous présentons pour dormir sur la paille. Voyant cela nous en prenons tout de même.

Lundi 31 Aout

A 5 heures nous quittons le bivouac pour aller prendre position entre Germont et Autruche, dès notre arrivée nous nous mettons en action pour appuyer la marche du 91e d’infanterie, comme chaque fois nous voyons les villages situés devant nous qui sont en flammes, c’est le tableau de chaque jour. A 15 heures nous cessons le feu, ainsi que la 7e.

La 9e et le 4e groupe qui sont plus à notre gauche font un feu d’enfer

Je vois passer David, Gaschet, Debuire, Guyetant tous en bonne santé

A 19 H30 nous quittons notre position pour nous rendre au bivouac à  Km .NE. de Briquenay. Nous nous dépêchons de  faire le rata car nous mourrons de faim et nous sommes vannés, nous ne tenons plus sur nos guiboles. La soupe mangée, je m’allonge derrière le canon et je ne tarde pas à pioncer ferme, car il était minuit quand nous nous sommes couchés.

Mardi 1 septembre

A 4 heure réveil, à 4h30 départ pour retourner à Termes où nous arrivons à 10 heures, aussitôt je me précipite chez mes nos anciens hôte qui sont heureux de nous revoir sain et sauf et il nous prépare de suite une bonne omelette avec une tranche de jambon je coure chercher Caillard  Dailly  Catroux Demaury  Sabria Locquegnies pour manger, ils sont très contents car tout comme moi ils ont la dent.

Nos hôtes sont très inquiets car le maire leur a dit qu’il fallait évacué le pays, nous les rassurons de notre mieux.

Le soir à 17 heures quand nous mangions le fils qui est de la classe 14 vient nous faire ses adieux car il part devant avec son jeune frère, charmant gamin de 10 ans qui me fait penser à mon Georges. Les adieux furent touchants et rien ne nous fit aussi mal cœur. Que de voir  partir ces deux enfants sans leurs parents car eux ne devaient partir que le lendemain.

Le repas terminé nous prenons nos dispositions pour  aller nous coucher derrière notre matériel car il faut s’attendre à partir d’un moment à l’autre.

Mercredi 2 septembre

Nous ne quittons par Termes avant 5 heures, nous avons eu le temps de faire un bon somme à 7 heures nous mettant en (mots rayés) tout le régiment met en batterie non loin du village de Montchetun.

Le Capitaine nous annonce que nous devons tirer sur une crête dès qu’apparaîtra une lueur rouge sur cette crête, ce qui voudra dire qu’elle a été évacuée par les nôtres, mais nous ne voyons rien paraître à 7 h ¾ nous ouvrons le feu à 7000 m et nous tirons toute la journée entre cette distance et 7600. Toutes les pièces du régiment crachent sans relâche, les marmites tombent mais ne font aucun dégât personnel et matériel à midi pendant une légère accalmie nous mangeons un morceau de viande froide et nous vidons un litre de byrrh que j’avais eu la précaution de prendre à Termes, c’était heureux car par cette chaleur nous mourrions de soif et pas moyen de trouver une goutte d’eau.

Le soir nous continuons à tirer, on ne voit plus que les lueurs par le départ du coup.

Enfin 20h30 nous quittons notre position, tout à coup on nous crie de derrière de marcher au trot, que ça pressait en queue, mais on ne s’émotionne pas pour si peu et on continue au pas, on demande même en blaguant si ce sont les hulans qui viennent nous rendre une visite.

Nous bivouaquons à 2 Kms. sud de notre position.

A 22 heures nous mettons la soupe sur le feu, aussitôt en entendant que ça cuise je fais un somme, mais quand Leclercq vient pour me réveiller, je ne veux rien savoir et il parait que je l’ai envoyé promené mais à force je me réveille et je fais honneur à ma gamelle.

Jeudi 3 septembre

Départ à 3 heures notre marche vers le sud s’accentue de plus en plus et par une chaleur tropicale nous passons à La Neuville au Pont, nous laissons Ste Menehould à gauche et Valmy à droite, tout le long de la route ce n’est qu’une file d’immigrés. Nous faisons la grande halte et nous apprenons que nous devons cantonner à Dampierre, village situé à 6 Km. S.E. de Ste Menehould.

Là aussi les gens se préparent à partir.

Le soir nous mangeons deux poulets et un bon plat d’haricots.

Vendredi 4 septembre

Départ à 4 heures. Passons à La Neuville, Noirlieu,

Là j’ai pu trouver 5 paquets de tabac, ce n’est pas un malheur car  nous en sommes complètement dépourvus et j’ai vu des fumeurs enragés fumer des feuilles de chênes, j’en cède 2 à mon chef Dailly.

Puis nous traversons St Mard sur le Mont et nous arrivons à Possesse. Dans ce village, j’ai pu trouver chez un agriculteur qui se préparait à évacuer 2 Kgr de jambon et 1 Kgr de lard.  bonne aubaine. Nous apprenons par le Lieutenant Boulté que ce n’est plus de la tactique que nous faisons mais de la stratégie et que le général Joffre leur temps un piège de sa façon et que s’ils tombent dans le panneau tout est pour le mieux. Nous voilà un peu réconforté car nous nous demandions bien pourquoi nous marchions  de la sorte vers l’arrière. Donc maintenant attendons les événements. Le rata avalé, on prépare son lit derrière le matériel, et maintenant que l’on a l’habitude de coucher dehors on y pense plus et on dort même très bien mais pas longtemps.

 

 

Samedi 5 septembre

Nous quittons le cantonnement à 3 h le soleil est de plus en plus accablant, mais malgré la fatigue et la chaleur tout le monde tient bon. Nous traversons les Vanault les Dames - Heiltz le Maurupt – Pargny sur Saules où les habitants nous attendent avec des seaux de vin coupé d’eau, une bonne sœur de St Vincent de Paul, nous fait distribuer des pommes par les fillettes qui sont avec elle puis nous traversons la voie ferrée et au passage à niveau  le garde barrière qui doit évacué, nous distribue gratis toute sa basse cour, pour mon compte j’ai 3 lapins.

Ensuite nous passons à Perthes et nous arrivons assez tard à Hauteville où nous cantonnons, en arrivant je donne un lapin pour les officiers et je fais cuire les deux autres pour nous, nous invitons Mathieu à dîner. Le soir nous couchons dans une grange.

Dimanche 6 septembre

A 4 heures départ, nous refaisons en sens inverse une partie de la route parcourue hier, jusqu’à Perthes puis nous tournons à gauche et nous suivant la route nationale de Paris à Strasbourg ; Nous nous dirigeons sur Vitry le François nous traversons Orconte ou on y installe une ambulance et vers 14 heures nous arrivons à Thièblemont à 13 Km de Vitry le François nous installons le bivouac les chevaux restant attelés. 

Le chef d’escadron nous lit un ordre du général Joffre, lequel disait qu’une grande bataille allait avoir lieu, qu’il faudrait tenir coûte que coûte et aux besoins se faire tuer sur ses positions plutôt que de reculer .

Nous étions heureux de savoir que l’on allait bientôt recommencer à se battre, car nous en avions assez de marcher vers l’arrière et le moral des hommes en souffrait un peu, , c’est dans ces cas là qu’il faut savoir les prendre pour les faire marcher, pas un des miens ne flanchait et ils étaient même plutôt blagueur et en cela je leur donnais l’exemple, malgré que j’étais rongé d’inquiétude de ne pas avoir de nouvelle de ma petite Lolotte et de Georges, mais le pauvre Catroux, lui se laissait abattre il était triste comme une porte de prison et j’avais beau lui lâcher des boniments, rien ne parvenait à le dérider.

 

Donc très joyeux nous regagnons notre popotte et c’est en chantant que nous avons avalé nos pommes de terre cuites au lard et un bon bifteck. Puis nous sommes allés nous reposer dans  grange voisine car il est bien recommander de ne pas s’éloigner, avant de nous coucher nous montons sur une petite crête et nous apercevons des lueurs de huit grands incendies ce sont encore des villages auxquels ces sauvages ont mis le feu.

A côté de nous des hommes du 147 ° creusent des tranchées et ils y mettent de l’ardeur les gars. Nous regagnons notre grange pour faire un somme car demain il faut être d’attaque, on se souhaite bonne nuit et os se plonge dans les bras de morphée.

 

Lundi 7 septembre

Dès 3 heures tout le monde debout et nous nous tenons à nos postes en attendant les ordres, au bout d’un moment, impatients nous allons aborder le capitaine qui se trouve avec le lieutenant pour savoir s’ils connaissent quelque chose de la situation mais tout comme nous ils attendent les ordres.

Au bout d’un moment le lieutenant me demande si je n’ai pas un chasse brouillard pour lui et le capitaine, car il sait que j’ai toujours une réserve, au bout d’un moment je reviens avec un litre de marc, j’en fais la distribution à ceux qui se trouvent là  et nous trinquons à notre prochaine victoire. 

A 4 H 30  on demande le personnel de reconnaissance,  1/ 4 d’heure  après nous nous mettons en route, nous traversons Thièblemont au grand trop et nous mettons en Bie (batterie) à la sortie ouest du village – face à  Vitry le François – 50 m devant nous, nous avons Farémont et 20 m derrière Thièblemont – à 5 heures nous ouvrons le feu et le réglage terminé nous tirons à toute volée, nous tirons 18 coups par pièce  en 1 heure et demie. L’artillerie allemande  ne répond pas beaucoup, aussi 2 servants par pièce en profitent pour faire des tranchées.

A la fin de la journée aucune perte. Le soir nous couchons sur les positions après avoir mangé la soupe que les hommes  de l’échelon nous avaient préparé car nous n’avions pas eu le temps de nous en occuper.

 

Mardi 8 septembre

Dès la pointe du jour la lutte reprend de plus belle, les marmites nous sonnent le réveil ainsi que le bruit de ferraille des 77. Leur tir est très bien réglé sur le 4ème groupe qui subit pas mal de pertes, d’abord le lieutenant Maturier (10e) est tué je vais communiquer un ordre au Commandant Journel, je suis obligé de traverser Farémont en feu sur lequel s’abat une pluie de projectile, je rase les murs croulants et j’arrive à mon but, ma mission accomplie je reviens tranquillement à mon poste, comme je passais devant l’église deux projectiles éclatent dans la cloche.

Peu de temps après le Capitaine Clerc (11e) est blessé à la cuisse et à l’épaule.

L’adjt Vivien  (11e) blessé également à l’épaule. Les maréchals des logis Moreau et Gelé de la 12 sont blessés à la tête, Boudréaux  (11e) est décapité net. Pas mal d’hommes sont tués ou blessés.

L’ordre arrive au 4e groupe  ses pièces et de se retirer derrière Thièblemont, c’est alors que le servant Lagrange dit la grenouille s’est distingué en allant lui seul déclaveter les pièces.

Vers 15 heures ce fut à notre tour à prendre un peu sur la pipe, Dailly qui était resté avant nous pour faire la caissette s’en va rejoindre les avants trains pour être prêt à tout, au moment ou il arrive sur la route il est renversé par l’explosion d’un projectile, nous le croyons blessé mais non il se relève indemne. Le brig Lambert est tué par une balle de 77 qui lui fait sauter la cervelle, c’est notre premier mort dix chevaux sont tués également.

Voyant cela Dailly fait changer de place aux avants trains, une ½ plus tard un 110 vient éclater sur le timon d’un avant train et tue 5 chevaux, par un (mot rayé) miracle aucun conducteur n’est touché. Pendant ce temps nous continuons à tirer dare dare et les 77 tombent sans arrêt sur la Bie (Batterie) mais en sans souci le moins du monde. Nous sommes aussi calmes qu’aux écoles à part quelques uns dont je ne veux pas citer les noms. La nuit arrive et nous tirons toujours, nous sommes aveuglés par lueurs des obus explosifs et par celles des éclatements de 77. C’est un vrai tintamarre on ne s’y entend plus.

Enfin à 20 heures tout rentre dans le calme, on a encore dans les oreilles le bruit de la canonnade tellement celle-ci a été violente. Devant nous Farémont continue à brûler.  Thièblemont lui aussi subit le même sort de même que Fravesse à notre droite.

Les  avants trains  viennent se placer à proximité de la Bie  pour passer la nuit. Les hommes de l’échelon arrive peu de temps après avec la soupe, ils sont un peu inquiet sur notre sort mais se réjouisse vite en apprenant que nous n’avons pas eu d’autre perte que le pauvre Lambert.  Aussi vite on va chercher sa fourchette et on oublie vite les fatigues de la journée devant le rata qui fume.

Ce soir je suis de garde.

Baillard  me dit  attention, « ouvre l’œil ». Tu peux dormir tranquille, ainsi que les copains lui répondis je. Que ces heures de veille semble longue, car il ne faut se laisser surprendre.

Vers 1 heure du matin, une des sentinelles crues apercevoir quelque chose, immédiatement elle vint me prévenir, car elles ont ordre de ne pas tirer avant de m’avoir rendu compte à moins qu’elles ne soient surprises. Je prends un fusil ramassé dans la journée et nous voila partis en rampant pendant 100 m. Au bout d’un verger, l’homme (mot rayé) ardon m’arrête et me dit  tenez regardez maréchal des logis et son bras m’indique le sommet de la crête mais je ne distingue rien.

Tu te trompes lui dis –je, mais lui toujours obstiné mais non regardez bien. Je regarde bien et je vois que ce qu’il prenait pour des ombres, n’était autre qu’un champ de luzerne qui ondulait sous le vent. Je lui fis remarquer, mais pour ne pas les départir de sa surveillance, je lui dis vous avez tout de même bien fait de me prévenir car avec eux il faut s’attendre à tout et je rejoignais la tranchée qui me servait de poste.

Rien de particulier le reste de la nuit et silence complet

4e groupe venu chercher son matériel.

 

Mercredi 9 septembre

Comme elles l’avaient déjà fait la veille dès 5 heures les marmites sonnent le réveil.

Le pauvre Florentin qui venait de se réveiller et à peine sorti de sa tranchée est tué au moment où il regagnait son poste, la marmite est tombée à 20 m de lui. Le S /LT Boquet qui était à 3 m de l’endroit ou le projectile a éclaté n’a pas une égratignure.

La lutte continue acharnée mais nous tenons bon.

Vers midi, le bombardement de Thièblemont recommence de plus belle. Le Colonel Aubry (Paul Omer) est tué alors qu’il examinait un fusil Mauser. Le capitaine Armand subit le même sort. Le général Lejaille et le lieut. Colonel Pierre sont grièvement blessés. Un sergent et 8  hommes du 91e qui traversaient le village sont tués aussi. Le soir nous couchons encore sur le terrain.

 

Jeudi 10 septembre

 

Deruelle qui était en poste d’observation fut tué également ayant eu une partie du crâne enlevée et aussitôt je pense à sa femme à qui nous avions si bien promis de lui ramener, que va-t-elle dire pauvre femme.

Nous apprenons que notre infanterie progresse et que tout va pour le mieux. L’après midi la pluie se met de la partie gare ce soir il va faire bon coucher dehors.

A 11 heure, je vais porté au chef d’escadron de la part du Colonel du 147e c’est pour lui signaler qu’une forte colonne débouche de Vauclerc allant sur  Ecriennes. Mais à peine arriver à la crête je suis salué par une salve de 77.

Immédiatement je me jette à terre et je laisse passer la rafale. Puis au pas de course je continue ma mission et j’arrive près du Commandant qui me remercie. Je rejoins mon poste quand une 2e salve fait son apparition, je me rejette à terre, dans ces moments là on ne regarde pas si l’endroit où l’on se couche est propre, puis je repars je n’avais pas fait 25 m qu’une 3e rapplique pour la 3e fois à terre et me relevant j’aperçois un sac de fantassin.

Je me le colle dans le dos et je me dis advienne que pourra à la 4e et dernière salve j’ai continué ma route tranquillement et je suis arrivé à mon poste, ça ne fait rien, ils n’ont pas peur de gâcher la marchandise ces oiseaux, brûler inutilement 24 obus  pour un seul bonhomme. Pendant ce temps là, les camarades de la Bie et de la 7e prévenus par téléphone du Comd faisait un tir fauché à obus explosifs sur cette colonne, puis tout rentra dans le silence.

Le soir avec six hommes, je m’en fus enterré ce pauvre Duruelle.

Le Capitaine et toute la Bie, sauf la garde des pièces, le conduisit jusqu’au cimetière ou le Capitaine un petit discours qui nous remua ; puis nous fîmes un fosse près de celle du Colonel et nous le plaçons sur une bonne couche de paille  et mêmes quelques planches sur lui , une fois la fosse refermée, nous plaçâmes dessus un pot de fleurs et un petit drapeau trouvé dans l’église, nous avons mis un également sur la tombe du Colonel et du Capitaine Armand et un aussi sur la fosse commune du sergent et des 8 hommes du 91e. Puis nous regagnâmes nos pièces en repassant au milieu de l’incendie de Thièblemont. J’étais tout triste car je me demandais ce que deviendraient ma lolotte et mon Georges  si pareil malheur leur arrivait, mais je chassais vivement ces sombres pensées, mais le pire c’est que l’eau se remettait à tomber, triste nuit que celle-ci passée dans la boue.

 

Vendredi 11 septembre

La journée fut à peu près calme, l’infanterie allemande bat en retraite, son artillerie seule la protège, nous en profitons pour faire un tour sur le champ de bataille  et enterrer nos morts.

A 15 heures, la pluie se remet à tomber, à 18 heures nous quittons nos positions pour nous porter  en avant et nous logeons à Heiltz Le Hutier, mais le village est presque désert.

 

Samedi 12 septembre

A 5 heures départ, nous poursuivons notre marche en avant nous traversons le champ de bataille, quels tableaux tous les villages que nous traversons sont rasés, ils sont tous subis le même, ce sont Maurupt le village fut  où lieu de sanglants combats le village fut 3 fois par nos troupes, les rues sont encombrés de cadavres, Pargny s/ Saules où les gens nous avaient fait un accueil très chaleureux en passant, il n’y restait plus que la gare, et enfin Heiltz le Maurupt, notre marche derrière l’infanterie est très lente , enfin à 19 heures nous arrivons à Bettancourt.

Je me couche dans la ferme du maire, le pauvre homme a failli être fusillé 2 fois par les boches, il pleut tellement que nous ne faisons pas de cuisine et nous nous couchons sans manger.

Dimanche 13 septembre

Le matin en me levant, je bois un litre de bon lait dont la femme du maire nous fait cadeau, départ 4 h 30, nous passons à St Mard s/ le Mont ou nous faisons la grande halte, aussi on s’empresse de faire à manger car nous avons faim, le temps est beau on interroge avidement les gens du village pour savoir s’ils ont eu à souffrir des boches, ils nous disent qu’ils n’ont fait aucun mal aux habitants mais que par contre ils ont tous pillé, qu’ils tuaient toutes les volailles et ne les mangeaient même pas.

A 13 heures nous repartons toujours encadrés par l’infanterie  nous traversons  Givry en Argonne la même scène qu’à St Mard, mais quelques femmes ont eu à souffrir de leurs insultes, on nous dit qu’il y avait à peine 4 heures que les derniers étaient partis et que nous premières troupes les suivaient de près au bout d’une ½ heure nous remontons à cheval passons la Neuville et nous arrivons à Sivry s/ Ante à 20 heures.

Le bivouac formé nous nous empressons de faire le rata et ensuite nous allons nous reposer.

 

Lundi 14 septembre

Départ 5 heures, notre marche vers le nord s’accentue, nous traversons Ste Menehould, les gens sont heureux de revoir les troupes françaises, les jeunes filles et les enfants nous distribuent des pommes et des prunes, quelques unes nous donnent des fleurs.

Nous passons ensuite à Chaude fontaine et à La Neuville au Pont dans ce village nous nous arrêtons ¾  d’heure, les gens nous donnent du pain blanc, tous sont heureux de nous revoir et ce n’est que malédiction contre les barbares, tués les tous ces sauvages là, une dame nous raconte que son père agé de 70 ans a été emmené par eux.

Tout à coup une bonne vieille arrive et me remet une bouteille de vin que les boches n’ont pas pu avoir, je veux la lui payer mais la brave femme ne veut rien entendre  après l’avoir remercié et embrassé, ce qui l’a fait pleurer car elle a 2 fils qui sont aussi au feu, nous avons bu la bouteille à 8, quel bon vin. Avant d’arriver à Ste Menehould nous avons vu une batterie de boches qui a été anéantie hier par le 42e et coïncidence bizarre, c’est une batterie du 42e allemand.

Enfin, nous arrivons à Vienne la Ville que les boches ont évacué la veille.

 

Mardi 15 septembre

A 4 h 30 nous nous mettons en route, passons à St Thomas.

La reconnaissance part et nous nous mettons en position d’attente à côté de nous sur le bord de la route est un cadavre de dragon allemand son cheval se trouve 2 m plus loin.

Tout à coup le chef  vient chercher une pièce pour se glisser dans le  village de Servon cette pièce est à peine en route qu’un agent de liaison vient nous chercher car au lieu d’une seule pièce il faut toute la batterie  et il faut faire vite, assis dans un fossé nous voyons 4 boches gardés par 2 fantassins, ces prisonniers ont l’air fatigué, nous nous marchons dare dare et on a le sourire car on se dit ça va barder.

Et en effet ça devait barder et même dur.

La section de l’adjudant se met en batterie à la sortie de Servon et avec ma section je reste sur roues ans la rue du village, nous sommes à 600m des tranchées. Tout à coup les 77 tombent sur la section en position, et les marmites de l’autre côté du pays, mais on voit que les salves se rapprochent de plus en plus, tout le monde sent que la situation devient critique, mais on reste calme, on en rit même.

Les marmites se rapprochent si bien que l’une d’elles éclate à 2 m du 2ème caisson de ravitaillement je donne l’ordre aux conducteurs de porter leur voiture en avant et je les fais arrêter à hauteur des dernières maisons du village, ce qui nous avait gagné 6 mètres, ensuite j’ai été rendre compte au Capitaine, comme je me disposais à regagner ma section une autre marmite vint à éclater à 1 m derrière le même caisson, les chevaux affolés s’emballent avec l’aide d’un servant je réussis à les  arrêter, le Capitaine me dit qu’il va me citer à l’ordre du jour du régiment, voyant que nous étions toujours sous le feu des gros, je lui demande ce qu’il faut faire, il me dit de regarder si je peux mettre ma section à coté de celle de l’adjudant, la place est restreinte mais on y arrivera tout de même.

Il y avait une heure que nous étions placés et je causais avec les hommes qui faisaient les tranchées, quand en relevant la tête j’aperçois des ombres qui se glissaient derrière les buissons, c’était les boches qui arrivaient sur nous à 300m, je fais prévenir le capitaine, mais dans la situation où nous étions impossible de tirer, et ils arrivaient de partout , le chef de bataillon du soutient, fait dire au Capitaine qu’il ne peut plus assurer notre sécurité, les boches se voyant démasqués, tirent, et blessent des servants, on amène les avants trains, mais la plupart des chevaux de la 2e section sont abattus et ne peuvent accrocher les trains, ma 1er  pièce s’en va s’en encombre, mais le canon de la 2e verse dans un fossé situé à gauche du passage, comme il ne restait plus que 6 servants de cette pièces, nous essayons de nous dégager, mais impossible.

Le Capitaine donne l’ordre de dételer et va rejoindre la batterie nous restons donc seul et nous dételons aussi tranquillement que si nous étions à la manœuvre, pendant ce temps avec les servants nous tirons quelques coup des mousqueton.

Une fois que tout fut terminé je fis monter les servants sur les sous-verge et en route, j’ai le bonheur d’arriver sans avoir perdu 1 homme, mais nous laissions 3 canons sur le terrain. Le soir fatigué et encore sous le coup de cette affaire, je me couche sur un vieux sac que j’étends sur l’herbe humide et je m’endors d’un profond sommeil

 

Mercredi 16 septembre

A 5 heures le brigadier de Meersehmann me réveille pour prendre le café, je m’aperçois que je suis couché dans un flaque d’eau et je suis complètement trempé, il avait plus une bonne partie la nuit et j’étais si fatigué que je ne m’en suis pas aperçu. Caillard, Pailly, Catrona, malades. Avec ma pièce disponible, je reste à la disposition du chef d’escadron.

A 7 heures nous mettons tous en Batterie au Sud Ouest de Vienne la Ville.

A 9 heures nous mettons tous cette position pour en reprendre une autre à l’Est du village. Nous nous installons à 10 heures, cote 174.

A 11 heures 7 et 9 appuie l’attaque à Melzicourt.

Vers 14 heures elles bombardent Servon. Le soir je vais coucher à l’échelon, placé à 2 Km S.E des batteries. La pluie tombe et nous sommes dans un véritable bourbier. Les chevaux sont enfoncés jusqu’aux jarrets. Je me couche sur un avant train, mais impossible de dormir tellement la pluie est froide et à minuit je me lève pour aller me chauffer à un feu que font les gardes chevaux. J’y passe le reste de la nuit.

 

Jeudi 17 septembre

A 4h30, nous partons car il faut que ma pièce soit en place pour 5h15.

La pluie tombe toujours et les chemins sont complètement détrempés et l’on a du mal à arriver à notre emplacement. 7 et 9 tirent encore sur Servon. La canonnade marche dure.

Le soir je fais laisser le matériel en place et je rejoins l’échelon avec les avants trains. La soupe mangée, nous nous étendons sous des abris légers construits pas les servants disponibles, mais ils sont tellement minces que nous ne tardons pas à recevoir de l’eau sur la figure.

 

Vendredi 18 septembre

Je me réveille tout trempé, manteau, culotte, caleçon, tout est traversé mais on a pas le temps de se lamenter car 4h45, nous allons reprendre notre poste.

La pluie tombe et nous sommes faits comme des cochons, nous sommes pleins de boue, on ne sait plus où se mettre pour être un peu moins sale. Rien de particulier dans la journée.

Le soir, nous couchons à Vienne la Ville dans une maison abandonnée. Au moins là on est à l’abri.

 

Samedi 19 septembre

A 5h30 réveil et à 6 heures, nous remontons à notre poste. Situation toujours la même. Le mauvais temps continu. Quelques salves de 7 et 9.

 

Dimanche 20 septembre

La Batterie est reformée au complet avec du matériel venu d’une section de parc mixte et toute la Batterie prend position à la côte 174 à droite des deux autres batteries du groupe. Nous sommes en surveillance sur une crête occupée par une batterie du 17e pour tirer en cas de retraite de cette batterie. Caillard reprend son service. Pailly et Catroux vont un peu mieux. 7 et 9 continuent à tirer su Servon.

De l’artillerie lourde (120) arrive et met en Batterie entre St Thomas et Vienne la Ville, et, dès le soir, les Batteries se mettent à tirer sur un bivouac qui leur a été signalé par un avion.

 

Lundi 21 septembre

Dès la pointe du jour, le duel d’artillerie recommence très violent. Nous apprenons que le 120 a détruit le bivouac sur lequel il a tiré la nuit et il paraîtrait que les hommes du 51e entendaient les cris des Boches de leurs tranchées. Le mauvais temps continue.

Beaucoup d’hommes sont atteints de dysenterie.

A 10h30 nous appuyons une attaque sur la lisière Ouest du Bois de la Gruerie pour s’emparer de la croupe allongée E.O au N de Servon. Nous tirons au-delà de la route Servon-Pavillon du Roi. Cette attaque réussie en partie et à 13 heures nous cessons le feu. Suis proposé pour adjudant pour l’affaire de Servon.

 

Mardi 22 septembre

La situation est toujours bonne. Notre infanterie progresse jusqu’à Birmaville que l’artillerie lourde bombarde. A cet endroit, nous éprouvons une vive résistance mais nous maintenons nos positions. Nous sommes toujours dans la vase.

 

Mercredi 23 septembre

Toujours même situation. Le soleil fait son apparition ce n’est vraiment pas de trop, car voilà 8 jours que nous étions sous la pluie. Je recommence à trouver le temps long de ne plus avoir de nouvelles de Lolotte et je suis très inquiet du sort de mes êtres si chers.

Que peuvent ils devenir.

 

Jeudi 24 septembre

La journée fut à peu près calme. Quelques marmites le matin pour ne pas en perdre l’habitude et le soir, une petite fusillade.

 

Vendredi 25 septembre

Journée tout à fait calme. Le bruit court que St Quentin est dégagé. J’en suis heureux et c’est avec impatience que j’attend le vaguemestre comptant avoir des nouvelles.

Mais grande déception, rien pour moi pendant que j’en vois qui sont si heureux d’avoir des nouvelles des leurs.

 

Samedi 26 septembre

La journée commence bien.

Dès 4h30, violente canonnade et fusillade sur notre gauche occupée par le corps colonial. Nous, nous ouvrons le feu dès 5h45 et ça barde.

Mais vers 10h ou 10h30, les marmites rappliquent et elles nous serrent de très près. L’une tombe à 2 mètres du caisson de la 1e pièce. Celui-ci prend feu et brûle grièvement le Commandant St Pumérat à la figure et aux mains. Une autre enterre le Brigadier Fauchart téléphoniste de la 9e Batterie. 3 hommes arrivent pour le dégager, pendant qu’ils travaillent pour le dégager, une 3e éclate à 2,5 mètres d’eux sans les blesser, c’est une vraie chance.

Enfin leur tir cesse vers 14 heures, pas d’autres dégâts. Comme effet, c’est plutôt passable au point de vue du nombre de kilogramme de ferraille qu’ils nous ont envoyé car nous avons reçu plus de 100 projectiles et ils ne pèsent pas moins de 40 Kg chacun.

Espérons qu’il en sera toujours ainsi. Pailly a repris son service.

La nuit à 23h30, éclate une violente fusillade, tout le monde se lève d’un bond attendant des ordres mais rien. Aussi avec Pailly, nous nous étendons de nouveau sur la paille et bientôt tous les hommes nous imitent et l’on se rendort bientôt.

 

Dimanche 27 septembre

Le matin le temps est assez beau, mais un brouillard épais coupe ma plaine. Nous apprenons que le 328e a pris Melzicourt cette nuit d’où la fusillade entendue hier soir. Nous apprenons également que les coloniaux ont fait hier 1300 prisonniers.

Vers 10 heures le brouillard se lève et le soleil fait son apparition.

Un peu avant midi une très forte canonnade se fait entendre de tous les côtés, mais rien pour nous.

Vers 18h30, une fusillade très nourrie crépite et elle ne cesse que vers 20 heures.

 

Lundi 28 septembre

A 2 h, nous sommes réveillés en sursaut pas une nouvelle fusillade. Nous recevons l’ordre de rejoindre nos pièces, mais nous ne tirons qu’à 6 heures, malgré un brouillard très épais.

A 14h30, les marmites font leur apparition et cela dure une heure et malgré leur tir assez bien réglé, on enregistre aucun dégât dans le groupe. Dans le village, une masure située à proximité de nos cuisines et de la maison où nous couchons est réduite en miette.

 

Mardi 29 septembre

Matinée très calme.

A 13h30, une violente canonnade des Boches me réveille en sursaut, car j’étais en train de sommeiller sur le bord du talus, et les marmites rappliquent xxxxxx. Il nous tombe 178 projectiles sur le poil en 1h ¾. Résultat néant. Quelle honte pour la maison Krupp, ils pouvaient en parler de leur artillerie lourde. Le feu cesse mais au bout d’une demi heure, il reprend moins violent.

Nous comptons au total 232 coups en 3 heures y compris la demie heure de suspension. Le capitaine Lescourt est tué dans la tranchée par un projectile des dernières salves. Le téléphoniste Puech qui se trouvait à ses côtés est sérieusement blessé. Quel cornard, on ne voit plus que des trous de tous côtés.

 

Mercredi 30 septembre

La journée a plutôt été calme. Ce ne fut que vers 16 heures que nous reçûmes quelques marmites dont une blessa deux hommes. Le Sergent Beauvain de la 29e et le Capitaine Poindron. Le Lieutenant Colonel Azéma, le Commandant Warin, le Sous Lieutenant Grangeon sont également blessés.

Le Maréchal des Logis Chipallet de la 3e est tué ainsi que deux sergents de la 2e Batterie.

Cycliste du Colonel, blessé.

 

Jeudi 1e octobre

Journée tout à fait calme. Vers 20 heures violente canonnade et fusillade du coté du corps colonial. Le froid fait son apparition.

Vendredi 2 octobre

Le brouillard ne s’est pas levé de la journée. De ce fait calme complet sur toute la ligne si ce n’est une fusillade de ¾ heures qui a éclaté vers 18 heures.

 

Samedi 3 octobre

Le soleil ne se montre que vers 10 heures et la musique commence à peu près au même moment, mais heureusement aucun dégât.

 

Dimanche 4 octobre

Rien d’intéressant à cause du temps qui est toujours brumeux.

A 13 heures, nous recevons l’ordre d’aller au repos à la ferme de Naviaux située à 2 Km Sud de Vienne la Ville.

Nous ne l’avons pas volé, car nous avons rudement besoin de nous nettoyer. Immédiatement, je pars avec le Lieutenant Caillard pour reconnaître le cantonnement. Le soleil se montre et il fait un temps superbe. En arrivant à Naviaux je vois les camarades du 328e, quelques uns manquent à l’appel.

Lemaire, un excellent garçon, le caporal fourrier etc. Le cantonnement préparé, je n’ai plus qu’à attendre la Batterie qui arrive à 3 heures.

Lundi 5 octobre

Le temps est superbe, aussi j’en profite pour descendre à la rivière faire un bon nettoyage. Au moins nous sommes rudement tranquille ici et cela semble rudement bon. Le soir vers 20 heures, on entend quelques marmites au loin. A minuit nous sommes réveillés par de violents détonations, on se demande ce qui peut bien se passer par le bas.

 

Mardi 6 octobre

A 2 heures ¼, réveil et à 3 heures, nous quittons le cantonnement. En arrivant à la ferme de Penite, nous apercevons des lueurs d’incendie dans la direction de Vienne la Ville.

Immédiatement, je pars avec 2 brigadiers pour reconnaître si on peut passer. Des hommes du 328e qui étaient logés à Vienne la Ville nous disent que le quartier de la mairie a été bombardé à minuit.

En arrivant je constate que le pont établi sur l’Aisne est en partie détruit, mais on peut encore passer avec des voitures. La mairie, l’église et plusieurs maisons sont rasées. Des hommes qui se trouvaient dans ces maisons sont brûlés vifs. Le cycliste Lagrange a une jambe emportée.

A 15h30 les 77 font leur apparition mais pas de résultat. A la tombée de la nuit sur tout le front éclate une violente fusillade.

 

 

Mercredi 7 octobre

Devant nous la journée fut plutôt calme mais sur La Chalade on entendit une violente canonnade. Dans la nuit à minuit 30, nous avons été obligé d’évacuer le village car les Boches recommencèrent le bombardement, nous avons regagné nos pièces et nous passâmes le reste de la nuit dans nos tranchées. Cette fois-ci le village n’a subi aucun dégât car les coups étaient longs ou courts

 

Jeudi 8 octobre

La journée a très bien commencée car à 6h30 les boches ouvrirent le feu sur nous, puis sur le 1e groupe. 6 hommes se trouvèrent enterrés dans les tranchées on les dégage et ils en sortent sans égratignures. Vraiment il y en a qui ont de la chance. Le reste de la journée, rien de particulier.

 

Vendredi 9 octobre

Matinée très calme, mais à 12 heures, les marmites rappliquent et elles tombent rudement près. 3 éclatent à 1 mètre ou 2 de mon caisson, une autre tombe sur la tranchée du 6e caisson qu’elle rebouche.

Mais par bonheur pour eux, les hommes de la tranchée mangeaient tranquillement leur soupe à 40 mètres de là, donc pas de dégât.

A 15 heures, un autre bombardement recommence, à la 2e salve, une de leurs marmites m’éclate sous les fesses et m’envoie faire un petit voyage dans les airs, ainsi que 2 servants, Landrau et Laneyrie qui étaient près de moi. Heureusement nous nous relevons sains et saufs, sauf Landrau qui a une légère brûlure à la main causée par la déflagration de la poudre.

 

Samedi 10 octobre

Par suite du brouillard qui est resté très épais toute la journée, celle-ci fut assez calme. Le soir petite fusillade.

 

Dimanche 11 octobre

Journée très calme pour nous. Sur le front de Paris, violente canonnade et fusillade. Les Boches tentèrent une attaque mais elle fut vigoureusement repoussée.

 

Lundi 12 octobre

Journée calme sur tout le front, mais le soir vers 20 heures, violente canonnade sur la gauche qui a duré très avant dans la nuit.

Petite fusillade sur la Harazée.

 

Mardi 13 octobre

Matinée calme. La canonnade de la gauche, c'est-à-dire du côté du corps colonial, reprend vers 12 heures. Devant nous et à droite, rien, calme complet.

 

Mercredi 14 octobre

Journée très calme par suite d’un temps brumeux et pluvieux. Rien de particulier à signaler.

 

Jeudi 15 octobre

La nuit, la pluie a continué de tomber.

Le matin dès 5 heures, nous faisons une attaque, bon sang, quel boucan. Tout barde, canonnade, fusillade et comme cela jusqu’à 10 heures. On ne se fait pas prier pour dévorer la soupe. L’après-midi calme complet. Cela fait une différence avec le tintamarre de ce matin.

Le soir, nous apprenons que l’affaire de ce matin a très bien marché.

 

Vendredi 16 octobre

La nuit est très calme, mais dès le matin, les Boches veulent reprendre leur revanche de la veille, cré bon Dieu, si ça cogne, on ne s’y entend plus du tout et on y va de bon cœur.

Allez mon vieux, amène l’enfant.

Tenez tas de salopards.

Digérez moi cette pastille, et les quolibets vont leur train.

Le soir, le tintamarre continue, de même que la nuit. Nuit blanche complète, heureusement qu’il fait beau.

Samedi 17 octobre

Vraiment ces Boches l’ont sec et ils nous en veulent de leur échec car la lutte continue acharnée, mais ils ne l’ont pas belle. Qu’est ce qu’on leur crache dans le portrait.

Enfin, à 9 heures, le calme renaît. On respire un peu.

A la soupe. Le Capitaine nous dit qu’il faut construire des cabanes dans le bois qui est sur notre droite en vue de passer l’hiver ici. Comme l’après-midi est calme, on s’y met de suite et on se fourre dans la tête de faire des maisons superbes et confortables, on verra le résultat.

 

Dimanche 18 octobre

La nuit nous avons encore eu de la flotte, quelle dégoûtation.

La journée est calme. Le brouillard en est la cause. Aussi on en profite pour activer le plus possible la construction de nos cabanes et le soir, le terrassement est fort avancé.

Encore une journée comme celle-ci, et nous pourrons commencer la charpente. Le soir, violente canonnade et fusillade vers La Chalade.

 

Lundi 19 octobre

Dès le matin, nous remettons à faire nos palais puisque le brouillard persiste.

Aussi, la journée fut-elle calme Les Boches sont bien gentils de nous laisser tranquilles de la sorte. Notre terrassement est terminé. Mais le soir, vers 18h15, une fusillade épouvantable éclate soudain dans la direction du bois de la Gruerie, villages de Servon et de Melzicourt.

Et pourtant il fait noir comme dans un four, on n’y voit pas à 2 mètres, en plus de cela, la pluie tombe très fine.

 

Mardi 20 octobre

Le matin, le beau temps réapparaît et nous voyons un peu de soleil. Nous travaillons avec ardeur à nos baraques et dans quelques jours ce seront de vrais chalets que nous pourrons habiter. Journée à peu près calme. Ce soir, je prends la garde aux issues.

 

Mercredi 21 octobre

Quelle nuit, pas moyen de fermer l’œil. A chaque instant, il faut se lever pour reconnaître les autos et les voitures qui ne cessent de défiler sur la route, et avec cela le poste est dans une vieille grange ouverte à tous les vents. Pas moyen de se reposer un peu.

Dans la journée, rien d’important.


 

Jeudi 22 octobre

A 6 heures, nous partons en repose à ferme de Naviaux.

Au moins, je vais pouvoir faire une bonne nuit, et puis on va pouvoir aussi se nettoyer comme il faut et faire un peu de lessive.

 

Vendredi 23 octobre

Quelle bonne nuit et quelle grasse matinée, je ne me suis levée qu’à 8 heures. Ca semble bon, surtout à l’abri des marmites. On se sent un peu mieux, surtout après un bon nettoyage. L’après-midi se passe à écrire et à flâner, en pensant à ma pauvre Lolotte et à mon Georges. Comme ils doivent être malheureux.

 

Samedi 24 octobre

Départ à 4 heures, dès notre arrivée à la position et aussitôt après avoir mis les pièces en batterie et en direction, nous nous remettons au travail pour terminer nos constructions et nous travaillons dare-dare. Vraiment on ne se croirait plus à la guerre.

Mais quelques marmites éclatent de temps en temps nous rappelant à la réalité. Le soir, pour la 1e fois, nous couchons dans nos habitations.

 

Dimanche 25 octobre

J’ai rudement bien dormi dans notre baraque, on est un peu mieux que dans les tranchées et au moins, s’il leur reprenait la fantaisie de bombarder le village, nous serons en sûreté. Dans la journée, nous continuons notre installation. Rien d’important à signaler.

 

Lundi 26 octobre

Rien de particulier sur le front, nous apprenons que le Lieutenant Massart du 4e groupe vient d’être grièvement blessé. Il a été blessé Il a été blessé d’un éclat d’obus alors qu’il était observateur.

 

Mardi 27 octobre

Dès 8 heures, les Boches se mettent à bombarder Vienne le Château situé à 2 Km N.E de notre position, et ils ne cessent que vers 15 heures. L’après-midi, le 120 leur répond coups sur coups. Pas autre chose d’intéressant sur le front. Toujours pas de nouvelles de Lolotte.

Le soir, nous apprenons qu’un régiment d’infanterie de Pour gris (?) a été détruit dans les bois de la Gruerie situé au N. de notre position.

 

Mercredi 28 octobre

Les Boches recommencent le bombardement de Vienne le Château et les marmites tombent drues. Pour nous, tout est calme. Notre installation est définitivement terminée.

 

Jeudi 29 octobre

Vraiment, on croirait que nous n’avons

Le carnet se termine curieusement par cette phrase

 

 

 

 

 

 

 

Eugène ALBERT sera blessé dans la région de Verdun et succombera de ses blessures à l’hôpital temporaire N° 9, à Verdun, le 11 avril 1915..

 

 

 

 

 

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