Carnet de début de guerre de Léon Fonder
(1891 - 1976)
Musicien brancardier
du
150e Régiment d'Infanterie
de
Chauvoncourt (St Mihiel, Meuse)
Mise à jour : décembre
2009
« La lecture du
carnet est très difficile du fait qu'il a été écrit au crayon à papier, et que
ce carnet a dû séjourner pendant une très longue période de la guerre 14-18
dans une poche. Les points d’interrogations correspondent à des mots
impossibles à transcrire. »
« Si des lecteurs
veulent d’autres renseignements ou en apporter sur ce régiment, les personnes
mentionnées, prendre contact avec Didier. C’est avec plaisir que je pourrai
alors correspondre avec eux ».
Francis Blaise-Fonder,
petit fils de Léon Fonder (jan. 2006)
« Un détail assez étonnant, durant la journée du 24 août 1914, réuni ce carnet de campagne avec un autre carnet d’un sous-lieutenant du 19e bataillon de chasseurs. Cet autre carnet est aussi publié sur mon site >>> ICI <<<<
Le 150e
régiment d’infanterie était en 1914, constitué de 3 bataillons. Il tenait
garnison à Saint Mihiel (le dépôt du régiment se tenait à
Charleville-Mézières).
Le 150e R.I.
était rattaché à la 80e brigade d’infanterie et à la 40e
division d’infanterie.
Il a obtenu 5 citations
à l’ordre de l’armée, ce qui lui a permis d’obtenir la fourragère jaune
Début de la guerre :
Grand bruit de
guerre. Nous sommes tous mobilisés et on attend demain avec impatience. Nous
comptons partir cette nuit : mercredi 28 juillet 1914.
Les
enfants et leurs parents pleurent. Je vois une femme et sa fille qui pleurent à
notre passage.
A Creuë, réquisitions des chevaux.
A Vigueulles, nouvel adieux car nous autres,
anciens, revoyons nos hôtes des grandes manœuvres de l'année dernière : M
et Mme Croix. Nous apercevons Hattonchâtel
en haut d'une côte. Marche dans des souliers neufs qui font souffrir.
Echauffement des pieds.
Chaleur.
Retardataires tout au long de la route.
Arrivée à St Benoît vers huit heures. On
s'arrête plusieurs heures devant le portail de l'église. Le poste de garde en
face. Bouchard est de garde. Nous cantonnons dans une grange du château. Repos
tout le reste de la journée.
Repas du soir à 18 h.
Coucher avec Boutrez sur le haut d'un tas de foin. Bonne nuit. Réveil à 3 h.
Réveil à 3h. Départ à 4h ½. Bonne journée à
St Benoît.
La nuit, passage des réservistes rappelés.
On creuse des tranchées depuis la veille. On barricade les routes le matin.
Distributions de vives avec Bouchard. On monte la garde partout. On arrête les
civils.
Dans l'après-midi,
la cloche sonne. On n'y prête pas attention. Un tambour arrive, il entre dans
la cour du château et bat la générale. A 5h 30 la cloche avait sonné le tocsin.
Le soir, Jaignot nous sort une partie d'un article d'un journal allemand. Les réservistes arrivent enthousiastes. Nous apprenons avec peine la mort de Jaurès.
Lever à 3h¾. Préparatifs du départ, musique
devant l'église. On lit les affiches de réquisitions et de mobilisation
générale.
Les troupeaux de vaches réquisitionnés se
rendent à Lacroix sur Meuse. Départ pour Beaumont (M et Moselle). Passage
à Beney, Pannes Essey, Maizerais, St Baussant, Beaumont.
Nous sommes fatigués, plusieurs sont restés
en chemin. Henry et Perronet arrivent en chemin de fer.
Le soir orage, pluie, grêle et tonnerre. On
parle d'un ultimatum envoyé à l'Allemagne pour lui offrir la guerre si elle ne veut
pas nous donner un milliard. On dit que les Lorrains nous envoient leur bétail.
J'apprends que deux espions ont été tués à
St Mihiel ; ils voulaient faire sauter le pont et couper les fils
télégraphiques. Il y aurait un officier prussien. On l'enferme en cellule.
Les "trouffions" demandent la guerre, pendant qu'on y est... Rien d’intéressant jusqu’au soir.
Lever 6 h, on apprend à 6h½ que les
allemands ont violé la frontière en trois endroits, que les troupes arrivent.
Je touche les vivres à 9 h du soir avec
Boudoux, Barré, à 11h du soir, on est encore entrain de les distribuer.
Les couvertures ont droit d'affrontement.
Il est confirmé que les allemands ont labouré leurs routes pour préparer la
défense, que les troupes ont vu un dirigeable allemand évoluant au dessus du
territoire. Des canonniers l'attendent pour le bombarder. 426 navires anglais
coupent les vives à l'Allemagne.
L'Italie reste neutre. On lit le rapport à
7 h: l'Espagne offre
200 Uhlans qui ont passé la frontière sont
entourés et pris sans coup férir.
14 Uhlans sont tués par les chasseurs. On a
tenu à soutenir les chasseurs qui mettent en joue les allemands qui
apparaissent à la frontière.
Le Portugal offre 10000 hommes. Le Canada
25000 hommes à l'Angleterre. Le Japon s'offre pour défendre nos colonies, et
les colonies anglaises en Asie.. On nous ordonne de ne pas stationner sur les
routes pour permettre aux avions de trouver leur route et de nous cacher au cas
où ce serait un avion allemand.
Le 6ème corps (dont le 150 RI fait partie,
appartenant à la 40ème Division) a pour mission de défendre les Côtes de Meuse
jusqu'au jour où tout sera prêt pour prendre l'offensive générale. Des camions
automobiles passent pour ravitailler. Enthousiasme, réservistes en joie. Les
billets de banque, on peut rien en faire. Avec de l'argent pas moyen d'avoir ni
pain ni vin. Ordre de faire autant que possible la cuisine chez l'habitant.
Toutes les boutiques sont vides.
Les avions allemands se reconnaissent à la
queue qui est fourchue.
Une Compagnie du génie arrive à Beaumont.
Il paraît qu'à Paris comme partout ailleurs on désir la guerre. On apprend que
les ministres sont doublés et que Deloux est aux Affaires Etrangères.
Repas du midi excellent : fricot au
singe - salades, marmelades aux prunes, café au rhum. Chacun verse 4 sous.
Après-midi sans incident. Le soir, pluie torrentielle et vent. Coucher à 20 heures.
Jour de mes 23 ans. Lever à 3 h. Nous apprenons
que le colonel a reçu la dépêche suivante : relations diplomatiques
rompues entre
Nous nous mettons en tenue de campagne pour
l'arrivée du général de brigade. Le colonel nous dit de rentrer alors que les
Compagnies restent alignées sur le bord de la route.
A 10 h, nous remettons à la voiture de
Nous apprenons
que tout est démoli dans les chambres du 150 RI, y compris ceux de la musique
(bureau bouleversé, parquets saccagés). Ca m'embête surtout pour ma musique
copiée pour un instrument que je n'ai pas emporté avec ma clarinette.
Le chef nous réunit les quatre d'escouade
et le sergent major et nous donne notre argent pour le mois, soit chacun
10h 55, on annonce à son de caisse que la
moisson doit être commencée de suite pour que la farine ne vienne pas à
manquer. (Ordre du préfet de
L'après-midi, nous apprenons que
Nouvelle Adresse: Musique du 150 quartier
général de la 40ème division - Troupes
de l'Est.
Nuit sans incident. Réveil à 3h ½. A 7h ½,
on annonce à son de caisse l'appel aux troupes rédigé par Poincarré.
Nous mangeons un gâteau au riz, au lait et
au rhum : confectionné par Gruat. Coupe des cheveux à la musique par
Cailleau (et quelle coupe de cheveux..!)
Nous apprenons que l'Allemagne a violé le
Luxembourg.
Arrivée de la grande armée de Rouen que
confirme ce que nous avons appris et le refus du roi des Belges à l'empereur
d'Allemagne de livrer son territoire.
Au loin, on entend fusillade et nombreux
coups de canons. 2ème Compagnie du 1er Bataillon quitte Beaumont
pour se rendre à Seicheprey. On croit voir arriver un officier
uhlan. Erreur, c'est un officier cuirassier qui a enlevé sa cuirasse.
Voilà le vaguemestre. Toujours pas de
nouvelles de mes parents. J'apprends que cinq espions ont été fusillés à
Mézières dont un de Rimogne et deux de Sormone pour attentat sur la ligne de
chemin de fer et coupage des fils télégraphiques.
A 17 h un instructeur de Verdun, agent
réquisitionneur arrive de Nancy en auto et dit que 350 uhlans ont été pris à
Château Salin et dirigés sur le plateau de Maxéville où les prisonniers sont
parqués.
Violant orage à 20h ¼.
Lever à 5 h. Alerte par le chef à 6h ¼. On
a 10 minutes pour s'apprêter. D'après un aviateur, les villages prussiens sont
vides de troupes et les bois sont très fumants. Des corps de l'armée allemande
se dirigent sur Liège. Rien d'important le restant de la matinée.
L'après-midi, la musique touche des outils.
On installe une fortification provisoire au château de Beaumont. On nous
apprend que l'artillerie du 40ème a tiré sur des chasseurs à pied et a causé
plusieurs victimes. (Le 12ème Chasseurs était aussi de St Mihiel)
Nous faisons une tranchée
pour établir un poste de secours.
Le soir, le bruit court que le 153ème de Toul est presque entièrement détruit. A 19 h, grondement du canon dans le lointain.
Lever à 4 h. Vers 6 h, nous nous mettons en
manoeuvre.
Nous nous arrêtons dans le bois, et je
rencontre Manteau. Du bourg, nous traversons les moissons jusqu'à Flirey où
cantonne le 169ème et le 9ème génie.
Nous passons sous le pont, et voyons les bougies qui sont prêtes à allumer pour
faire sauter le pont. Nous rentrons à Beaumont à 11 h ½.. Difficultés à trouver
des vivres de réserves. On annonce à son de caisse le recul des allemands
devant Nancy.
Combat au cours duquel le 153ème aurait tué
10 000 allemands et perdu 2000 chevaux ?.
A 5 h on confirme que la flotte anglaise a coulé 2 cuirassiers allemands et capturé un autre. A 7 h½, le 8ème chasseur à cheval passe et nous dit que les belges auraient pris aux allemands 27 canons et ??
Lever à 3 h½. 6h 50, nous écoutons la
lecture des dépêches officielles, lecture faite par le capitaine de la 1ere
Compagnie. "Captures sur mer et sur terre. Les allemands ont pris deux
forts peu importants devant Liège."
Liège cédera, mais Namur résistera. Les
allemands voient déjà leur manoeuvre retardée de 36 heures.
Hollande violée.
L'Autriche est ternie par un échec devant
Belgrade.
Deux vaisseaux allemands capturés par les
français. Vaisseaux de guerre français dans les ports des Antilles, pour
capturer des vaisseaux de marine allemande. Italiens enrôlés en France, ainsi
que des officiers péruviens qui faisaient un stage en France. Les anglais
débarquent au Havre.
On apporte à notre grange, aux
sous-officiers chasseur à cheval du 150 RI, l'équipement d'un de leur camarade
tué. (Cartouches maculées de sang).
De 10 heures à 16
heures, on entend distinctement le canon. L'après-midi, nous allons faire de la
signalisation par alphabet morse, puis nous faisons un exercice de brancardier.
(Camus sur un brancard, sur au moins un km. Quelle chaleur !) On nous dit
que le canon que nous entendions toute à l'heure, était l'artillerie française,
canonnant les allemands qui n'osent s'avancer.
On dit que les
belges ont fait reculer les allemands qui battent en retraite vers
Aussitôt le réveil, la musique part pour
faire de la signalisation. Moi, étant de jour, je reste pour faire changer les
mandats et bons portés (14). (Un tableau comme celui ci-dessous est tracé sur
une page)
L. Fonder |
6433 |
1 |
L. Boutrez |
6410 |
1 |
Brutteaux |
6070 |
1 |
Cachera |
6183 |
1 |
Taillard |
5766 |
1 |
Perronnet |
7037 |
2 |
Gruat |
6522 |
2 |
Wattelier |
6600 |
1 |
Fugazza |
7772 |
1 |
Brouillard |
6182 |
1 |
Laporte |
6597 |
1 |
Total: 14
10 mandats
3 bons
1 mandat télégramme.
A 9h 45, le chef de musique arrive en auto,
brandissant le casque d'un officier saxon.
Applaudissements.
L'auto repart. (La femme du commandant du 12ème qui s'y trouve emporte avec sa demoiselle
le casque qu'elle élève bien au-dessus d'elle.)
A 10 h,
enterrement d'un chasseur du 12ème décédé à l'hôpital. Le cortège funéraire
passe, les jeunes filles du pays le suivent avec des fleurs.
Le chef a aperçu
dans les gerbes de blé, des canons braqués contre les aéroplanes.
A 2 h, l'officiel
nous apprend que d'Armade est entré dans Mulhouse. Ensemble, des soldats et des
habitants qui ont déplanté les poteaux frontaliers pour les placer sur
l'ancienne limite. Nous apprenons qu'une patrouille du 25ème chasseur a surpris
18 uhlans, en a tué 14 et a fait 2 prisonniers. Le vaguemestre apporte à midi
du tabac pour 185.
Bien qu'à
Beaumont, il n'y ait que deux compagnies du 150 RI,
Réveil à 4h 10.
En service à 5 h, on apprend que les
allemands ont 3000 morts autour de Mulhouse, 18 drapeaux, 20 canons, 80
mitrailleuses. Du côté des Français, pertes insignifiants, 1/5 des pertes
allemandes (le 133ème est entré dans Mulhouse avec 430 hommes).
Le 44ème, 600 morts, 7000 prisonniers,
150000 blessés. Le corps d'armée allemand couvre la déroute (les nouvelles
arrivent par le fils du Colonel.) Les Français ont attaqué à la baïonnette, le
combat a duré de 2h à 8 h.
A la sortie Ouest de Beaumont, nous allons
faire de la signalisation. Pendant l'après-midi, le 10ème d'artillerie vient
manoeuvrer prés de nous et repart.
Rentrée vers 9 h. au retour, nous voyons
devant l'hôpital, arriver en auto un chasseur du 25ème et un dragon du 12ème
tous deux blessés. Alors qu’on se forme
à la signalisation avec sur la route de Rambucourt. A 6h ½, un aéroplane
allemand passe et repasse au dessus de Beaumont.
Coups de clairon, tout le monde rentre dans
les cantonnements rapidement.
Le soir, on apprend par Cesnard, un de nos musiciens, que les troupes qui ont occupé??????? Après sa défense de St Mihiel ??? tous passages. Routes défoncées, signalisation et ...? enlevés. Bureaux entièrement saccagés Atelier ????à clarinettes???????????????????????????.(tout un passage illisible, le texte au crayon est usé par le frottement des feuilles entre-elles) et le poste de garde ??????.. Si seulement on avait pensé que l'on partait pour longtemps et pour combien de temps..!
Un dirigeable, et 3 aéros français passent.
Nous partons à 6h 30 pour la signalisation.
Coups de canon à faible distance. Fusillade nourrie. Les forts environnants
(Lunéville, Gérouville, forts de Toul) laissent entr'apercevoir des colonnes de
fumée. Le poste où se trouve le chef, nous télégraphie par alphabet
Morse :
" Bataille de Munster terminée
Allemagne endeuillée »
Arrivée des camions de ravitaillement.
Douze se suivent à
On mêle les batailles de Munster et de Mulhouse et on ne sait sur quel champ de bataille laisser les 10000 allemands. A 9h½, le colonel envoie chercher toutes les troupes du cantonnement, pour qu'elles soient prêtes à partir à la première alerte. Après-midi, chaleur terrible, avons nettoyé dans notre cantonnement, ne sachant où nous fourrer pour trouver un peu de fraîcheur.
Réveil à 4 h et à 5h½, départ.
Passage à Seicheprey, St Baussant, Essey et
Maizerais. On entre à Pannes où on nous annonce qu'un soldat bavarois traverse
le pays en auto. Je ne le vois pas.
Le 3ème Bataillon cantonne à Pannes, avec
le 9ème génie de Verdun creusent les innombrables tombes des chasseurs à cheval
tués à Maizerais en éclaireurs du 150. (Journée terrible).
Dans la grange où nous sommes, deux garçons
de la maison boivent le café avec nous, en compagnie de leur mère et d’une
jeune fille qui s’appelle Blanche.
A 13 h, je vais visiter l'église avec
Brouillard; je monte dans le clocher; j'arrive à l'horloge prise comme (mot barré) 1h moins ¼ seulement. Je
monte aux cloches dont le poids est pour 1ère
de
Comme je reviens, le tambour annonce que
les habitants n'ont droit qu'à ?? de
pain par jour et par tête. Je vais me baigner dans la rivière avec le tambour
Truay, Frédéric et Gruat. L'eau était très bonne et
Le lendemain, nous devons partir de très bonne heure.
Quoique réveillés de très bonne heure, marche sans halte par une chaleur torride. Après-midi, nous achetons un canard avec Denis, Frédéric et Vaucher. Je fais une fricassée (félicitations pour ma cuisine).
Réveil à 2h¼. Départ à 3h 30 pour St
Benoît. Avant d'arriver, nous faisons la pause. Un sergent arrive et me donne
le bonjour de Signy le Petit.
Je ne vois pas qui c'est, quoiqu'il ne me
soit pas inconnu. Nous venons habiter notre ancienne place du château. Pendant
que je me reposais avec Bouchard, à proximité du porche et on prend notre place
et nous allons de l'autre côté. Je suis dans une chambre en haut avec Cousin, Bouchard et Boutrez. Le
canon tonne fortement, mais on n'y fait pas attention, on ne se rend même pas
compte que c'est la guerre.
Je ne vois pas les deux officiers aviateurs allemands à leur passage à St Benoît fortement hués par la foule. Le soir en attendant le passage des prisonniers allemands, je rencontre Paulford qui est à la 11ème compagnie. Je rentre en possession de mes 20 sous. J'apprends que Frédéric est à l’infirmerie : il a la colique à cause des fruits verts…
Nous sommes debout à 2 h en vue d'un départ
que nous attendons jusqu’à 4 h, prés de l'église.
A 5h ¼, fusillade tout prés. Grand émoi,
tout le monde voudrait avancer. Plusieurs sections partent en tirailleurs pour
prêter renfort aux avant-postes, si besoin. Le 150 prend des positions de
combats. Les voitures partent en arrière sur la route de Vigneulles. La musique
en arrière, nous couchons dans la rosée.
Nous dormons pour la plupart. Autour de
nous, les cloches sonnent l'alerte.
C'est aujourd'hui du
Tout est couvert depuis le matin à 11h.
Je vais aux girolles avec Voiret, nous les
épluchons. Il y en a en masse (chanterelles).
Vers 15 h, nous voyons arriver une voiture
de paysan. Elle arrive escortée de deux chasseurs à cheval du 12ème (la voiture
est conduite par le paysan) contenant 3 soldats allemands et un officier en
tenue de campagne réséda avec casque à pointe, tandis que les soldats sont en
calot. Attitude piteuse comme celle des enfants que l'on vient de gronder,
regardant de gauche à droite avec l'air triste qui fait presque pitié. La
musique reste calme.
Ces soldats ont été pris en voulant se
sauver, et se sont lancés dans les fils tendus par l'infanterie. . Un aéroplane
allemand passe le matin, un soldat a troué le réservoir à essence d'une balle
et les aviateurs ayant descendu en vol plané, et ont été capturés.
Réveil à 4h ½. Un chasseur à pied de St
Mihiel, nous raconte le fait curieux qui s'est passé hier : à la suite
d'une escarmouche entre patrouille Française et Allemande, 6 chasseurs à pied
se sont trouvés égarés, leur lieutenant fut tué et un d'entre eux fut blessé
d'une balle dans le mollet, ils parviennent à se sauver et pénètrent dans une
grange et se fourrent dans le foin.
Les Allemands, sachant qu'ils sont dans les
environs, fouillent les granges.
Ne trouvant rien, ils arrivent dans la leur
et piquent leur baïonnette dans le tas où étaient les chasseurs à pied, mais ne
les découvrent pas et se cantonnent dans la grange. C'est alors qu'à la nuit,
les chasseurs à pied se lèvent, et empruntent les effets des allemands pour
s'en revêtir et c'est ainsi qu’ils se sauvèrent.
Les allemands, à leur réveil fouillèrent
dans toute la ferme, ne trouvant pas leurs fringues. Mais est-ce vrai ?
Ils incendièrent plusieurs maisons avant de se retirer…
Un officier allemand qui était blessé a tué
l'infirmier qui voulait le soigner. Nous nous promettons de sortir le
coupe-choux au moindre mouvement des blessés allemands. Charles Norurie, chef
d'escouade prend 8 jours pour avoir fait l'appel avant notre départ, croyant
voir des musiciens de l'autre côté de la maison, court pour les rappeler.
C'était l'image des musiciens alignés qui
se dessinait dans la glace de l'appartement que nous quittions. Un sergent de
chasseur à pied qui revenait à bicyclette, a surpris un soldat allemand entrain
de manger des pois, et le met en joue, mais l'autre lui a jeté ses armes. Il
n'avait pas du manger depuis plusieurs jours.
Un fourgon arrive empli d'objets et
d’équipements allemands. Le chef pend un sac d'officier.
A 10 h, un uhlan passe en auto, gardé par
des gendarmes. Nous partons, nous passons à Vigneulles, Hattonchâtel,
Hattonville. Arrivons à Vieville sous les Côtes à 15 h.
Tranchées dans les gares, cimetières,
vignes etc.. A Viéville, le 67ème, et le 132ème viennent de cantonner. Nous ne
trouvons rien à acheter, ni œufs, ni lait, ni épicerie.
Nous achetons une poule à cinq avec
Bouchard, Gruat, Henry et Blangonnet.
Réveil à 4 h, départ à 5 heures.
Mauvaise marche. Pluie fine. A gauche,
collines couvertes de vignes, à droite, plaine de
A Billy, les femmes nous regardent passer et pleurent à chaudes
larmes. Toujours la même topographie.
Collines couvertes de tranchées.
Retranchements de toutes sortes. Passons à St Maurice sous les Côtes.
Le 154 y est cantonné. Derrière la mairie,
sur une voiture gardée par des gendarmes, se trouvent 3 prisonniers allemands
saxons qui causent entre eux. Nous traversons Hannonville sous les
Côtes où est le 294 cantonne. Pays très long où nous nous demandons
aux gens où demeurent les boutiques et nous avons l'adresse par les enseignes
placées au dessus des portes.
Une jeune femme court vers Charles, les
bras grands ouverts, croyant reconnaître un parent. Nous quittons la route
d'Etain pour nous enfoncer dans la plaine de
Dans tous ces petits pays, toutes les
maisons où se trouvent une jeune fille à marier, se garnissent d'une belle
branche d'arbre plantée dans la gouttière. Nous traversons Wadonville
en Woëvre, village composé de fermes qui se touchent. En sortant du
village, nous entendons deux coups de canons.
Avant d'entrer à St Hilaire en Woëvre,
nous faisons une courte halte, je cause avec Tilquin qui ne reçoit pas de
nouvelles non plus de ses parents. Il m'apprend le nom du réserviste de Signy
le Petit. Nous entrons, et nous cantonnons dans un ancien pensionnat, tout prés
de l'église. Vers 17 h, nous entendons trois coups de canons. Ce sont des
pièces de marine, bien que nous soyons à très grande distance des canonniers.
On nous apprend que la guerre a été
décrétée entre l'Autriche d'une part et l'Angleterre et
Lever à 4 h. Revue
par M Beauzelaire. On nous apprend que le village de Jeandelize est en feu, que
les habitants se disposent à évacuer leur bétail aussitôt après notre départ.
Vers 13 h 30,
forte détonation suivie d'un gros nuage de fumée. Nous apprenons le soir, la
mobilisation de l'Italie. Ultimatum au Japon. Un régiment de cuirassiers uhlans
jeté à
Réveil à 5 h. Nettoyage du cantonnement.
Revue par le chef des effets. L'après-midi, je vais à la pêche. Je casse quatre
fois dans cette rivière, le Longeau.
Nous faisons la
grasse matinée. Ça ne nous arrive pas souvent.
Réveil brusqué par
M. Beauzelaire à 5 h. J'apprends la manifestation Italienne à Montauban en
faveur de
Exercices de brancardiers.
Réveil à 4. Nous attendons une revue
jusqu'à 7h ½.
Départ annoncé : on ne sait pas où
l'on va.
Le colonel reçoit l'ordre de conduire la
troupe dans un village voisin où de nouveaux ordres lui sont donnés.
Nous passons à Butgnéville,
village assez important, puis Harville. On arrête avant d'entrer dans Pareid.
Nous traversons Pareid où nous attendons quelques instants. A Buzy, commune
assez importante et agréable, nous laissons St Jean les Buzy à droite. Nous
passons à Béchamps : eau fraîche sur le bord de la route. Nous remarquons la
lueur blafarde du soleil. C’est probablement une éclipse du soleil. On fait du
café prés de Béchamps.
Je regarde ma clarinette où niche quelques
toiles d'araignées ... Nous croisons le 303ème de réserve du 103ème de Paris.
Un voiturier passe avec des tonneaux d'eau.
On l'assiège comme s’il portait du vin. Nous entendons le canon à faible
distance. Départ à 16 h. Enthousiasme, on est content d'aller vers le canon. On
chante, on blague plus que jamais.
Nous marchons dans l'ordre de bataille, les
flancs-gardes de droite marchent sur la ligne de chemin de fer. Des éclaireurs
passent au galop : la musique acclame. Ils nous apparaissent peu après sur
les crêtes.
Arrêt, on distribue des cartouches et on
approvisionne les armes. Le canon partout tonne plus que jamais. Nous avons sur
notre droite la ligne de Longwy à Nancy. A notre droite, la gare de Gondrecourt-Aix.
Nous passons à Gondrecourt, puis à Aix.
Faisons la pause avant d'entrer dans Affléville, où
nous voyons les ruines des maisons incendiées par les allemands au nombre de 24,
dont un château.
Tous les fils sont coupés. En attendant que
le cantonnement soit fait, nous faisons la pause à l'entrée d'Affléville. On
entend les coups à faible distance. Une petite troupe allemande est mise en
fuite par les Français, en avant garde du 150 RI. Nous cantonnons à Norroy
le Sec où nous trouvons de la bière à discrétion (sardines).
Réveil à 3h ½. Départ à 5 h.
Nous apercevons les montes charge de
Piennes. Nous traversons Piennes, on me donne du lait.
Nous croisons le 12ème cuirassier.
Nous faisons halte au parc de Bertrameix.
Le canon tonne et tonne. Nous traversons Xivry Circourt que les allemands ont
quitté hier après l'avoir habité pendant plusieurs jours. A la sortie de Xivry,
on se met en ordre de bataille. Nous montons sur une crête, et nous apercevons
la fumée d'un duel d'artillerie et les éclairs des détonations.
Il est 11 h, le canon tonne à notre droite
à deux endroits au moins. Nous arrivons à Joppécourt que les allemands
occupaient le matin avant que le 40ème arrive.
Ils ont fusillé le maire en présence des
habitants alignés parce qu'il avait protesté contre les réquisitions
allemandes. Nous faisons la pause à côté de Joppécourt, prés des caissons du
40ème qui renferment les réserves de munitions. Les pièces de 75 tirent à
On fait mettre sac au dos avant que le café
ne soit terminé.
Nous partons parallèlement à nos lignes
d'artillerie. Un des artilleurs nous dit qu'un zeppelin, vient d'être
descendue. Fusillade nourrie. Nous montons sur la côte, derrière notre
artillerie. Nous sommes couchés, et nous voyons parfois le tir de nos
artilleurs. A notre droite, autre duel d'artillerie; on voit les explosions des
obus allemands qui forment des petits nuages blancs. Nous montons sur la côte
pour mieux voir les allemands qui dirigent leurs projectiles vers nous.
Nous reculons quelque peu, à peine couchés,
un obus éclate à
C'est le baptême du feu.
Nous changeons de place. Les obus passent
au-dessus de nous, quelques-uns n'éclatent pas et vont tomber plus loin.. Dans
le lointain, villages incendiés. Nous changeons plusieurs fois de place. Nous
remontons une crête en face toujours à cause des obus dirigés sur nous fuyards.
Incendies terribles partout. Tout le monde recule. La musique recule avec le
drapeau. Feu terrible de l'artillerie. Des blessés passent prés de nous.
Pendant que le service de santé s'organise, l'artillerie nous encercle.
Piennes et Landres brûlent. On part avec
une lenteur extrême. Franchissons ruisseaux et collines. Mécontentement à cause
de la lenteur : ce qu'il faudrait, c'est une paire d'obus. En voilà
justement deux. Maintenant on active la marche. Sacs, campements etc.. laissés
par les fuyards.
Atteignons la route. Marche continuelle. Le
régiment a commencé à 6h ½. On nous parle de faire la pause, mais nous
refusons. Arrivée à Réchicourt. Arrivée à Spincourt où nous campons jusqu'à
l'arrivée du colonel. On repart et l'on marche le long d'une route sans fin,
bordée d'arbres.
On traverse un seul pays :
Vaudoncourt. Notre marche a été gênée par les convois et voitures de paysans
émigrants En levant la tête, on aperçoit l'horizon illuminé. Verdun nous envoie
des projecteurs. Des hommes restent le long des talus. Ereintement général. A
minuit ½, arrivée à Billy : on se couche après avoir bu un peu d'eau. Nous
avons fait au moins
Réveil à 5 h.
On retrouve
Sauglet, Diclitin? et Mourèse.
Au 161ème, on ne
retrouve que 7 musiciens.
Le colonel de
Feraudy a perdu son képi et porte un calot de soldat (80ème Brigade). On fait
l'appel dans les compagnies : c'est la 4ème la plus éprouvée. On se remet
en marche et à 11h ½. on arrive à l'entrée de Maucourt.
On fait halte, on
mange du singe, boit du café et on cantonne à Maucourt où on arrive à midi,
tous bien fatigués. Nous logeons à côté de l'école. Le bruit du canon après
s'être approché, s'éloigne considérablement. On nous dit que la cavalerie que
nous avions vu à Bertrameix (NO de Landres) a tourné l'ennemi et l'a mis en
déroute sur sa gauche.
A 17h, on nous annonce un succès léger mais certain. En Belgique, succès également. Mais est-ce seulement vrai ? On se couche à 21 h.
Réveil à 5 h. Départ vers Billy que nous
laissons à notre droite pour prendre la route de Mangiennes.
Faisons une grande halte avant d'arriver au château à
Au bout d'un quart d'heure, nous quittons
notre place suivant l'ordre du chef, pour nous placer derrière la 7ème
compagnie et derrière les mitrailleuses. Que de poussière...
Nous traversons Billy où les habitants et
le génie apportent de l'eau fraîche. Nous voyons un sous-officier allemand
blessé, sur un brancard. Respect au blessé.
Le service de santé nous rejoint à
C'est Muzeray.
Nous reculons enfin tellement notre
position est dangereuse. Pendant ce temps, nos troupes tiennent bon. 19 h:
alors que l'artillerie tire encore, nous partons dans la relève des blessés.
Rôle extrêmement dangereux. Je pars avec Taillard, Leloup et Cachera,
Charles : je porte le brancard avec Taillard. Nous avançons tous deux sous
le feu des obus à la mélinite qui creusent des trous d'un mètre cube de terre.
Nos obus et ceux des allemands font un bruit affreux en éclatant sur Muzeray.
Nous transportons le sapeur Henry blessé à
la cuisse et à la poitrine sur au moins quatre kilomètres ... Le poste de
secours est changé : il nous faut aller jusqu'à Billy où nous arrivons à
21 h du soir. Nous portons notre blessé dans une maison où repose déjà deux
morts, dont un commandant
du 19ème chasseurs qui a la cuisse complètement détachée. (1)
Il nous faut le descendre en bas.
Nous entrons boire un peu d'eau dans un
seau, et tombons sur un demi seau de lait que nous buvons.
A 10 h, nous nous couchons sans manger, et
très peu rassurés.
(1) « Un détail assez étonnant, durant la journée du 24 août 1914, réuni ce carnet de campagne avec un autre carnet d’un sous-lieutenant du 19e bataillon de chasseurs. Cet autre carnet est aussi publié sur mon site >>> ICI <<<<
Réveil à 3 h. Nous sortons et allons nous placer
dans une rue où nous faisons du feu pour préparer le café; un lieutenant
d'artillerie nous fait éteindre le feu qui pourrait indiquer nos emplacements à
l'ennemi.
A 5 h, le 150ème RI prend immédiatement les
positions de combat, mais les positions sont moins avancées qu'hier. Aussitôt
l'action engagée, on recule de toute part.
La musique recule avec le drapeau.
Le recul est organisé, nous dit-on. Faut-il le croire ?
Nous entrons dans une pâture, et nous
attendons prés d'un étang. La position que nous tenons est minée par le génie.
On nous apprend que l'artillerie tire encore, que le 150ème RI la défend
encore, et que les allemands tenus en échec par l'artillerie, n'avancent pas.
Plus tard, pendant que nos troupes montent, Billy est bombardée. Nous reprenons
la route de d'Azannes. Nous voyons un groupe de blessés se dirigeant sur
Verdun.
Nous partons sur Romagne sous les Côtes.
Marche difficile à cause des tirs d'artillerie. On prépare le cantonnement dans
la plaine; nous allons chercher des bottes de blé et en arrivant, on nous dit
qu'il faut nous cantonner à Chaumont. Nous mettons au moins trois heures pour
faire
Lever à 4 h.
Le colonel félicite la musique pour sa
belle conduite de Lundi. Nous prenons la route de Verdun, passons à Ville
devant Chaumont. Le chef discute avec le commandant major.
Passons à Vacherauville, Bras et Charny
par la territoriale 48ème et 44ème. Abattoir militaire entre Charny et Marre.
Nous croisons la garde civile qui porte des effets militaires pris au 120ème de
Stenay : c'est comique.
Les habitants des environs émigrent vers Verdun. Arrivons à Cumières. Je reçois une lettre que Papa m'a écrite lui-même. On se couche à 8 h, et nous passons une bonne nuit.
Réveil à 5 h, départ à 9 h pour Forges.
Des troupes de réserve du 150ème RI
arrivent de Soissons. Je revois Taton.
On nous apprend la distinction de plusieurs généraux. Félicitations au 6ème Corps et en particulier à la 40ème Division. Le chef nous apprend que le 4ème ou 5ème corps d'armée allemande sont anéantis entre Lunéville et Rambervillers, par le Général Pau.
Réveil à 5h½. Revue de tenue et de
campement. Passage d'aéroplanes. Muel à
On nous communique des bonnes nouvelles qui
pourtant n'ont rien d’officiel : 1er corps d'armée allemande aurait passé
Du reste, le corps d'armée aurait été
dispersé. 1200 prisonniers dans les casernes d'Etain, voitures et 1100 chevaux.
Les habitants de Forges vont émigrer.
Nous apprenons par Mr et Mlle Fribourg que
600 prisonniers allemands sont passés à St Mihiel.
La nuit, indisposition de plusieurs
musiciens, sans doute à cause du "singe".
A 23 h, alerte brusquée faite par Cousin du
Havre qui est planton au poste. Ce n'est rien, on se recouche. Lever à 4h ¼. Départ
à 4 h ¾. Passage à Béthincourt où cantonnent le 161ème et le 40ème.
Nous nous installons sur une crête.
Le colonel nous donne des images. Nous
descendons à Béthincourt pour préparer le repas et retournons au petit bois.
Vers 17 h, on parle de bivouaquer.
Nous descendons dans la cour d'un moulin ou
d'une ferme situé à
Lever à 2h ¾. On se rend à l'entrée de
Béthincourt où nous faisons le café lorsque les ténèbres sont dissipées.
Le canon commence à tonner, et le feu
devient de plus en plus vif à mesure que le brouillard se lève.
A 8 h, on distribue des cartouches aux
compagnies. Nous restons avec le 3ème bataillon qui est de réserve. On nous dit
que le 4ème corps avec le Général Evard a passé
Un capitaine allemand aurait dit que l'on
ne devrait pas tolérer l'emploi de projectiles comme en envoi nos canons. Les
Russes sont paraît-il tout prés de Berlin.
A 17 h, nous partons préparer le bivouac dans un champ d'avoine.
Réveil à 5 h. Ceux qui n'ont pas couvert
leur capote de paille, la retrouve toute mouillée.
Nous partons, traversons Malancourt,
Montfaucon. Nous prenons la route de Cierges, prenons de l'eau et partons dans
la direction de Romagnes. Le 46ème d'artillerie avec des canons de 155 nous
dépasse. Nous allons nous installer dans un bois. Fromage avec Bouchard.
On nous apprend que nos canons de 120, que
nous avions croisés la veille, ont démoli neuf batteries ennemies. Nous
bivouaquons dans un champ d'avoine.
Je continue une lettre que j'ai commencée hier
et j'écris aussi à Rimogne.
Toute la nuit, le canon a tonné.
Lever à 4h. Distribution d'eau de vie. Nous
partons à 6 h, nous remontons un convoi de blessés, puis nous revenons presque
sur nos pas. Nous remarquons que les pièces de 155 sont en batterie.
Nous traversons Bantheville. Prés de
Romagne, nous nous mettons à la disposition du médecin major, et nous attendons
prés d'un ruisseau avec Renaud.
On nous apprend que les allemands
s'apprêtent à passer
Nous attendons à
Le 150 RI quitte Romagne. Nous arrêtons
avec le premier bataillon en plein champ et nous nous apprêtons à préparer le
bivouac. Mais tout à coup, la musique part avec le 2ème bataillon qui va à
Réveil à 4 h.
Départ à 5 h. Nous marchons toujours à travers champs, jusque derrière
Montfaucon. Le canon tonne à faible distance. Sûrement, l'ennemi aura traversé
Les obus tombent
tout prés. Nous reculons sur la côte avec nos brancards. Les obus tombent plus
que jamais : il nous faut néanmoins aller chercher les blessés. Je
rapporte un sergent fourrier.
Le soir nous repartons vers 23 h et nous portons un alsacien à la mairie de Montfaucon et le médecin nous renvoie. Où aller à minuit, nous sommes sans chef. Nous allons trouver le lieutenant porte drapeau, et nous couchons dans un pré sans souper.
Réveil à 3 h, nous
avons dormi à peu prés 2 h.
On a le tort
d'allumer du feu qui sera peut-être la cause de la canonnade de toute à
l'heure, on quitte le bivouac pour prendre les positions de combats que l'on quitte
peu après. Aussitôt, les obus éclatent de tous côtés, et nous nous replions
vers le Sud à travers bois. Nous traversons Avocourt.
Nous marchons toujours : le Commandant Roibon nous fait marcher et revenir
plusieurs fois sur nos pas.
Arrivons à
Récicourt. Harassés de fatigue, nous nous couchons sur l'herbe jusqu'au moment
d'aller dans notre cantonnement. Le lieutenant porte drapeau nous donne du
pain. Le canon ne cesse de tonner jusqu'à 17h. Nous allons coucher de bonne
heure.
Lever à 4h ½. Le
29ème chasseur qui cantonnait à Récicourt
passe au pas cadencé. Nous partons à 6h ½, passons à travers champs et bois,
traversons plusieurs villages. Chaleur étouffante. Jamais nous n'avons tant
sué. Nous faisons la grande halte à la sortie de ?. A 5 h du soir, nous
arrivons à St André.
Nous devons
prendre beaucoup de précautions avec l'eau, la fièvre typhoïde étant dans le
pays. A 17 h 30, un aéroplane allemand passe au dessus du village. On lui
envoie une pluie de balles inutiles.
A 21 h, on va se
coucher et nous sommes très gênés par la fumée des feux qui nous empoisonne.
Réveil à 2 h.
Départ à 3 h. Les hommes sont très fatigués : beaucoup de traînards.
On passe à Heippes
où comme partout sont installés des bivouacs d'émigrants. Nous passons à
Issoncourt. Derrière nous, attaché à un fourgon du convoi, est l'incendiaire de
Montfaucon. Trois allemands nous suivent également.
Nous traversons Chaumont où les femmes frappent l'incendiaire
qui est en loques. On traverse ensuite Erize
Enfin, nous
arrivons à Erize la Grande où nous nous arrêtons.
Nous allons nous
coucher et dormons jusqu'à 3 h.
A 5 h, le chef de
musique nous passe une revue. Alors arrive le Colonel pour donner une solution
aux différentes difficultés qui se sont élevées à propos du service des
brancardiers. Il nous dit "La musique est le plus beau mouroir du régiment
et elle restera la musique, et qu’une voiture de réquisition nous suivra
continuellement pour porter nos sacs et nos instruments, lorsque nous
remplirons nos fonctions de brancardiers".
Nous ne pouvons
pas nous coucher, puisque le bruit court que nous allons partir à 21h 30 pour
une gare des environs de Bar le Duc où nous devons, dit-on, embarquer.
A 20h 30, le
colonel passe et nous dit de rentrer, que l'on ne partira pas ce soir. Avant de
nous endormir, nous entendons les récriminations de notre hôtesse qui ne veut
pas que nous touchions à son tas de blé...
Lever à 2h ½.
Départ 3h ½.
Nous retournons
sur nos chemins : Erize
Le régiment et
ceux qui suivent vont prendre leur position de combat sur les crêtes à gauche,
et nous autres les musiciens, après avoir déposé sacs et instruments à la
voiture,, nous nous asseyons sous les saules et nous attendons. Le canon tonne
très loin, mais vers 8 heures, on entend de nouvelles batteries et canonnades
de plus en plus vives. Le train de combat du 150 part ravitailler les
nôtres.
A 11h 30, après
avoir fait du café, nous partons sous la conduite du chef de musique. Nous
sommes rassemblés sur un lieu de combat
que les allemands abandonnèrent. Nous traversons Courcelles sur Aire
abandonnée.
Nous installons
notre poste de secours dans le verger de la ferme des Anglecourt.
Les obus pleuvent
sur la côte qui nous fait face et derrière nous, les pièces de 120 lancent
leurs obus qui nous passent par dessus la tête. Nous apprenons par le
commandant major que jusqu'alors nous avions 3 corps d'armée devant nous après
Montfaucon, ils ont détaché deux de leurs corps de sorte que le 6ème corps
attaque à force égale. Nous avons 16 bataillons arrivant de Verdun qui viennent
nous aider paraît-il.
Le 6 septembre,
nous cantonnons à Seraucourt.
Chaumont sur Aire.
Terribles journées
de Rembercourt.
Chaumont sur Aire.
Landrecourt.
Bouchard se trompe de chemin en revenant d’un endroit où il a trouvé du miel et
il suit le 154èmeRI dans la direction de Verdun et faisant ainsi une dizaine de
km de rabiot.
Damploup
Bezonvaux
Ornes. Je porte un
blessé avec Mondet, Cousin Perronnet et Florentin: souvenir éternel...
Verdun
Lacroix sur Meuse.
Le carnet s’arrête là,
brutalement. La guerre de mouvement aussi. A partir de cette date c’est la
guerre de position. Les soldats n’ont pas été préparés à cette forme de guerre.
On s’aperçoit que
« le bourrage de crâne » va bon train, dès le début du conflit. Après
un certain temps, mon grand-père a des doutes. Il est inquiet, ne
recevant plus de nouvelles de sa famille et pour cause, les allemands occupent
déjà les Ardennes, mais personne ne lui dit. Est-ce pour cela que mon
grand-père arrête la rédaction de son journal ?
Blénod le Toul, Mai 1918
Composition Musique du 150 R.I. En encadré, les morts au Champ d’Honneur.
(photo annotée au verso par Victor CHRISTOPHE)
Un
croquis qui se trouvait dans le carnet de guerre.
Lacroix-sur-Meuse
Quelques
coins de «
25/11/1914
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