Lettres de Robert Fournier (adjudant-chef au 158e RI) à Germaine Fournier

pendant la grande guerre

 

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Robert Fournier

Adjudant Chef Mitrailleur au 158e R.I

 

 

Germaine Fournier

 

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 25/12/15 à 20 h.

Ma chère Germaine

Dans l’impatience de ma rentrée je croyais trouver à peine ici quelques lettres aussi grande a été ma désillusion lorsque il y a 3 jours j’ai du monter à la tranchée sans un mot de personne. J’étais si souffrant que j’ai pu à peine tenir 2 jours là haut. Hier dans l’après-midi voulant sortir un moment, je me suis trouvé mal, voyant cela je me suis fait relever le soir même.

Je vous dirai d’ailleurs que bien qu’ayant dormi 15 h de suite je ne vais guère mieux.

Enfin j’ai 8 jours devant moi pour me reposer : une lettre de Maman et les vôtres m’ont aidé à passer presque agréablement, si j’ose dire, cette journée de Noël. Noël, ce mot si magique autrefois n’évoque plus pour moi que de lointains souvenirs, bien tendres et bien doux. Si les bébés pouvaient se douter de ce qu’ils perdent lorsqu’ils deviennent grands !

Vous êtes trop gentille ma chère Germaine de vous déranger ainsi pour moi. Je n’oserai bientôt plus rien vous demander, si ce n’est des lettres plus suives et plus longues que par le passé !

Avez-vous fait un bon voyage de retour et un peu moins long que celui que nous avons fait ensemble ! Je l’espère pour vous. Je m’arrête sur ces mots, ma chère Belle sœur.

Quelque soit le plaisir que j’aie à écrire avec vous, si vous saviez comme je suis fatigué, je continuerai un autre jour.

Mes meilleurs amitiés à Madame Perron et pour Vous et Simette (*) d’affectueux baisers

Robert

J’attends votre petit Paquet et une carte.

*Simette est le surnom donné par Robert à Simon son neveu

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 27/12/15

Ma chère Germaine

Cette lettre vous joindra je l’espère assez tôt pour vous apporter mes souhaits les plus affectueux de bonne année et de bonne santé. J’ai reçu ce soir votre lettre du 24. Je suis navrée pour vous de l’affreux voyage que vous avez du faire. J’espère que vous êtes maintenant remise complètement de vos fatigues. Pour ma part, les voyages ne me réussissent pas. A peine rentré j’ai du monter aux tranchées, mais très fatigué j’en suis redescendu 2 jours après, depuis je dors toute la grande journée et me soigne le mieux possible.

J’ai reçu hier soir votre boite de bonbons expédiée de Bourges ainsi que la bague qui me va maintenant très bien , vous êtes trop gentille et je n’oserai plus désormais vous déranger de la sorte : vos « poilus » ont-ils été aimable pendant votre voyage.

Je me serais très certainement passé pour vous de cette compagnie.

Enfin par ces temps de guerre c’est presque un honneur de voyager avec des guerriers (je ne dis pas cela pour moi, croyez le bien). Nous avons toujours un temps détestable et la boue des tranchées monte chaque jour. Si cela continue d’ici un mois nous aurons par-dessus la tête. On parle de nous conduire au repos dans quelques temps, si cela pouvait être vrai ! J’attends toujours les photographies de Bourges vous ne m’en parlez pas : Au revoir ma chère Germaine, je vous embrasse tendrement ainsi que Simette.

Que lui donnez vous pour le jour de l’an. Nous penserons à vous ce jour là.

Affectueux baisers

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 31/12/15

Ma chère Germaine

Je viens de rentrer à mes cantonnements après un voyage qui nous a semblé terriblement long !

La pensée que je laisse à la maison des êtres chéris et attristés, qu’il se pourrait que je ne revois pas, le souvenir aussi de notre cher Papa m’a mis dans un état d’esprit déplorable, et puis ce passage rapide au milieu d’une vie civilisée, ce retour non moins rapide parmi nos guerriers, n’est pas fait pour me remettre.

Je compte un peu sur vous pour dissiper cette mauvaise impression du retour. Avez-vous pu remporter ma bague ! J’y tiens.

Et n’oubliez pas de me l’expédier ainsi que la note de mon Bottin. Nos photos sont elles réussies ? Il pleut à torrent ici et je dois remonter après demain aux tranchées. Joyeux noëls, n’est-ce Pas ! Enfin on pensera peut-être à moi à la maison. Cela me console.

J’attends bientôt de vos nouvelles ma chère Germaine.

Je vous embrasse tendrement ainsi que Simette ; meilleures amitiés à votre Maman.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 1er janvier à 4 heures du matin

Ma chère Germaine

De la tranchée où je vous écris, cette carte vous apportera avec mes vœux les  plus tendres, mes remerciements pour le charmant et délicat envoi que vous m’avez fait. Il est arrivé le matin de mon départ pour les tranchées, j’en ai emporté quelques-unes avec moi !

Et Simette, l’a-t-on gâté ?

Affectueux baisers Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 4/1/16

Ma chère Germaine,

Ma lettre sera courte aujourd’hui bien que je vous en doive encore plus long que de coutume, la seule raison est que je manque de papier et je déteste écrire sur du papier ordinaire.

J’ai reçu de vous pendant ces 4 jours la carte de Simette la veille du jour de l’an avec votre lettre du 28. Elle m’a tenu compagnie pendant toute cette journée du 1er de l’an qui m’a semblé bien longue. Enfin j’ai vécu quelques heures seul à seul avec mes souvenirs , les uns déjà bien anciens, les autres encore  tout frais et ravivé encore par les lettres.

Mon indisposition de l’autre jour n’a été que passagère et maintenant je me porte de nouveau tout à fait bien. Je suis aidé dans mon rétablissement par la pensée que nous sommes relevés bientôt.

Nous partons le 10 ou le 12 pour les environs d’Amiens où nous resterons 5 à 6 semaines. Quelle joie ! Vous être trop gentille de penser ainsi à moi. Germaine, j’attends votre gâteau. Je ne doute pas qu’il ne soit excellent ! Que me demandez-vous. Je ne puis vous écrire plus et mieux que je le fais sans dépasser les bornes de la sagesse.

Il n’en est pas de même pour vous, n’est ce pas ? Je crois vous avoir dit que j’avais reçu bonbons, et bague de Bourges, mais le bijoutier l’a très mal rangé. Elle est à peine dégrossie et polie. J’ai bien envie de vous la renvoyer pour que vous la donniez à finir à Dijon.

A bientôt de vos nouvelles, chère grande sœur Je vous embrasse bien tendrement

Je vais dormir. Bonne   Robert   nuit !

 

 

 

Robert Fournier (en haut à droite) et ses hommes du 158e RI

 

 

Détail de la photo ci-dessus

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 9/1/16

Ma chère Germaine

Nous avons quitté hier nos cantonnements pour gagner en auto un patelin plus en arrière. Vous ne vous étonnerez donc pas de ne rien recevoir de moi avant quelques jours.

J’ai toute une organisation de cantonnement à faire. J’ai reçu vos deux lettres avant-hier. Tendres baisers.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 10/1/16

Ma chère Germaine

J’attendais aujourd’hui une longue lettre de vous et ce n’est qu’une très courte que je reçois. Après 3 jours de silence c’est bien court vous en conviendrez, et vous qui avez peur de m’ennuyer.

Comment osez-vous écrire de telles choses ! J’ai bien reçu les photos d’Alex. Elles ne sont pas bien fameuses mais elles n’en ont pas moins de prix pour moi.

Je n’ai pas encore eu l’occasion de me faire photographier mais dès que je le pourrais je le ferai. Depuis 3 jours je suis pris par notre nouvelle installation.

Et ce n’est pas petite affaire.

J’espère que Simette ne vous donne plus d’inquiétude et qu’il est complètement remis maintenant : avez-vous reçu mes dernières lettres. La carte postale d’Hubert m’a fait bien plaisir : je crois vous avoir dit que votre gâteau m’était arrivé un petit peu aplati mais malgré cela délicieux puisque je l’ai mangé à moi tout seul. Voyez un peu quel gourmand ! J’attends vos autres fleurs avec impatience et vous en remercie d’avance.

Pour le moment, je profite du beau temps et des loisirs que me laisse le service pour faire du cheval. Demain matin je vais faire une promenade avec mon Lt. Je m’arrête pour ce soir ma chère en vous embrassant bien tendrement. J’attends une longue lettre demain.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 15/1/16

Ma chère Germaine

Quelques mots seulement, nous partons à la revue d’ici ½ heure.

Il nous faut faire 10 Km pour aller défiler devant d’Urbal. Le spectacle serait certainement beau toute une division, cavalerie artillerie y prendra part. Je vous raconterai cela demain. Hier soir je recevais votre gentille lettre du 12 et ce matin des fleurs délicieuses (illisible) très fraîches malgré le voyage.

Je les ai mises dans un vase, elles embaumeront ce soir ma petite chambre.

Simette dort-il maintenant ? Il ne faut pas avoir peur de lui faire prendre l’air, laisser courir, trotter, ce régime lui fera certainement beaucoup plus de bien que de rester confiné dans une chambre à fatiguer par ses jeux sa petite Maman.

Je crois vous avoir assez dit que j’avais eu les photos d’Alex. Elles ne sont pas merveilleuses à part 1 ou 2, malgré tout elles me plaisent ainsi. Aujourd’hui nous avons un temps superbe. J’ai reçu hier mes bottes. Elles sont très bien et ont fait tiquer mon Lt. Je les étrenne aujourd’hui.

Je rentre de la revue épatantes mais nous avons du rester sous la pluie plus de 2 h ; mon Rgt. a reçu les félicitations de D’Urbal : vous verrez  peut-être d’ici q.q temps cette revue au Ciné, et sur l’illustration et vous pourrez peut-être m’y reconnaître marchant  à 10 pas en avant de mon peloton en passant devant de Boissandy qui commande notre Division : il a dit : « très bien » (au passage de notre Peloton)

Revers de la médaille ! Mes bottes trop dur m’ont blessés et j’ai du rester à cheval ; j’étais ravi !

Au revoir ma chère Germaine A bientôt le plaisir de vous lire, je vous embrasse bien tendrement.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 20/1/16

Ma chère Germaine

Déception hier. Déception avant-hier. Pas de lettres : je me rattrape heureusement un peu ce soir avec votre petit mot trop court de mardi, et une lettre de Maman et de Guite ; je ne m’expliquais pas le silence de ces derniers jours, je le comprends maintenant, vous avez du être occupée par le départ de votre Maman. Vous voilà maintenant tout esseulée.

Votre petit compagnon heureusement se charge à lui tout seul de vous occuper largement .Et puis le papier et la plume sont là qui vous attendent, prometteurs de consolation pour celui qui le lira ; je vous confirme ce que j’écrivais l’autre jour de Guite.

J’espère venir à Dijon fin février.

Je m’endors et me réveille chaque Jour en y pensant, le reste du temps je me promène, lis et écris avant-hier j’ai galopé tout l’après midi avec mon Lt, à travers champs et bois il faisait délicieusement bon, aujourd’hui nous avons été au tir toute la journée et nous venons à peine de rentrer il est 6 h ; j’espérais non seulement trouver 1 lettre mais plusieurs, aussi je ne suis qu’à moitié contenté, le courrier de demain sera meilleur !

Les dernières fleurs reçues se conservent encore quoique un peu fanées. Seule une rose à peine épanouie et toute rouge garde toute sa fraîcheur.

Je l’ai mise dans un vase auprès de mon lit : Attendez-vous bientôt Alexandre ? Il m’avait écrit il y a déjà q.q temps et je ne sais pourquoi je ne lui ai pas encore répondu, je vais profiter de mes loisirs pour le faire. Si vous voulez vous amuser, procurez-vous « Monsieur de Courpière Marié » de (Habel Hernant) et « la Peur de l’amour » de H de Régnier : à bientôt le plaisir de vous lire, avant d’avoir celui de vous embrasser ainsi que  Simette.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 24/1/16

Ma chère Germaine Excusez moi de vous laisser ainsi sans nouvelles, malgré mon grand désir de répondre à vos 2 lettres du 20 et 21.

Je n’ai pas eu une minute pour le faire ces 2 derniers jours.

Depuis hier je suis un peu souffrant. Ce soir je suis absolument éreinté, et en ce moment pendant que je vous écris mes mains et mon front sont brûlants, toute la journée j’ai été assisté à des exercices de cadres, c’est intéressant, mais la route est un peu longue 15 Km avant d’arriver au terrain de manœuvre, demain je repars à 11 h ½ avec le Capitaine et le Lt, une bonne lettre je l’espère m’attendra à mon retour.

Je suis heureux de voir que mes lettres vous sont parvenues assez à temps pour vous montrerque quoique vous en disiez je ne pourrais oublier ma si gentille correspondante.

Je vous accorde votre pardon mais pas à genou ! Votre lettre de l’autre jour m’annonçant l’indisposition de Guite m’avait un peu inquiété, ce n’est rien heureusement.

Je compte un peu sur vous pour la distraire ! J’accepte tout ce qui viendra de vous.

Votre dernier gâteau était si bon, que votre offre d’un second ne peut faire autrement que de me réjouir.

J’accepte aussi, et à moins (illisible) votre projet de promenade à Grignon.

Je serais si heureux d’y retourner et de le revoir encore une fois avant de partir pour les grandes attaques d’Avril ou de Mai. On nous exerce dès maintenant en prévision de cette effervescence. Nos grandes manœuvres que nous commencerons d’ici peu disons 15 j. Mais avant d’arriver à pied d’(illisible) 20 Km à faire à pied. Cela me sourit moins !

Je vous quitte malgré mon désir de continuer notre causette, je veux être frais pour demain. À bientôt et bien tendres baisers de votre Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 27/1/16

Ma chère Germaine

Je brûle d’envie de causer un petit peu avec vous d’autant plus que j’ai là devant moi 2 de vos gentilles lettres qu semblent me reprocher sinon ma paresse tout au moins ma nonchalance.

Mais il est près de 3 h et le courrier ne va pas tarder à arriver m’apportant j’en suis certain de plus fraîches nouvelles. J’attends donc encore quelques instants, n’est ce pas !

Je n’ai pas été déçu votre carte lettre et les fleurettes du Clos me font grand plaisir lorsque je viendrai en permission je ne manquerai pas d’y aller. Je vous envoie quelques violettes que j’ai cueillies hier pendant une manœuvre dans le parc d’un château. Elles sentent merveilleusement, malheureusement je crois bien que lorsqu’elles vous parviendront elles ne soient un peu fanées. Nous partons pour Abbeville après demain à 7 h du matin.

Notre marche durera 3 jours.

Je n’aurai certainement pas beaucoup de temps à moi pendant ces marches pour vous écrire aussi je vous prie de patienter un peu si vous ne receviez rien de moi. Je pars dimanche matin à 6 h à une 2ème manœuvre de cadres. Je ne compte par rentrer avant la nuit. Alex a-t-il sa permission ?

Je ferai parti dorénavant d’une nouvelle armée en formation dans la Somme. Nous ne sommes donc pas prêts de revoir les tranchées. Je m’en réjouis certainement autant pour vous.

Si votre gâteau n’est déjà parti oserais je vous demander de joindre à votre petit paquet quelques feuilles et enveloppes comme celles-ci ?

A bientôt et tendres baisers pour vous et Simette

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 2/2/16

Ma chère Germaine 1 mot seulement, nous venons d’arriver dans un patelin à 10 Km d’Abbeville dans la Somme.

Après 3 jours de marche que j’ai fait assez aisément. J’ai reçu juste la veille de notre départ votre gâteau qu était délicieux.

Je sais par une carte de maman qu’Alex était auprès de vous, malheureusement pour hier peu de temps. Je vous quitte, ma chère Germaine car je suis un peu éreinté.

Il est 8 h et je compte dormir jusqu’à 10 h demain.

Je vous embrasse tendrement ainsi que Simette et Alex.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 7/2/16

Ma chère Germaine

Je vous écris tout joyeux.

Je viens de passer q.q heures avec Pierre qui est venu cet après-midi me surprendre en auto, malheureusement les 2 h. qu’il a passé avec moi ont passés trop vite. Et maintenant j’en suis encore à me demander si sa visite n’a pas été un rêve. J’ai reçu votre gentille carte de Grignon. Merci, j’ai bien pensé à vous tout ce jour là. Alexandre est-il reparti déjà ?

Nous n’allons pas moisir bien longtemps où nous nous trouvons, et nous ne marcherons guère à monter vers les lignes. Aussi soyez sans inquiétudes si vous ne recevez pas de suite de mes nouvelles, ce qui ne vous empêchera pas d’ailleurs de me répondre n’est ce pas ?

Si vous vouliez m’envoyer un petit colis de cigarettes. Levant ou autres j’en serais bien heureux car nous ne trouvons absolument rien ici, et trouverons encore moins où nous allons. Je vais très bien, vous aussi je l’espère. Je vous embrasse bien fort avec Simon.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 20/2/16

Ma chère Germaine

Un petit mot pour vous dire avant de vous embrasser que nous embarquons ce soir pour destination inconnue. La bataille fait rage vous le savez sur Verdun.

Peut-être allons-nous à la rescousse. Hourra !

En 3 jours nous avons changé 2 fois de cantonnements. Hier matin nous partions nous installer dans un autre village où nous aurions été merveilleusement bien, malheureusement nous le quittons ce soir à 5 h.

J’attends avec impatience de vos nouvelles ! Il neige à gros flocons ! À quand la permission maintenant !!!!

Bien tendres baisers

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 29/2/16

Ma chère Germaine

Je reçois après n’être resté plus de 5 jours sans nouvelles de personne votre lettre de 25. Vous devez être bien contente de l’arrivée d’Alex ;

Quel veinard ! Pour nous les permissions par la faute de ces rosses de Boches sont remises à quand ? Enfin ce qui me réjouit le cœur c’est que l’échec que nous venons de faire subir à leur offensive leur fera peut-être passer l’envie de recommencer. En attendant nous déménageons de nouveau demain matin pour je ne sais où, mais certainement pour nous rapprocher de la bataille.

Si nous pouvions seulement les culbuter une bonne fois !!! Votre maman ne doit pas être bien tranquille à Rt avec ce bruit effrayant de canonnade qui ne cesse depuis 8 jours. Je me rapproche de Pierre.

Je viens de lui écrire pour l’avertir de ma présence dans la région.

Je m’arrête pour ce soir ma chère Germaine en vous embrassant tendrement ainsi qu’Alex s’il est près de vous. Sans oublier Simette.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 3/3/16

Ma chère Germaine

Pourrais-je vous charger d’une commission auprès de votre mari ? J’ai brûlé l’extrémité de mes bottes en me chauffant il y a q.q jours auprès d’un poêle un peu trop ardent. Je demanderais à Alex de passer chez le bottier à Bourges et lui dire de m’envoyer avec un morceau de cuir de 10 cm2 pour la réparation et un pot de colle couchou (Couchou). Nous sommes pour le moment dans un petit village dans les environs de B. le. D et nous attendons d’un moment à l’autre à être porté en avant.

Les Boches se sont enfin un peu calmés devant Verdun, probablement pour frapper plus fort plus tard mais ils trouveront à qui parler.

Et cette promenade à Grignon. Avez-vous eu le beau temps et votre vieux donjon est-il toujours en bon état. Combien je voudrais pouvoir le visiter : les permissions sont supprimées pour le moment.

Je suis très occupé par l’instruction de ma 1ère qui commence à prendre forme.

Mais ces déplacements continuels nous font perdre un temps précieux. Nous ne serons guère en état de marcher avant un bon mois.

Je vais très bien et j’espère qu’il en est de même pour vous tous.

Bon baisers.

Robert

Lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 11/3/16

Ma chère Germaine

J’ai reçu hier deux de vos lettres du 6 mais les miennes vous sont-elles parvenues !! Je le souhaite : au moins j’espère que vous avez pensé que je ne suis pas le seul fautif dans ces retards si ennuyeux.

Ces Boches sont toujours là cause de semblables (mot illisible) une chose qui vous fera grand plaisir j’en suis persuadé, c’est que je ne suis pas encore engagé, et que je n’espère pas l’être avant que mon Rt ne soit sorti de la bataille qui fait encore rage à l’heure où je vous écris ; je suis (si votre frère n’est pas parti) tout près de lui 2 Km.

Je vais faire mon possible pour le voir : nous sommes parfaitement logés dans des maisons évacuées par leurs habitants le jour même de notre arrivée. Ces derniers pressés de partir nous ont tout abandonnés. Malgré tout, les permissions je l’espère reprendront d’ici peu. Pas plus que vous je ne perds patience. D’ailleurs la guerre est une excellente école et je ne serais pas soldat si je n’avais pas la patience d’attendre ce qui doit venir.

Je continue l’instruction de mes hommes malgré le froid et la neige. Pendant qu’autour de nous gronde le canon.

A bientôt de vos nouvelles ma chère. Je vous embrasse tendrement ainsi que Simette.

Robert

Carte de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 15/3/16

Ma chère Germaine

Encore cette fois je ne répondrai à votre lettre du 13, reçue hier soir, que bien vivement.

Mon papier se trouve dans ma cantine à 15 Km d’ici et je n’en ai plus une feuille sur moi. Mon Rt a été relevé ce soir, et probablement nous allons partir nous informer plus en arrière. Je suis navré de vous savoir un peu souffrante. J’espère que maintenant vous allez mieux. Merci pour vos fleurettes et tendres baisers.

Robert

Carte de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 21.3.16

Ma chère Germaine

2 lettres de vous et ce soir je n’ai que juste le temps de vous griffonner un petit mot en attendant mieux. J’ai reçu vos cigarettes. Je vous en remercie en vous embrassant bien fort.

Robert

Carte de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 24.3.16

Ma chère Germaine

Reçu vos 2 lettres. Je ne puis vous répondre encore aujourd’hui car nous logeons sous la tente. Dès que nous serons mieux je vous écrirai. Je pense à vous.

Bon baisers. R.

Alex a-t-il oublié la commission que je vous avais demandé de lui faire ?

Carte de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 27.3.16 à 17 h.

Reçu hier soir votre lettre du 22.

Je n’ai pas le temps d’y répondre ce soir car nous déménageons, et par une pluie diluvienne.

Tendres baisers

Robert.

Dernière lettre de Robert Fournier à Germaine Fournier datée du 1.4.16

Ma chère Germaine

Quelques temps déjà que je n’ai eu de vos nouvelles.

Que devenez-vous. Avez vous pu voir votre frère. Nous avons un temps superbe depuis hier.

Si ce n’était ce bruit continuel des canons la vie serait encore supportable. Cettenuit presque impossible de dormir. Le grondement était effrayant. Tous les monts qui nous protègent semblaient embrasés et nous pouvons être appelés à monter d’un moment à l’autre là haut.

Ce serait peut-être notre bonheur. Une gentille petite blessure. Puis évacués sur Nice ou Vichy, convalescence, permission. Enfin revoir un peu cette vie que j’ai quitté depuis 17 mois ne serait pas pour me déplaire. Je vous quitte en vous embrassant bien affectueusement ainsi que Simon. Mes amitiés à votre frère.

Robert.

 

 

 

 

 

Robert Fournier a été tué quelques heures après avoir rédigé cette dernière lettre le 31 mars 1916. Il n’a jamais connu le premier jour du mois d’avril dont il avait daté sa lettre…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                 

 

Témoignage sur la mort de Robert Fournier

 

 

 

 

Témoignage donné par Joanny Bailly qui écrivit également une lettre à la tante de Robert Fournier pour lui donner un récit plus complet de la mort de son fils.

Reproduction de la lettre de Joanny Bailly destiné à la tante de Robert Fournier

Madame

Je m’empresse de faire réponse à votre demande au sujet de votre cher neveu Mr Robert Fournier Faucher adjudant chef de la 2e Cie de Mitrailleuses du 158e d’Inftie disparut le 31 Mars 1916 à L’attaque Allemande dans le Village de Vaux près de Verdun.

 

Je connais Monsieur Robert depuis son arrivée au 158e Infanterie (mot illisible) tous ses grades depuis chef de (mot illisible) Jusqu’à adjudant chef. Mais soyez forte chère Madame le malheur a voulu qu’une balle le frappe en plein cœur au cours de l’attaque.

Il est mort en brave le vendredi 31 Mars à 4 heures du soir tout près de moi. Je connais très bien l’endroit.

Sa mort a causé une vive Emotion parmi les camarades car Monsieur Robert était pour nous un chef juste et bon. Je sais que votre douleur sera Grande chère Madame surtout qu’il venait encore de perdre son cher Père il n’y a pas longtemps.

C’est moi qu’il lui avait encore Porté cette triste nouvelle aux tranchées c’était une dépêche car j’étais souvent détaché auprès de lui. J’étais agent de liaison à sa Cie. Si vous désirez chère Madame Recevoir d’autres renseignements sur votre cher neveu au sujet de ses affaires : cantines ou autres choses je vous donnerai l’adresse de son ordonnance.

Je n’ai malheureusement rien pu prendre sur lui. Je n’ai pas eu le temps. Si vous avez autres choses à demander chère Madame je suis à votre entière disposition.

Votre tout dévoué.

Bailly Joanny

Lettre d’Hubert Fournier à son frère Alexandre datée du 13 décembre 1916

Mon cher Alexandre

Je viens de recevoir une lettre de Germaine qui m’a fait le plus grand plaisir. Je suis heureux de te savoir tranquille, près de Germaine et Simon, et pour Maman et Guite qui ont un soutien sur. Tu connais sans doute le nouveau malheur qui nous a frappé, notre pauvre petit Frère Robert est mort, j’en ai eu la certitude par un des témoins de sa fin, qui m’en a fait le récit le plus complet, que je vous dirai de vive voix.

Je me porte assez bien.

Je te souhaite bonne santé, et t’embrasse tendrement avec Germaine et Simon

Hubert

 

 

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