Vers les années 1914 1915 1916 1917 1918 1919
« Je viens de
transcrire une petite centaine de lettres écrites par les trois frères SAUER.
Il s’agit d’Henri
(mon grand père), Gaston et René, tous au front, dans des endroits
différents ; lettres écrites à leur maman, leur sœur (Claire), tante ou
fiancée (restées en Algérie), cousin ou entre eux.
Tous trois ont eu
le bonheur de rentrer à la fin de la guerre. »
« À partir de 1917, mon grand-père Henri, déclare son amour à sa
cousine germaine (Claire BROGAT), ma future grand-mère, puis ils se marient à
l’occasion d’une permission, en 1918, et les courriers deviennent plus
amoureux, et plus impatients, l’attente est longue.
Henry a devancé l’appel, les premières lettres sont datées de
1913. »
Mireille, janvier 2010
Henri, sergent fourrier, était au 50e RI
René, caporal au 9e Zouaves
Gaston, sergent au 1er Zouaves, puis cassé de son grade, 2e
classe en mars 1918, puis gravement blessé
Lettre de Monsieur Cabanel à Thérèse Sauer,
née Baudier après le décès de son époux Emile Sauer, père de Claire, Henri,
Gaston et René.
Chère
Madame,
Je ne
puis croire encore au terrible malheur qui vous frappe si cruellement et qui
m’a enlevé mon meilleur ami. Je reste confondu devant ce désastre si prompt et
que rien ne laissait prévoir.
Lorsque
votre Henri m’a annoncé la maladie de son père j’ai été un peu effrayé, mais
j’espérais que cela ne serait qu’une X, qu’une maladie bénigne que vos soins
enrayeraient très vite. Votre télégramme m’a révélé la gravité du mal qui a
terrassé mon cher Sauer en quelques jours.
Mon
émotion est si intense depuis samedi que je n’ai pas eu le courage de vous
écrire, et en ce moment encore les mots me manquent pour vous exprimer ma
douleur et vous apporter des paroles de consolation qui je le sais bien ne
pourront calmer votre profond désespoir.
Pleurez,
chère amie, si cruellement éprouvée, pleurez ce mari si bon, ce père si aimé,
pleurez une perte irréparable, mais aussi ne vous laissez pas abattre, soyez courageuse
devant cette terrible épreuve, songez à vos chers enfants qui n’ont plus que
vous et qui comptent sur votre tendresse et votre fermeté.
J’aurais
voulu rendre les derniers adieux à mon pauvre ami, malheureusement votre
télégramme ne m’ait parvenu que samedi matin à 10 heures, c’est-à-dire trop
tard pour pouvoir prendre le train d’Alger-Oran.
Que
comptez-vous faire ? Quelles résolutions avez-vous prises ?
Restez-vous
à Oran ou irez-vous demeurer auprès de vos parents ?
Veuillez,
je vous prie, me mettre au courant de vos projets. Si je puis être utile à
quoique ce soit, disposez entièrement de moi.
J’attends
toujours ma nomination pour Alger, elle se fait bien attendre et je commence à
désespérer.
Recevez,
Chère Madame et amie, avec l’expression de mes sentiments attristés mes
respectueuses amitiés. Embrassez bien vos chers enfants de ma part et
dites-leur combien je pense à eux.
Cabanel
Henri, debout derrière, calot de biais, Périgueux le 14 mai
1913
Lettre d’Henri
Ma
chère Maman,
Enfin
nous voilà de retour à Périgueux après 4 jours de marche et
Il a
fait pendant ces 15 jours un temps splendide et une chaleur algérienne pendant
les 4 jours de retour.
Dans
la carte que je t’ai envoyée de Nontron, je t’ai dit que nous étions logés chez
l’habitant. J’étais avec un de mes camarades logé chez de très braves gens, une
famille d’ouvriers charrons, dont le père est un vétéran de 1870. Nous avons
pris possession de notre chambre dès notre arrivée, on nous a préparé à chacun
un grand verre de vin rosé qui nous a un peu remontés, et après nous être
changés, ils nous ont fait manger la soupe avec eux, ne nous retenant pas car
ils avaient juste pour eux, car ils ne nous attendaient que vers midi.
A
Nontron les soldats sont très bien vus et les habitants étaient tous sur notre
passage pour nous voir passer.
A
Brantome, les habitants sont moins enthousiastes, l’écurie où nous étions logés
était si dégoûtante et sentait tellement le fumier que j’ai loué un lit pour la
nuit.
Je
t’assure que je ne mettais pas beaucoup de temps à m’endormir aussi bien dans
la paille que dans le lit.
Ces
quinze jours de manœuvres se sont passés très vite ; si l’on a eu un peu de
fatigue, par contre la vie a été moins monotone, néanmoins c’est avec beaucoup
de plaisir que je suis entré ce matin dans une chambrée et c’est encore avec
plus de charme que je me suis couché pour faire la sieste.
L’étape
Brantome Périgueux a été assez dure 26km car le soleil tapait fort sur moi.
A la
dernière pose, le capitaine nous a fait un discours patriotique au sujet de la
loi des trois ans recommandant aussi aux hommes de la classe de ne se livrer à
aucune manifestation car elles seraient sévèrement réprimées. (1)
Je ne
crois pas qu’avec le 50e une manifestation soit à craindre car la discipline
est sévère et en général les capitaines ont tous leurs hommes dans la main.
Comme
je te l’ai dit dans une lettre, j’ai reçu mon mandat qu’à Brantome et je
t’assure qu’il me faisait bien besoin ; quant à l’état de mes finances, puisque
tu me demandes où il en est, j’ai en poche 28 sous ; tu vois que ce n’est pas
beaucoup, et je t’assure que je n’ai dépensé que le strict nécessaire.
Au
commencement du mois prochain vers le 5 ou le 6 envoie-moi
Ton
fils qui t’aime bien
Henri
Pourquoi
ne m’envoies tu pas ma photo, celle qu’Albert m’a faite, joins y plusieurs
prises par lui avant mon départ et celles de Gaston, René et Claire
(1) Le service militaire venait de passer de 2 à 3 ans. Certains journaux pacifistes d’époque interpellèrent le gouvernement et beaucoup d’hommes sous les drapeaux manifestèrent leur mécontentement sous diverses formes.
Périgueux le 14 Mai 1913 – photo
prise le 11 mai devant le poste de police 4 jours
avant le départ pour «
Henri est derrière la grille, le
premier à droite. A coté de lui, LACRETELLE Armand, tué le 24 août 1914
Lettre d’Henri
Ma chère maman,
Excuse moi si j’ai un peu tardé
à t’écrire, je n’avais absolument rien d’intéressant à te raconter, la vie ici
est tellement pareille ! Les actes de chaque jour sont à peu de chose près une
répétition de ceux de la veille.
Les marches se font maintenant
de très bonne heure, à cause de la chaleur, nous partons à 4 heures du matin et
sommes de retour vers 10 h. Heureusement que les routes sont bordées presque
toutes d’arbres qui nous protègent des ardeurs du soleil.
Presque tous les arbres
commencent à être couverts de fruits mais, défense d’y toucher, les cerises et
les fraises sont en assez grandes quantités.
Hier pendant une marche, je
faisais partie d’une patrouille devant aller explorer une forêt ; nous sommes
tombés sur des fraises sauvages en assez grande quantité, je t’assure que j’en
ai mangées avec plaisir, elles n’étaient pas tout à fait mûres mais elles
étaient bonnes quand même ;
Gaston et René ne vont sans
doute pas tarder à passer leur examen.
Ont-ils l’espoir d’être reçus ?
Je pense qu’ils piochent dur ; surtout René qui est un peu en retard je crois.
A propos d’examen, celui d’élève
caporal pour la compagnie est fini, je me suis classé 4ème sur 17 et je
suis le 1er des engagés qui sont au nombre de 6. Il est vrai que j’ai culotté
et que c’est un peu la récompense de mes efforts. Cette nouvelle n’est pas
encore officielle c'est-à-dire que le capitaine ne nous en a pas encore fait
part.
Je sais ces résultats par
Bessrirh qui a fait le classement (j’ai souligné pour la compagnie parce
qu’il y aura peut être un examen pour le bataillon).
Je n’ai encore aujourd’hui
aucune nouvelle de la maison, comment cela se fait-il ?
Si tu n’as pas le temps de
m’écrire, que Gaston ou René le fassent. Claire ne m’a pas encore envoyé un mot
depuis 3 mois que je suis ici. Je vais lui envoyer une carte et lui passer un
savon.
Je n’ai pas encore écrit à
Albert, je ne sais ce qu’il doit penser de moi ; tu devrais m’excuser auprès de
lui car ma préparation à mon examen me prenait tout mon temps. Je vais tacher
de lui écrire cette semaine.
Autre sujet, mes chaussettes
sont presque usées, et presque plus mettables ! Si tu as l’occasion de
m’envoyer une caisse (fermant à clef de 30cm de long, 15 de haut et 25 de
large) mets y donc quelques paires, j’en achèterai dès que j’aurai reçu ton
mandat.
Ne sais-tu pas si monsieur
Lasserre viendra cette année à Périgueux ? Je sais que monsieur Gavoreau doit y
venir mais je ne connais pas la date de son départ.
Dans tous les cas, chaque fois
que tu pourras m’envoyer par quelqu’un une petite caisse de conserves
d’épicerie, elle sera la bienvenue.
Ma chère mère, je te quitte en
t’embrassant bien fort et en te priant d’embrasser tout le monde à la maison et
chez tante. Encore un baiser de ton fils, Henri
Envoie moi des photos je n’en ai
que deux de celles qui ont été prises par Albert chez tante. Je tiens
absolument à avoir les autres, il en a pris huit.
Je te remercie d’avance et je
t’embrasse encore ; ton fils Henri
Périgueux, au 50ème régiment, 1913
Lettre d’Henri
Ma chère maman
Ne marchant pas aujourd’hui, car
je remplace le caporal de la semaine, j’ai un peu de temps pour t’écrire. Je
suis dans la chambre des malades (qui sont peu atteints), et je dois les
surveiller. J’en profite pour étudier une leçon de géographie que l’on doit
réciter ce soir.
Le nombre de malades diminue
beaucoup ; et à
Hier en fait de mardi gras,
quoique ayant quartier libre l’après midi, nous avons travaillé notre
géographie. En ville, quand nous sommes sortis, il y avait très peu
d’animation, quelques masques et encore quels masques qui se promenaient.
J’espère qu’à Oran, les Oranais
se sont un peu plus amusés que les Périgourdins, qui ma foi, ont l’esprit bien
tranquille et peu bruyant !
Je n’ai pas reçu ta lettre
aujourd’hui, je l’aurai peut être ce soir. J’ai reçu ton médicament ; comme en
ce moment on ne fatigue pas beaucoup, je ne prendrai de ces pilules que
quelques temps avant les marches, qui seront sans doute retardées à cause de l’état
sanitaire.
Dimanche dernier nous devions
encore aller à Bordeaux ; tout le monde avait ses permissions, quand au dernier
moment a paru un ordre du Ministre de la guerre supprimant toutes les
permissions pendant les fêtes de carnaval. Tu penses si nous étions contents
!!! Il a fallu immédiatement télégraphier à l’équipe qui nous attendait et à
laquelle nous avons joué deux fois le même tour.
Le temps est à la pluie depuis
samedi dernier, et je crois que maintenant jusqu’au mois d’avril, on ne verra plus
souvent le soleil. Enfin, étant soldat, je dois aimer la pluie, car pendant
qu’il pleut on ne marche pas, du reste un proverbe qui a cours ici, est
celui-ci :
« Pompez, pompez Seigneur pour
le bien de la terre et le repos du militaire. »
Quand on ne marche pas, je fais
à mon escouade des théories, et cela me fait revoir mon règlement militaire,
sur lequel il faut être très calé à l’examen.
Je te charge, maman d’embrasser
mes frères pour moi, et reçois de gros baisers de ton fils Henri
J’attends une lettre de Gaston
et René (dont je n’ai pas encore vu une lettre) me donnant des nouvelles du
carnaval à Oran.
J’ai reçu aujourd’hui ta lettre,
j’espère que tu vas te soigner. Je vais écrire de nouveau à tante, car je l’ai
déjà fait dès réception de son mandat.
Je t’embrasse
Henri
Périgueux – 1913, Henri – debout derrière, 3ème en partant
de la droite, bras croisés.
Lettre de Gaston
Ma
chère maman,
Tu as
du recevoir mon télégramme t’annonçant mon séjour à Bordeaux puis mon séjour à
Pompignac à
Nous
sommes bien ici, tu n’en doutes pas. Couchons et dormons à l’hôtel et sommes
d’une façon générale très bien reçus. Je t’avoue volontiers que je resterai ici
jusqu’à la fin et davantage et même plus longtemps encore.
Si tu
as des nouvelles de René et Henri, je voudrais bien que tu m’en donnes mais il
faudra attendre que j’aie une adresse fixe.
Tu
peux tout de même m’adresser une lettre à l’adresse suivante :
Nom
et qualité, 2ème zouave, 51e compagnie Camp de Satonnay (Lyon).
Peut
être la recevrais-je.
J’embrasse
tout le monde chez tante Lucie et x chez la famille Jouve, à toi mille gros baisers
de Gaston
Télégramme
d’Henri
Mes
chers parents, ma chère maman
Advienne
que pourra, et comme les arabes, je pars en disant « mecktoub ».
Dans
la chambre que nous avons en ville, différentes choses m’appartenant s’y
trouvent. C’est la cousine de madame Lacretelle qui aura la clef de cette
chambre ; mais je n’ai rien de bien important que l’on puisse t’envoyer dès
maintenant.
Bettrich
ne tardera pas à partir en congé de convalescence pour Oran ; il te donnera de
nos nouvelles de vive voix, il regrette beaucoup de ne pas partir avec nous ;
il a beaucoup pleuré mais les médecins n’ont pas voulu le laisser partir.
Tu
m’écriras toujours à la même adresse. Tu as du recevoir une dépêche te disant
de m’envoyer un mandat télégraphique ; tu ne m’enverras plus d’argent à partir
de ce moment-là car beaucoup de lettres doivent se perdre et ce ne sera pas
prudent, à moins d’une demande de ma part, ne m’envoie donc plus d’argent.
Je te
charge ma chère maman, d’embrasser tout le monde chez tante Adèle de ma part,
dis leur bien qu’ils m’écrivent quelques fois car si quelques lettres s’égarent
d’autres au moins arriveront, et que je ne sois plus très longtemps sans de vos
nouvelles. Chez cousine Maria embrasse les tous pour moi ; beaucoup de baisers,
à cousine.
Quant
à toi, ma chère mère je t’embrasse de toutes mes forces et pense bien que ma
pensée ira toujours et à tous les moments vers toi.
Embrasse
aussi mes frères, je penserai beaucoup à eux. Encore une fois je vous embrasse
tous.
Votre
enfant Henri
Lettre d’Henri
Ma
chère maman,
Je
t’écris sur le bord d’une route française, nous sommes à la poursuite de
l’armée allemande. Comme tu t’en doutes, puisque je t’écris, je suis sain et
sauf jusqu’à présent.
Il n’avait
aucune blessure extérieure mais le choc a dû lui briser une côte qui est entrée
sans doute dans le cœur. Il est mort sur le coup. Je t’enverrai sa ceinture où
il avait de l’argent, tu la remettras à sa pauvre mère.
Je
t’embrasse de toutes mes forces
Henri
Lettre d’Henri
Reçue le 1er
octobre
Ma
chère maman
Voilà
1 mois moins 2 jours que j’ai reçu le baptême du feu, plus heureux que bien
d’autres je suis encore sain et sauf. Cela durera-t-il longtemps ? Après avoir
évité la mort tant de fois j’espère retrouver un jour ma chère maman et alors
quel bonheur ! !
Comme
le font mes camarades je vais faire venir de Périgueux un peu de chocolat
Ne
t’étonne pas de recevoir un jour une facture.
Marie
et Friess se portent bien. Embrasse tout le monde pour moi.
Ton
fils Henri
Lettre d’Henri
Reçue le 5/10
Ma
chère maman,
Toujours
une santé aussi bonne ; le froid seul m’est un peu sensible, mais je m’y
habitué. Je reçois régulièrement de vos nouvelles, est-ce pour vous la même
chose ?
Nous
sommes très bien nourris, et je t’assure que si le canon ne tonnait pas si
souvent et si fort l’on se croirait en manoeuvre. Si la victoire nous sourit,
la fin de la guerre ne tardera pas, et alors quel long repos !!
Je
vous embrasse tous bien fort.
De
gros baisers de ton fils Henri
Lettre d’Henri à
Claire, sa soeur
Ma
chère Claire,
C’est
donc moi qui suis obligé de t’écrire le premier, j’espère que dès réception de
cette carte, vite une réponse. Et le petit Henri se porte bien, j’espère ?
Envoies
moi donc une de ses photos petit format. Je me porte toujours bien ; les balles
m’épargnent jusqu’à présent. Serais-je parmi les heureux qui reviennent ?
Mecktoub
disent les arabes, et je pense comme eux. Vie en ce moment pas trop fatigante,
parce qu’inactive, mais que nous réserve l’avenir. Je te charge d’embrasser
pour moi la famille Jouve.
De
grosses caresses à Henri. Et pour toi et Albert des baisers de votre frère.
Henri
Lettre d’Henri
J’ai
bien reçu hier soir les cartes que tu m’as envoyées, je les ai tout de suite
expédiées aux adresses indiquées.
Tâche
de m’envoyer 2 cravates genre régate ou cavalière assez longues pour remplacer
mes cravates de soldat. As-tu reçu une lettre recommandée.
IL
commence à faire froid, ces deux nuits passées surtout, mais comme j’ai la
veine de ne pas prendre la garde, grâce à mes fonctions (1), je dors presque toutes
mes nuits tranquillement dans une tranchée où un bon poêle brûle presque toute
la nuit.
Je te
quitte ma chère maman et t’embrasse bien fort ainsi que René dont j’attends
toujours les nouvelles.
Henri
Avec
les chaussettes, envoie moi aussi au moins 1m de toile cirée très souple.
(1) Henri était devenu sergent-fourrier (voir la carte)
Lettre d’Henri
Ma
chère maman,
J’ai
reçu aujourd’hui ta carte du 26 octobre et le paquet de chocolat et chaussettes
de laine que tu as eu la gentillesse de m’envoyer.
Les
pastilles de réglisse me seront bien utiles ; je les ai mises de côté pour le
cas, fort peu probable, où je m’enrhumerai (tu sais que j’ai la gorge très
forte). Ne m’envoie plus rien avant que je te le demande, car j’ai absolument
tout ce qu’il me faut.
Mon
sac est plein d’effets de rechange. J’ai des effets pour plus d’un mois, car tu
penses bien qu’on ne se change pas de linge toutes les semaines.
Encore
une fois merci. Embrasse tout le monde pour moi.
De
gros baisers de ton fils.
Henri
Je t’ai
envoyé quelques lettres à Tlemcen, je ne le ferai plus jusqu’à ce que tu
m’avises de ton changement
Lettre d’Henri
Ma
chère maman,
Toujours
rien de nouveau à te raconter, toujours en position d’attente.
Je
suis allé voir Mavie et Friess que je n’avais pas vus depuis 4 ou 5 jours ;
nous avons causé plus de 2 heures ensemble de nos bons moments passés à
Périgueux.
Au
sujet de la ceinture d’Armand, t’ai-je dit que celui à qui je l’avais remise a
eu une certaine somme de cet argent volée à l’hôpital de Chalons. J’espère
quand même qu’il aura expédié la ceinture et le restant de l’argent.
Suis
toujours bien portant.
Pas
reçu de lettres de toi depuis 2 jours. Je t’embrasse. Ton fils
Henri
Lettre d’Henri
Ma
chère Maman,
Je
suis toujours bien portant, toujours au même endroit. Temps horrible pendant
deux jours, mais aujourd’hui un soleil magnifique sèche la boue.
Reçu
ta longue lettre et les nouvelles que tu m’y donnes m’ont fait bien plaisir.
Je
t’écrirai la prochaine fois une longue lettre.
Je
t’embrasse bien fort. Ton fils
Henri
Lettre d’Henri
Reçue le 29
Ma
Chère maman,
Nous
sommes toujours au même endroit, tout est calme par ici où les allemands ne sont
pas bien nombreux. Toujours bien nourris, nous ne serions pas trop à plaindre
si le froid n’avait pas augmenté ; mais il gèle toutes les nuits depuis trois
jours. Heureusement que dans la journée un bon soleil nous remet un peu.
Je
n’ai pas de lettre de toi depuis 3 jours ; ceci est peut être dû aux courriers
qui ne doivent pas traverser en grande confiance la méditerranée.
On
nous apprend l’échec complet des allemands dans le Nord, et la marche
victorieuse des Russes, ce qui va, je l’espère, hâter la fin de cette guerre.
L’hiver
rigoureux de l’année dernière m’a accoutumé au froid, et j’espère ne pas trop
souffrir, ou du moins le supporter sans être malade.
L’état
sanitaire est ici excellent, pas une seule trace de maladie épidémique ; un peu
de dysenterie au début a été vite combattue et vaincue.
Vois-tu
quelques fois cette pauvre Madame Lacretelle ?
Je
n’ose lui écrire, puisqu’elle a l’espoir que son fils vit !
Mais
j’aimerais bien savoir sur quoi elle se base pour affirmer cela, et qui lui a
donné des nouvelles d’Armand.
Renseignes
moi car je voudrais bien le croire encore vivant, même prisonnier ! Cela me
consolerait.
Gaston
est-il toujours à Alger ?
Ne
sait-il pas encore quand il partira ?
Beaucoup
de blessés des premiers jours reviennent sur le front. Dans le régiment nous ne
sommes pas bien nombreux, ceux qui ont fait toute la campagne sans
interruption, à peine 25 par Cie sur 250. Nous avons été bien éprouvés au
début.
Donne
de mes nouvelles à toute la famille et embrasse bien tout le monde pour moi. Et
pour toi de gros baisers de ton fils
Henri
Chère
cousine, je vous envoie cette lettre d’Henri et une lettre de tante clotilde.
Je ne
vous écris qu’un petit mot car il est tard et mon fils commence à
s’impatienter, il a faim. Petit Riquet vous envoie une grosse bisette et moi,
ma chère cousine je vous embrasse bien fort.
Votre
clairette (sœur d’Henri) (1)
(1) Certaines lettres ont été complétées par les
destinataires qui les faisaient suivre pour informer d’autres membres de la
famille, ces ajouts sont inscrits en rouge sur le site, et sont principalement
du fait de Thérèse Sauer, et sa fille Claire Jouve.
Lettre d’Henri
Reçue le 14
décembre
Ma
chère maman,
Il fait
depuis hier un temps magnifique et malgré le ciel découvert, il ne fait pas
trop froid. Je reviens de prendre mon chocolat du matin avec du pain grillé ;
cela t’étonnera et pourtant c’est vrai. Nous sommes en 2è ligne et nous
trouvons au village quoique qu’inhabité, du lait ; j’ai eu l’occasion d’acheter
du chocolat et j’en fais faire. (1)
On
trouve à acheter différentes choses par l’intermédiaire des infirmiers quand
ils vont en arrière pour amener des malades ou des blessés.
Avant-hier
au soir nous avons fait un grand « chahut », pour célébrer la victoire Russe,
le général
d’armée
avait prescrit qu’à 10h l’artillerie tirerait pendant ¼ d’heure et qu’à ce
moment là nous crierions tous ensemble « vive
Je
t’assure que joints à nos cris cela devait faire un joli « chahut » et qu’ils
ont dû avoir une belle alerte, ceux d’en face.
Le 4
décembre Je continue cette lettre commencée que j’avais cru égarée et que je
retrouve maintenant dans la poche de ma capote. Nous venons de passer trois
nuits en première ligne, nuits très tranquilles.
Nous
retournons ce soir en 2è ligne et c’est ainsi la navette depuis le 18 octobre,
c'est-à-dire depuis 56 jours.
J’ai
reçu hier au soir 5 lettres, 3 de toi, 1 de Claire et une de Maurice. Tu penses
que j’étais content et dans la tienne j’ai trouvé des journaux et dans celle de
Claire 1 lettre de Gaston et 2 photos du superbe bébé qui est Henri.
Au
sujet des journaux, je n’ai absolument rien à craindre quand tu m’en envoies.
Nous lisons ici les journaux qui ont paru le matin ou la veille à Paris. Tu
vois que l’on a des nouvelles fraîches.
Si je
tiens à avoir l’écho c’est pour les nouvelles locales ou spéciales à l’Algérie.
J’ai expédié, je te l’ai, je crois, déjà dit, les cartes où tu avais mis les
adresses.
J’ai
rectifié aussi l’adresse d’Albert.
Avant-hier
au soir, je suis allé rendre visite à Friess, je sui arrivé juste au bon moment
pour me voir offrir des crêpes qu’ils venaient de faire cuire dans la tranchée
; elles ne valaient assurément pas celles que je mangeais à la maison ; mais à
la guerre comme à la guerre, et je t’assure que je les ai trouvées très bonnes.
Pour
Temps
toujours beau et pas froid du tout.
Nous
n’allumons les poêles dans les tranchées que vers le matin de très bonne heure.
Je te
quitte ma chère maman.
Embrasse
Cousine Maria pour moi quand tu les verras, un baiser à René et à tous chez
tante Adèle.
Je t’embrasse
mille fois
Henri
Tlemcen
le 16
Mon
cher Gaston
Je
t’envoie la lettre d’Henri. J’ai eu aujourd’hui aussi des nouvelles de mon
Albert. Il va bien, mais fait souvent un travail pénible et parfois triste.
As-tu reçu ce que je t’ai envoyé ? J’espère te voir bientôt mon cher Gaston et
t’envoie avec la bisette de mon Riquet, mes baisers affectueux.
Embrasse
tout le monde à OF et à Alger.
Ta sœur
Clairette (2)
(1) Le régiment se trouvait
dans la Marne, près de Prosnes
(2) Certaines lettres ont été
complétées par les destinataires qui les faisaient suivre pour informer
d’autres membres de la famille, ces ajouts sont inscrits en rouge sur le site,
et sont principalement du fait de Thérèse Sauer, et sa fille Claire Jouve.
Lettre d’Henri à
sa soeur Claire
Ma
chère Clairette
J’ai
reçu aujourd’hui un paquet dû à ta gentillesse.
Quelques
jours avant j’ai reçu les photos de ton petit Riquet. Tu ne peux te figurer
combien ces photos m’ont causé de plaisir. Ton petit gosse vraiment est
charmant, et je suis fier d’avoir un neveu pareil. Sur une des photos, il a un
air étonné qui lui va à ravir ; sur l’autre où il rit, il m’a communiqué
l’envie de rire. J’espère avoir le bonheur de connaître mon neveu, si cela
n’arrive pas tu lui parleras souvent de son tonton qui l’aurait bien aimé, bien
gâté.
Merci
beaucoup pour ton paquet.
Ecris-moi
le plus souvent possible car tu ne peux pas te figurer combien une lettre ou
simplement une simple carte cause du plaisir.
Nous
sommes toujours au même endroit et je suis toujours bien portant ; Embrasse
pour moi ton petit Riquet, mes amitiés à la famille Jouve. De gros baisers pour
toi de ton frère Henri
Ma
lettre arrivera aux environs de
Bonnes
fêtes de Noël.
Je
joins à ma lettre une poésie de Miguel Zamacois, Auteur des Bouffons.
Henri
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