Carnet du capitaine Gambarelli

Du 118e régiment territorial

19 décembre 1914 terminée le 19 février 1915.

 

 

Mise à jour : Janvier 2014

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« Bonjour, veuillez trouver en pièce jointe la copie des notes de mon arrière-grand-père Capitaine GAMBARELLI du 118eme territoire 1er compagnie, commencé le 19 décembre 1914 et terminé le 19 février 1915. »

«  Il y avait 2 carnets mais malheureusement je n’en ai trouvé qu’un seul. Celui-ci est le second. »

Josiane, 2013

 

Merci à François pour la recopie

 

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Avant-propos

Le lieu de mobilisation du 118e régiment d’infanterie territoriale (RIT) est Avignon.

La composition du régiment (3 bataillons) est de 40 officiers, 184 sous-officiers et 3028 hommes de rang. La majorité des ces hommes étaient de la classe 1899 à 1893 inclus (35 à 40 ans en août 1914)

Le capitaine GAMBARELLI commande la 1ère compagnie (1e bataillon)

 

En août 1914, le 118e RIT est affecté à la défense de la frontière italienne, à Nice. Puis le 6 septembre, il part à Dijon, y reste jusqu'au 1e novembre.

 

 

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Extrait du journal de marche et opérations (JMO) du 118e RIT

 

 

Le 118e RIT est alors réorganisé en régiment de combat, et part pour le secteur de Reims.

Le 1e bataillon occupe les tranchées dans le secteur de la ferme de l'Espérance. La 1e compagnie, celle de GAMBALLERI, cantonne à Verzelay.

C'est à cet endroit que le retrouvons.

 

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Début du carnet

 

 

J’ai en horreur le mensonge tout ce que j’écrirai sera la vérité.

19 décembre

L’ordre nous fut donné de préparer notre déménagement pour rentrer le 20 décembre à Verzenay, nous n’étions point fâchés d’avoir à rejoindre un poste de tout repos ou à peu près.

20 décembre

Le repos rêvé après 25 jours de tranchées ne vient pas encore, recevoir contrordre, donc perspective d’un combat auquel la Cie devrait prendre part.

21 décembre

Le commandant LORIOZ du 73ème, chef du ½ secteur vient me trouver pour me dire de tenir la Cie prête pour le combat qui aura lieu le lendemain.

Aussitôt je fais la distribution de 50 cartouches par homme pour compléter à 220, je fais déblayer les créneaux pour que le tir soit efficace et pour mieux saisir la phase du combat, je me poste toujours avec mon camarade et ami lieutenant (*) en avant de notre ligne pour me rendre bien compte des sinuosités du terrain.

Après examen sérieux nous rentrons et faisons disposer les lignes protectrices de défense, haies, fils de fer, boites de conserves, tessons de bouteilles, tec. Etc.

 

La nuit, repos.

 

(*) : Il s'agit certainement le sous-lieutenant DETTORI

22 décembre

Voici le jour ou pour la première fois nous sommes appelés à voir du boche face contre face. La soupe est mangée à 9h du matin.

 

A 14h ½, commencement violent de notre artillerie sur les tranchées allemandes pendant plus de 2h .

 

A 16h ¼, la section du 273ème de ligne qui occupe la première tranchée à 200 mètres de l’ennemi reçoit l’ordre d’avancer en lignes de section sur 1 rang.

Le lieutenant D..... (?), suivi de ses hommes, tombe aussitôt après atteint d’un shrapnel derrière l’os de la tête.

 

Voir ici l’extrait du JMO du 273e RI relatant cette journée

 

Les 2 demi-sections continuent sous le feu de l’artillerie ennemi à s’avancer ; mais arrivées à la ligne de défenses artificielles des boches ils se trouvent impuissants à avancer arrêter par la barrière de fils de fer, de l’artillerie ennemie qui tirait dessus et par les boches avec leurs mitrailleuses toujours cachés dans les tranchées.

Ne pouvant mordre sur les tranchées ennemies, la section s’arrête et ébauche aussitôt une tranchée à 40 mètres à peine de l’ennemi, les deux artilleurs se taisent à cause de la faible distance des combattants et la nuit couvre de son voile les blessés et les morts de la section du 273ème qui s’étaient avancés.

 

Aucune contre-attaque de la part de l’ennemi.

Sur la même ligne que le 273 se trouvait le 243 et un bataillon de tirailleurs algériens (4e) qui se trouvait à notre droite et occupait le bois des Zouaves.

Ils prirent de leur coté l’offensive, le 243e réussit à arriver à la même hauteur que le 273 au prix de quelques sacrifices et les 243 et 273 se trouvèrent à la fin du combat tous deux contre la route de Beine qui les séparait et à 40 mètres au plus de la tranchée boche.

Quant aux tirailleurs qui avaient pour mission d’enlever la tranchée Est de la route de Beine et pour flanquer plus tard les tranchées boches, ils ne purent accomplir leur mission malgré la perte énorme qu’ils ont éprouvée

 

Toutefois ils arrivèrent assez près de l’ennemi pour parachever et prolonger les tranchées déjà ébauchées par les 273 et 243e, nous avions en somme gagné 120 à 150m de terrain ce qui a été très appréciable vu les difficultés.

 

La nuit, réfection des tranchées à peine ébauchées après le combat pour permettre aux hommes de première ligne d’être à l’abri des balles de l’ennemi, en approfondissement les boyaux et l’élévation de terre du côté de l’ennemi.

Pendant le combat toute ma Cie était à son poste de combat prête à intervenir soit pour occuper les tranchée en avant si le coup de main avait plus amplement réussi, soit pour résister à l’ennemi en cas de contre-attaque et favoriser ainsi la protection du 273e de ligne qui se trouvait devant moi.

 

Ordre préparatoire N°1 du colonel commandant le secteur :

« Un mouvement est projeté (l’un à droite axe le bois des Zouaves) l’autre à gauche (axe route de Beine) les mouvements sont simultanés. Le mouvement en avant ne sera pas exécuté avant le 21 soit à la nuit tombante, soit au lever du jour.

Les 1ère, 2ème, 4ème Cie du 118e seront placées sous les ordres du C…de P… lui-même sous les ordres du commandant LORIOZ commandant du sous-secteur, 1, 2, 4e pas de mission spéciale, vérifier les créneaux pour assurer bonne exécution du tir, ni trop haute, ni trop basse.

Le poste de secours du 118e restera au moulin de Sillery. Le chef de bataillon se rendra à la station du Petit Sillery (1e Cie)."

Signé Colonel LAVENY

 

J’ai donc rempli ma mission sans avoir heureusement à y participer d’une façon efficace.

 

Le lendemain, félicitation du commandant LORIOZ pour les mesures que j’avais prises.

Observations personnelles :

Le 4e tirailleur qui avait été appelé à se porter en avant s’est heurté à une ligne de défense ennemie trop profonde (malgré tout le combat de la journée et une partie de la nuit, personne n’a vu de boche ni de près ni de loin. (Toujours blottis terrés comme des bêtes fauves).

Pour que la marche en avant donnât le plus de rendement possible, l’artillerie aurait du au préalable démolir leur ligne de défense et pour comble le lieutenant des tirailleurs qui avait la périlleuse mission d’enlever la tranchée ennemie est tombé avant d’avoir atteint la ligne de défense, d’où désordre parmi les tirailleurs quoique très braves à la baïonnette mais ne pouvant avancer à cause des fils de fer où ils s’empêtraient et formaient des cibles vivantes aux yeux de l’ennemi, toujours blotti dans ses tranchées en faisant faucher les tirailleurs par les hommes abrités et par les mitrailleuses placées dans leur repaire

 

L’artillerie d’autre part a trop tôt présumé de la fuite de l’ennemi. Notre M.S. (saluons-le c’est la première fois que je l’entendais) accomplissait, il est vrai, des ravages sur les tranchées ennemies, mais le tout n’est pas de supposer que les hommes qui se trouvent dans les tranchées sont tués ou ont battu en retraite, car lorsque le M.S. se tait, l’assaillant se trouve à trop près de distance des tranchées ennemies et avant de franchir les 40m de fils de fer barbelés, d’attraper etc…,

l’ennemi a le temps de venir réoccuper ses tranchées (qu’il avait abandonnées pendant le tir en se terrant davantage) et de tirer à bout portant sur les hommes qui attaquent, sans compter que l’ennemi est largement approvisionné de mitrailleuses, de grenades, de bombes et dont le tout fait un ravage considérable

 

Il faut donc s’assurer avant d’ordonner l’attaque que l’assaillant soit assez sûr, que le réseau de fils de fer ne tient presque plus et que la marche en avant quoi que sous la pluie de balles et de mitrailleuses ne soit pas arrêtée par la défense artificielle.

On brulera ainsi plus de munitions mais l’on évitera certainement la mort de plusieurs garçons et pères de famille qui auraient pu être utilisés le lendemain pour une autre bataille, car ceux qui ont déjà affronté la marche en avant sont toujours plus aguerris que les débutants. En somme le combat du 22 décembre fût pour nous une avance de 150m sur un front de 1km à peu près mais nous eûmes plus de morts que de blessés par suite de la petite distance qui séparait les combattants.

 

Les 273 et 243e n’eurent que quelques blessés mais le 4e tirailleurs eut une quarantaine de morts. Il y en aurait eu bien moins si les tirailleurs avaient pu parvenir jusqu’aux tranchées.

Paix à leur cendre.

 

 

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Extrait du JMO du 118e RIT

23 décembre

De toute la nuit point de repos.

La curiosité nous fit faire à peu près 2h de marche.

 

à 8h du matin, toujours énervé de la veille je fis appel à mon toujours ami DETTORI pour aller visiter les tranchées 1ère lignes creusées pendant la nuit sur le terrain pris à l’ennemi la veille et tacher de voir si possible un boche.

Les sous-officiers … Guichard ( ?) nous accompagnaient.

Arrivés aux nouvelles 1ère lignes nous enregistrâmes avec plaisir l’avance de terrains faite sur l’ennemi, le travail intense accompli pendant la nuit à 40m à peine des boches.

Nous crûmes là pouvoir en voir un : Erreur !

Toujours le néant. Rien, rien.

 

Nous suivîmes tout le terrain gagné parallèlement creusé aux tranchées ennemies ; chaque 20 pas nous nous mettions au créneau dans l’espoir d’en voir un.

Inutile, cela n’empêchait pas ces brutes de tirer sur nous de derrière leurs créneaux. Je dis à  …. Prenez aussi un fusil et tirons tous les deux.

Nous tirâmes, lui un coup, le premier dit-il de sa vie, alors que j’en ai tiré deux autres après, soit trois cartouches dans le même créneau ennemi sans jamais voir personne. Et mon insistance à tirer me dit le soldat qui me passait les cartouches était inutile car il me dit :

« Voilà 3 mois que nous sommes en face jamais j’en ai vu un seul ».

 

Et alors et ces coups qu’ils tirent sur nous d’où viennent-ils ?

Voilà sa réponse :

«  Dans les tranchées il y a des mitrailleuses mobiles sur axe, de temps en temps le mitrailleur fait partir un coup, des fois 2, 3, 4 et 5 surtout à cause du chargeur, mais on suppose qu’il n’y a qu’un homme ou 2 à chaque 20 ou 30m derrière leur mitrailleuse et le reste est terré et au moindre signal chacun reprend son poste à la tranchée.

Voilà pourquoi l’ennemi reste invisible et le mitrailleur a pour consigne de ne pas se faire voir afin de ne pas être pris pour cible."

 

Nous finîmes de faire le tour des tranchées, retour par le bois des Zouaves dans des boyaux souvent pleins d’eau mais toujours très boueux, après 2h de marche et nous fûmes très content de trouver à notre popote un petit diner qui nous a restauré et ce qui nous a fait encore plus de plaisir, une note du commandant de secteur nous faisant connaitre que rentrerions à Verzenay le 24 décembre au soir, d’où belle perspective de faire le réveillon de la Noël à Verzenay.

24 décembre

Tous les hommes de la compagnie sont contents : Ce soir relève pour Verzenay.

 

A 9h du matin, je fais rassembler tous les outils, puis préparatifs de départ pour tout le monde.

La soupe a été trouvée meilleure, le ¼ de vin distribué a été reconnu meilleur que le vin d’Asti et tous en cœur trinquèrent à la santé de la compagnie, d’être resté 29jours sous le feu ennemi sans laisser personne à part quelques légères blessures insignifiantes.

 

A 14h, j’ai été déposé quelques branches de sapin sur le petit cimetière qui se trouvait en face de ma casemate et dis une prière à leur intention.

 

A 16h, un ordre est venu jeter une note discordante au milieu de cette joie : Une section ne serait relevée que 2 jours après pour faire plaisir, dit-on, à un chef de bataillon monsieur de la Valette qui avait tenu à faire réveillon à Verzenay.

Cet ordre fut exécuté mais plein de tristesse

 

La compagnie ne fut donc relevée qu’au ¾ par section de ¼ d’heure en ¼ d’heure.

Pour mieux diriger ma compagnie, j’avais donc donner l’ordre à la première section de filer, puis je me porte à hauteur du passage à niveau pour voir passer le 2ème section mais une balle voulut me faire une niche : Elle vint taper sur le poteau indicateur des routes de Beine et de Prunay au moment même où j’arrivais à sa hauteur, elle a sifflé à mon oreille droite et j’ai entendu lorsqu’elle a tapé sur le poteau à 1m de moi, je lui ai fait remarquer son inconvenance de vouloir me blesser juste au moment où je partais pour Verzenay.

Elle a peut-être communiqué sa réflexion à ses sœur, le fait est que depuis cet instant je suis rentré à Verzenay avec toute la Cie  et n’ai plus rien entendu de si près.

Le cantonnement était préparé par mon fourrier. Et la Cie (les ¾) se trouvait installée à 9h du soir.

 

Dès que mes chefs de section m’eurent rendu compte de l’installation, le fourrier me dirigeait sur mon logement lorsqu’une jeune demoiselle 18 à 20 ans s’avança vers moi et me dit « monsieur, c’est chez moi que vous logez.

Je ne puis faire moins que lui offrir galamment mon bras et 5 minutes après je me trouvais à côté d’un bon feu.

 

Le soir, nous étions trop fatigués pour diner, nous avons pris un café et causé jusqu’à 10h avec le propriétaire, père de la jeune fille, et de là un bon lit m’attendait pour réparer la fatigue de la journée. La compagnie fût relevée assez tard à 6h du soir par le capitaine Etienne du 3ème bataillon.

La 4ème section qui n’était pas venue avec la Cie avait été prendre possession du moulin de Sillery sous les ordres du sous-lieutenant …. Mais aussi bien les gradés que les hommes étaient navrés de ce fâcheux contretemps car entre pays ils s’étaient promis de faire bonne ripaille des nombreux colis que chacun avait reçus du pays et qu’ils espéraient manger ensemble.

25 décembre

Je commence par expédier la voiture de compagnie contenant tous les colis des hommes de la 4ème section au moulin de Sillery pour leur permettre de faire un bon gueuleton, puis je vais entendre une messe en musique dirigée par le soldat Touche ( ?) , professeur de violon au conservatoire de Paris, les orgues étaient tenues par le directeur des concerts Colonne ? à Paris, la partie chants dirigée par un ténor, enfin messe de gala, sermon par l’aumônier général qui a quelque ressemblance avec Paul Déroulède.

 

Nous en sortons à midi et me dirige aussitôt vers la table où les officiers et sous-officiers de la Cie m’attendaient. La table était mieux garnie que une grande noce, tous les desserts du midi s’y trouvaient, dattes, nougats de Montélimar, mandarines de Menton, berlingots de Carpentras, marrons glacés e Privas, amandes princesse, noix, pruneau et enfin jusqu’aux huitres d’Arcachon.

Le tout arrosé de bons et excellents vins, de 7 à 8 plats sous la haute direction d’un chef cuisinier de la flotte et du serveur Rigaut qu’on a voulu appeler pour ce jour-là  " le Joffre de la mise en scène " tellement tout avait été bien préparé et exécuté.

Je fus placé entre M DETTORI et la patronne de la maison où nos cuisiniers s’étaient installés. La présence de cette dame (50 ans environ) ne nous déplut point.

Il y avait 29 jours que nous n’avions vu visage de femme, mais petit à petit l’entrain occasionné par un bon et succulent déjeuner, arrosé de bons vins (champagne, etc…) fit délier les langues, la femme se joint à cette belle joute de mots sous-entendus que s’envoyaient les convives, tous du midi, et dès lors fit en maitresse de maison son choix sur celui qui avait le plus tapé dans son œil.

Mais cela n’alla pas plus loin, à 2h de l’après-midi, j’avais rendez-vous chez le commandant où nous avons bu du champagne jusqu’à 3 heures.

 

De là chacun a été se reposer un peu pour retourner au souper le soir.

Le même entrain n’a cessé de régner, la gaieté du midi se donnait libre cours et nous ne sommes sortis de table que le soir à 11 heures pour aller nous coucher, ce dont nous avons tous besoin. Nous avions bien rempli notre journée en prenant notre revanche des 29 jours que nous avions passés assez tristes aux tranchées de Sillery.

26 décembre

La journée se passa au repos pour tout le monde, mais la bonne propriétaire au moment du déjeuner des sous-officiers s’installe elle-même à table, personne n’ose lui faire une observation et depuis elle a mangé matin et soir avec eux en regrettant des ans l’irréparable outrage de ne pouvoir satisfaire son caprice avec le sergent Guichard.

Celui-ci était sourd et aveugle, l’ingrat ne voulait rien entendre et ne prenait pas en pitié les œillades de la bonne vieille de 45 à 50 ans.

Que faire ?

Elle se dit :

« Le sergent ne veut point de moi, je vais m’adresser à Joffre" (le cuisinier).

Je ne connais pas la suite.

27 décembre

Exercice sur le plateau de Verzenay, marche pénible, pluie toute la journée, les hommes trempés comme des soupes au lait.

Nous rentrons au cantonnement à 10h assez éreintés mais surtout très mouillés.

28, 29, 30 décembre

Même exercice et peu de changements.

31 décembre

Exercice en campagne sous la haute direction du colonel Loveny ?

 

Départ à 11h du matin, rentrée à 7h du soir.

Journée très pénible, pluie depuis le départ jusqu’à l’arrivée, pas de pause avec de la pluie, nuit noire à partir de 4 heures du soir, heureusement que j’avais mon cheval que je n’avais pas monté depuis 2 mois et dès la manœuvre terminée, j’ai monté dessus et fait 7 kilomètres sans descendre, il m’a porté jusqu’à la maison.

Cela m’a fait souffrir d’autant moins que ma chaussette s’était déchirée pendant la première pause et que le pied commençait à me faire mal. Il est vrai aussi qu’en descendant de cheval j’avais froid et j’avais les jambes ankylosées, mais un coup de pied dans ma chambre à droite et à gauche et un bon feu préparé par mon ordonnance que j’avais eu soin de laisser m’ont vite ranimés et un bon petit diner a achevé le rétablissement normal.

 

Voilà comment l’année 1914 s’est terminée pour le 1er bataillon. Tous les hommes esquintés par 3 jours de pluie et de fatigue, pour leur apprendre quoi ? Pas grand-chose !

 

Aussi le 31 décembre, j’avais à ma Cie 52 malades alors que le lendemain 1er janvier 1915 j’en avais que 20. Donc voilà 32 hommes qui avaient tiré au flanc la veille à cause de l’exercice que l’on devinait pénible (sur un effectif de 220 présents)

Paix à 1914

Année 1915

Le premier jour de cette année de la guerre 1915 s’annonce pour nos voisins du 4e tirailleur d’une façon malheureuse. Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier l’ennemi a fait sauter à la mine une tranchée ; résultat 40 morts et plus de 60 blessés, alors que notre mine était achevée de la veille aussi et que faute d’ordre précis nos sapeurs n’avaient pas fait sauter la tranchée ennemie, nous étions prêts comme eux et ce sont eux qui ont mis les premiers le feu.

 

Pendant toute la journée, duel d’artilleries.

Pendant ce temps ma Cie était au repos à Verzenay.

Dès le matin messe en musique à 9 heures.

 

Visite ½ officielle du chef de bataillon qui nous a convoqué pour 3h de l’après-midi ; à midi déjeuner pantagruélique digne des meilleurs gourmets.

En somme répétition du fameux diner de la Noël 1914. Souhaits de bonheur, de santé, de retour dans nos foyers, etc, etc ….

 

A 3h, rendez-vous chez le chef de bataillon où nous bûmes 2 coupes de champagne.

 

Vers 4h ½,  rendez-vous à la popote de la Cie où se trouvait, chose rare, ¾ de pernod.

Là quelques-uns de nos invités, nous prouvèrent leur force, lieutenant Paoletti (*) faisant le grand écart et prenant une noix avec la bouche sans toucher les mains parterre, le docteur Clavel faisant preuve de sa force en cassant une noix en s’asseyant dessus.

Enfin nous passâmes presque 2 bonnes heures chacun racontant ses prouesses, d’autres ses rencontres heureuses, etc

L’heure du diner arriva et je mangeais seul avec mon camarade DETTORI qui avait reçu le 27 décembre 1914 la triste nouvelle de la mort de son fils et qui n’avait pas voulu assister au diner général avec les s/off de la Cie. Je ne l’ai pas quitté mais aussitôt après le diner il a été se coucher et j’en ai profité pour aller rejoindre les s/off qui m’avaient invité.

 

Dès mon arrivée le café fut servi, gâteaux, etc… Mais comme l’humeur méridionale s’était donnée libre cours pendant toute la journée, il fallut le soir sortir un peu de l’ordinaire.

« La patronne de la maison où était installée la cuisine mangeait toujours avec eux ont résolu de la tirer au sort. On voulait d’abord me faire avoir l’as de cœur, mais je me suis arrangé après pour le glisser entre les mains de  …. Qui par trois fois voulut faire recommencer les cartes mais que par 3 fois grâce à un tour de prestidigitation de ma part lui revenait toujours.

Enfin 9h 1/2 sonnèrent et il fallut aller se coucher sans qu’aucun crime fut commis.

 

(*) : Lieutenant à la 2ème compagnie.

2 janvier

Le matin repos.

 

A 11 heures, nous avions exercice mais grâce à une pluie bienfaisante la Cie reçut contrordre. Dans la même journée, l’artillerie ennemie arrosait de ses projectiles la ferme de l’Espérance à 150m au sud du canal.

Dans cette ferme se trouvait l’état-major du colonel Perri commandant le secteur de Prunay. Cette ferme n’avait jamais reçu d’obus depuis la déclaration de la guerre, alors que celle qui se trouvait à 50 mètres au nord avait été criblée d’obus pendant la retraite de la Marne, que les villages de Sillery et de Beaumont à l’est et à l’ouest avaient été bombardés dès le 1er jour.

De là à supposer que c’était un repaire d’espionnage, il n’y avait qu’un pas.

Un beau jour un légionnaire déserte, dès le lendemain l’artillerie tonne, envoie pendant toute la journée  des obus sur la ferme et la démolit en partie. Le colonel P… co… toujours son état-major dans la ferme mais s’installe dans la cave.

3 janvier

Continuation des tirs d’artillerie, du haut de Verzenay on suivait attentivement le tir ennemi et l’on voyait l’éclatement des obus, la ferme ne se trouve qu’à 3k500 de Verzenay.

4 janvier

Même refrain.

Toutefois un sergent de la légion fit observer très judicieusement qu’au milieu de la ferme se trouvaient 2 grands arbres qui servaient de point de mire à l’artillerie ennemi, on les fit couper aussitôt et depuis l’artillerie a tiré mais n’a plus attrapé la bâtisse de la ferme.

Les habitants de Verzenay avaient fort à faire pour dissuader les militaires que parmi les civils il n’y avait plus de traite ni d’espion. Cette désertion du légionnaire vint à pic pour leur donner raison et disaient-ils toujours :

« Il vaut mieux s’assurer si parmi les légionnaires qui se disent alsaciens, il n’y aurait pas quelques Allemands »

 

Ils avaient raison. Le déserteur légionnaire a pu rejoindre les tranchées ennemies, a donné des indications de la ferme, de l’effectif et a même écrit après à quelques camarades de la légion se vantant de ce qu’il avait fait. Il aurait été prudent de ne pas ramener en France tous ces …

5 janvier

Bombardement, duel d’artillerie, notre génie fait sauter une tranchée ennemie, prend sa revanche au bois des Zouaves de la mine du 31 décembre au fort de la Pompelle ainsi appelé parce qu’il faut une corvée permanente de 12 hommes pour faire monter l’eau « garni … d’une tranchée ennemie ».

La Cie reçut l’ordre d’occuper le lendemain 6 janvier les tranchées nord du village de Prunay.

6 janvier

Le coup de mine de la veille, la perte d’une tranchée met en rage les boches. De tous côtés une action intense de l’artillerie : 116 coups de canon ont été tirés ce jour 6 janvier avant 16 heures à Prunay même.

Il y a 2 morts et quelques blessés.

 

à 17h ½,  ma première section, par une noire qu’on ne voyait pas à un pas, ma première section dis-je entre dans le village précédée par des hommes de liaison que j’avais eu soin d’envoyer le matin à 6 heures, les autres sections se suivaient de ¼ d’heure en ¼ d’heure.

Enfin chacune va prendre position de sa tranchée devancée 1 heure avant par la 10e Cie

 

à 21 heures, tout le monde était à son poste aux tranchées ; à 23 heures un éboulement se produit dans une tranchée occupée par la 10e escouade. Aussitôt tous les hommes de la section se portent au secours des camarades et tant bien que mal casent leurs amis qui en ont été pour quelques blessures, 2 fusils cassés et autres casses insignifiantes.

Tout ce travail a été fait par une ….

Avec une bougie allumée pour toute la section en cachant la lumière de temps en temps afin de ne pas se faire repérer par l’ennemi qui se trouvait à moins de 600mètres de nous et qu’il fallait avec de la prudence et sans faire de bruit.

7 janvier

A 5 heures du matin, avant le lever du jour, démolition de la tranchée écroulée, ébauchage d’une nouvelle tranchée, obus et pendant toute la journée travail intensif à cette partie.

Corvée de poutres, de rondins, de paille au village de Prunay à 300 mètres des tranchées. Les cuisiniers étaient aussi installés à Prunay derrière des murs de maisons bombardées afin que la fumée des cuisines ne décelât pas notre présence à coté d’eux.

D’autre part, travail imposé par le colonel P….élargissement des boyaux à peine ébauchés par la 243ème sur le terrain conquis la veille par un bataillon du 243e.

8 janvier

Continuation de ce travail urgent, élargissement prolongement du boyau jusqu’aux premières lignes qui se trouvent contre la voie romaine de Chalon/Cambrai à 200 mètres des Marquises à droite net à 200 mètres à gauche du bois des Zouaves. Il y avait 50 hommes qui y travaillaient ce jour sous la direction de M le lieutenant DETTORI. L’artillerie ennemie a dû voir ce mouvement de terre qui se produisait, a tiré dessus, un obus est tombé sur le talus de la tranchée, personne n’a été atteint et M DETTORI par sa présence d’esprit a fait qu’aucun homme ne se laisse intimidé par l’obus et aucune défection ne s’est produite.

 

(*) : Il s'agit de la ferme des Marquises.

9 janvier

Ce travail n’avait pas été interrompu ni la nuit ni le jour.

 

A 14 heures, le colonel P… a été visiter le travail et a félicité le lieutenant DETTORI.

 

A 16 heures, j’ai rencontré à Prunay le colonel P… qui m’a félicité de l’impulsion que j’avais su donner aux gradés et hommes de la compagnie en me disant :

" J’en ferai part à votre colonel, mais moi-même chargé de rendre compte au chef du secteur du travail exécuté "

 

J’avais fait ressortir le calme du lieutenant DETTORI lorsque l’obus a éclaté au milieu des hommes sur le parapet de la tranchée. Mon commandant m’a dit 2 jours après que le colonel P…. lui avait dit qu’il avait été très content des travaux exécutés par ma Cie à Prunay mais mon colonel ne m’a jamais parlé de rien.

10 janvier

L’ordre de commander les corvées arrivait à une heure trop tardive de la journée, 17h1/2, 18 heures.

Les chefs de section éprouvaient des difficultés pour commander sans lumière les 50 hommes de corvées, des fois 60 ou 80 et surtout des corvées très pénibles qui consistaient à porter le lendemain matin à 5 heures du matin des poutres de chemin de fer de 110 à 120k dans les boyaux que nous avions élargis et aux premières lignes, soit environ 3 kilomètres en zigzag.

Ce travail se faisant toujours de nuit, on voit tout de suite les difficultés aussi le sergent Roche trouva un moyen pour que les hommes commandés la veille ne se fissent pas trop tirer l’oreille.

Il avait acheté une boite de cigares de 100 à 0,10. Il leur disait aux hommes :

" Les premiers arrivés auront un cigare de 0,10 "

 

il lui arrivait rarement de voir ses hommes en retard mais lorsque la boite fut terminée, les hommes se faisaient un peu tirer l’oreille et n’obéissaient qu’à contre cœur, à tel point que l’adjudant Denis, camarade d’école du sergent Roche fut obligé de lui faire un reproche devant les hommes, ceci arrivait assez souvent mais ce qui fut le plus dur à avaler et ce qui fit le plus de peine au sergent Roche c’est que l’adjudant Denis lui fit le reproche en français et pas en patois et lui donna du vous au lieu de le tutoyer.

Ce fut là le plus sanglant outrage que l’adjudant Denis put faire à Roche.

Celui-ci disait après :

« Ce n’est pas le reproche qui me fait de la peine, c’est qu’il ne m’a pas tutoyé et qu’il m’a parlé en français car il aurait pu me le dire en patois comme toujours, puisque nous sommes de la même classe et que nous étions sur les bancs ensemble ».

 

Observations : En général tous les s/off, les capitaines et les soldats se tutoient à peu d’exception. Ils sont tous du même pays, de là la colère du sergent Roche.

Du 11 au 16 janvier

Toujours tirs de l’artillerie ennemie sur le village de Prunay.

Cet acharnement sur Prunay s’explique : Le village était démoli, il ne restait que des pans de mur, mais il y avait aussi 10 à 12 officiers et à peu près 200 à 300 hommes, plus le ravitaillement, les corvées, les cuisines, tout à Prunay.

La chambre que j’occupais avec les deux lieutenants était la première du village contre la voie ferrée face à l’ennemi

 

 Toutes les dépendances de la maison d’habitation avaient écopées, le grenier aussi, seul le rez-de-chaussée où nous étions n’a rien reçu, et indépendamment de la troupe, il y avait 2 batteries d’artillerie de chez nous qui répondait à l’artillerie ennemie.

Celle-ci visait plutôt notre artillerie mais comme nous nous trouvions dans la zone dangereuse on ne sortait que pour le service, j’ai eu un blessé, Chandoze légèrement aussi ; l’artillerie a eu 2 morts, la légion 3 morts et 7 blessés le 16 janvier.

 

Dans l’après-midi du 16 janvier, je reçus la visite de Mr l’aumônier le lieutenant Rivet qui me pria de prévenir les hommes de la Cie que le lendemain 17 il y aurait messe dans l’église de Prunay.

Lui ayant demandé s’il avait une clochette, il me dit non, j’eus alors le plaisir de lui faire une surprise. Comment une clochette de cheval devient clochette d’église.

Mon ordonnance David ayant trouvé dans l’écurie un collier de clochettes. Je m’étais proposé de faire faire une clochette pour l’aumônier du 1er bataillon du 118e, caporal d’Anselme (marquis) jésuite très aimable, payant de sa personne à tous les points de vue, fraternisant avec tous les soldats quoique marquis d’Anselme et appartenant à une des plus anciennes noblesses du midi.

 

Je fis donc astiquer la clochette du collier, j’y fis faire un petit manche et je me proposais d’en faire cadeau à l’aumônier d’Anselme de la clochette. Lorsqu’il dirait la messe pour la compagnie ou le bataillon. Dès que M l’aumônier Rivet ancien officier de l’active sorti de St Cyr et actuellement lieutenant au 1er régiment de marche vit la clochette si bien astiquée et si bien emmanchées, il manifesta aussitôt le désir de l’avoir.

Je n’ai pu faire moins que de la lui donner en me promettant d’en donner une pareille au caporal d’Anselme.

17 janvier

Par une coïncidence fâcheuse la messe qui devait être dite à 9 heures du matin, l’a été à 8h c-à-d 1 heure plus tôt. Beaucoup de soldats n’ont pu y assister.

Le cimetière de Prunay a été atteint par des projectiles ennemis, il fait le tour de l’église de Prunay qui est en ruine, plus de clocher, les tableaux, les vases, les autels, les lustres, la procession de la croix, le tout en morceaux.

Idem au cimetière sont enterrés une cinquantaine de s/off, capitaines ou soldats, sur chaque tombeau il y a une croix et le nom, à part 2 ou 3 héros inconnus.

Pendant les heures supposées de corvées, tirs de l’artillerie des 2 côtés ; nuit et jour.

Nos oreilles sont pleines de sifflement des obus.

18 janvier

Même attrait. Duel d’artillerie.

Pas de corvée, versement des outils, préparatifs et départ pour les abris au canal de la Marne à 16h1/2.

La Cie se rend à son nouveau bivouac par section de ¼ d’heure en ¼ d’heure à 18 heures.

 

Diner de contentement de se trouver tous en bonne santé à côté d’un petit poêle et d’une bonne soupe aux choux.

19 janvier

Le nouveau bivouac, le long du canal a beaucoup de ressemblance avec les gourbis d’Afrique.

Depuis le 6 septembre 1914, date de notre première installation au canal de la Marne, des modifications heureuses y ont été apportées par les Cies qui nous ont précédés.

Le gourbi que j’occupe se compose de 3 pièces. Une salle à manger qui tient toute la longueur et la largeur est divisée en deux chambrettes, une occupée par les officiers l’autre par moi. On accède à notre gourbi au moyen de 3 marches.

Contre notre gourbi est installée la cuisine des officiers où notre Vatel nous fait des plats de plus en plus sains et succulents. Il est regrettable que mon appétit qui laisse beaucoup trop à désirer ne soit pas à la hauteur des diners qu’il nous sert.

L’installation des hommes se trouve en général contre les berges du canal, les cuisines occupent un quadrillage qui ressemble à un petit square qu’on appelle pompeusement place de la victoire, à côté se trouve le logement du commandant, les écuries, les bureaux.

 

Enfin tout se trouve dans un rayon de 500 mètres carrés. Ce qui facilite le travail, c’est que les allées y sont dessinées d’un point à un autre et c’est au milieu de ces gourbis champêtres que nous allons passer à l’abri des coups de fusil nos 12 jours de ½ repos.

20, 21, 22, 23 janvier

Les jours se suivent et se ressemblent, construction de nouveaux abris auxquels on apporte des perfectionnements que notre séjour dans les tranchées nous a suggérés, approfondissement pour que l’homme soit abrité debout, largeur des tranchées pour que l’homme puisse s’étendre de tout son long avec place réservée pour râtelier d’armes.

 

La distribution de vivres se fait toujours par Verzenay une voiture nous les apporte tous les soirs vers 5 heures sous la direction du fourrier et du soldat Armadou (?), homme très intelligent, dévoué et qui est chargé en outre de toutes les commissions dont il s’acquitte très bien.

24 janvier

Dimanche messe à 9 heures dans une salle de l’infirmerie appelée délicieusement :

« Le nid des blessés ».

 

Cette salle placée le long du canal à 30 mètres à droite du pont de Prunay, est large de 4 mètres sur 20 de longueur, des planches recouvrent le sol boueux du terrain. La messe a été dite par Mr l’aumônier Rivet du 1er étranger. C’est là que pour la première fois j’ai entendu le tin-tin de la clochette que je lui avais donnée, ce qui m’a fait beaucoup de plaisirs.

Dans cette salle il y avait à peu près 100 militaires de toutes les armes stationnés le long du canal (légion, artillerie, 208, 118ème, etc., etc.).

La journée du dimanche se passa comme les autres jours de la semaine, c-à-d, artillerie et fusillade entendues et provenant du bois des Zouaves qui a eu jusque là les honneurs de l’attaque. (*)

 

(*) : Le bombardement a fait 11 victimes (8 blessés et 3 tués). Florent Marius Charles, Gilles Casimir, et Geay Julien (mort le lendemain). Tout trois étaient de la 4e compagnie du 118e RIT.

Les 2 derniers sont inhumés au cimetière militaire de Sillery (tombes n° 1822 et 986)

Lundi 25 janvier

Dans la matinée, une surprise agréable est arrivée à la tranchée de ….. Un boche s’est présenté comme prisonnier, s’étant évadé des tranchées ennemies.

Tout le monde lui a fait la fête, on l’a fait manger, on l’a interrogé mais peu d’hommes comprenaient ce qu’il voulait dire ; comme toujours après l’événement les hommes de la 7e Cie du régiment qui se trouvaient aux 2èmes tranchées se réunirent pour commenter la désertion du boche et formèrent un groupe compact.

Comme ils étaient à découvert, un obus tomba au milieu d’eux tua 2 hommes et en blessa 7 plus ou moins. Le déserteur boche fut conduit à la division et d’après les renseignements qu’il donna, les Allemands se préparaient pour la journée du 27 janvier à une attaque furieuse contre nos lignes afin de remporter un succès pour donner à leur empereur à l’occasion de l’anniversaire de sa naissance 27 janvier 1859.

26 janvier

Matinée sans changement.

 

A 13 heures, je quitte mon bivouac pour aller à Verzenay voir le dentiste Brideux (?) après un pansement et quelques visites je rentrais à pieds vers 16h 1/2.

 

Couché à 9 heures contrairement aux autres jours, vers minuit le bruit d’une vive fusillade vient nous empêcher de dormir, à 1 heure alerte tout le monde sur le pont.

27 janvier

L’alerte donnée à 1 heure du matin nous fit faire des préparatifs de départ. La fusillade dura jusqu’à 3 heures du matin. C’était les boches qui annonçaient au monde l’anniversaire de la naissance de leur brute d’empereur.

 

Vers 7h du matin, notre artillerie qui n’avait pas donné signe de vie dans la nuit leur envoya quelques obus pour leur faire digérer la choucroute qu’on avait dû leur distribuer pour faire le réveillon et cela ne fut pas trouvé sélect de leur part.

Aussitôt leur artillerie pousse des boum-boum, leur mitrailleuse pour finir et notre M.S. se met enfin dans le quadrille pour mettre fin à leur digestion et les oblige à se terrer dans les tranchées.

28 janvier

Aujourd’hui réveil en campagne comme d’habitude, mais l’orgie à laquelle ont du se livrer les artilleurs boches nous a valu une friture de la Marne qui mérite d’être insérée dans mon journal.

Voici le fait tel qu’il s’est passé sans y ajouter un mot de faux.

« Une pêche miraculeuse, curieux effet d’une marmite allemande ».

 

Ce 28 janvier 1914 à midi, nous étions à table dans notre modeste gourbi si j’ose dire lorsque nous fûmes dérangés par un bruit d’éclatement d’obus 105 allemand tombé à 25 mètres de nous dans le canal de la Marne. Le commandant P…. qui présidait la table sortit aussitôt suivi de nous tous et quelle ne fût pas notre surprise de voir que l’obus avait éclaté au milieu du canal de la Marne recouvert d’une couche de 2 centimètres de glace.

L’éclatement de leur marmite n’avait heureusement blessé personne mais avait occasionné la mort ou l’évanouissement des malheureux goujons qui se trouvaient dans un rayon de 45 à 50 mètres et surnageaient entre les eaux et la glace à la surface.

Aussitôt tous les hommes de la Cie vauclusiens et marseillais en général, et tous plus ou moins pêcheurs, s’armèrent de longues branches, de longues perches au bout desquelles des paniers étaient accrochés et organisèrent une pêche des plus miraculeuses.

Dans chaque escouade ou popote (off, s/off) on mangea le soir la friture de la Marne à la santé des boches artilleurs qui n’avaient pas prévu comme résultat de leur tir qu’ils nous régaleraient de cette belle aubaine

 

L’obus provenait sans doute de la batterie ennemie placée au N.O. des fermes des Marquises situées sur la voie romaine Chalon/Cambrai à 1k au N de Prunay.

Le sifflement de l’obus avait fait lever la tête du caporal Terlikoski (?) caporal d’ordinaire de la Cie C2 du premier étranger en train de laver son linge le long du canal qui vit tomber l’obus à 3 mètres de lui.

Caporal Terlikoski, engagé volontaire pour la durée de la guerre, salua en polonais qu’il est, l’obus, le remercia de lui avoir fourni pour le soir une friture fraiche de la Marne à laquelle il n’avait jamais osé espérer par ce temps prohibé de chasse et de pêche. La Cie du 1er étranger et ma Cie se trouvèrent l’une à côté de l’autre contre le canal où l’obus a éclaté.

 

Pluie de galons.

Ce même jour la décision du colonel nous a apporté aussi de bonnes nouvelles pour les grades comptables de la Cie.

Nous avons eu 3 nominations : Le sergent major Roudes nommé adjudant de bataillon. Le sergent … devint sergent major et le caporal ….sergent le tout à la date du 29 janvier 1915.

29 janvier

Allégresse parmi les nouveaux promus qui se débrouillèrent d’avoir au réveil leurs galons tout flambants neufs cousus sur les manches de leurs effets.

 

A midi, notre artillerie canonne violemment les tranchées ennemies, on aurait cru une attaque de notre part, renseignements pris qqs boches qui arrivaient pour la première fois dans les tranchées pour la relève n’avaient pas pris les précautions prudentes pour se rendre aux tranchées et avaient été découverts.

L’artillerie leur a prouvé que de notre côté aussi nous surveillons et que tout homme qui se faisait voir risquait de ne plus rentrer chez lui.

30 janvier

Journée comme les autres sans incident notable.

Corvée de droite et de gauche, bombardement de part et d’autre, résultats plutôt négatifs.

31 janvier

Dimanche, la neige tombe, hier soir en me couchant, en voulant arranger ma capote et ma veste qui était sur mon lit, quelle est ma joie de voir une souris qui se promenait tranquillement sur mon matelas….. dès qu’elle m’entendit, elle disparait dans la paille et au revoir.

 

La journée du dimanche a été marquée par un petit incident :

Vers 13 heures deux femmes d’un certain âge furent amenées au poste de police et en présence du commandant je les ai interrogées.

Elles paraissaient abasourdies, disant qu’elles ignoraient la consigne et d’un village à côté (Beaumont). Je les ai fait accompagner chez elles par un s/off et un officier, mais l’on a appris en cours de route qu’une des deux avait déjà été arrêtée pour tourner autour de la batterie.

J’ai donné ordre de ne les lâcher que sous la responsabilité du maire de Beaumont. Cet officier de l’état-civil a donné un bulletin avec son cachet disant que les femmes étaient….

Et compte rendu a fait à Verzenay.

1er février 1915

Aujourd’hui préparatifs de départ pour Verzenay.

 

A 14 heures, départ par section de ¼ en ¼ d’heure. Toute la Cie était installée à 17 heures 1/2.

Même locaux à peu près que la dernière fois.

2 février

Anniversaire de mon mariage du 2 février 1887.

 

A 16 heures, j’ai fait une visite chez mon ancien propriétaire Mr Gaunaire (?) qui m’a offert un verre de champagne, puis un 2e.

 

A 18 heures pluie, nuit noire, obligé d’emprunter une lanterne.

 

A 18h 1/2, diné extra, champagne provenant d’un pari que j’ai gagné contre Mr Gournaire (?) et DETTORI qui soutenaient qu’une lettre avec valeur déclarée coutait plus qu’une lettre avec mandat. Je leur ai dit :

" Une lettre recommandée avec valeur déclarée 500 ne coutait que 0,10 d’affranchissement, 0,25 de recommandation et 0,10 de déclaration jusqu’à 500f. "

 

Ils n’ont voulu rien savoir et m’ont proposé de payer le champagne s’ils avaient tort ou de me le faire payer s’ils avaient raison. Bien entendu ils ont perdu et j’ai bu le champagne à leur santé.

Toutefois le lendemain je leur ai dit que je payais ma côte part du champagne. Ils m’ont répondu :

« Le contraire nous aurait étonnés »

Et la journée du 3 février sans incident digne d’être noté.

4 février

Aujourd’hui à 9 heures, visite des tranchées dont l’une aux environs de Verzenay a du recevoir un obus mais a pu franchir la ligne ennemie tout de même.

 

A 13 heures, visite au moulin à vent de Verzenay qui appartient à Mr Roeder (?) et dont une grande partie du coteau planté de vignes est encore intact.

C’est là que le général Foch était installé pour surveiller les opérations qui obligèrent les boches à la retraite de la Marne.

De ce point élevé la vue s’étend très loin, Reims et au-delà à l’O, au N, toutes les hauteurs occupées par la ligne ennemie avec leurs lignes de tranchées que nous avons pu voir avec la jumelle d’artillerie à l’Est Verzy- Beaumont, etc

Un poste important de téléphone est installé et c’est de là que très souvent part l’ordre de tirer sur telle ou telle tranchée ennemie.

 

A 14 heures ½, visite au dentiste Brodeur (?) toujours froid et correct.

 

A 15 heures, j’ai assisté en spectateur à une partie de boules dans la cour de l’école entre médecins et auxiliaires, c’est dire qu’ils n’ont pas grand-chose à faire pour aujourd’hui. Ce même jour notre Vatel étant fatigué le serveur Uffrein l’a remplacé et ce dernier l’a été à tour de rôle puis l’ordonnance des officiers.

Il fallait voir la tournure gauche de ces petits p…. ordonnance d’occasion, pour éviter les corvées pénibles, qui ne savaient pas annoncer les plats.

5 février

Journée calme, 2 aéros français ont rayonnés sur les coteaux qui produisent les meilleurs vins de la champagne.

Ce sont les crus de Verzy-Beaumont, Mailly, Verzenay. Les civils ont été autorisés à aller travailler les vignes et ils en sont très contents quoique ce soit un peu tardif.

Avons mangé ce matin l’aïoli grâce à un peu de morue que le fourrier T… avait reçu d’Avignon.

6 février

De service aux tranchées de Beaumont, j’ai fait la route à cheval mais à un moment donné une voiture qui arrivait derrière contenant des bidons vides faisait une musique peu agréable aussi il se mit à danser et peut être il m’aurait culbuté si mon ordonnance Constantin ne se fut trouvé là.

 

Dès 7h ½, une pluie commença à tomber, tous les hommes étaient trempés comme moi ; rien pour s’abriter. Je donne l’ordre de rentrer à Verzenay au grand contentement des 150 hommes qui étaient aux tranchées. Au retour à Verzenay toujours par une pluie battante, je rentrais à pied avec le sapeur du génie natif de Montpellier et sur la route de Beaumont il me fit voir le poteau où les 3 espions de Verzenay avaient été pendus.

 

Ce poteau se trouve à la sortie N. du village de Verzenay derrière le phare de la propriété Coulet. Ce fut un bon exemple.

 

Le reste de la journée fut consacré à faire sécher les effets, à la correspondance.

Repos.

7 février

Aujourd’hui dimanche réveil à 8h ½.

 

Messe à 9 heures, temps sec, froid.

 

A midi, reçu 2 lettres de ma femme dans lesquelles se trouvaient 2 de ses photographies. L’une assise, l’autre debout.

Celle-ci est préférable, et une troisième de Lucie qui est très bien réussie. Lettres me donnant beaucoup de nouvelles de Marseille.

Enfin correspondance très agréable rappelant l’anniversaire du mariage 2 février 1887.

Ne suis plus sorti de la journée pour répondre à ma femme et aux enfants et enfin une autre lettre à mes belles-sœurs d’Ajaccio qui méritent beaucoup que l’on pense aussi à elles qui ont travaillé toute leur vie pour mes enfants et leur sœur et qui se plaignent de n’avoir pas de parent autour d’elles pour les soulager de leur travail à la maison car elles sont âgées.

 

Elles sont quoique ça assez jeunes, j’oubliais de dire que c’est aujourd’hui 7 février que dans toute la France on distribue des emblèmes de notre M.S.. Ici on n’a pas eu besoin de l’emblème car notre artillerie a tiré beaucoup plus que d’habitude sur les tranchées ennemies. Ce duel d’artillerie nous est d’ailleurs très familier et l’on y fait plus attention car les résultats en sont plus que douteux.

8 février

Ce matin la neige tombe à flocons.

Commande de corvées pour faire les tranchées aux 200 hommes, nous sommes tous rassemblés devant le …. Du génie et la neige tombe toujours. Bien entendu aucun officier du génie, le sergent couche où ?

Seuls les 2 plantons en même temps hommes de liaison sont là, distribution des outils, le temps n’étant pas favorable je me décide à faire demander au colonel du 118e si je dois partir.

Monsieur N…. (*) qui commande le régiment me dit NON mais prévenir le commandant du génie par les soins du sergent qui avait daigné se lever.

 

Le jour, pluie, neige, repos.

Pour ce jour la pluie m’a été bienfaisante puisqu’elle m’a dispensé d’aller aux tranchées.

 

(*) : Lieutenant-colonel NANTA

9 février

Jour de repos, j’avais invité à diner les soldats.

 

Touche premier violon à l’opéra et professeur au conservatoire de musique à Paris et le soldat de Seyner (?) compositeur de musique, auteur de plusieurs sonates et de l’opéra « La maffia » opéra joué à Nice.

Le Vatel de la Cie s’est distingué et au champagne il fut des nôtres. La journée s’est passée très agréablement, champagne toute la journée et menu le soir grâce à la rencontre du capitaine Valter (?) du 1er étranger que j’avais invité.

Toute la journée champagne et agréable conversation musicale, artistique et militaire.

10 février

Recevons les ordres de départ pour le 14 avec nombre de jours à passer dans chaque cantonnement

 La Cie de garde avec section de service pour les ….

Ma Cie fournit une section de 50 hommes à la gare.

 

Vers 4 heures, un aéroplane vient survoler la position mais l’artillerie placée au moulin de Verzenay ne nous signale pas si c’est un français ou un allemand, de là, incertitude, on n’ose pas tirer de crainte de tirer sur un français, enfin il disparait dans nos lignes et notre conscience de n’avoir pas tiré nous a été soulagée.

11 février

Ma Cie fournit 100 hommes aux tranchées avec les autres hommes commandés.

Il ne restait qu’un faible cadre, d’où repos pour les officiers et pour moi, employé à notre correspondance.

12 février

Temps toujours à la neige et à la pluie, mêmes travaux, mêmes corvées.

Mr Paoletti a diné avec nous.

 

(*) : Le lieutenant PAOLETTI vient de prendre le commandement de la section de mitrailleurs, nouvellement créée. (JMO)

13 février

De nouveaux ordres de départ nous sont arrivés qui modifient l’assiette des mouvements donnée le 10. Nous sommes mieux partagés entre les Cie du bataillon et je préfère.

14 février

On nous donne l’ordre de quitter Verzenay le soir à 5h mais comme ma Cie devait occuper des tranchées inoccupées, j’ai demandé à partir demain.

 

Ce jour tous les s/off sont invités à vider une coupe de champagne avec les officiers de la Cie en retour de leur invitation du 1er de l’an.

Lieutenant Eymeri était venu partager notre diner avec les 3 adjudants et le sergent major et le soir nous nous couchâmes de bonne heure pour être prêts à partir le lendemain pour les tranchées.

15 février

Rassemblement de la Cie à 3h 1/2 du matin, départ à 4 heures par section, arrivée aux tranchées à 5h 1/2 occupation des emplacements terminée à 7 heures, très peu de places.

Pris connaissance des diverses consignes.

 

A 9 heures, visite du commandant Muller du 1er étranger, commandant le ½ secteur.

 

A 10 heures, visite au bois de la Mare contre la route de Cambrai.

Le bois de la Mare n’existe plus, tous les arbres ont été coupés, l’emplacement occupé par une Cie du 1er étranger est envahi par l’eau. Cette eau forme un beau lac où les hommes vont se débarbouiller.

A la partie supérieure de la cuvette sont les casemates de la Cie dans lesquelles l’eau s’infiltre petit à petit et la Cie est obligée de construire des casemates nouvelles pour pouvoir s’y loger mais la terre est blanche, de la marne comme on l’appelle, et les souliers  se collent à elle, on a été obligé de leur distribuer des sabots.

 

En revenant du bois de la Mare et en visitant avec M DETTORI les casemates du 1er peloton, des shrapnels nous ont inondés et l’un entre autre a éclaté sur notre tête, un morceau de l’obus aussi grand qu’une bouteille d’un litre est tombée à 2 mètres de M DETTORI et de moi.

 

Le soir, à l’occasion de notre arrivée les boches nous ont arrosés aussi un peu mais leur tir était plutôt dirigé sur Prunay pour tâcher d’atteindre une batterie de M.S. qui s’y trouve, heureusement que cela a été en vain.

D’où duel d’artillerie sur nos têtes.

 

Nous sommes à 1k300 des boches et à 100 mètres de Prunay.

16 février

Aujourd’hui je n’ai su qu’à 4 heures du soir que c’était mardi gras, c’est dire si aux tranchées nous avons la notion du temps.

 

Corvée dans la journée à peu près toujours les mêmes.

Suis intrigué par une note de rapport disant que les officiers qui ont dépassés l’âge de servir dans l’action donneront leur nom.

Pour les capitaines c’est 53 ans, comme j’ai bientôt 54 ans j’ai donné mon nom. Dans quel but a-t-on demandé cela je l’ignore ?

A la même heure un aéroplane français est venu survoler au-dessus de nos tranchées et il est descendu à peu près à 500 mètres, nous l’avons salué et lui nous a remercier en faisant claquer 2 ou 3 fois le drapeau français cela nous a fait plaisir.

 

Le soir même, M DETTORI a failli mettre le feu dans la chambre qu’il occupe contre la mienne et a failli démolir notre bicoque, heureusement qu’un peu d’eau a suffi pour éteindre le feu.

Le fait était d’autant plus grave que les cartouches de réserve se trouvaient là.

17 février

Visite du commandant Muller commandant du ½ secteur me demandant des propositions à lui faire pour exécuter des travaux.

A parlé tout seul pendant 2h …… sans avoir pu placer un mot.

M DETTORI mon lieutenant me dit :

« Mon capitaine, on me reproche que je parle beaucoup mais le commandant me damne le pion ».

 

Le soir, je lui envoie après étude des propositions pour le défilement des boyaux.

Au préalable j’avais fait exécuter un petit travail sans rien lui demander, bien entendu dans l’intérêt du service. Mr le chef du bataillon Muller 1er régiment étranger qui a l’air d’être plutôt officier d’habillement ou major que militaire, a pour adjoint Mr le capitaine Gobet du 1er étranger qui a fait toutes les campagnes coloniales mais qui parait ignorer la différence entre la territoriale et la légion.

18 février

Le commandant arrive le matin me disant propositions de la veille sont acceptées mais me reproche d’avoir fait creuser de 0,30 les boyaux.

 

Une heure après, le colonel Pein arrive me dit avoir bien fait de creuser de 0,30, cela m’a consolé. Mon chef de bataillon de Pina accompagné de Mr de Montillat arrive aussi et trouve que j’avais bien fait, donc le commandant Muller se trouvait tout seul être de son avis.

Je profite de la présence du commandant pour lui demander à rester où je suis afin d’éviter un déménagement.

Le lendemain j’obtiens satisfaction d’accord avec le commandant de Cie qui devait me relever.

 

Le même jour à 10 heures du matin, une canonnade intense est tirée sur Prunay, toujours pour atteindre l’artillerie, finalement elle finit par atteindre un maréchal des logis qui sortait pour aller manger sa soupe et l’a tué raide.

 

Dans la soirée vers 16 heures, rage d’artillerie des 2 côtés, finalement rien de notre côté.

19 février

La veille 150 hommes de ma Cie étaient commandés pour diverses corvées à faire aux premières lignes.

Les ¾ de ces corvées étaient très pénibles, il fallait porter des plaques de tôles au bois de la Mare, d’un poids de 120 kg.

Il fallait 8 hommes (2 séries de 4) pour se relayer dans la marche des boyaux.

 

Le matin à 9 heures, les boches tirent sur le canal, plusieurs obus vont y tomber et fait faire une bonne friture aux heureux habitants.

L’aumônier facteur, dont il a et déjà parle plusieurs fois, d’Anselme veut nous faire payer à déjeuner et nous annonce qu’à notre droite les français ont gagné du côté de Perthe, 4 kilomètres de tranchées.

 

Vers 11 heures, le commandant Muller vient me voir, il me parle pendant 2 heures d’horloge sans pouvoir placer un mot, me demandant un topo du terrain.

 

Le soir venu, je lui fais demander le plan du secteur afin de me limiter dans mon travail par Mr le lieutenant DETTORI et j’apprends qui n’en existait point.

Lieutenant DETTORI lui rapporte ma réponse en disant que n’ayant rien, je ne pouvais pas lui faire ce qu’il me demandait, alors le commandant me fait dire que ce n’était pas un plan mais simplement un petit topo au crayon.

Dans ces conditions je lui ai fait plaisir en faisant un simple dessin avec indication de l’emplacement de la Cie. Mr l’adjudant Dany (?) professeur de français à Carpentras a fait un petit travail là-dessus très propre et le commandant Muller a été enchanté.

 

Le soir toujours à 16 heures, l’artillerie a annoncé sa présence par une pluie d’obus sur Prunay toujours dans la même direction à la droite du clocher là où est notre artillerie et a en assez des succès puisqu’il y a eu 1 cheval de tué et 4 de blessés mais pas d’homme ni blessé ni tué.

 

Tous ces faits racontés sur ce livre sont l’expression exacte de la vérité. 

 

Fin

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