Publication : Août 2023
Mise
à jour : Août 2023
Laurent nous dit :
« Vous trouverez ci-joint la retranscription fidèle d’une lettre
d’un sous-lieutenant du 216ème RI, Marcel Michel,
mon grand-oncle.
Dans la famille Michel,
il y eut 5 garçons partis sur le front. Deux furent tués en septembre 14,
Georges et Marcel, à quelques kilomètres l’un de l’autre.
J’ai récupéré 2 boites à chaussures pleines de lettres datant de cette
époque. C’est ainsi que j’ai eu l’idée de les retranscrire pour la mémoire de
ma famille. »
Merci à Laurent pour cette lettre.
Merci
à Philippe S. pour la vérification du récit et le temps passé sur certaines
recherches.
Nous avons ajouté du texte en bleu pour la compréhension de certains termes et pour aller « plus loin » dans l’analyse du récit.
Marcel MICHEL est fabricant de ruban et habite à Saint-Etienne où il est né en septembre 1888. Engagé volontaire en 1908 pour trois ans, il est affecté au 38ème régiment d’infanterie. Caporal, puis sergent en 1910, il est promu sous-lieutenant de réserve fin 1913. Rappelé à la mobilisation d’août 1914, il intègre avec son grade de réserve au 216ème régiment d’infanterie et fait partie de la 19ème compagnie.
Ce régiment combat dans l’Oise à Brégy vers Fosse-Martin début septembre 1914.
Après les combats de la Marne, un état des effectifs dans le journal du régiment est établi le 9 septembre : il reste 1146 hommes sur 2202, 14 officiers sur 37…
Au moment de sa blessure le régiment se trouve à la ferme de Confrécourt, dans l’Oise, le poste de secours étant installé dans les grottes de ce village.
Vic-Sur-Aisne, le 17 septembre
1914
Chers parents,
« Depuis le 6, jour de mon anniversaire, nous nous sommes battus
presque sans relâche. Nous avons eu de grosses pertes, et, dans tout le
régiment, il ne reste que 4 officiers. Mon lieutenant (*)
a été blessé au pied le 6 au soir. Mon capitaine (**) a été tué le 7 par un éclat d’obus qui lui a
perforé l’intestin de part en part. Je restais le seul officier de ma compagnie
lorsque le 14, pendant une attaque de nuit, j’ai eu la poitrine traversée par
une balle. (***)
Nous étions à 200m à peine des Allemands et l’un d’eux, heureusement
charitable, me mit mon paquet de pansement au lieu de m’achever comme ils en
ont l’habitude. Je suis resté 24 heures sur le champ de bataille, tout seul au
milieu des balles et des obus qui continuaient à pleuvoir et c’est un véritable
miracle que je n’ai pas été touché une seconde fois. Ensuite on m’a transporté
dans un hôpital de campagne d’où je vous écris.
Cet hôpital est installé au château de Fontenoy et nous y sommes très
bien. Je partage le lit d’un capitaine de chasseurs alpins qui a eu la cuisse
fracassée. Dans la même salle que moi, il y a un Ducreux de Panissières qui a le
tibia cassé.
Dès qu’on le pourra, on nous évacuera sur un hôpital du Centre où nous
serons parfaitement bien soignés.
Philippe et Bernard n’étaient pas blessés lorsque j’ai été transporté
ici. Depuis je n’ai pas eu de leurs nouvelles.
Ma blessure n’est pas grave. C’est le côté gauche de la poitrine qui
été traversé de part en part. Le poumon a été légèrement atteint mais je ne
crache presque plus de sang et la plaie sera vite cicatrisée. Ne vous inquiétez
pas du tout, car je suis entre de bonnes mains et j’ai vraiment de la chance de
m’en tirer à si bon compte.
Combien de mes camarades ont été tués net. C’est affreux. Ne vous
tourmentez pas et je vous dis la vérité parce que je sais qu’elle ne vous
frappera pas.
A bientôt, la grande joie de vous revoir. »
Marcel.
(*) : Lieutenant BLANC, 29ème
compagnie.
(**) : Capitaine auguste Charles
Constant HUBIN, 29ème compagnie. Voir
sa fiche.
(***) : Le journal du régiment
signale sa blessure que le 16 septembre, certainement après l’avoir retrouvé
sur le champ de bataille comme il l’indique dans sa lettre :
Sur le site Mémoire des hommes, on retrouve la fiche de décès de Marcel Michel, sous-lieutenant au 216ème RI, mort pour la France des suites de ses blessures, le 28 septembre 1914 à hôpital annexe 106 (Villers-Cotterêts dans l’Aisne).
Je désire contacter le propriétaire de cette lettre
Voir
des photos du 216ème régiment d’infanterie
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