Mémoire de guerre d’Émile SIVIARD

du 327e régiment d’infanterie

 

Mise à jour : Avril 2021

Retour accueil                                                               

 

 

Émile Nestor Hyacinthe SIVIARD est né le 08/ 06/1886 à Vieux Condé (59). Matricule 1800 du recrutement de Valenciennes, malheureusement de nombreuses fiches sont manquantes dont la sienne.…

 

Le 327e régiment d’infanterie (régiment de réservistes) s’est constitué le 4 août 1914 à Valenciennes (Nord). Il est composé de 2 bataillons (n°5 et 6) et de 2 sections de mitrailleuses. Émile SIVIARD trouve affecté dans le 6e bataillon, 22e compagnie. Pour info, les bataillons n° 1 à 3 sont réservés au régiment d’active, le 127e régiment d’infanterie (qui a 3 bataillons) et le n°4 pour les régiments qui possèdent quatre bataillons.

Le 327e régiment d’infanterie a donc comme effectif : une soixantaine d’officiers, environ 2200 sous-officiers et hommes de troupe, 133 chevaux et 38 voitures hippomobiles. Il fait partie de la 51e division d’infanterie de réserve et de la 101e brigade d’infanterie.

Ce régiment fait partie des régiments les plus éprouvés durant la guerre. Environ 3000 tués et disparus et 8000 blessés…(JMO). D’ailleurs, c’est assez rare dans un JMO, tous les noms des hommes tués, blessés et disparus avec leur grade, matricules, origine y sont listés.

 

Émile SIVIARD nous dit :

« Cette partie a été recopiée pendant ma seconde convalescence à Bourbourg  Avril-Mai 1916 »

 

Merci à Martine et Philippe pour la recopie

 

Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : feather

 

 

Début des écrits

 

2 août 1914 (dimanche)

1er jour de la mobilisation. Jour des adieux à Fresnes (*) et Macou.

 

(*) : Fresnes-sur-Escaut

5 août

Je me rends à la caserne Ronzier en compagnie de mon cousin Émile PUREUR.

De là on m'envoie au collège Notre-Dame où je suis affecté à la 22e compagnie du 327e régiment d’infanterie.

6

La mobilisation se fait dans des conditions normales, les réservistes arrivent sans  retard.

7

Nous sommes habillés et équipés. Nous faisons quelques exercices à l’extérieur.

8

Même programme.

9 dimanche

C'est le dernier jour que nous passons à Valenciennes. Permission de la journée que je passe en compagnie de mon beau-père.

Belle journée

10 août

Réveil à 2h du matin. Nous embarquons à 4h.

La chaleur commence à se faire sentir. Nous descendons à Hirson à 9 heures. La chaleur est étouffante.

Après une marche déplorable nous arrivons à Harcigny à 9h du soir nous avons fait environ 25km.

11

Repos

12 13 14 15 16 dimanche 17

Nous cantonnons toujours dans le même village.

Exercices journaliers dans les environs. Le pays est accidenté et on sue en montant les côtes .Toutes les femmes du pays sont goitreuses : Cela est du parait-il à la composition de l'eau.

Les habitants sont très aimables. Pris la garde aux issues du village dans la nuit du 17 au 18.

Nuit très fraîche. Couché dans un cabriolet qui formait barricade.

18

On parle de départ.

Resté toute cette période chez Mr DUCLOS-BAUCHART (à Harcigny) - Envoyer carte après la guerre.

Gens très aimables.

Nous quittons le village à 3 heures du soir.

Après une marche pas trop dure nous arrivons à Yviers vers 9h du soir. Tant bien que mal on arrive à se loger dans les granges.

19

Nous quittons le village à 1h du matin. La marche au nord s'accentue. nous arrivons à Antheny à 10h du matin.

20

Après une grande halte repos, nous nous remettons  en marche à 4h du matin direction Rocroi.

Depuis Iviers le pays est très pittoresque, nous abordons les derniers contreforts des Ardennes. Nous commençons à monter les côtes sans trop de fatigue. Nous venons d'être doublés dans un énorme nuage de poussière par un convoi d'autobus parisiens transformés en énormes voitures à viande.

Nous entrons dans la forêt de Sévigny.

Au loin bruit sourd de la canonnade. 2 avions français passent au-dessus de nous se dirigeant vers la Belgique. Par méprise les troupes de Rocroi ont tiré dessus. Nous cantonnons au Cheval-Blanc à 4 km au sud de Rocroi. Les habitants sont très revêches.

21

Nous quittons ce hameau nous dirigeant sur Rocroi que nous traversons vers 7h du matin. J'ai le grand plaisir de rencontrer Mr DUMAISNE (148ième) qui m'accompagne quelque temps pour causer un peu.

Nous approchons de la frontière que nous traversons  au Gué-d’Hossus à 8h du matin. Tous nous notons cette heure mémorable. Nous faisons la pause à 5mn de la frontière. Les belges accourent de toute part et nous donnent tabac, tartines mais ne veulent pas accepter d’argent : « No fait » disent-ils.

Nous cheminons alors dans la forêt de Couvin (Ardennes belges). Nous sommes heureux d’y trouver un peu d’ombre. Nous arrivons bientôt en vue de la ville de Couvain. Le panorama est merveilleux.

Nous traversons la ville acclamés par la population. Quoique le défilé des troupes dure depuis longtemps déjà, de partout on nous distribue du café, des tartines de confiture etc..

Le paysage est merveilleux. Les pentes parfois abruptes sont couvertes de sapins verts.

Enfin après avoir abattu nos 35 km nous arrivons à Olloy où nous cantonnons. J’ai l’heureuse chance de coucher dans un bon lit et de boire de la bière depuis le départ de Valenciennes.

22

Nous quittons Olloy à 4h du matin. Nous continuons notre marche en avant.

Rencontré LAUTREBECQ (de Dutemple), adjt au 201ième. (*)

Ce régiment est affecté à la garde des convois. Un avion allemand survole notre colonne dans notre direction de marche. Le bruit de la canonnade s’entend de mieux en mieux.

Il fait chaud ; Les côtes succèdent aux côtes. Nous approchons de la vallée de la Meuse. Nous abattons toutefois nos 33km ; mais les pieds sont en feu. Nous cantonnons à Anthée à environ 12 km à l’ouest de Dinant.

Sur la route nous croisons de pauvres belges qui abandonnent cette ville, emportant avec eux tout ce qu’ils peuvent. Nous apercevons de nombreux incendies dans cette ville. Avant  de gagner le cantonnement notre brave commandant de Richard D’IVRY (*) nous fait une petite allocution. Nous avons l’impression que bientôt nous allons recevoir le baptême du feu. chacun fera son devoir.

 

(*) : « de Dutemple » : c’est le nom d’une fosse. La fosse DUTEMPLE de la compagnie des mines d’Anzin (59) se trouvait sur le territoire de la commune de Valenciennes. Le chevalet existe toujours. Nous verrons par la suite qu’il nommait ainsi ses connaissances mineurs de cette manière. Il était géomètre à son mariage, géomètre aux Houillères du Nord ?

(**) : Le commandant Richard D’YVRY commande le 6e bataillon.

23 août dimanche.

La nuit a été un peu mouvementée. Ma section de garde  aux issues du village cantonne dans une salle des fêtes isolée.

La veille, j’avais fait remarquer à mon chef de section la position de cette salle que l’on pouvait cerner comme on voulait.

 

Vers 2h du matin, pendant que la fraction qui n’était pas de veille dormait le cri « alerte » retentit.

Aussitôt chacun bondit et dans l’obscurité cherche les armes. Un homme en manœuvrant donne un coup de crosse dans une fenêtre, les carreaux sont brisés et tombent avec fracas. L’idée que j’avais eu la veille me revient à l’idée ; Nous sommes cernés par les uhlans. Heureusement il n’en était rien : c’était notre capitaine (MUSIN) (*) qui sans être aperçu des sentinelles avait pu pénétrer dans la salle (j’avais donc raison).

Enfin craignant recevoir un coup de baïonnette, il s’était fait reconnaitre.

Nous rassemblons et bientôt nous marchons vers Dinant. La canonnade s’entend de mieux en mieux.

 

(*) : Le capitaine MUSIN commande la 22e compagnie.

 

À 6h du matin, nous formons les faisceaux protégés par une crête, nous entendons maintenant la fusillade. Les balles sifflent au-dessus de nos têtes ; le combat est engagé sur les deux rives de la Meuse.

 

Vers 10 h, l’ordre est donné au bataillon de reprendre la ferme de Lenne que les Allemands viennent d’occuper en traversant la Meuse sur des radeaux. Nous traversons Onhaye et bientôt nous sommes en rase campagne. Nous rencontrons les premiers blessés  et la vue des pansements maculés de sang nous donne un petit frisson. Nous marchons en ligne de section par 4, comme à l’exercice. Avec nos pinces nous coupons les clôtures des pâtures.

Nous avançons toujours, puis à 7 ou 800m de la ferme nous nous déployons en tirailleurs pour continuer notre mouvement. Tout à coup une rafale de 77 tombe sur nous : je reste un certain temps avec ma ½ section isolé dans un champ d’avoine.

Les éclats sifflent sans interruption à nos oreilles.

 

Enfin après bien des péripéties je me lève pour me reconnaitre et apercevant une haie, je donne l’ordre de gagner cette haie en rampant. De temps en temps nous entendions une galopade effrénée : c’était les cuirassiers de la division qui se faisaient accueillir soit par les balles soit par les obus dans leurs reconnaissances.

Nous retrouvons la Cnie  qui est parvenue à la haie ; à coup de serpe et de pelle-bêche nous faisons des trous et arrivons bientôt à la ferme que les Allemands viennent d’évacuer. Les obus se mettent à siffler au-dessus de nous. Nous rencontrons une section du 208ième.

Quelques moments de répit.

 

Bientôt la fusillade reprend à notre gauche. Les boches reviennent à la charge. Nous nous déployions dans un petit chemin creux en avant de la ferme.

De malheureux blessés se mettent dans les caves. Les boches comme à l’exercice se déploient en tirailleurs à 150m de nous. De malheureuses vaches affolées sont entre les lignes. Nous les abattons à coup de fusil afin de dégager notre champ de tir. Notre tir augmente d’intensité ; nous tirons à répétition.

Un moment d’émoi ; abrité derrière un mur avec quelques hommes je tirai dans une direction donnée lorsque juste au-dessus de mon képi une balle vient s’aplatir venant d’une direction perpendiculaire à notre position. Aussitôt je fais face et prend place au talus du chemin où les hommes tirent à volonté.

Mon caporal (TISON (Henri) de Denain (*)) de la 2ièmeescouade a la joue traversée par une balle mais continue à tirer malgré les flots de sang qui coulent de sa blessure. Il me dit :

«  Voyiez sergent, j’en ai ».

 

Un peu plus loin notre brave commandant venait de prendre la place du capitaine DAYEZ de la 23ièmequ’une balle venait d’étendre raide mort. (**). Le commandant, tête nue, les bras croisés sur la poitrine dirigeait le feu. L’endroit où il se trouvait était fort battu, et à chaque moment, nous nous attendions à le voir touché. Les boches se rapprochaient sensiblement.

Alors malgré la fusillade nous entendions la voix du commandant :

« Mes enfants préparez-vous à mourir. Baïonnette au canon. Clairon  sonnez la charge ».

 

Au même instant l’ordre de battre en retraite arrivait.

Il était temps nous étions presque cernés. L’ordre est donné d’abandonner les sacs.

 

Alors commence la retraite à travers une campagne, sans abri.

Les balles sifflent partout ; les hommes tombent un peu partout .Il fait chaud (il pourrait être environ midi) je porte aux lèvres le petit flacon de rhum que Marguerite avait eu la sage précaution de me faire prendre, chaque fois que je me sens prêt à tomber.

Néanmoins j’ai conservé mon sac. Quelques gouttes de rhum aux blessés de ma ½ section les remettent un peu en état. Le grand trouillard  qui vient d’avoir la cuisse traversée se couche.

Enfin après cette course à travers les balles j’arrive sain et sauf au village. Je m’aperçois alors que c’est une retraite générale ; nos malheureux artilleurs ont dû abandonner leurs positions et les caissons arrivent dans le village encombrés de blessés (fantassins) et d’hommes qui ne peuvent plus avancer.

Je revois sur un caisson le sergent-major ST AUBERT  de la compagnie. « J’ai la cuisse brisée par un éclat d’obus » me crie-t-il.

 

Je suis la colonne lorsqu’au débouché du village une rafale d’obus nous arrose littéralement. Je vois tout le monde obliquer à droite et gagner un autre chemin. Je suis le mouvement.

Alors c’est la vraie déroute : canonniers, fantassins, cavaliers etc. tout cela se presse. Harassé, j’avise un cheval libre sans selle. Toujours avec mon sac et mon fusil, je saute dessus et nous allons vers l’inconnu. Pendant combien de temps cela dura-t-il ?

Je grignote un bout de chocolat pour calmer ma faim.

Bientôt à notre droite nous apercevons des flocons de fumée, au loin. C’est l’éclatement de shrapnels, (j’ai su plus tard que c’était Charleroi).

 

Enfin vers 7h du soir, je rencontre sur route le capitaine DATH (***) qui a ramené des hommes de toutes les Cnies. Nous sommes une cinquante. Nous nous demandons avec anxiété où étaient les autres.

 

La nuit venue, nous bivouaquons à proximité d’un parc d’artillerie.

Bientôt arrivent les malheureux du 1ercorps ; comme nous, ils ont été écrasés à Charleroi par le nombre. À l’horizon, on ne voit que des lueurs d’incendie (1)

Nous nous replions sur Philippeville.

Nous marchons par un soleil de plomb. Des groupes des divers régiments de la division se joignent à nous. Nous rejoignons bientôt le régiment qui est à peu près reformé. Nous faisons la grande halte ; un peu de café et un petit somme nous remettent un peu. Nous nous remettons en marche à 6h du soir

 

(1) : Le soir en examinant mon sac, je m’aperçois que ma gamelle avait le fond presque décollé par une balle ou un éclat d’obus et la toile cirée qu’enveloppait mon gilet de laine et mes souliers, percée de part en part par une balle. Mon gilet, plié était devenu une véritable écumoire.

 

.Ma compagnie a perdu le 23 : 1 lieutt tué ou disparu ainsi qu’un adjdt professeur au lycée de Valenciennes (RICHARD (****)) et 40 hommes.

Le lieutt (*****) qui est mon chef de section étant disparu, j’ai pris le commandement de la section.

Nous marchons toute la nuit.

 

(*) : Le caporal Henri TISON du 327e régiment d’infanterie de Denain sera encore blessé le 9 octobre 1915 et ne semble pas être dans la liste des morts pour la France.

(**) : Paul Alidor Léon DAILLIER, capitaine au 327e régiment d’infanterie, mort pour la France à la ferme de Lenne (indiqué Anthée) le 23 août 1914. Voir sa fiche.

(***) : Capitaine Fernand DATH, qui devient commandant du 5e bataillon en 1916.

(****) : Marie RICHARD, adjudant au 327e régiment d’infanterie, né à Laon   (recherches AD 02 vaines  habite certainement le Nord à  ses 20 ans

(*****) : André LEFEBVRE, lieutenant au 327e régiment d’infanterie

25

À 1h du matin nous arrivons à Mariembourg.

Nous bivouaquons dans une pâture humide. De plus la nuit est glaciale et rien pour s’abriter.

À 4h nous nous remettons en en marche et nous nous dirigeons sur Rocroi dit-on.

Plus de doute c’est un mouvement de retraite générale. On ne cause plus, les hommes sont graves. Nous marchons toujours.

Nous repassons à Couvain mais les habitants se préparent à fuir.

L’anxiété se lit sur leurs visages. Quelle différence avec notre premier passage.

Rencontré le 233ième ; Ils ont un prisonnier boche :

« C’est un goujon de la Meuse » dit un homme.

 

Sur tout notre parcours nous rencontrons des convois de belges, fuyant l’invasion. Charrettes, voitures, bœufs, vaches etc..

Tout se meut ensemble. Dans les ravins abrités des vents ils campent. Ils ne savent où ils vont. Les petits enfants ont faim ; de temps en temps on leur donne une boule.

Nous retraversons la forêt de Couvin, direction Fumay.

Sur la route, une laiterie .Le patron ne voulant pas laisser sa marchandise aux boches permet aux hommes de prendre ce qui leur convient. Point n’est besoin de leur répéter ; en un clin d’œil, gamelles, bouthéons,  sont remplis de beurre ou de lait. Les grandes cuves à lait ont été surement plus vite vides que pleines.

Enfin, après une marche très dure nous arrivons à 8h du soir à l’Escaillère ou nous cantonnons. nous sommes fourbus.

26

Départ à 4h du matin, direction Chimay puis la frontière française.

Nous voici en territoire français. Il fait toujours très chaud. Nous passons à Signy(-le-Petit).

Les km succèdent aux km.et cependant nous marchons toujours. Les pieds brulent ; la colonne de trainards augmente.

Nous arrivons à Any où j’ai l’heureuse chance de trouver un lit et pouvoir me déshabiller un peu. Les gens de la maison sont très aimables mais inquiets de ce qui se passe. Ils ont l’intention de partir.

27

Nous nous mettons en marche à 4h du matin. Le soleil a disparu et la pluie tombe.

Nous quittons le département des Ardennes pour entrer dans le département de l’Aisne. Nous passons à Leuze, Martigny et nous pensons revoir Harcigny que nous avons quitté il y a 8 jours à peine. Nous cantonnons à Morgny-en-Thiérache.

Nous sommes encore bien fatigués.

28

Nous partons au petit jour. Nous traversons Renneval, Chaourse.

La pluie de la veille a rafraichi la température ce qui nous fait plaisir. Nous cantonnons à La Neuville-Bosmont dans des maisons abandonnées ; nous sommes plutôt à l’étroit ; mais on se repose cependant.

29 Bataille de Guise

Ordre est donné de reprendre l’offensive. Nous formons les faisceaux et attendons les ordres.

 

À 10h, sac au dos. Il fait encore chaud. Nous sommes, parait-il, soutien d’une division de cavalerie.

Nous marchons dans la direction de Verviers.

 

À midi, le train de combat nous approvisionne en cartouches. De crainte d’être à cours de munitions les hommes  prennent chacun 2 trousses.

La canonnade s’entend distinctement. Tantôt nous marchons, puis nous stationnons.

 

Enfin vers 3h du soir, nous reprenons notre marche.

Par un cheminement parfaitement défilé nous arrivons au village de St Gobert dans une cuvette. Les obus passent au-dessus de nous en masse. Il fait encore très chaud. Nous débouchons du village et immédiatement nous grimpons la cote pour atteindre la crête, déployés en tirailleurs. Nous atteignons la crête ; le mouvement a duré assez longtemps.

Tout à coup nous recevons des coups de fusil devant nous et bientôt après également derrière. Moment de stupeur ; nous nous aplatissons le plus possible entre les routes d’un champ de pommes de terre. C’est le 243ième qui de l’autre crête nous canarde par méprise.

Heureusement que cela ne dure pas longtemps car rien ne démoralise plus une troupe de que se savoir canardés par les camarades. Notre mouvement continue ; on a un joli coup d’œil. À droite et à gauche, soutenus par un feu de mousqueterie intense, les diverses compagnies avancent, par bonds, comme à l’exercice. Nous avançons toujours. la nuit arrive.

 

Nous ne devons pas être loin des pièces d’artillerie allemandes car à chaque départ la lueur nous éclaire vivement. La fusillade a cessé. Je ne suis plus en liaison avec le reste de la Cie ; je suis isolé avec ma ½ section.

Mon caporal CRUNELLE (d’Arenberg) part en avant car nous pensons que la Cie est plus avancée que nous.

Il revient bientôt en me disant :

« J’ai entendu le sifflet du capitaine » et il crie :

« Les s/s officiers à moi ».

 

Alors nous nous dirigeons du côté du bruit.

Mais bientôt j’entends des commandements allemands. Il y avait bien un sifflet mais pas celui de notre capitaine. Un peu surpris les hommes font ½ tour en courant à travers un champ de betteraves. On se ressaisit et je donne l’ordre de battre en retraite, escouade par escouade, l’une toujours prête à faire feu. Le mouvement s’opère très bien et bientôt nous n’entendons plus rien.

Nous arrivons sur une route ; par prudence, pour éviter des patrouilles, je me maintiens à proximité d’elle, dans les champs. La situation est embarrassante. Il peut être 10 à 11h du soir et il fait un petit clair de lune. Où sont les nôtres ?

 

Je prends le parti de suivre la route ; elle nous conduira sûrement à un village.

Bientôt nous entendons un bruit de voix ; prudemment un homme avance. Joie, on parle français. Nous nous avançons après nous être fait reconnaître. C’est notre Cie. Nous bivouaquons sur place à l’entrée du village et nous prenons le service des avant-postes.

La nuit est froide ; à la hâte nous grignotons un bout de pain. Pas d’incident ; seul roulement de voitures dans le lointain.

 

 

 

Positions de la 101e brigade (327e et 248e régiments d’infanterie) le 29 août 1914 au soir.

Franqueville et Saint-Pierre-lès-Franqueville. Carte actuelle

30 août 1914

La fusillade reprend au petit jour.

Nous sommes en position derrière un talus ; les boches ont dû avancer pendant la nuit. Les balles sifflent au-dessus de nous sans pouvoir se rendre compte d’où elles partent. J’examine à la lunette les bottes de blé qui sont à 500m de nous. Est-ce une hallucination ?

Je crois les voir se déplacer. J’en rends compte au capitaine.

Le soleil est de plomb. Le clairon DROPESIT part au village. Le 5e bataillon y est. Les habitants donnent leur vin. Mon clairon revient avec une ½ douzaine de bouteilles de bon petit picolo. Distribution à la ½ section.

La 21e Cie se déploie à notre gauche. Le capitaine tombe mortellement frappé (*). À note droite sur l’autre crête, la 102e brigade se fait arroser copieusement d’obus.

 

Vers midi, l’ordre arrive de se replier.

Nous redescendons dans le village. Malgré la bataille mon bataillon fait le café dans un verger pendant que les obus sifflent sans discontinuer au-dessus de nous. Bientôt l’ordre de battre en retraite arrive. Le 243e protège notre marche. La route est encaissée ; nous ne recevons rien ; notre mouvement n’a pas dû être éventé par l’ennemi. Les hommes sont fatigués car il fait encore bien chaud.

L’adjt Eugène PATTOU (**) de la 21e arrête un civil sur les indications d’un habitant d’un petit village que nous traversons. Cet individu le prend de haut et montre un livret militaire ; grade de caporal. On le traîne à notre suite. Certains hommes le reconnaissent ; il a déjà été arrêté à Harcigny lors de notre séjour.

 

Vers 5h, on fait la grand-halte dans une pâture à l’entrée d’un village. Les artilleurs y sont déjà.

L’espion (car s’en est un) est interrogé par un commandant d’artillerie. Habillement cuisiné, il finit enfin par avouer. Il nous suit depuis notre arrivée dans l’Aisne ; en Belgique faisait partie d’une bande qui indiquait nos positions la nuit à l’aide de signaux lumineux :

« Je vous l’abandonne » dit le commandant.

 

Au même instant, d’un coup à revers, un artilleur ouvre la gorge du bandit d’un seul coup de couteau. Il tombe inondé de sang ; ceci ne fait qu’exaspérer les hommes au souvenir de ce que nous avons enduré à cause de ce bandit.

La scène est atroce ; un fantassin lui envoie un coup de baïonnette. Les paysans avertis arrivent bientôt ; ils sont plus acharnés encore. Vite ils prennent une botte de paille ; le feu est mis et l’espion grille vif. Ils le retournent à l’aide de grands crochets en lui lançant les pires injures. La scène est affreuse ; on voit les membres qui se recroquevillent. Tout à coup une détonation. Le monstre avait caché des balles de révolver dans ses bottines ; elles éclatent sous l’action de la chaleur. Quoique scène sauvage, chacun la regarde, impassible.

Il n’a que ce qu’il mérite car bien des camarades sont tombés à cause de lui. Maintenant le cadavre est entièrement nu et noir. Vite un trou et tout disparait.

 

Au même instant un avion boche passe au-dessus de nous à faible hauteur. Accueilli par une vive fusillade, il a l’air de piquer. Quelle joie s’il pouvait tomber, on aurait fait coup double en peu de temps. Mais il continue sa route.

L’ordre du départ arrive. Nous marchons toute la nuit.

 

(*) : Le capitaine COLIN (ou COLLIN, selon la page du JMO) qui commandait la 21e Cie, a dû survivre car non trouvé dans « mémoire des Hommes » et non listé dans les pertes au JMO (nota : seul un s/s lieutenant Gustave COLIN est cité dans les pertes des officiers dans l’historique du 327e régiment d’infanterie et est mort de maladie le 30 avril 1918 à Offenburg, donc probablement en captivité).

(**) : Écrit PATOU au carnet, Eugène PATTOU de la 21e Cie passera sous-lieutenant et décèdera de suites de blessure en 1917.

31 août 1914

Nous arrivons à Chivres à 4h du matin. Nous y cantonnons, les hommes ont besoin de repos. Pas de veine, je suis de garde avec ma section et par surcroit au poste central. Pas un moment tranquille. On vient d’arrêter encore 2 hommes et 1 femme. Les notes abondent.

 

Départ à 7h du soir.

Je n’ai pu fermer l’œil un seul instant. Nous marchons toujours ; à chaque halte horaire chacun se laisse tomber là où il est.

Nous arrivons à Sissonne à minuit. On pense qu’on va se reformer au camp ; mais point, nous continuons.

1er septembre 1914

Nous traversons la voie ferrée à St-Erme. Nous marchons toujours.

Quelle fatigue, c’est dur de lutter contre le sommeil. Quelques-uns dorment en marchant. À la halte on s’endort sur les tas de pierres qui bordent la route. Enfin grand-halte de 2 heures à Guignicourt. J’ai ronflé à poings fermés sous un arbre.

Nous reprenons la marche.

 

À 6 heures du soir nous arrivons à Chenay. Nous avons abattu nos 60km depuis hier soir.

2 septembre 1914

Nous quittons Chenay.

Marche pas trop pénible. Nous cantonnons à Chamery où nous sommes très bien accueillis.

Nous nous reposons très bien.

3 septembre 1914

Partons tôt. Nous traversons Épernay à 8h du matin. Nous sommes très bien accueillis ; nous faisons justement la halte horaire dans la ville.

Nous cantonnons à Brugny.

4 septembre 1914

Nous partons dans la direction de Montmort. Il fait toujours chaud.

Nous cantonnons à Villevenard. Ma ½ section loge dans une ferme. La fermière dont le mari est mobilisé a peur de voir arriver les boches. On entend le canon.

5 septembre 1914

Nous quittons le village à minuit.

Très agréable à marcher car nous sommes sous bois et une bise nous rafraichit très agréablement.

Nous arrivons à Sézanne à 5h du matin. Aux abords de la ville, dans la vallée, de véritables campements d’émigrés sont installés. Ils viennent de passer la nuit et femmes, enfants, vieillards s’apprêtent à continuer leur route. Les petits pleurent et appellent leur mère. Triste spectacle.

Notre marche arrière continue. Il recommence à faire chaud. Nous cantonnons à Barbonne.

6 septembre 1914 - Bataille de la Marne

L’ordre de reprendre la marche en avant est arrivé (nous allons nous battre ; cela ne nous surprend pas car depuis le début nous combattons toujours le dimanche).

Nous entendons la canonnade dans le lointain. Nous retraversons Sézanne. Nous sommes en réserve ; notre marche en avant continue. Nous marchons déployés en utilisant le terrain le plus possible. Nous nous arrêtons vers 9h du soir et commençons des tranchées un peu en arrière d’une crête.

Nous couchons sur nos positions.

Sommes arrosés par 77 ; petit instant d’émoi. Le 70e en avant a eu une légère panique. (*)

 

(*) : Il s’agit, en vérité des réservistes du 70e régiment d’infanterie : le 270e régiment d’infanterie.

 

Extrait du JMO de la 56e division

Extrait du JMO de la 102e brigade – Positions des unités le 6 au soir

 

7 septembre 1914

La marche en avant continue vers l’Ouest.

Vers le matin un détachement du génie ramène une de nos patrouilles, égarée la veille au moment de la petite panique.

Pauvres malheureux, il faut un exemple. Le général a donné l’ordre de les fusiller. Scène poignante ; on leur prend leur plaque d’identité et en pleurs, remettent leur montre, porte-monnaie etc aux amis. Ils ne veulent pas mourir par les balles françaises. Tout le monde pleure. Le colonel essaie une dernière démarche auprès du général. Refus.

Alors il faut obéir.

 

De loin nous suivons la scène, glacés. Ma Cie fournit le peloton d’exécution (2e section commandée par adjt TERRASSE). Rangés au pied d’une meule les malheureux attendent. Le sabre de l’adjt s’abat ; un crépitement, tous sont tombés. L’adjt donne coup de grâce à l’un d’eux, mais écœuré il ne peut continuer ; mon camarade REITER sergent essaie de continuer car c’est la consigne (coup de fusil à bout portant dans l’oreille) mais de même que pour le premier il ne peut continuer. Il est décidé qu’on laissera les cadavres.

Parmi ces malheureux il y avait un Fresnois.

(Quelques jours plus tard, on voyait revenir un autre nommé WATERLOT. Il avait échappé aux balles en se laissant tomber au moment de la décharge. Après avoir erré quelques jours, il avait réussi à rejoindre sa Cie. Naturellement il fut gracié. Un mois plus tard, il était cité à l’ordre du jour). (*)

 

Nous marchons toute la journée ; nous bivouaquons.

 

(*) : Les 7 fusillés sont François WATERLOT, Alfred DELSARTE, Gaston DUFOUR, Gabriel CAFFIAUX, Palmyr CLÉMENT, Eugène BARBIEUX et Désiré HUBERT.

François WATERLOT est indemne, Palmyre CLÉMENT et Gaston DUFOUR sont blessés.

François WATERLOT regagne son unité le 11 septembre (21e compagnie) et est gracié. Il sera tué le 10 juin 1915 à Colincamps (80). Voir sa fiche.

Palmyr CLÉMENT meure de ses blessures à Orléans le 9 septembre 1914. Voir sa fiche.

Selon Odette HARDY-HÉMERY, (Fusillé vivant. L’histoire fabuleuse de François WATERLOT, Gallimard, 2012, page 228), le lieu de l’exécution se situerai à 300m à l’ouest de Verdey (51). Avant le remembrement de 1966, tout le secteur situé à l’ouest de Verdey s’est appelé la « contrée des fusillés ». Les corps furent inhumés provisoirement au pied d’un Orme qui n’existe plus, mais que l’on peut essayer de situer sur cette carte, avec un secteur appelé « le bas de l’Orme ».

 

 

8 septembre 1914

Nous continuons notre marche. Les nouvelles sont bonnes parait-il.

Nous passons à Lachy. Il ne reste plus que quelques murs debout ; la lutte a dû être chaude. Nous marchons vers le nord.

 

À midi, nous prenons nos intervalles (lignes de section par 4). Nous sommes en arrière d’une crête. Deux batteries d’artilleries sont devant nous. Bientôt repérés, les Boches nous envoient des 77 à profusion. Nous progressons toujours lentement. Jusque maintenant pas de pertes.

Arrivés à hauteur des batteries, nous nous apprêtons à franchir la crête d’un seul bond afin d’arriver sur l’autre versant. L’opération se fait très bien ; mais l’autre versant est copieusement battu ; nous commençons à écoper. Mon malheureux clairon DROPESIT reçoit un éclat d’obus dans le bras. Le caporal d’ordinaire a le mollet emporté (*).

Au-dessus de nous les obus de 75 sifflent sans arrêt ; les batteries font un tir rapide. Nous sommes maintenant sous bois. Le 233e qui est devant nous a été éprouvé ; nous rencontrons de nombreux cadavres. Sur un petit chemin un caporal brancardier de ce régiment a dû recevoir un obus en plein corps. Il est coupé en deux et les côtes sont décharnées. (**)

 

Nous avançons toujours ; nous rencontrons bientôt des cadavres boches ; nous sommes dans une vallée où coule un petit ruisseau.

Avidement en passant chacun y puise un quart. L’eau est plus ou moins propre mais cela rafraichit un peu.

 

Nous gagnons bientôt le petit village de Corfélix : nous y arrivons avec le 233e. On crie :

« Baïonnette au canon ».

 

Quelques Boches étaient restés dans une maison. Ils réussissent à s’enfuir.

Bientôt nous entendons pour la 1ère fois le bruit caractéristique des marmites Boches. Notre malheureux 5e bataillon qui descend la pente vers le village est copieusement arrosé. De véritables nuages de fumée noire se dégagent à chaque éclatement.

 

La nuit est venue.

Nous organisons des barricades aux issues du village et chacun cherche un petit coin pour essayer de dormir.

La nuit est calme. Au petit jour tout le monde est sur pieds.

 

(*) : Le caporal d’ordinaire doit être Belloni VANDERMEREN, seul caporal de la 22e Cie blessé ce jour.

(**) : Ce fait est rapporté dans le JMO du service de santé du 233e RI. Il s’agit d’Henri Anatole CHOQUET, seul caporal tué le 8 septembre 14 (date non précisée dans ce JMO mais confirmée au JMO du 233e RI par la blessure du colonel survenue en même temps.

Voir sa fiche.

9 septembre 1914

L’ennemi occupe la pente qui descend vers le village (Corfélix).

Un peloton de chasseurs à cheval a à peine débouché d’une issue qu’il reçoit une grêle de balles. Obligé de faire ½ tour au grand galop ; pas de casse, quelques chevaux blessés.

Bientôt nous recevons des obus ; l’un d’eux démolit la cheminée d’une cuisine où nos hommes font le café ; un peu de poussière dans jus et c’est tout.

Cependant, l’intensité du feu augmente.

je me réfugie un moment dans une cave ; de malheureuses jeunes femmes y sont déjà réunies. Elles sont 5 ou 6 c’est ce qui reste de la population. Triste scène ; elles sont démoralisées et ne demandent qu’à mourir ; il n’y a plus d’hommes ; les Boches ont emmené ceux qui restaient.

L’ordre arrive de nous mettre en marche vers le petit village de Les Culots. (Le JMO indique bien que le 6e bataillon à ordre de se porter sur Les Culots).

Notre mouvement est signalé car les obus tombent dru comme grêle.

 

Enfin nous gagnons la route et nous sommes un peu protégé par le talus.

Nous cheminons dans le fossé ; nous avons de la boue et de l’eau jusqu‘aux genoux. Nous arrivons au village sans perte. Ma section reçoit l’ordre de se déployer le long d’une haie face à un débouché de bois avec mission de faire feu dès l’apparition des Boches.

Nous demeurons couchés pendant quelques heures, le doigt sur la détente ; au-dessus de nous les obus boches et français ne cessent de passer. Toujours rien ; par malheur un cheval crevé, tout gonflé, se trouve à une dizaine de mètres. Le vent soufflant de notre côté nous envoie de ces odeurs ! Nous mettons un peu de tabac dans la bouche.

 

Vers 1 heure, nous gagnons un bois tout proche. L’ombre nous rafraichit. Dans les fossés quelques cadavres boches ; des équipements en masse.

Nous nous arrêtons bientôt ; la route est barrée par un arbre énorme abattu par les boches pendant leur marche rétrograde. Nous nous couchons à l’ombre et nous pensons à manger. Hélas nos musettes sont vides depuis hier déjà ; nos biscuits diminuent. Il m’en reste 1 que je conserve quoique ayant de bons tiraillements d’estomac. Nous n’avons pas eu de ravitaillement depuis 2 jours ; nous sommes isolés du 5e Bon. Les hommes fouillent dans les sacs boches et de temps en temps réussissent à trouver un sachet de petits biscuits ronds de la grandeur des pains d’amour, c’est un régal.

 

Vers 4h arrive le reste d’un bataillon du 243e avec le commandant LAPOINTE ancien commandant de la place de Condé. Beaucoup de nos hommes sont heureux de le revoir.

Nous apprenons que la situation est bonne et que la division marocaine à notre droite a fait des prodiges.

Pendant tout ce temps au-dessus des arbres, le sifflement des obus est ininterrompu.

 

Vers le soir, le commandant donne l’ordre de regagner le petit village où nous avons pris position le matin.

Je dois former la patrouille de reconnaissance car nous ignorons qui occupe le village. Au débouché du bois nous prenons nos intervalles et avançons prudemment. Tout à coup j’aperçois un pantalon rouge.

Alors nous avançons résolument ; c’est un régiment d’active qui est arrivé depuis quelques heures ; il devait nous relever le matin. Le commandant arrive bientôt ; sur les pentes de l’autre versant nous apercevons des colonnes boches qui se replient poursuivies par nos obus. Nous sommes heureux.

J’avise une maison à moitié démolie ; les pauvres gens sont dans la seule pièce épargnée. Je demande quelque chose à manger ; sur le poêle un bouillon de poule mijote. On m’en offre un bol ; quoique bouillant je l’avale avidement, puis un second. Je suis ragaillardi ; deux hommes qui sont avec moi ont aussi cette heureuse aubaine.

La nuit est presque venue. Le bataillon est reformé et nous revenons en arrière à la recherche de l’autre bataillon.

Nous traversons quelques villages, le commandant se renseigne.

 

Enfin vers 10h du soir, nous parvenons à rejoindre le 5e bataillon qui lui-même part pour destination inconnue. Le fourgon de pain qui nous cherche depuis 2 jours arrive bientôt, aussitôt les boules distribuées chacun y mord à pleines dents ; c’est un régal. Nous bivouaquons.

10 septembre 1914

Très tôt nous nous remettons en marche. C’est la poursuite.

Nous traversons le bois de Talus ; partout des cadavres français et allemands les uns à côté des autres et déjà tout noirs.

Remarqué particulièrement toute une ½ section de chez nous, tombés et alignés comme à l’exercice. Le sergent à la gauche et sur sa main déjà noircie, bien en vue, brillait son anneau de mariage (j’ai toujours eu ce spectacle devant les yeux car je pensais à mon anneau que j’avais laissé à Marguerite avant mon départ).

Les routes sont défoncées par les trous de nos 75 ; les cadavres boches deviennent de plus en plus nombreux. Les villages sont complètement pillés ; l’aspect des maisons est lamentable ; tout ce qu’ils n’ont pu emporter jonche le sol. On nous défend de prendre de l’eau dans les puits car quelques-uns ont été empoisonnés.

Nous repassons à Villevenard ; revu la femme chez qui nous avons logé à notre passage. Les Allemands lui ont pris le seul cheval qui lui restait ainsi que ce qu’elle avait chez elle, mais n’ont rien fait aux habitants.

Nous marchons toujours ; partout même spectacle ; des cadavres boches et français.

Enfin à minuit nous bivouaquons ; nous faisons la soupe. Cela nous réconforte.

11 septembre 1914

Nous nous remettons en route au petit jour. Le vent souffle et le temps est froid et humide.

Nous rencontrons quelques petits villages formés de grandes fermes. Il n’en reste plus que des ruines fumantes ; les boches ont pris toutes les volailles et toute la route est couverte de plumes.

Nous passons à Coligny, 6 prisonniers faits par le régiment sont employés à creuser les fosses pour enterrer les cadavres français. Ils n’ont pas l’air d’être mécontents de leur sort.

 

Nous marchons toujours. Nous suivons les Boches de 15 à 18h d’intervalle. Nous passons à Bergères (-les-Vertus) : 200 blessés allemands sont encore dans l’église transformée en ambulance.

À la sortie du village nous traversons un véritable charnier. Dans un rayon de 50m, nous comptons 49 cadavres de chevaux ; un de nos avions a réussi ce coup heureux ; une bombe est tombée juste dans un parc boche ; quelques fourgons ont été démolis également. L’odeur qui se dégage de cet endroit est épouvantable. Ceux qui ont pu avoir une gousse d’ail la mettent dans la bouche.

De mon côté, j’ai conservé précieusement un petit cigare belge que je mets à la bouche lorsque les odeurs sont trop fortes. Je le mets toujours de côté car depuis plusieurs jours nous n’avons plus de tabac. Ici les à-côtés de la route sont jonchés de bouteilles à champagne ; dans leur retraite les Boches pillent toutes les caves mais respectent les habitants. Les vignobles n’ont pas souffert, sauf les quelques mètres qui se trouvent en bordure de la route.

 

Nous traversons bientôt la petite ville de Vertus ; j’avise à trouver par miracle une bouteille de vin de champagne ; les habitants ne me font payer que 2frs. Avec un camarade nous la dégustons à la 1ère halte.

Cela nous remet un peu car depuis plusieurs jours nous ne mangeons presque pas et pour toute boisson de l’eau  et encore pas de première qualité. Nous maigrissons ; depuis longtemps on ne peut plus se faire raser car le perruquier de la Cnie n’a plus d’instruments, tout le monde est poilu. On ne peut pas toujours se laver et la poussière est collée sur les visages ruisselant de sueur. Nous sommes méconnaissables.

Aujourd’hui est rentré à la 21ième, le fusillé échappé par miracle à l’exécution du 6 septembre.

Nous cantonnons à Avize.

 

Nous avons reçu cet après-midi une fameuse pluie d’orage sur le dos. Nous sommes trempés jusqu’aux os. Nous n’avons pu continuer notre marche car la canonnade a repris avec ardeur devant nous.

Avize chef-lieu de canton ; belle petite ville, riche de la Champagne. Les habitants sont très aimables, heureux de revoir les Français. Ils nous donnent beaucoup de détails ; lors de leur arrivée les Boches défilaient dans les villes, musique en tête et ne cessant de répéter «  Nach Paris » Mais hier, ils dégringolaient au triple galop les pentes assez raides du pays, sans tambour ni trompettes.

Pendant leur séjour ils n’ont fait que boire du vin. Ils en étaient malades comme des chiens. N’ont rien fait aux habitants.

 

Fait une bonne nuit sur un matelas offert par les gens de la maison ; cela semble bon de pouvoir se déshabiller un peu. Je n’avais enlevé mes bottines depuis 15 jours.

Nous quittons Avize à 8h du matin. Avant de partir j’envoie une carte postale à Marguerite. Arrivera-t-elle jamais ?

 

Nous traversons les vignobles immenses de L Chandon. Nous repassons à Pierry nous dirigeant vers Épernay. Un habitant me raconte que les Allemands on fait sauter le pont d’Épernay hier matin à 9h. Mais les dégâts n’ont pas été importants ; le génie a vite rétabli le passage et dès hier soir les nôtres étaient sur la rive droite de la Marne.

Nous traversons Épernay à 1 h de l’après-midi. La joie se lit sur la figure des habitants ; les Boches sont restés 8 jours dans la ville. Nous croyions trouver du tabac, mais tous les débits ont été pillés ; toutes les caves ont été mises en coupe réglée. Le champagne a coulé à flot nous disent les habitants. Les monuments de la ville sont intacts.

Nous traversons la Marne près de la gare. Une arche seule du pont a été démolie ; en effet le passage est rétabli depuis longtemps. Le pont du canal est plus endommagé ; nous le traversons sur un pont de bateaux. Nous nous dirigeons vers Reims ; la canonnade s’entend toujours au loin ? Nos artilleurs talonnent l’arrière garde ennemie. Nous marchons toujours.

Nous sommes maintenant dans la forêt de la montagne de Reims. La pluie tombe depuis 2h de l’après-midi.

Enfin nous arrivons à Germaine petit village, au milieu de forêts. Nous nous installons et cherchons à faire à manger er sécher un peu nos vêtements. Avec quelques camarades.

Nous nous installons dans une maison abandonnée. Les portes ont été enfoncées par les Boches.

À notre grande surprise nous trouvons à la cuisine le feu tout prêt, une poule prête à être mise au pot et la marmite toute prête avec les légumes. Dans leur retraite précipitée un boche avait même oublié son couteau sur la table.

Nous nous promettions de faire un bon repas à la santé des soldats de Guillaume lorsque l’ordre du départ arrive.

 

Il fait nuit noire, la pluie redouble d’intensité. Nous atteignons la route nationale ; nous sommes à chaque instant doublés par des convois d’artillerie. Obligés de marcher sur les côtés, nous nous enfonçons dans les ornières. La marche est pénible ; et la pluie ne cesse pas un seul instant.

Enfin à 1h du matin, nous arrivons à Villers-Allerand. Nous sommes les derniers arrivés, pas de place. L’église est bondée de soldats ; les cierges allumés tous changent de linge. N’ayant pu trouver de place on me dirige avec ma section vers un château. Là aussi toutes les places sont  prises ; il ne reste qu’une écurie.

La pluie ayant un peu diminué nous allumons un grand feu dans la cour afin de nous sécher un peu. Le linge du sac est lui-même mouillé.

Enfin à bout, chacun cherche un coin dans l’écurie et sur le crottin on dort d’un sommeil profond. Mais il fait froid.

13 dimanche

Nous partons très tôt.

Bientôt nous sommes en vue de Reims. La canonnade fait rage depuis ce matin. Nous arrivons au pied du fort de Montbré vers 9h du matin. Le soleil se montre et nos vêtements sèchent. Nous restons en position toute la journée.

La nuit nous faisons des tranchées sur l’autre versant du fort. De nombreux incendies éclairent l’horizon.

À minuit, le 310ième passe près de nous. Il va essayer de gagner Taissy (proposé pour sous-lieutenant ce jour).

 

Nous occupons les tranchées dès le petit jour. La canonnade est très vive. On attaque Taissy et St Léonard. Un régiment d’artillerie en batterie derrière un bois, devant nous ne cesse de tirer sans recevoir un seul obus. Par contre le malheureux village dans le fond est sérieusement marmité.

De nombreux incendies sont encore occasionnés par le bombardement. Nous bivouaquons.

 

Nous partons à 2 ½ du matin. Nous traversons Cormontreuil et arrivons aux portes de Reims. Nous sommes en réserve derrière un mur d’usine le long du canal. Nous en profitons pour laver notre linge tant bien que mal dans le canal. La canonnade continue. Les Boches sont installés dans les forts situés sur l’autre versant de la montagne de Reims  et résistent avec fermeté. Nous avançons un peu vers le soir et cantonnons place Dieu Lumière.

Vu l’enterrement de 3 civils et d’un petit enfant tués par les obus. Les fenêtres n’ont plus de vitres ; le quartier est bombardé par les Boches.

16

Nous sommes en réserve ; nous en profitons pour nous rafraichir un peu la figure. Je me fais raser pour la 1ère fois depuis notre départ d’Harcigny. Le coiffeur civil continue son métier au milieu des éclatements d’obus.

 

À 3h du soir, ma Cnie reçoit l’ordre de se porter en avant comme soutien d’artillerie. Nous traversons la ville et arrivons bientôt près de la maison Pommery. Un groupe d’artillerie de notre division est en batterie entre les pavillons du quartier. Mais les pièces sont abandonnées car les batteries sont repérées et les obusiers allemands ne cessent d’envoyer leurs projectiles.

Autour de nous, sur le boulevard, c’est une vraie pluie d’éclats ; nous sommes tous aplatis contre un mur de jardin (on a dit que des téléphones, installés dans certaines caves, indiquaient nos positions de batterie).

Plusieurs coquets pavillons sont la proie des flammes. Je reçois l’ordre de me rendre au Château Pommery avec quelques hommes et veiller à ce qu’aucune lumière ne soit allumée. Dans les celliers et dans les caves  est réfugiée toute la population du quartier ; il y a là des centaines de femmes et d’enfants.

 

La nuit venue, nous regagnons notre cantonnement place Dieu Lumière.

Nous demeurons toute la journée au cantonnement. Le bombardement de la ville continue toute la journée.

 

Nous partons à 2h du matin, relever le 5ième Bon qui occupe les tranchées le long de la voie ferrée. Ce sont plutôt des trous de tirailleurs que des tranchées ; nous les aménageons le mieux possible. Pendant toute la journée les Boches ne cessent de bombarder la ville, principalement les casernes qui se trouvent à environ 1km de nous. Vers 3h du soir un incendie s’allume près de la cathédrale ; C’est le séminaire qui flambe. Nous ne recevons que quelques 77 de temps en temps ; pas de casse. A la jumelle j’observe des mouvements de troupes allemandes à environ 3 km de nous.

 

À 10h du soir, nous sommes relevés par le 348ième. Le régiment se rassemble à Reims et nous nous mettons en marche.

La pluie tombe ; après une marche fatigante, trempés nous arrivons au village de St Euphraise à 3h du matin.

 

Nota : Le 16 à 20 heures, le régiment reçoit un renfort de 600 hommes, l’effectif est porté à 2079 hommes et 27 officiers.

19

Nous nous sommes à peine reposés quelques heures que nous nous remettons  en route.

La marche est pénible car les routes sont détrempées ; les hommes sont fatigués. Nous restons en position de combat à la lisière d’un bois à 3km environ du cantonnement.

Le soir nous regagnons le village.

20 dimanche

Nous nous rassemblons au même endroit qu’hier. Nous faisons le café sur le terrain ; Il pleut. Nous sommes détachés ensuite au haut de la crête, face à Reims. Nous organisons les talus de route en tranchées. La canonnade semble s’éloigner.

Nous assistons de loin à l’incendie de la cathédrale de Reims ; seules les 2 tours émergent dans le nuage de fumées. Sur la route les habitants fuient la ville  emportant ce qu’ils ont de plus précieux. Tout le versant de la montagne de Reims s’organise en tranchées.

Le soir nous rentrons au cantonnement.

21

Nous sommes au repos.

Vu des Vieux-Condéens (*), Léon LANNOY, Georges DUR, DELPLANQUES etc. Beaucoup sont arrivés le 16 à Reims avec le 1er renfort. Nous quittons le village à 3h du soir direction Reims. Nous arrivons à Courcelles-St Brice à 7h du soir.

Vu le cantinier DRAUX du 136.

 

(*) : Vieux-Condéens : Habitant de Vieux-Condé (59), commune de naissance d’Émile SIVIARD.

22

J’ai eu l’heureuse chance de faire une bonne nuit dans un lit. Repos jusque 11h du matin.

Les hommes cherchent du pain blanc ; les quelques boulangeries sont prises d’assaut. À peine le pain est-il sorti du four qu’il est ramassé.

 

À 11h sac au dos ; nous allons aux tranchées à environ 3 km du village. Nous organisons déjà un mur de clôture.

Puis nous revenons au cantonnement d’alerte à la ferme ou château des Marais. C’est un immense bâtiment en fer à cheval ; tout le bataillon y est logé facilement. Dans une aile il y a une belle chapelle.

La canonnade est vive ; les marmites allemandes tombent à 1km. Nos mouvements ne sont pas vus car la ferme est entourée de bois face à l’ennemi. Derrière ce sont des marécages.

23

Nous partons le matin relever les 2 Cnies qui sont aux tranchées (sortie nord du parc) depuis hier. Nous sommes face au fort de Brimont occupé par les allemands.

À notre droite Reims, dont on voit les 2 tours de la cathédrale nous n’en sommes qu’à 3km environ. La canonnade est vive car le 3ièmecorps attaque depuis ce matin.

24

La nuit a été froide : on a dormi un peu mais les pieds sont gelés.

Vers le matin une gelée blanche s’est abattue sur le sol et a achevé de nous glacer. Le soleil heureusement a vite fait de se montrer et nous réchauffe.

La canonnade est vive à l’est de Reims. Une batterie de 120 long vient de se mettre en position derrière nous. Nous évacuons provisoirement notre tranchée car nous sommes trop près des pièces. Bientôt le feu est déclenché. On voit les pièces se soulever à chaque départ. Elles tirent à 12km sur un objectif situé de l’autre cote de la montagne de Reims.

25

Nous revenons aux tranchées à midi relever les autres compagnies.

Reçu une carte datée du 20 août, de Ferrière-la-Grande de mon cousin Édouard PUREUR.

Nous regagnons le soir notre cantonnement de Courcelles-St Brice. Je retrouve la même maison et également le bon lit.

La canonnade et la fusillade font rage toute la nuit.

26

La fusillade continue. Ma section est de garde de police.

Temps superbe. Reçu une lettre de marguerite datée du 19 août et une autre du 8 sept. Je suis heureux car ce sont les premières nouvelles depuis mon départ de Valenciennes.

Vu le fils de Mr SOCLIER, Edgar à la 2ième section. La journée se passe sans incident.

A la nuit la fusillade et la canonnade reprennent de plus belle.

 

À 2h du matin : Alerte. Mon bataillon prend position à la sortie du village. Partout on ne voit que des éclatements d’obus dont les éclairs ressemblent à un grand feu d’artifice.

27 Dimanche

Nous sommes relevés de garde à 7h du matin. Repos la matinée.

On se prépare à partir j’ai déjà fit mes adieux au patron de la maison Mr ELHÜNGER.

Contrordre nous restons au cantonnement ; J’en profite pour me reposer. Longtemps j’ai fait pareille nuit : de 7h du soir à 5h du matin.

28

Nous faisons l’exercice dans le parc du Château.

À midi nous relevons aux tranchées les Cies du 5ime bataillon, sur la crête de St Thierry en avant de la ferme des Marais. Il n’y a pas de boyaux, nous arrivons en colonne par 4. La tranchée est trop petite pour la section : des hommes restent dehors.

Malheureusement pour nous tout ceci n’a pas échappé aux observateurs boches qui du fort de Brimont ont des vues  partout. Nous sommes à peine installés qu’une marmite éclate en avant de notre tranchée. Bientôt une 2ième puis c’est un bombardement intense pendant 20 minutes environ qui nous paraissent des siècles. La tranchée est bien repérée, en avant, en arrière les marmites pleuvent, les nuages de fumée noire passent au-dessus de nous. Aplatis les uns sur les autres nous nous attendons à être  écrasés d’un moment à l’autre. À chaque éclatement la terre de la tranchée tombe sur nous.

Enfin cela cesse ; nous n’avons pas de casse. Le plus près obus est tombé à 2m de la tranchée en faisant un trou de 1m50 de diamètre et à 0m80 de profondeur.

Les hommes qui se trouvaient à cet endroit ont été recouverts de terre sans une égratignure. Malheureusement, les artilleurs, en batterie derrière la crête ont écopé : tous les coups longs étaient pour eux et il y a eu quelques morts. Le cheval de notre capitaine a été blessé mortellement.

 

La nuit venue nous évacuons la tranchée et nous nous portons en avant, sur une route dont le talus a été organisé. Nous sommes soutien d’une batterie d’artillerie en position à environ 150m derrière nous. La fusillade fait encore rage toute la nuit en avant de nous. Quelques balles perdues sifflent au-dessus de nos têtes. Nous avons un poste de chez nous qui doit mettre le feu à une meule au cas où les Boches avanceraient.

Nous restons au même endroit. La journée est beaucoup plus calme. Seuls les canons ne se taisent pas. Le château et le parc St Thierry, environ 600m à notre gauche et derrière nous est copieusement marmité. Malgré cela nos batteries ne cessent de répondre.

Reçu 2 lettres de Macou : l’une du 20 août et l’autre du 3 sept. : Elles me font grand plaisir.

Le soir nous regagnons la ferme des Marais. Nous sommes restés 30h dans la tranchée.

 

Réveil à 3h1/2.

À  4 h nous retournons aux tranchées le long du talus du chemin de fer C.B.R. (*) Les Boches bombardent sérieusement le faubourg de Laon de Reims.

 

Vers le soir, un incendie éclate à cet endroit. Des détonations s’entendent ; c’est le parc d’artillerie qui brûle. Nous nous expliquons pourquoi les Allemands ont mis tant d’acharnement à bombarder cet endroit. Seulement ils ne réussissent pas trop car ce sont des munitions d’exercices chargées à blanc.

La nuit est froide, calme. On bat la semelle. Il gèle au petit jour.

 

(*) : La CBR était la compagnie des Chemins de fer de la Banlieue de Reims qui reliait Reims, Épernay et la région environnante avant de s’étendre jusqu’à Soissons, Châlons, Rethel …

1er octobre-Jeudi

Nous sommes relevés à 4 h ½ du matin par le 5ième Bon. Nous regagnons le même cantonnement à Courcelles.

Travaux de propreté et revue du cantonnement par le commandant. Reçu une lettre de Marguerite datée du 18 sept. ; J’essaie de lui faire parvenir de mes nouvelles par Lille.

2

Nous faisons un peu  d’exercice.

Journée calme et de tout repos. J’en profite pour faire une nuit excellente (6h1/2  soir à 6h matin)

3

Journée de repos.

Quelques petits exercices le matin. Travaux de couture le soir.

 

Nota : Émile SIVIARD a eu un fils Jean durant cette période né le 03/10/1914 à Anzin et malheureusement décédé le 07/11/1914.

4  dimanche

Réveil à 3h du matin ; nous allons relever le 5ième Bon aux tranchées de la ferme Baslieux à 1km de la ferme des Marais. La température est très douce.

Nuit très calme. Passé la nuit dans le gourbi du chef de section que je remplace.

Lundi 5

Nous sommes relevés à 4h1/2 du matin.

Nous retournons à la ferme Baslieux où nous sommes au repos toute la journée.

Pendant l’après-midi nous apprenons que l’ordre est arrivé d’aller relever le 243ième à la verrerie de La Neuvillette.

Nous regagnons Courcelles à 5h du matin. J’ai la chance de retrouver toujours le cantonnement chez Mr ELHUIGER.

Repos toute la journée. Nous faisons un peu d’exercice dans les terrains vagues à la sortie du village.

 

Le soir repos au cantonnement.

Réveil à 1h du matin. Nous allons relever le 5ième Bon à la verrerie de La Neuvillette. Avec ma section j’occupe une tranchée sur la rive droite du canal à 800m des Boches. J’ai relevé une section de la 17 Cie (Capitaine DATH).

La journée est calme. Mais la nuit est plus agitée ; coups de canon et de fusil par intermittence. Quelques rencontres de patrouilles. Devant notre tranchée, réseau de fil de fer barbelé.

Il fait un clair de lune superbe ce qui nous permet de manger la soupe, (un peu froide) à 10h du soir.

L’ordinaire a été amélioré : chocolat, eau de vie dans le café.

De temps à autre il nous arrive des odeurs de cadavres ; elles proviennent des quelques cadavres de patrouilleurs du 243ième tombés en avant de la tranchée.

 

La nuit est calme et froide. Chacun est à son poste, préparé à toute éventualité.

9

Nous sommes relevés à 5h du matin par une autre section de la Cnie. Nous sommes en réserve à la verrerie.

Cette usine a été bouleversée complètement par les obus ; le bombardement dure depuis 15 jours. Quelques habitations ouvrières qui entourent l’usine ont beaucoup souffert également ; on aperçoit les meubles déchiquetés à travers les fenêtres éventrées ; Néanmoins il y a encore des habitants dans  les pavillons épargnés par les obus. En cas de danger, tout le monde se met dans les caves.

La journée est calme ; le soleil chauffe.

À notre droite se trouve Bétheny. Nos tranchées le long du canal se trouvent aux Cavaliers de Courcy.

Nous retournons à notre cantonnement de Courcelles. Repos toute la journée.

 

Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : nord reims2 - Copie

 

Carte du secteur de la 10e brigade d’infanterie du mois d’octobre 1914

On peut y situer la verrerie de La Neuvillette, les fermes Baslieux et du Marais, et les Cavaliers de Courcy. Vue actuelle.

 

 

À 10h du soir alerte.

Les Allemands attaquent à La Neuvillette. Nous sommes prêts er attendons l’ordre de départ. L’attaque a échoué ; nous nous recouchons.

11 dimanche

Repos toute la journée.

Vers 1h de l’après-midi, les boches envoient une série de marmites dans le voisinage du pont qui se trouve à 150m environ de notre cantonnement. Les artilleurs campés le long du canal ont eu de la casse. (je crois que le margi Charles DELOFFRE, fils du mtre garde (?) d’Arenberg a été tué ce jour) (*)

Le calme renait bientôt car les fourgons (objectifs des Boches) sont partis au triple galop.

 

(*) : C’est exact. Charles Nicolas DELOFFRE, maréchal-des-Logis au 41e régiment d’artillerie de campagne a été tué à cet endroit le 11 octobre 1914. Voir sa fiche.

 

Lundi 12

Départ à 3h du matin pour les tranchées de La Neuvillette. Nous occupons la tranchée avancée qui commence au chemin de halage : Ce pont occupé par les Boches est à 400m. Il n’est pas prudent de montrer la tête car les balles sifflent aussitôt.

La nuit est calme mais froide. L’odeur des cadavres est de plus en plus épouvantable.

13

Nous sommes relevés et retournons à la verrerie.

Le soir le 320ième fait une attaque sur le pont. Cela ne marche pas.

Nous sommes en armes toute la nuit.

14

Nous retournons aux 2ièmes tranchées.

À 4h du soir, l’ordre nous arrive de nous porter à la tranchée avancée que l’on a prolongée dans les champs la nuit dernière.

Bientôt le 320ième arrive, et sous le feu des mitrailleuses du pont, occupe l’extrémité de la tranchée.

Bientôt nos 75 battent le terrain devant nous, les obus rasent nos têtes et éclatent dans le voisinage du pont. Bien posés, nous appuyons l’artillerie par des feux de salve à 400, 500 et 700m sur des groupes de Boches qui regagnent la partie boisée des Cavaliers. Les hommes sont heureux et tirent comme au champ de tir.

Une mitrailleuse à la gauche du pont tire toujours et rate notre parapet. L’artillerie est prévenue.

Tout à coup nous avons la joie de voir éclater un de nos 75 percutant juste dans le créneau où nous apercevions les petites flammes des départs. Bientôt un immense panache de fumée noire ; la mitrailleuse boche est éteinte. Un bon point aux artilleurs.

 

La nuit approche.

L’ordre arrive de nous porter en avant.

Aussitôt par bonds de 25 à 30m nous partons vers le front. La fusillade est presque finie, nous nous arrêtons à proximité du pont dans un champ de betteraves. La nuit est venue ; chacun fait son trou. N’ayant pas d’outils je creuse un trou tant avec mon petit canif qu’avec mes ongles.

Enfin j’arrive à me protéger la tête ; il est temps car les Boches se sont ressaisis et au hasard la fusillade reprend. Pour éviter toute surprise le chef de section donne l’ordre de resserrer les intervalles  et de creuser un élément de tranchées.

 

Titre : Croquis du carnet d’Émile SIVIARD du 327e régiment d’infanterie - Description : Croquis du carnet d’Émile SIVIARD du 327e régiment d’infanterie

 

Croquis n° 1 du carnet d’Émile SIVIARD du 327e régiment d’infanterie.

 

En rampant l’ordre s’exécute et nous appuyons à gauche vers le cavalier. Aussitôt chacun se met fiévreusement au travail car les balles sifflent toujours. J’occupe l’extrémité sud avec ma ½ section. Le travail avance péniblement car les outils portatifs sont trop légers et le terrain est dur. Il pleut et nous sommes en sueur.

Les Boches ne cessent de nous envoyer des fusées éclairantes accompagnées de salves.

Le 320 qui devait se trouver à notre droite est disparu ; nous envoyions une patrouille à sa recherche.

Bientôt notre tranchée a 0m40 de profondeur et avec le parapet nous sommes assez abrités. Nous avons soif et plus d’eau dans les bidons. Nous suçons les feuilles de betteraves humides ; les feuilles ont l’odeur des cadavres qui ne sont pas loin de nous.

 

À 1h du matin, le travail cesse ; la pluie et la terre ont encrassé nos culasses ; nos fusils ne fonctionnent plus et nous ne sommes plus que ma section. Bientôt cependant une section ½ du 320 vient à notre droite.

 

À 3h du matin, l’ordre vient de nous reporter en arrière à notre tranchée de départ.

À regret nous abandonnons notre élément de tranchée que nous avons eu tant de peine à établir. Cette situation est créée par le 320 qui est revenu en arrière sans ordre, nous laissant seuls en avant (2 sections de la 22ième).

 

Au petit jour, le 320 se reforme et revient en avant on ne lui pardonne pas sa manœuvre d’hier soir.

Appuyé par nos 75 il reprend la marche en avant et nous occupons le pont que les Boches viennent d’évacuer.

À notre tour nous appuyons le mouvement du 320 ième. L’artillerie boche nous arrose ; nous nous abritons dans de vieux abris boches ; cela sent le moisi.

Toutefois le 320 a dépassé le pont et continue son mouvement.

Au pont nous trouvons des équipements et munitions en quantité que l’on jette dans le canal.

 

À midi ordre est donné à ma Cnie de regagner la verrerie ; nous sommes poursuivis par les shrapnells boches. Les hommes courent.

Près du pont, dans le chemin de halage le capitaine se heurte dans un fil de fer au ras du sol. Aussitôt explosion violente. C’est une mine que le capitaine vient de faire sauter inopinément. Beaucoup de bruit et pas de mal.

Nous nous reformons à la verrerie et vers 3h nous rentrons à Courcelles où nous nous reposons.

Repos.

 

Nous avons les membres engourdis tant par le travail d’hier que par le froid du terrain. Nous sommes relevés par une autre division (Mr Elhuîger arrêté depuis 8 jours n’est pas rentré. Ayant reçu l’ordre comme chef de cantonnement de faire une perquisition j’ai découvert 4 fusils allemands dans les niches à lapins. Dans le salon des cartouchières remplies de cartouches. Au grenier des kilos de potage condensé. Il a prétendu que c’était du butin ramassé par lui-même sur le champ de bataille.

Les fouilles exécutées dans le jardin n’ont rien donné.

Est-il coupable ? Je n’en sais rien. La femme est désorientée avec ses 7 enfants.)

Nous couchons notre dernière nuit à Courcelles.

17

Départ à 8h.

Nous nous dirigeons à Gueux puis nous revenons vers Reims que nous traversons à 1h.

Nous rencontrons un bataillon de tirailleurs sénégalais. Ils ont la marche dandinante. Nous faisons la soupe dans les maisons.

 

À 6h1/2 du soir, nous passons place Dieu-Lumière, prenons la route de Chalons. Nous occupons les tranchées en avant de la voie ferrée. La nuit est calme ; nous couchons dans des abris car nous sommes en réserve.

18

Journée calme.

Nous avons à notre droite le village de St Léonard, en ruines. Nous sommes à la Butte de tir.

 

À 7h ½ du soir nous sommes relevés par le 5ième Bon.

Nous retournons à Reims ou nous cantonnons dans les grands halls de la maison Goulet Turpin. Nous couchons sur des paillasses, pas très propres ; enfin cela vaut mieux que rien. (Reçu ce jour ma citation à l’ordre du jour pour combat du 14)

 

(*) : Il obtient la croix de guerre, étoile de bronze, par sa citation du 17/10/1914 :

« S’est particulièrement distingué au combat du 14 au 15/10 pour son activité, son sang-froid, sa belle conduite au feu ».

19

Repos.

Nettoyage des armes et des effets. Nous retournons aux tranchées à 6h du soir.

Nuit calme et froide. Quelques rares coups de fusil.

20

Nos tranchées font face au village de Cernay occupé par les Boches.

À 7h du soir nous sommes relevés et retournons à notre cantonnement à Reims.

21

Repos.

Profite de cette occasion pour prendre un bon bain, chez les Petites Sœurs Rue des Barbâtres. Quelques obus boches sont tombés sur l’établissement ; l’un d’eux crevant la voute de la cave a tué 4 sœurs et blessé grièvement 5 autres.

Nous retournons aux tranchées de la Butte de Tir à 7h du soir.

22

Nous travaillons jour et nuit au creusement des tranchées.

Le soir nous sommes relevés par le 233ième. Nous retournons à Reims ou nous mangeons la soupe puis nous nous mettons en route.

À 11h nous arrivons au village de 3 Puits ou nous cantonnons.

23

Repos au village.

Le soir je pars en patrouille vers le fort Montbré où l’on aperçoit depuis longtemps déjà des signaux lumineux.

Rien

24

Nous quittons le village à 7h, nous arrivons à Champfleury.

Repos toute la journée

25 dimanche

Repos.

Profite de l’occasion pour assister à la messe dans la petite église du village. Nous faisons de nombreuses parties de manille

26

Exercice le matin.

Nous quittons Champfleury et cantonnons à Cormontreuil (banlieue de Reims).

27

Repos.

Nous faisons une partie de canotage dans la propriété du maire du village qui a tout abandonné dès le début des hostilités.

Nous partons aux tranchées le soir.

28

Nous sommes en réserve au moulin.

En avant de nous, nous voyions le collège des athlètes si bien aménagé ; Malheureusement les Boches y ont laissé des traces de leur passage.

Actuellement ils le bombardent par intermittence.

29

Nous montons aux tranchées de 1ère ligne le soir.

Le long du canal, nombreuses tombes. Les cadavres enterrés peu profondément dégagent une odeur épouvantable. Nuit calme.

30

Ma section est relevée à 2h du soir. Nous retournons à Cormontreuil ou nous prenons la garde de police.

Nuit calme. On parle de départ.

31

Reçu la 1ère lettre de mon cousin Émile PUREUR.

Il m’annonce son départ pour le front, incorporé au 278ième Infrie. Nous retournons aux tranchées. Nuit froide.

1 novbre dimanche  Jour de la Toussaint.

Les hommes, en réserve, dressent des couronnes de verdure pour garnir les tombes des malheureux camarades qui dorment de leur dernier sommeil à coté de nous spectacle très touchant.

2

Nous sommes au repos à Cormontreuil.

Présenté au colonel pour proposition de sous lieutt.

Nous retournons aux tranchées le soir.

À 11h1/2 Alerte. Une compagnie de 1ère ligne signale attaque boche. Nous garnissons aussitôt les tranchées de soutien. Rien ne se passe ; les renseignements sont faux.

Après 2h d’attente fiévreuse, nous retournons dans nos gourbis le long du talus de la voie ferrée.

3

Toujours en réserve.

Nous sommes relevés le soir par le 233ième. Nous retournons à Champfleury.

4

Repos.

Je dois me présenter l’après-midi au général de brigade à Cormontreuil pour nomination

Vu Louis DELPLANQUE ; il me dit que ma belle-mère est à Lille. Suis inquiet et n’y comprends rien.

5-6

Exercices dans les environs du village et repos et travaux de propreté

La véritable vie de tranchée commence très monotone. Tantôt nous sommes aux tranchées au canal, ou au chemin de fer

14-15

En 1ère ligne en avant de la route de Chalons. Nous allons au repos à Champfleury.

Le secteur est très calme.

15

Je suis désigné par le commandant pour former équipe de mineurs, employée au creusement du tunnel sous le remblai de la voie ferrée.

Ce travail commencé par le 233ièmea été repris par le 5ième bataillon (sergent DENÉCHAUX).

J’alterne avec  ce dernier. Ce passage à 2m80 de large et 2m50 de haut. Il est destiné à supprimer le passage en dessous facilement repérable et permettre aux réserves d’arriver en 1ière ligne. Commencé au ras du sol en A, nous arrivons à débouché en B, le sol naturel aux billes et masqué par la ferme un boyau de 1m80 aboutit à la sortie B .Afin de cacher B le boyau a été couvert avec des rondins serrés et recouverts de terre sur 10m de longueur.

Creusement assez difficile car le remblai est constitué par de la craie très friable. Les déblais tous enlevés à la brouette. Avancement journalier 1m. Nous avons souvent des visiteurs parfois très généreux.

 

 

Croquis n° 2 du carnet d’Émile SIVIARD du 327e régiment d’infanterie.

 

Après la percée on a longeonné au milieu et fait un plafond en planches, car les blocs de craie, se désagrégeant très vite ne cessaient de passer entre les joints des queues. Il y a eu ainsi 2 compartiments. L’un d’eux servant à l’ « aller » aux 1ières lignes, l’autre au « retour ».

En cas de bombardement, excellent abri car nous avions 6 à 7m de remblai au-dessus de nous.

Chaque équipe faisait 4 jours. On couchait sur place.

 

(Reçu le 19 la lettre que ma belle-mère avait écrite à Lucie, étant à Lille).

Le travail continue jusque vers le 16 ou 17 décembre dans les mêmes conditions. Louis DELPLANQUE fait partie de l’équipe du 5 Bon.

Dans mon équipe il y a des mineurs de Ledoux, Thiers, Sabatier et St Mark. Je les connais parfaitement. (*)

 

(*) : Ce sont des noms de fosses des mines de charbon : La Fosse LEDOUX (à Condé-sur-Escaut, 59), la fosse THIERS (Saint-Saulve, 59), la fosse SABATIER (Raismes, 59), fosse SAINT-MARK (Escaudain, 59).

20 décembre

Je suis désigné pour suivre les cours d’élèves-officiers. Un peloton fonctionnera à Champfleury pour toute la division. Nous sommes 12 pour le régiment tant sergents qu’adjudants.

Nous nous logeons comme nous pouvons. Avec STRADY,  adjudant (instituteur d’Arenberg) nous nous ménageons un petit coin dans une remise à côté d’un tas de betteraves. Nous y dormons très bien.

Chaque matin le capitaine commandant le peloton fait une conférence. Après-midi, exercice pratique sur le terrain et de 5 à 6 discussion de l’exercice de l’après-midi. Très intéressant. (*)

 

Noël et Nouvel an arrivent très vite.

 

Enfin vers le 15 janvier, le peloton est dissout.

Nous retournons dans nos compagnies respectives et reprenons la vie ordinaire des tranchées.

 

(*) : Émile SIVIARD passera sous-lieutenant à la 22e compagnie (JMO du 26 juin 1915.)

 

Cette partie a été recopiée pendant ma 2ième convalescence à Bourbourg, avril- mai 1916.

Signé SIVIARD.

 

Fin des écrits

 

 

Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : feather

 

 

Ce récit a donc été écrit (ou recopié) en 1916. Les précisions étant très détaillées, il semblerait qu’il s’agisse d’une recopie de son carnet qui devait être en mauvais état. C’est une piste…

Le 16 septembre 1915, il est « détaché en surnombre et jusqu’à nouvel ordre, à la compagnie 1/15 T du génie par décision du général commandant le 51e division d’infanterie en date du 14 septembre 1915. »(JMO).

On le retrouve donc au 3e génie à la compagnie territoriale 1/15. Une erreur est d’ailleurs faite sur le JMO de cette compagnie qui indique qu’il vient du 273e régiment d’infanterie…Il est blessé quelques jours plus tard, le 24, par éclat d’obus à la jambe et au bras. Il est évacué sur l’hôpital de Cherbourg (JMO).

 

A-t-il écrit un autre carnet ?

Nous savons qu’il est resté au génie après rétablissement grâce à son dossier de la légion d’honneur, nommé Chevalier, en 1936.

Il est décédé en avril 1946.

 

 

 

Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : Description : feather

 

Voir toutes les pages de son carnet brut

 

Voir des photos de soldats du 327e régiment d’infanterie

Vers d’autres témoignages de guerre 14/18

Suivre sur Twitter la publication en instantané de photos de soldats 14/18

Retour accueil