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En décembre 1914, la 28e division d’infanterie (28e DI) se positionnait dans la Somme, secteur Fay-Dompierre-Foucaucourt. La 28e DI faisait partie du 14e corps d’armée. La 28e DI comprenait les 55e brigade d’infanterie (22e et 99e régiments d’infanterie) et la 56e brigade (composé du 30e régiment d’infanterie et le 1e bataillon du 3e régiment de marche du 1e étranger - Polonais, Russes, Belges – nouvellement affecté à cette brigade).
Le 101e régiment d’infanterie territorial fait aussi partie de la 56e brigade, chaque compagnie est mélangée à chaque bataillon du 30e régiment d’infanterie.
Le 9e régiment de Hussards fournit 70 hommes de son 5e escadron qui prennent les tranchées dans le même secteur.
J’ai donc « fouillé » dans tous les JMO (Journaux de Marches et Opérations) de ces unités et les témoignages des soldats au travers de leurs carnets de guerre ; Voici ce que j’y ai déniché :
Extrait du JMO de la 28e division d’infanterie
Extrait du JMO de la 55e brigade d’infanterie
JMO du 22e régiment d’infanterie
Extrait du JMO du 99e régiment d’infanterie
Soldat Frédéric BRANCHE, acteur de ces fraternisations
Extrait du JMO de la 56e brigade d’infanterie
Extrait du JMO du 30e régiment d’infanterie
JMO des 9e Hussards et 101e régiment territorial
28 décembre 1914
« Dans le
secteur de la 55e brigade, des relations de tranchée à tranchée se sont
engagées entre nos troupes et des Bavarois.
Un certain nombre de
nos hommes et des Bavarois sont sortis de leurs tranchées et se sont rencontrés
à mi-distance environ, se sont serrés la main, échangés des journaux, des
cigarettes et provisions de diverses natures. Invités par nous de se rendre,
les Bavarois ont déclarés en avoir assez ; mais ont refusé de se rendre
pour l’instant, et vouloir réfléchir avant de prendre une décision.
Les relations et
pourparlers se poursuivront les jours suivants. »
29 décembre
« Rien à
signaler sur le front de la division »
30 décembre
« Vers 13h30,
entre la ferme Brûlée de Fay et la Palmeraie (secteur de la 55e brigade), un
soldat allemand, porteur d’un fanion blanc et accompagné d’un sous-officier
sortait des tranchées et se dirigeant vers les nôtres.
La sentinelle leur
fit signe de s’arrêter à 250m de notre ligne, un officier, le capitaine MICHOUX
(*), accompagné d’un homme parlant couramment
allemand, se portèrent en avant et engagèrent une conversation avec le
sous-officier et l’invitère à se rendre.
A ce moment 300
hommes environ sortirent sans armes des tranchées ennemies.
Sur l’invitation du
capitaine MICHOUX, le sous-officier fit signe à tous les hommes de s’arrêter.
Ce qui fût fait sur le champ.
La conversation se
poursuivit, le sous-officier déclarant qu’ils en avaient tous assez, que nous
devions d’ailleurs être comme eux, et que nous aurions fait la paix si nous
n’étions poussés par les Anglais qui sont la cause de tout le mal.
Le capitaine MICHOUX
répondant que nous tiendrons 3 ans s’il le fallait, qu’il ne pouvait être
question de paix tant qu’un seul Allemand resterait sur le territoire français
et ajoutant que la meilleure façon de terminer la guerre pour les Allemands
était de se rendre, qu’ils pouvaient venir en toute sécurité chez nous où ils
seraient bien traités.
Le sous-officier ne
répondit rien et demanda qu’on leur fit venir quelques journaux et des
renseignements sur la situation du point de vue politique et économique, afin
de les comparer avec ceux qui leur parviennent d’Allemagne.
Bien qu’il ait été
impossible de reconnaître le N° de régiment auquel appartenaient les Allemands,
l’endroit où s’est engagée la conversation a été reconnu comme étant le front
tenu par des troupes Prussiennes.
Cet incident n’en
est pas plus significatif » (…)
(*) : Le capitaine MICHOUX sera promu capitaine à titre
définitif le12 mai 1915. Le 17 novembre 1916, il sera désigné pour suivre un cours
spécial des officiers d’état-major. Il quittera définitivement le 99e régiment
d’infanterie.
31 décembre
1914 :
« Dans la nuit
du 30 au 31, à la suite de
pourparlers engagés en pleine nuit, dans le 1er secteur de la 55e
brigade, les Bavarois ont laissés des fractions du 99e travailler à la pose de
réseaux de fil de fer, sur l’assurance que nous n’exécutions que des travaux
définitifs et que nous ne nous proposions de ne pas couper leur propres
réseaux.
Un Bavarois a
adressé à nos hommes des cartes postales contenant des vœux de nouvel an et des
remerciements pour le pain et le cognac qu’ils ont reçu d’eux. Une de ces
cartes est ainsi conçue :
« Aux camarades
français :Nous ne tirons que si un officier est à (auprès de) nous.
Seulement notre lieutenant est toujours en rage et tire quelquefois ! Une
bonne année, merci beaucoup pour le cognac, il a bien goûté. »
1er janvier 1915
« Vers 23h00,
deux sous-officiers bavarois ont déclaré à un lieutenant du 99e qui surveillait
le placement des fils de fer, qui tout en restant nos camarades, ils ne
pouvaient plus causer avec nous, parce que leur officiers l’ont défendu trop
rigoureusement.
Cette interdiction
s’explique soit par une certaine agitation qui se serait manifestée chez les
Bavarois soit par la crainte de voir des renseignements importants transmis à
nos troupes. Ces relations, si elles ne nous ont pas permis de déterminer des
soldats allemands à se rendre, ont cependant été utiles à plusieurs points de
vue.
Elles ont renseigné
les Bavarois sur des faits qu’ont leur cacahit, et sur notre intention de
pousser la guerre jusqu’au bout ; elles nous ont permis de poser sans être
inquiéter des réseaux de fil de fer et d’inhumer des cadavres des nôtres qui
étaient resté sans sépulture très près des lignes ennemies après le 28
novembre. »
2 janvier
« Rien à
signaler sur le front de la division (…) »
Du 23 au 31
décembre
« Pendant cette
période, le feu de l’infanterie ennemie diminue d’intensité, puis cesse
complètement dans la région à l’est du bois Commun et du bois Touffu où nous
est opposé un régiment Bavarois. Plusieurs soldats de ce régiment passent
volontairement dans nos lignes (…) L’ennemi cherche visiblement à rentrer en
relations avec nous.
L’accalmie s’étend
bientôt à la plus grande partie du front de la brigade. Nous profitons de ces
circonstances pour faire parvenir aux Allemands des journaux français et
étrangers afin de les informer de la situation européenne (…) »
1e au 6 janvier
1915
« Dès le 1er
janvier au soir, les officiers allemands se sont opposés à toutes communication
de leurs troupes avec nous. Ces relations sont de moins en moins fréquentes et
bientôt cessent complètement. »
Du 6 au 12 janvier
« (…) L’accalmie
signalée plus haut dans le feu de l’infanterie ennemie cesse peu à peu et
bientôt nos travailleurs doivent s’abriter comme par le passé. »
Les faits ne sont pas relatés dans le journal du 22e RI.
Soldats du 99e régiment
d’infanterie, avant 1914. L’un d’eux a-t-il été témoin des
fraternisations ?
24 décembre
(…) 13 heures :
Un Allemand, ayant dépassé toute la tranchée de la hauteur du buste et étant
sans armes, une patrouille sortit de notre tranchée pour inviter l’homme à se
rendre. Cet homme déclara que d’autres camarades avaient l’intention de se rendre
également. Il leurs fit signe et 6 prisonniers se présentèrent successivement.
(…)
7 Allemands se sont rendus. (…) d’après leurs
dires une très grande animosité existe entre Bavarois et les Prussiens. (…)
25 décembre
« Les
tirailleries ont cessé brusquement chez les Allemands dès le point du jour. Un
grand nombre de Bavarois sont sortis de leurs tranchées en faisant signe de ne
point tirer sur eux, puis ils se sont avancés à mi-distance de nos tranchées et
ont engagé la conversation avec nos hommes devant le secteur du Bois Commun. Trêve complète.
Fureur des Prussiens
qui tirent sur les Bavarois.
Ceux-ci nous
préviennent de l’arrivée de leurs officiers et déclarent qu’ils tireront en
l’air, ce qu’ils font en effet. »
26 décembre
« Les bavarois
sympathisent toujours devant le secteur du Bois Commun. Trêve absolue »
27 décembre
« La paix
continue. 2 officiers Bavarois sont venus à mi-distance des tranchées Filippi.
Un de nos hommes s’est
approché. La conversation s’est engagée et les officiers Bavarois ont paru tout
étonnés d’apprendre que Lyon n’était pas investi par une armée Italienne ainsi
que le bruit s’est répandu dans les tranchées allemandes. »
28 décembre
« L’accalmie
persiste sur tout le secteur
Au bois Touffu, nous
avons pu enterrer 8 morts français remontant au 29 novembre, qu’on est allé
chercher tout près des tranchées allemandes.
12 heures : Les
Bavarois nous préviennent que le génie prussien va lancer des bombes sur les
tranchées de 1e ligne du Bois Commun.
12h10 : les
bombes sont lancées sans effet (…)
29 décembre
« Les Bavarois
continuent à ne pas tirer et à nous informer de l’arrivée de leurs officiers.
Nous en profitons pour placer des fils de fer devant le front de toutes nos
tranchées (…) »
30 décembre
« Les relations
continuent avec les Bavarois. Elles sont toutefois plus restreintes que
précédemment. Ils ont prévenu qu’ils ne laisseraient plus travailler à
découvert.
Un incident se
produit devant les tranchées allemandes entre la ferme Brûlée de Fay et la
Palmeraie : un sous-officier et un soldat prussien porteur d’un fanion
blanc sortent de leurs tranchées se dirigeant vers les nôtres. Un officier
(capitaine MICHOUX) accompagné d’un homme parlant allemand se porte au-devant
du parlementaire. Aussitôt 300 soldats prussiens environ sortent sans armes de
leurs tranchées. Sur l’invitation du capitaine MICHOUX, le sous-officier
allemand fit arrêter ses hommes.
Après une
conversation qui a porté sur l’état moral des troupes allemandes qui semble
très abattu, le parlementaire a rejoint sa tranchée
Échange de journaux
et de cartes postales du nouvel an. »
31 décembre
« La trêve
continue toujours et les bavarois nous laissent travailler à condition, ont-ils
dit, que nous ne coupions pas leur propre réseau de fils de fer.
Dans le secteur de
Foucaucourt, malgré les avances faites par les Prussiens, les coups de feu ont
continué pendant la nuit (…).
1er janvier
« Continuation de la trêve.
Échange de journaux. Nous en profitons pour fortifier nos défenses accessoires.
Construction de réseau de fil de fer, chevaux de fraise. Les Allemands
continuent à ne pas tirer.
Devant Dompierre et
Foucaucourt, les Prussiens sont dans de moins bonnes dispositions ; des
coups de fusil nous arrivent de ces directions.
A minuit, pour fêter
la nouvelle année, ils ont tirés de nombreux coup de feu en l’air. Avec
l’autorisation des Allemands, quelques cadavres ont été enterrés. »
2 janvier
« Confirmation
de la trêve. Nous continuons à fortifier nos positions et enterrer les
cadavres.
Les Allemands
regrettent de ne pouvoir continuer à causer avec nous, leurs officiers l’ayant
rigoureusement défendu (…) »
3 janvier
« L’accalmie
persiste toujours dans le secteur.
On parvient très
difficilement à renouer conversation avec les Bavarois.
Des relèves
fréquentes ont lieu ; Visiblement les chefs bavarois cherchent à éviter
les contacts prolongés avec les mêmes adversaires.
Les travaux ont
cependant continué à découvert, l’ennemi n’a pas tiré. »
4 janvier
(…) Journée calme
(…)
5 janvier
(…) Aucune
conversation n’a eu lieu avec les Bavarois ou Prussiens (…)
6 janvier
(...) Désertion du
soldat WRICH de la 1e compagnie. Ordre formel a été donné : Personne ne
doit sortir des tranchées.
Le 7 janvier, les bataillons du 99e régiment d’infanterie sont déplacés de quelques km. Pour quelle raison ?
Frédéric BRANCHE est soldat au 99e régiment d’infanterie. A cette période il se trouvait dans la Somme, au bois Touffu, secteur Fay. La nuit de noël, il est dans la tranchée en toutes premières lignes. Il assiste et est acteur de ces fraternisations. Il sera tué en juin 1918. (Merci à Bernard).
Voici ce qu’il écrit dans son carnet :
Dimanche 20
décembre 1914
« (…). Je
commence à me former à cette vie de tranchées et à m’orienter. Derrière nous se
trouve Fontaine-lès-Cappy, et, sur notre gauche, le Bois Commun. Nous sommes
dans le Bois Touffu.
Devant nous et à gauche,
sur le coteau, je vois le Bois Carré qui est encore à l’ennemi, puis, plus sur
la droite, le village de Fay et, plus loin encore, le Bois Etoilé et
Foucaucourt.
Nous sommes environ à cent cinquante mètres de l’ennemi ; en d’autres points, les deux tranchées sont à soixante mètres de distance. Des réseaux communs de fils de fer les séparent. (…) »
Jeudi 24 décembre
1914
« La nuit a été
froide, le soleil long à se lever ; à peine daigne-t-il briller à midi. Il
souffle une bise assez forte qui pince. Depuis ce matin, violente canonnade
vers Arras.
Quelque opération se
prépare. Au rapport, paraît une proclamation du Général JOFFRE : « l’heure des
attaques a sonné : depuis trois mois, nous nous tenons sur une défensive
agressive, nous avons usé l’ennemi ; nous sommes prêts en hommes et en canons.
Haut les Cœurs ! Il faut délivrer le pays ! Avancer ou mourir ! »
Le rapport ajoute
d’autre part, que le régiment doit s’attendre à quitter le pays d’un instant à
l’autre : il faut se tenir prêt à charger les sacs sur des voitures, les vivres
de réserve seront mis dans la musette, la couverture et la toile de tente,
portée en sautoir.
… Histoire
singulière et qui me donne à réfléchir : STEFANAGGI m’avait raconté que, dans
sa reconnaissance d’hier, les bleus, ses compagnons, l’avaient abandonné. Voilà
que LEROUX vient de me certifier le contraire, au témoignage d’un caporal parti
la nuit passée en patrouille, dans la même direction, pour refaire celle de la
veille, mal conduite : succès complet, puisque quatre sentinelles ennemies ont
été surprises et tuées à coup de baïonnette… Ces pauvres, je les plains
sincèrement ; … mais j’ai pris la résolution d’ouvrir l’œil lorsque je serai de
faction la nuit.
J’ai écrit hier ma
lettre de nouvel an pour maman. Cela m’a donné le cafard pour une partie de la
journée. Pour tous, les fêtes de fin d’année auront de la tristesse : amis et
ennemis, tous souffrent de la séparation d’avec la famille et, même il semble
que les hommes aient voulu faire trêve à leur tueries, comme semble le prouver
le fait suivant.
Vers quinze heures,
à la 1e compagnie, sur notre gauche, à la hauteur du Bois Carré occupé par
l’ennemi, en un point où les tranchées ne sont distantes que d’une centaine de
mètres, un dialogue s’est engagé entre Français et Allemands. De part et
d’autre, l’on fait des signes d’amitié ; voici qu’un de nos caporaux
mitrailleurs quitte notre tranchée ; un gradé ennemi fait de même ; ils se rejoignent, se serrent la
main, échangent des cigarettes et descendent l’un et l’autre dans la tranchée
adverse. Bientôt, c’est un défilé de soldats ennemis dans nos tranchées : il en
vient huit, des Bavarois qui, une fois chez nous, ne veulent plus retourner
là-bas. Quant à notre caporal, il est renvoyé chez nous avec force, cigares et
cigarettes.
Questionnés, nos
prisonniers volontaires avouent une grande lassitude de la guerre et nous
préviennent, en outre, que les Prussiens, nos vis-à-vis, ont décidé de nous
attaquer cette nuit ! »
Vendredi 25
décembre 1914
« Nous
comptions passer une veillée de Noël bien tranquille : ah oui ! Nous avons été
des dupes !
En suite des
déclarations faites par les prisonniers, le bataillon reçoit l’ordre de passer
la nuit aux créneaux, prêt à toute éventualité. Dès dix-sept heures, chacun est
à son poste.
Clair de lune
superbe ! Du côté de l’ennemi, la fusillade a complètement cessé. Un silence
impressionnant règne, seul troublé par les coups de feu de nos sentinelles.
Dans le lointain, l’on entend les Allemands chanter, jouer du fifre et du
tambourin. Derrière mon créneau, l’oreille aux aguets, fiévreux, j’attends les
événements.
Dix-huit heures :
quatre coups de 75.
Dix-huit heures
quinze : les ennemis nous envoient une marmite qui éclate avec fracas, assez
loin de la tranchée… par moments des fusées éclairantes.
Je suis las ; j’ai
froid. Je me couche. Soudain, l’on crie : « aux créneaux ! » minute inoubliable
! Je bondis sur mon fusil, le doigt sur la détente, tremblant sur mes pauvres
jambes.
C’est une fausse alerte…
minuit… deux heures… tout le monde s’est couché, éreinté… On nous fait lever…
Encore cinq heures avant le jour ! Et toujours le même silence en face de nous.
Les chants ont cessés.
Cinq heures du
matin… le brouillard tombe. On redouble d’attention.
Six heures : le
silence toujours… nous seuls tirons… l’ennemi est peut-être là, prêt à bondir ;
pourtant il envoie de nombreuses fusées éclairantes, comme s’il craignait
d’être attaqué… Non, il n’attaquera pas et sottement nous avons veillé tandis
qu’en face de nous l’Allemand s’amusait.
Eh bien ! Malgré les
réflexes physiques provoqués par l’attente, j’étais tranquille et prêt à
sacrifier ma vie. Tout de même j’ai vu poindre le jour avec satisfaction.
Et quel sommeil le
matin ! A l’ordinaire, un cigare, un quart de gniole.
Cet après-midi, les
causeries ont recommencé de tranchés à tranchés. Les Allemands nous ont tenu un
petit discours amical et un de leurs officiers s’est avancé au-devant de
l’adjudant FAURE, de la 1ère (compagnie), pour lui serrer la main.
Voilà donc comment
s’est écoulé Noël 1914, dans la tranchée, par un temps froid et triste. Jamais
je n’ai autant ressenti l’horreur de cette guerre qu’aujourd’hui, en ce jour de
fête, si doux à vivre de coutume et si triste cette année. »
Samedi 26 décembre
1914
« Quelle nuit
j’ai passé !
L’ennemi n’a pas
tiré un seul coup de fusil, lui qui, d’ordinaire, tiraillait sans cesse.
J’étais de garde en petit poste avancé ; j’ai pris trois fois une heure et
demie, et, chaque fois, je poussais un « ouf ! » de satisfaction quand j’avais
fini. Aucun incident…
Pourtant, à partir
de trois heures du matin, l’on entendit du côté de Fay des bruits de cavalerie
?… Que se prépare-t-il donc ? Voilà deux nuits que règne le même silence
impressionnant.
Ce matin, un soldat ennemi
s’est avancé vers nos tranchées au cri de « Kamarad ! Nicht kaput ! » On lui
fait signe de venir ; il s’approche ; parlant un peu l’allemand, je vais
au-devant de lui. Nous nous serrons la main ; il m’offre un verre de Kummel, un
cigare. Il m’apprend qu’il était artiste-peintre, étudiant à Munich ; il a
vingt-six ans. Après quelques minutes d’entretien, chacun rentre dans sa
tranchée, en se souhaitant au revoir.
Que penser de ces
manifestations d’amitié ?
Je souhaite qu’elles
soient sincères : ce serait preuve que tous sentent le besoin d’imposer une
trêve à cette horrible guerre et qu’elle peut s’établir un instant par accord
tacite. »
Dimanche 27
décembre 1914
« Nuit pénible
par suite du froid : je n’ai pu dormir. Reçu une lettre d’Antoine, de maman,
qui m’ont réconforté un peu. Il fait froid. Il pleut.
Ce soir, LEROUX sort
comme volontaire pour une reconnaissance conduite par STEFANAGGI. Cela me peine
de voir partir ce « copain ». Je lui serre la main, il me remet ses papiers
pour sa famille, en cas de malheur.
… Ce n’était qu’une
fausse nouvelle… LEROUX est descendu à Fontaine faire des expériences de
lancement de bombes. Son retour, ce soir, m’a donné du plaisir. »
Lundi 28 décembre
1914
« Temps
pluvieux et morose. Une lettre de la maison me donne de bonnes nouvelles de
tous. J’ai encore le cafard. Cantonné dans mon gourbi, je songe… comme on songe
en un gîte.
Cette après-midi, en
face de notre troisième section, des soldats Bavarois sont montés sur leurs
tranchées en disant : « Pas kaput ! Kamarad ! » Et nous ont demandé des
journaux que l’on s’est empressé de leur donner.
Le 77 allemand
bombarde nos tranchées sur la droite, sans résultat ; des 105 lancent des
dizaines d’obus sur Fontaine-lès-Cappy. Par instant, des bombes tombent vers un
petit poste occupé par la 1e Compagnie, dans un boqueteau à gauche de la vallée
Fontaine - Fay… Nous ne tardons pas à répondre d’ailleurs… Somme toute, journée
calme…
Depuis le 25, la
fusillade a cessé complètement. C’est à oublier que nous sommes en guerre.
Dix-sept heures : un
vent violent du sud-ouest s’est levé, chassant d’épais nuages. La lune paraît,
se cache à tout instant… Impossible aux sentinelles de rien entendre. C’est un
véritable ouragan. Du côté d’Arras, les éclairs d’une canonnade qui dure depuis
quatre ou cinq jours, mais dont on n’entend point le roulement.
Dix-neuf heures : le
silence était complet ; soudain, des coups de fusil éclatent de notre côté. Je
suis veilleur : par ordre je réveille tout le monde… Simple alerte. »
Mardi 29 décembre
1914
« Seize heures
: notre section descend au repos à Fontaine-lès-Cappy, en attendant que la
compagnie et le bataillon la rejoignent le 31. »
Son carnet de guerre est publié entièrement sur mon site, ici.
Secteur de Dompierre-en-Santerre, Somme
25 décembre
1914 :
« La journée
est calme, une trêve très spontanée s’établit sur tout le front du secteur,
notamment aux deux extrémités où soldats allemands et français sortent par
endroits des tranchées pour échanger des journaux et cigarettes… »
27 décembre 1914
« Situation
stationnaire.
La trêve tacite de Noël se
continue et le calme est complet sur tout le front ; sur les deux
lignes opposées, les soldats n’hésitent pas à sortir des tranchées. Des isolés
viennent à la rencontre les uns des autres : il y a des échanges de
journaux et de cigarettes… »
28 décembre
« (…) La
situation ne s’est pas modifiée. (…) »
29 décembre
(…)
30 décembre
« Pas de
changement dans la situation. Les conversations entre Bavarois et Français
continuent dans le secteur de droite (*),
mais n’amène pas le résultat espéré de provoquer quelques désertions dans les
rangs allemands. (…) »
(*) : Le secteur de droite de la 55e BI est occupé par 3
compagnies et une section de mitrailleuses du 30e régiment d’infanterie et une
compagnie du 101e régiment d’infanterie territoriale.
31 décembre
(…)
1e janvier 1915
« Journée calme sur tout le front ; quelques
dialogues s’échangent même de tranchées à tranchées. (…) »
Soldats du 30e régiment
d’infanterie, avant 1914. L’un d’eux a-t-il été témoin des
fraternisations ?
Le 30e régiment
d’infanterie se trouve secteur de Dompierre-en-Santerre.
25 décembre
(...)
26 décembre
(...)
27 décembre :
« Situation
stationnaire. La trêve de noël continue et le calme est complet sur tout le
front.
Sur les 2 lignes
opposées, les hommes n’hésitent pas à sortir des tranchées. Les Allemands
viennent à la rencontre des nôtres, il y a échange de journaux, tabac,
cigarettes.
Aucune autre manifestation
dans la journée »
28 décembre
(...)
29 décembre
(...)
30 décembre :
« Rien de
changer. La conversation s’engage à nouveau entre Français et Bavarois dans le
secteur du Cond-Lagarde ( ?), mais n’atteint pas le but poursuivi de
provoquer des déserteurs dans les rangs allemands. Tout est calme.(...)
31 décembre
(...)
1e janvier
Journée calme sur
tout le front, sauf quelques dialogues échangés de tranchée à tranchée. (...)
J’ai aussi consulté les JMO des 101e territorial et 9e Hussards, mais pas d’écrits sur ces faits de fraternisation.
Ces 2 régiments étaient aux côté du 30e régiment d’infanterie à cette date.
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